vendredi 15 septembre 2023

Application du Code criminel sur un terrain privé

R. c. Noori, 2023 CanLII 67513 (QC CM)

Lien vers la décision


[22]        L’article 8 du Code criminel (C.cr.)[6] prévoit son application partout au Canada, sauf certaines exceptions spécifiquement prévues. Par exemple, l’article 320.24(8)[7] énonce qu’une interdiction de conduire un véhicule à moteur ne s’applique qu’à la conduite dans une rue, sur un chemin public ou une grande route ou dans tout autre lieu public. De telles restrictions n’ont pas été prévues par le législateur en lien avec l’article 320.14.

[23]        Le requérant plaide que puisque la garde ou le contrôle a eu lieu exclusivement sur un terrain privé, le Code criminel ne s’applique pas. Conséquemment, les policiers n’avaient pas les motifs raisonnables de procéder à l’arrestation. Le Tribunal ne partage pas cet avis et voici pourquoi.

[24]        Tout d’abord, afin d’appuyer ses prétentions, le requérant soumet les décisions Ramshaw[8] et Bossé[9] qui concernent des accusations de conduite pendant interdiction[10]. Les interdictions de conduire en vigueur en vertu du Code criminel, dans les deux dossiers, prévoyaient leur application sur une rue, un chemin ou une grande route ou dans tout autre lieu public. Les lieux privés sont exclus de ce type d’infraction, contrairement à notre dossier.

[25]        Il soumet également la décision M.F. c. Québec (Société de l’assurance automobile)[11], laquelle doit également être distinguée de notre affaire. Il s’agit d’une contestation d’une suspension de permis de conduire en vertu du Code de la sécurité routière (CSR)[12], à la suite d’une arrestation pour conduite avec capacités affaiblies et un taux d’alcool de plus de 80 mg par 100 ml de sang, alors que le conducteur se trouvait à l’arrière d’un terrain privé. Le CSR prévoit explicitement les lieux visés pour l’application d’une telle mesure[13].

[26]        Le Tribunal est plutôt d’opinion que les infractions de garde et contrôle avec les capacités de conduire affaiblies par l’alcool, comme dans le dossier à l’étude, peuvent se dérouler sur les terrains privés[14].

[27]        La jurisprudence reconnaît que le lieu de l’infraction peut avoir un impact lorsqu’il s’agit de déterminer la présence ou l’absence de garde et contrôle[15]. La décision Toews[16], de la Cour suprême du Canada, en est un exemple. Dans les circonstances qui nous occupent, le requérant avait effectivement la garde et le contrôle et cet élément est admis. Cette conclusion factuelle ne s’écarte pas sous prétexte que l’infraction s’est déroulée sur un terrain privé. Son intention était claire, il a pris la place du conducteur afin de tenter de déprendre le véhicule et de le remettre sur la voie publique, en circulation.

[28]        Conséquemment, les policiers avaient les motifs raisonnables de croire à la commission de l’infraction, l’arrestation était valide et la prise des échantillons par la suite également.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire