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vendredi 1 août 2025

Revue de la jurisprudence mettant en cause une demande d’exclusion de photographies d’une victime décédée

R. c. Araghoune, 2022 QCCS 5234

Lien vers la décision


[13]        Rappelons que, pour être admissible, un élément de preuve doit être pertinent et ne pas aller à l’encontre d’une règle de droit ou d’exclusion[2].

[14]        Un juge présidant un procès possède le pouvoir discrétionnaire d’exclure un élément de preuve lorsque l’effet préjudiciable surpasse sa valeur probante.

[15]        Le fardeau incombe aux accusés de démontrer que l’effet préjudiciable des photographies dont ils demandent l’exclusion l’emporte sur la valeur probante[3].

[16]        Dans la décision R. c. Ramsurrun[4], l’honorable Éric Downs, j.c.s., fait une revue de la jurisprudence mettant en cause une demande d’exclusion de photographies d’une victime décédée :

[9]     Dans R. c. Lambert, la Cour d’Appel du Québec a considéré que cela ne suffit pas que des photographies soient dures. Il faut qu’elles causent un préjudice qui surpasse leur valeur probante. Par exemple, des photographies d’une violence extrême qui n’ont aucune utilité mais peuvent susciter le dégoût des jurés et les inciter à juger l’accusé avec plus de sévérité à cause de la violence du crime.

[10]   Dans R. c. Grenier, il s’agissait des photographies d’autopsie d’un enfant. La cour d’appel considère que les photographies étaient pertinentes car elles représentaient la condition de l’enfant au moment du décès. Il s’agissait donc d’une preuve matérielle permettant aux experts de se prononcer sur l’état des ecchymoses qui recouvraient le corps de l’enfant, ce sur quoi l’expert de la défense et de la poursuite ont abondamment témoigné. Cette preuve était pertinente vu la thèse respective des parties. Les photographies étaient nécessaires vu les avis partagés des experts. L’exclusion de cette preuve, loin d’aider le jury, lui aurait causé une difficulté supplémentaire. Ces photographies rendaient compréhensible le témoignage des experts.

[11]   Dans R. v. Muchikekwanape, le juge d’instance avait admis en preuve la photographie du visage de la victime décédée prise lors de l’autopsie, « for the limited purpose for which it has been admitted, to show you in a way that words and drawings could not the extent of the dislocation of the bony features of Ms. Clarke’s face”. La défense a plaidé en appel qu’étant donné le caractère choquant de la photographie, le jury ne pouvait pas suivre les instructions du juge et pouvait l’utiliser à des fins inappropriées au préjudice de l’accusé. La Cour d’appel du Manitoba établit six motifs pour admettre une preuve photographique :

43   The following six grounds for admitting photographic evidence in Canada were summarized in R. v. Schaefler, [1993] O.J. No. 71 (Ont. Gen. Div.) (at para. 24):

1)   to illustrate the facts on which experts base their opinion and to illustrate the steps by which they arrive at their opinions;

2)   to illustrate minutiae of objects described in the testimony of a witness, i.e.; to show the nature and the extent of the wounds;

3)   to corroborate testimony and provide a picture of the evidence and to assist [the] jury in determining its accuracy and weight;

4)   to link the injuries of the deceased to the murder weapon;

5)   to provide assistance as to the issues of intent and as to whether the murder was planned and deliberate;

6)   to help the jury determine the truth of the theories put forth by the crown or defense, e.g.; as to which accused committed the crime; as to whether the crime was committed in self-defence.

[12]   La Cour d’appel du Manitoba rappelle que le pourvoir [sic] du juge est discrétionnaire et qu’il doit être exercé dans le contexte factuel unique à la situation. En l’espèce, était au cœur du débat la question de savoir si les blessures étaient accidentelles ou intentionnelles. De plus, le témoin expert s’était appuyé sur cette photographie pour arriver à sa conclusion, en opposition à la conclusion d’un autre témoin expert. Le juge d’instance avait donc admis en preuve cette photographie car le jury devait avoir accès à la preuve sur laquelle l’expert s’était fondé pour pouvoir évaluer des témoignages contradictoires de deux experts. À noter que le juge d’instance a donné une instruction au jury sur l’utilité pour laquelle la photographie était admise en preuve et l’a averti contre une utilisation impropre.

[13]   Dans R. v. Leblanc, la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick rappelle qu’il relève de la discrétion du juge de déterminer si l’effet préjudiciable des photographies surpasse leur valeur probante. En l’espèce, il s’agissait de photographies des blessures des victimes. La Cour d’appel considère que « [bearing in mind Mr. LeBlanc’s contention as to how the victim sustained her injuries, the trial judge’s conclusion as to the photographs’ high probative value is unassailable] ». Selon la Cour d’appel, les photographies des blessures pouvaient être utiles pour déterminer si la victime disait la vérité ou si les suggestions de l’accusé quant à l’origine des blessures faisaient du sens.

[14]   Finalement, dans R. c. Lavoie, le juge Huot développe extensivement sur l’analyse à faire pour admettre en preuve des photographies extrêmement violentes (corps démembré). Ce dernier prend notamment en compte le fait que les jurés dans une société moderne ont « l’habitude » des images violentes. Le juge appuie aussi sur le fait qu’il donnera des directives de mi-procès et des directives finales.

[15]   En l’espèce, le Tribunal conclut que malgré que les photographies soient dures, elles ne causent pas un préjudice à l’accusé qui surpasse leur valeur probante.

                                                                                                            [Renvois omis]

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