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mercredi 3 décembre 2025

Le rôle de l'avocat du Ministère public dans une affaire criminelle & la possibilité de corriger une erreur suivant l'enregistrement d'un plaidoyer de culpabilité dans la précipitation

D.K. c. R., 2009 QCCA 987

Lien vers la décision


[52]           Je rappelle une règle connue, mais dont l'importance nécessite qu'elle soit répétée ici. L'avocat du Ministère public s'acquitte d'un devoir public qui consiste à veiller à ce que la preuve légale et disponible soit présentée au juge pour que justice soit rendue. Même si son action se situe dans un système contradictoire, son rôle exclut toute notion de gain ou de perte.

[53]           Dans Nelles c. Ontario[16], la Cour suprême écrit ceci au sujet du rôle de l'avocat du Ministère public :

Traditionnellement, le procureur général jouait le rôle de conseiller juridique auprès de la Couronne et des différents ministères du gouvernement.  Plus spécifiquement, sa tâche principale consistait, et consiste encore, à poursuivre les délinquants.  La nomination de procureurs de la Couronne pour représenter le procureur général tient au fait que ce dernier avait de plus en plus de difficulté à s'acquitter efficacement de toutes ses fonctions, devant l'accroissement de la population et l'expansion des régions habitées.

Le rôle premier du procureur de la Couronne consiste à poursuivre les actes criminels et les infractions punissables sur déclaration sommaire de culpabilité et à exercer une surveillance à cet égard.  Le procureur de la Couronne administre la justice au niveau local et, en cela, agit au nom du procureur général.  Le procureur de la Couronne a traditionnellement été décrit comme un [TRADUCTION] « représentant de la justice » qui « devrait se considérer plus comme un fonctionnaire de la cour que comme un avocat ».

[54]           Dans R. c. Stinchcombe, la Cour suprême reprend une citation célèbre du juge Rand dans l'arrêt R. c. Boucher[17] :

On ne saurait trop répéter que les poursuites criminelles n'ont pas pour but d'obtenir une condamnation, mais de présenter au jury ce que la Couronne considère comme une preuve digne de foi relativement à ce que l'on allègue être un crime.  Les avocats sont tenus de veiller à ce que tous les éléments de preuve légaux disponibles soient présentés:  ils doivent le faire avec fermeté et en insistant sur la valeur légitime de cette preuve, mais ils doivent également le faire d'une façon juste.  Le rôle du poursuivant exclut toute notion de gain ou de perte de cause; il s'acquitte d'un devoir public, et dans la vie civile, aucun autre rôle ne comporte une plus grande responsabilité personnelle.  Le poursuivant doit s'acquitter de sa tâche d'une façon efficace, avec un sens profond de la dignité, de la gravité et de la justice des procédures judiciaires. [18]

[55]           Ici, l'avocate du Ministère public n'a sans doute pas cherché à tromper le juge de première instance ou l'avocat de l'appelant. Elle a simplement fait état du caractère « mandatoire » de la disposition visée, ce qui est strictement exact[19]. En revanche, elle s'est retranchée derrière le fait que la décision était rendue pour refuser d'aider à corriger une erreur commise par l'avocat de l'appelant, au préjudice de son client. En principe, la règle du functus officio, appliquée de façon rigoureuse, empêchait la correction de l'erreur. En pratique cependant, des erreurs dues à la précipitation qui règne dans certaines salles de cours peuvent être corrigées, lorsque toutes les parties et le juge y consentent.

[56]           Sans excuser totalement l'erreur de l'avocat de l'appelant, il faut constater que celle-ci a été dénoncée dans les quelques minutes suivantes, et que le juge était prêt à entendre sa demande. Il faut aussi reconnaître que le Ministère public n'aurait subi aucun préjudice si son avocate avait consenti à l'audition d'une demande sous le paragraphe 490.012(4) C.cr. Le motif qu'elle avance aujourd'hui, à savoir qu'elle était susceptible de faire appel de la peine, est sans pertinence. Elle aurait, en effet, pu préciser ce fait devant le juge de première instance, d'une part, et même si elle ne l'avait pas fait, son consentement à l'audition de la demande de l'appelant aux termes du paragraphe 490.012(4) C.cr. n'aurait pas constitué un obstacle à une demande d'appel, d'autre part.

[57]           L'attitude de l'avocate du Ministère public était-elle raisonnable? Il n'est pas nécessaire de trancher cette question. En effet, les circonstances de l'affaire permettent de conclure qu'elle n'a pas joué son rôle adéquatement en affirmant seulement et, sans avoir annoncé sa demande, que l'ordonnance était « mandatoire ». Si cette affirmation était strictement exacte, il faut aussi constater qu'elle était clairement incomplète. Vu qu'elle connaissait l'existence de l'exception, elle aurait dû attirer l'attention du juge sur la disposition au complet ou préciser le caractère obligatoire de l'ordonnance sauf si l'exception s'applique. Sinon, ses observations apparaissent comme une stratégie inacceptable en raison des conséquences pour l'appelant.

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