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lundi 19 mai 2025

L’attente raisonnable en matière de vie privée et la hiérarchisation de cette expectative de vie privée ayant trait aux lieux

R. c. Tessling, 2004 CSC 67 

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19                              La Cour a donc très tôt adopté à l’égard de l’art. 8 une méthode téléologique axée principalement sur le respect de la vie privée.  « La garantie de protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives ne vise qu’une attente raisonnable » : Hunter c. Southam, précité, p. 159 (souligné dans l’original).  Étant donné l’ensemble déconcertant de techniques différentes (existantes ou en développement) qui s’offrent à la police, il ne serait guère réaliste d’appliquer l’autre méthode consistant à établir un « catalogue » judiciaire de ce qui est ou n’est pas permis par l’art. 8.  La méthode fondée sur des principes a été précisée dans l’arrêt R. c. Edwards1996 CanLII 255 (CSC), [1996] 1 R.C.S. 128, par. 45, où le juge Cory, en indiquant qu’il fallait tenir compte de « l’ensemble des circonstances », a insisté sur l’importance de l’existence d’une attente subjective en matière de vie privée, et sur l’importance du caractère raisonnable de l’attente sur le plan objectif.

20                              Dans le cadre du principe général ainsi formulé, la jurisprudence est parvenue à distinguer un certain nombre d’aspects du droit à la vie privée que protège l’art. 8, notamment des aspects qui ont trait à la personne, aux lieux et à l’information.

21                              La vie privée qui a trait à la personne peut le plus fortement prétendre à une protection constitutionnelle parce qu’elle protège l’intégrité corporelle et plus particulièrement le droit de refuser toute palpation ou exploration corporelle qui dévoilerait des objets ou des matières qu’une personne veut dissimuler.  L’État ne peut effectuer de fouille à nu sans mandat sauf si elle est accessoire à une arrestation légale et si elle est effectuée de façon non abusive (R. c. Golden, [2001] 3 R.C.S. 679, 2001 CSC 83, par. 90-92), dans des cas où la police a des motifs raisonnables de croire que la fouille à nu est nécessaire dans les circonstances particulières de l’arrestation (par. 98).  La police ne peut pas non plus prélever sans autorisation des échantillons de substances corporelles : R. c. Stillman, 1997 CanLII 384 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 607.

22                              La notion initiale de la vie privée qui a trait aux lieux ([traduction] « la maison de chacun est pour lui son château et sa forteresse » : Semayne’s Case, [1558-1774] All E.R. Rep. 62 (1604), p. 63) a évolué pour faire place à une hiérarchie plus nuancée visant d’abord la vie privée dans la résidence, le lieu où nos activités les plus intimes et privées sont le plus susceptibles de se dérouler (Evans, précité, par. 42; R. c. Silveira, 1995 CanLII 89 (CSC), [1995] 2 R.C.S. 297, par. 140, le juge Cory : « —i—l n’existe aucun endroit au monde où une personne possède une attente plus grande en matière de vie privée que dans sa “maison d’habitation” »; R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13, par. 43), puis, dans une moindre mesure, dans le périmètre entourant la résidence (R. c. Kokesch, 1990 CanLII 55 (CSC), [1990] 3 R.C.S. 3; R. c. Grant, 1993 CanLII 68 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 223, p. 237 et 241; R. c. Wiley, 1993 CanLII 69 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 263, p. 273), dans les locaux commerciaux (Thomson Newspapers Ltd. c. Canada (Directeur des enquêtes et recherches, Commission sur les pratiques restrictives du commerce), 1990 CanLII 135 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 425, p. 517-519; R. c. McKinlay Transport Ltd., 1990 CanLII 137 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 627, p. 641 et suiv.), dans les véhicules privés (Wise, précité, p. 533; R. c. Mellenthin, 1992 CanLII 50 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 615), dans les écoles (R. c. M. (M.R.), 1998 CanLII 770 (CSC), [1998] 3 R.C.S. 393, par. 32), et même, au bas de l’échelle, dans les prisons (Weatherall c. Canada (Procureur général), 1993 CanLII 112 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 872, p. 877).  Cette hiérarchie des lieux n’est pas contraire au principe sous-jacent selon lequel l’art. 8 protège « les personnes et non les lieux », mais elle emploie la notion de lieu comme instrument d’évaluation du caractère raisonnable de l’attente en matière de vie privée.

23                              Au-delà de notre intégrité corporelle et des lieux où nous vivons et travaillons, toutefois, se pose l’épineuse question des renseignements qui nous concernent et des activités que nous pouvons soustraire à la curiosité de l’État (R. c. S.A.B., [2003] 2 R.C.S. 678, 2003 CSC 60).  Cela englobe les renseignements commerciaux conservés dans un coffre‑fort dans un restaurant appartenant à l’accusé (R. c. Law, [2002] 1 R.C.S. 227, 2002 CSC 10, par. 16).  Le droit au respect du caractère privé des renseignements personnels a été défini comme [traduction] « le droit revendiqué par des particuliers, des groupes ou des institutions de déterminer eux‑mêmes le moment, la manière et la mesure dans lesquels des renseignements les concernant sont communiqués » : A. F. Westin, Privacy and Freedom (1970), p. 7.  La protection de ce droit repose sur 

 

—le— postulat selon lequel l’information de caractère personnel est propre à l’intéressé, qui est libre de la communiquer ou de la taire comme il l’entend.

 

(Rapport du groupe d’étude établi conjointement par le ministère des Communications et le ministère de la Justice, L’ordinateur et la vie privée (1972), p. 13)

 

24                              La distinction entre les aspects du droit à la vie privée selon qu’ils ont trait à la personne, aux lieux ou à l’information nous fournit des outils d’analyse utiles, mais dans une affaire donnée, bien sûr, divers aspects peuvent se recouper.  En l’espèce, par exemple, c’est l’aspect qui a trait à l’information qui domine (les renseignements concernant les activités du défendeur), mais l’aspect qui a trait au lieu intervient aussi parce que, même si la police n’est pas effectivement entrée chez l’accusé, c’est dans sa maison que se déroulaient les activités qui intéressaient les forces de l’ordre.

dimanche 18 mai 2025

Le pouvoir d'amender un acte d'accusation ou une dénonciation expliqué par la Cour d'appel de l'Ontario

R. v. K.R., 2025 ONCA 330

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[17]      The power to amend an indictment or information under s. 601(2) of the Criminal Code is broad, as wide powers of amendment promote the determination of criminal cases on their merits and avoid a multiplicity of proceedings: R. v. R.S., 2023 ONCA 626, at para. 24, citing R. v. Irwin (1998), 1998 CanLII 2957 (ON CA), 38 O.R. (3d) 689 (C.A.), at paras. 9-10. Provided there is no irreparable harm to the accused and the fairness of the trial will not be adversely affected, the amendment may be granted: R.S., at para. 24, citing R. v. Bidawi2018 ONCA 698, 142 O.R. (3d) 520, at para. 33, leave to appeal refused, [2019] S.C.C.A. No. 145. Such amendment may be made “at any stage of the proceedings”: Criminal Code, s. 601(3). A decision to amend that is based on a determination of whether there is prejudice to the accused should not be interfered with lightly, since the trial judge is in a privileged position to determine the effect on the fairness of the trial of events happening in the courtroom: R.S., at para. 25, citing R. v. Côté1986 CanLII 93 (SCC), [1986] 1 S.C.R. 2, at p. 29.

[18]      As set out by Doherty J.A. in Irwin, at para. 25:

On a plain reading, the section contemplates any amendment which makes a charge conform to the evidence. The limits on that amending power are found, not in the nature of the change made to the charge by the amendment, but in the effect of the amendment on the proceedings, and particularly, on the accused's ability to meet the charge. The ultimate question is not what does the amendment do to the charge, but what effect does the amendment have on the accused?

[19]      The trial judge made no palpable and overriding error in his determination that the amendment would not cause irreparable harm to the accused. He noted that all of the alleged interactions were explored with the Crown witnesses in “considerable detail”, including the allegations with respect to the handwritten contract, the allegations with respect to the recording, and the evidence regarding shopping trips and purchases. He noted that the cross examinations were “lengthy, probing and pointed” and that defence counsel was alert to the “entirety of the evidence”. He observed that “few stones appeared to have been left unturned” with respect to the defence counsel’s approach to the evidence. He concluded that the defence had not been misled and that no prejudice was occasioned at all, let alone irreparable prejudice.

[20]      This case is easily distinguished from R. v. Miners Incorporated (1949), 1949 CanLII 368 (ON CA), 93 C.C.C. 118 (Ont. C.A.), at pp. 119-120, cited by the appellant, in which separate transactions that were months apart were added to the charge. In this case, there is no violation of the single transaction rule set out in s. 581(1) of the Criminal Code, as alleged by the appellant: see R. vRocchetta2016 ONCA 577, 352 O.A.C. 130, at para. 44. The amendment did not expand the scope of the evidence. Rather, as submitted by the Crown, both the original and amended charges captured events within a week of the disclosures of sexual assault, were disclosed to the defence well in advance, and were relevant to the Crown’s theory from the outset. The amendment did not compromise the appellant’s knowledge of the case she had to meet or her ability to meet the charge. The fact that the amendment opened up additional routes to liability on the same evidence does not, without more, constitute irreparable prejudice.

Définition des aides au jury & Cadre applicable lorsqu’il s’agit de permettre l’utilisation d’aides au jury dans la salle du jury

R. c. Pan, 2025 CSC 12

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b)            Définition des aides au jury

[121]                     Les aides au jury sont des outils permettant de comprendre la signification d’un élément ou d’un ensemble d’éléments de preuve testimoniale, documentaire ou matérielle. Elles comprennent des cartes, des échéanciers, des listes de protagonistes, des tableaux et des diaporamas. Alors que les éléments de preuve testimoniale, documentaire et matérielle [traduction] « donnent au juge des faits la possibilité d’avoir une impression directe significative », les aides au jury remplissent une fonction secondaire, à savoir « aider le jury à interpréter, à comprendre ou à analyser » ces éléments de preuve (S. C. Hill, D. M. Tanovich et L. P. Strezos, McWilliams’ Canadian Criminal Evidence (5e éd. (feuilles mobiles)), § 23.1).

[122]                     Contrairement à la preuve, les aides au jury ne fournissent pas un fondement justifiant à lui seul des conclusions de fait ou de droit. Leur utilité repose entièrement sur la question de savoir si le juge des faits accepte de façon indépendante la preuve sur laquelle elles reposent (R. c. Scheel (1978), 1978 CanLII 2414 (ON CA), 42 C.C.C. (2d) 31 (C.A Ont.), p. 34; voir aussi R. c. Kanagasivam2016 ONSC 225029 C.R. (7th) 201par. 41R. c. Shaw2004 NBBR 260, 277 R.N.‑B. (2e) 306, par. 8).

[123]                     Les aides au jury prennent différentes formes et leur sophistication varie, et la distinction entre les aides au jury et la preuve peut parfois être difficile à établir (voir Hill, Tanovich et Strezos, § 23.1). Dans certains cas, des outils qui peuvent être à juste titre classés comme des aides au jury seront néanmoins admis en preuve par l’entremise d’un témoin et déposés comme pièces conformément aux règles ordinaires de preuve. La présente espèce ne concerne pas la pratique consistant à admettre des aides au jury en preuve conformément à ces règles.

[124]                     La question soulevée est plutôt de savoir dans quelles circonstances des aides au jury peuvent être autorisées à aller dans la salle du jury en dehors des règles normales de preuve pour être utilisées par le jury au cours de ses délibérations. À la Cour d’appel, le juge Nordheimer a fait remarquer que, normalement, seules deux catégories d’éléments matériels iront dans la salle du jury : les pièces déposées au procès et les aides au jury présentées sur consentement (par. 114). Comme il l’a souligné à juste titre, malgré le consentement des parties, le juge du procès conserve le pouvoir discrétionnaire de ne pas envoyer une aide au jury dans la salle du jury et, inversement, le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire de permettre qu’une aide contestée aille dans la salle du jury en certaines circonstances. Je vais maintenant examiner ces circonstances.

c)            Cadre applicable lorsqu’il s’agit de permettre l’utilisation d’aides au jury dans la salle du jury

[125]                     Sur le plan théorique, le pouvoir discrétionnaire de permettre que des aides au jury aillent dans la salle du jury relève du domaine des pouvoirs de gestion du juge du procès, lesquels découlent de la compétence inhérente ou implicite du tribunal de contrôler sa propre procédure et de « garantir le bon fonctionnement des rouages de la cour » (R. c. Samaniego2022 CSC 9, [2022] 1 R.C.S. 71par. 20; voir aussi R. c. Anderson2014 CSC 41, [2014] 2 R.C.S. 167, par. 58).

[126]                     La partie qui demande à ce qu’une aide au jury aille dans la salle du jury devrait communiquer celle‑ci à la partie adverse dès qu’il est raisonnablement possible de le faire après qu’elle a été préparée et présenter une demande au tribunal en vue d’offrir cette aide. Lorsque la partie adverse s’oppose à ce que l’aide aille dans la salle du jury, le juge du procès devrait solliciter des observations. Les aides qui satisfont aux critères énoncés ci‑après devraient être autorisées à aller dans la salle du jury et devraient porter une marque formelle de façon à les distinguer de la preuve.

[127]                     Si une aide est autorisée à être utilisée par le jury, il incombe au juge du procès de donner des directives au jury sur les utilisations appropriées et inappropriées de l’aide (voir, p. ex., R. c. Hovila2013 CarswellAlta 2965 (B.R.), par. 20). Comme exemple d’une mise en garde bien formulée, je citerais les directives du juge du procès en l’espèce, lesquelles sont reproduites plus loin. Des directives appropriées sont essentielles pour garantir que le jury ne se fie pas à une aide comme [traduction] « raccourci pratique » au lieu d’examiner la preuve (R. c. Belcourt2012 BCSC 2128, par. 10).

[128]                     La détermination des mécanismes procéduraux et des directives qui sont nécessaires dans les circonstances dépendra de la nature de l’aide, de son objet et des points de vue des parties. Par exemple, une aide au jury simple comme une carte ou une liste de protagonistes peut commander une approche simplifiée ou informelle. En revanche, une aide complexe ou obscure peut exiger que la partie qui l’offre appelle un témoin à expliquer et à authentifier l’aide. Le juge du procès devrait prendre des décisions dans l’optique de prévenir l’iniquité, de maintenir l’efficacité du procès et d’améliorer la capacité de recherche de la vérité du jury.

[129]                     En ce qui concerne les critères substantiels, je suis d’accord avec le juge Nordheimer pour dire que le juge du procès a commis une erreur en se fondant sur une déclaration tirée de l’arrêt R. c. Bengert (1980), 1980 CanLII 321 (BC CA), 15 C.R. (3d) 114 (C.A. C.‑B.), selon laquelle [traduction] « les membres du jury [ont] droit à tout ce qui peut les aider à traiter la preuve de manière raisonnable, intelligente et rapide » (p. 160). Ce critère est trop large et ne tient pas compte du préjudice potentiel découlant du recours excessif aux aides.

[130]                     J’adopterais plutôt le critère énoncé par le juge Nordheimer de la Cour d’appel, avec quelques légères modifications. Avant de permettre qu’une aide au jury aille dans la salle du jury au cours des délibérations, le juge du procès doit être convaincu que l’aide est raisonnablement nécessaire, exacte et équitable. Ces critères servent à mettre en balance la valeur que sont susceptibles de revêtir ces aides dans la compréhension de la preuve avec leur capacité à distraire le jury ou à l’induire en erreur. Il y a lieu de permettre que des aides au jury aillent dans la salle du jury si le premier élément l’emporte sur le second.

[131]                     Le premier critère est que l’aide doit être raisonnablement nécessaire pour que le jury comprenne la preuve. Une aide sera raisonnablement nécessaire lorsque la preuve qu’elle inclut est tellement vaste, complexe ou de nature technique qu’un jury aurait du mal à parvenir à la comprendre sans aide ou sans consacrer des efforts et un temps déraisonnables. Le juge du procès n’a pas à être convaincu qu’il serait impossible pour le jury de s’acquitter de sa tâche sans l’aide; il suffit de démontrer qu’il serait déraisonnablement lourd, ou déraisonnablement long, pour le jury de passer en revue les points de données pertinents nécessaires à la compréhension de la preuve sans l’aide. Comme la juge Fairburn (maintenant juge en chef adjointe de la Cour d’appel) l’a expliqué dans la décision Kanagasivam, au par. 42 :

      [traduction] L’utilisation d’aides démonstratives de cette nature peut servir à raccourcir ce qui pourrait autrement prendre des jours d’audience à développer. Elle peut également faciliter la tâche du jury en abrégeant ce qui pourrait être d’innombrables heures passées à revoir et à distiller des données au cours du processus de recherche des faits.

[132]                     Les jurys ne sont pas censés [traduction] « trouver des aiguilles dans des bottes de foin » (Kanagasivam, par. 48). Cependant, lorsque l’aide ne fait que reformuler la preuve déjà accessible d’une manière plus attrayante ou pratique, le critère de la nécessité ne sera pas rempli.

[133]                     Deuxièmement, l’aide doit résumer la preuve avec exactitude. Elle ne peut déformer, rapporter incorrectement ou occulter aucun élément de preuve, que ce soit intentionnellement ou non (Kanagasivam, par. 52). Dans l’arrêt R. c. Poitras (2002), 2002 CanLII 23583 (ON CA)57 O.R. (3d) 538 (C.A.), le juge Doherty a décrit comme suit l’impératif d’exactitude, au par. 48 :

      [traduction] Toute inexactitude ou insuffisance dans les documents écrits, ou toute confusion ou iniquité créée par ces documents, est susceptible d’avoir une incidence importante sur la validité de tout verdict rendu par le jury. La grande importance accordée au fait d’assurer l’exactitude et l’impartialité des documents écrits ne devrait pas décourager l’utilisation des documents écrits, mais devrait encourager une préparation minutieuse de tout document écrit destiné au jury.

Une aide qui pourrait être trompeuse en soi peut être considérée suffisamment exacte si elle est accompagnée d’autres aides qui complètent le portrait de la preuve. Toutefois, des préoccupations relatives à l’équité peuvent entrer en jeu si on attend des parties qu’elles répondent aux aides unilatérales au jury, comme je l’explique ci‑dessous.

[134]                     En outre, une aide peut être considérée inexacte si elle ne tient pas compte de la complexité de la preuve. Pour rappeler la mise en garde formulée par le juge Conlan dans la décision Woods c. Jackiewicz2019 ONSC 2069, [traduction] « nous devons prendre soin d’éviter de trop simplifier la preuve technique par l’utilisation d’une aide démonstrative » (par. 13(vi)). Il n’est pas toujours possible d’abréger sans sacrifier l’exactitude.

[135]                     Troisièmement et enfin, le juge du procès doit être convaincu qu’il serait équitable de permettre que l’aide aille dans la salle du jury. L’appréciation de l’équité comporte un examen global de la valeur explicative et de l’effet préjudiciable de l’aide (voir Jackiewicz, par. 13(iii)). Une considération clé est la mesure dans laquelle l’aide reflète la thèse d’une partie, bien qu’il n’existe aucune condition préalable stricte voulant qu’une aide soit totalement exempte du point de vue de la partie qui l’offre. Si l’aide reflète la thèse d’une partie, la partie adverse devrait avoir la possibilité de soumettre sa propre aide, ou de soumettre des modifications ou des ajouts à l’aide. Les aides neutres qui ne reflètent pas le point de vue de l’une ou l’autre des parties répondront plus facilement aux exigences de l’équité.

[136]                     En exerçant leur pouvoir discrétionnaire à l’égard des aides au jury, les juges de première instance devraient viser à préserver le fonctionnement approprié et équitable du système contradictoire. Les juges de première instance doivent être conscients des déséquilibres sur le plan des ressources et ne devraient pas permettre qu’une aide unilatérale aille dans la salle du jury lorsqu’il serait trop lourd pour la partie adverse de produire des éléments matériels concurrents. Une considération importante est la rapidité avec laquelle une aide peut raisonnablement être communiquée après avoir été préparée. Certaines aides devront peut‑être être mises à jour tout au long du procès pour pouvoir satisfaire au critère de l’exactitude ou représenter équitablement l’ensemble de la preuve. Naturellement, il sera plus lourd pour une partie de fournir des éléments matériels concurrents si l’aide originale est communiquée pour la première fois peu de temps avant sa présentation au jury.

[137]                     Les objectifs ultimes de ces critères sont d’empêcher un raisonnement inapproprié de la part du jury et d’éviter l’apparence d’iniquité. La décision d’envoyer ou non une aide au jury à la salle du jury est, en fin de compte, une décision discrétionnaire qui appartient au juge du procès. À titre de décision relative à la gestion de l’instance, elle commande la déférence en l’absence d’une erreur de principe ou d’un exercice déraisonnable du pouvoir discrétionnaire (Samaniego, par. 26).

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les déclarations d'un accusé à son complice ne sont pas du ouï-dire

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