jeudi 5 novembre 2009

Un individu ayant bénéficié d'une absolution peut en bénéficier de nouveau si le tribunal juge cette sentence appropriée

R. c. Mohammadi, 2006 QCCS 1224 (CanLII)

[4] Au moment du procès, l'intimé est diplômé de l'université d'Ottawa, ainsi que de l'université d'Arizona, et travaille à titre d'ingénieur analyste pour une compagnie d'Ottawa, soit AA Tex Scientific inc. Cette compagnie oeuvre dans le domaine de l'exploitation pétrolière et des rénovations de fondation et lui offre des possibilités de travail à l'étranger. De plus, l'intimé rapporte qu'il a de la famille aux États-Unis, dont un cousin qu'il aimerait visiter. Le soir de son arrestation, il dit qu'il a trop fêté et bu en raison de sa graduation de l'université d'Arizona. Il doit partir le lendemain pour les Etats-Unis mais manquera son avion à cause de son arrestation. Il regrette les gestes posés, les qualifiant d'étrangers à sa personnalité.

[5] On apprend aussi qu'il a déjà reçu une absolution sous conditions pour une affaire de falsification de cartes de crédit en 2000.

[7] Il s’ensuit que le premier juge accorde à l'intimé une absolution sous conditions, avec l'obligation de faire un don de $400 et qu'il lui interdit par ordonnance de probation d’une année de se présenter au Bistro.

[8] Dans sa décision, le premier juge met l'accent sur les éléments suivants : la gravité objective de l'infraction ; l'absence d'antécédent judiciaire en pareille matière ; la qualification de l'intimé comme une personne de bonne moralité ; l'âge de l'intimé ; la jeune carrière de l'intimé et ses chances d'avancement ; le caractère isolé de l'événement ; et les conséquences particulièrement néfastes et importantes d'une condamnation.

[12] Bref, l'appelante dit que l'absolution conditionnelle n'était pas la sentence appropriée à rendre pour un intimé ayant, dans un passé récent par rapport à l'infraction en cause, un antécédent criminel et ayant déjà bénéficié d'une absolution.

[17] La conséquence de l'absolution est que le délinquant qui est absous en conformité avec le paragraphe (1) est réputé ne pas avoir été condamné à l'égard de l'infraction (art. 730(3) C.cr.).

[18] L’absolution n'est pas limitée à des infractions mineures ou techniques. Elle ne doit pas non plus recevoir une interprétation restrictive, ne s'agissant pas d'une mesure exceptionnelle. Le pouvoir conféré par le juge par l'article 730 (1) C.Cr. s'applique à toutes les infractions qui remplissent les conditions y énumérées. Un juge ne peut, de façon péremptoire, refuser d'appliquer cet article à une infraction donnée.

[19] L'absolution recherche un but spécifique : éviter l'effet disproportionné qui découlerait de l’imposition d'une condamnation emportant un casier judiciaire. On regarde alors l'intérêt véritable de l'accusé. Cet intérêt suppose que ce dernier est une personne de bonne moralité, qui n'a pas d'antécédent judiciaire, quoique cela ne soit pas dirimant, qu’il n'est pas nécessaire d'enregistrer une condamnation pour le dissuader de commettre d'autre infraction ou pour qu'il se réhabilite et que cette mesure aurait à son égard des conséquences particulièrement négatives.

[20] Quant au fait de subir des conséquences particulièrement négatives suite à la condamnation, la Cour d'appel précise qu'il n'est pas nécessaire de démontrer que ces conséquences se manifesteront réellement. Il suffit qu'une possibilité existe.

[24] Une absolution sous conditions ou inconditionnelle doit être prise en compte par le tribunal qui impose la sentence. Bien qu’elle ne soit pas un obstacle fatal à l’obtention d’une nouvelle absolution, elle est l’un des facteurs à considérer pour décider de la sentence.

[25] Dans l’arrêt Tan, le juge McIntyre écrit en p. 169 :

« In deciding whether to grant or withhold a discharge under the provisions of s. 662.1 of the Criminal Code the sentencing Judge must consider both the interest of the accused and that of the public. In the second consideration the question of whether the accused person has had a previous discharge and the manner of his or her reaction to it is certainly both by logic and common sense a relevant factor to be known and considered by the Judge so that he can discharge his task in considering the fundamental conditions under which a discharge may be given.

No question of a past conviction is involved. In dealing with the matter the trial Judge is merely weighing a factor relevant to the disposition of the case. »

[31] La lecture de la sentence montre que le premier juge a accordé une grande importance à l’intérêt de l’accusé et qu’il a peu ou pas traité de l’intérêt du public et de l’aspect punitif et dissuasif de la sentence.

[33] Le tribunal ne retient pas ce plaidoyer. L’individualisation des peines est un principe essentiel du système de justice criminelle. L’intimé doit donc recevoir une peine proportionnelle à la faute reprochée, non préméditée, et d’une gravité peu importante en l’espèce et qui tienne compte de son passé.

[34] On aurait pu rendre une décision différente, mais là n’est pas la question. On aurait peut-être souhaité que le premier juge expose davantage ses motifs sur l’ensemble des critères à considérer. Encore une fois, là n’est pas la question. Il faut se rappeler le volume des dossiers traités par les juges des cours municipales et le fait que les jugements sont généralement rendus séance tenante.

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