lundi 9 août 2010

Peines appropriées dans différents cas d'homicide involontaire coupable

R. c. Richard, 2010 QCCS 3400 (CanLII)

[15] La jurisprudence reconnaît que l'on doit distinguer les cas s'apparentant à un accident de ceux qui ressemblent davantage à un meurtre. Ainsi, l'auteur d'un homicide involontaire commis à l'occasion d'un accident de chasse sera vraisemblablement moins sévèrement puni que l'auteur d'un homicide involontaire qui se réalisera dans un contexte de vol de stupéfiants entre bandes criminalisées. Dans ces deux cas, toutefois, le minimum de quatre ans d'emprisonnement s'imposera.

[16] Voici quelques illustrations de ce qu'ont pu décider, récemment, nos tribunaux, en regard des peines appropriées dans différents cas d'homicide involontaire coupable :

▪ R. c. Billings, [2004] B.C.J. (Quicklaw) no 1031 (B.C.S.C.).

Sans antécédent judiciaire, le délinquant a étranglé son vendeur de drogue. Âgé de 25 ans, il était devenu dépendant des drogues. L'homicide involontaire qu'il a commis se rapprochait du meurtre. Il a été condamné à six ans de pénitencier.

▪ R. c. Leaf, [2004] O.J. (Quicklaw) no 1692 (O.S.C.J.).

Possédant des antécédents judiciaires de conduite avec facultés affaiblies et de conduite dangereuse, il procédait à commettre un vol qualifié lorsque la victime a été tuée. Il a plaidé coupable à l'infraction qu'on lui reprochait et affirmait n'avoir pas eu l'intention d'utiliser l'arme à feu. Il a coopéré avec les policiers et a reconnu l'entière responsabilité de ses actes. Il était affecté par un problème sérieux de consommation de drogue et d'alcool. La peine a été fixée à douze ans d'emprisonnement.

▪ R. c. Whitteker, [2004] O.J. (Quicklaw) no 1415 (O.S.C.J.).

Le coup de poing qu'elle a donné à son époux a causé sa mort. Elle était alors intoxiquée par l'alcool, dans un état de dépression et sous l'effet des médicaments. Elle a bénéficié d'une peine d'emprisonnement avec sursis au sein de la collectivité d'une durée de deux ans moins un jour assortie d'une ordonnance de probation de trois ans.

▪ R. c. Dadgar, [2004] J.Q. (Quicklaw) no 5702 (C.A.).

Le délinquant a poignardé son épouse à soixante reprises. Le crime a été perpétré dans des circonstances d'extrême violence. Le délinquant représentait un degré élevé de dangerosité compte tenu de la schizophrénie dont il était affligé. Il a été condamné à une peine d'emprisonnement de vingt ans.

▪ R. c. Eliason, [2003] B.C.J. (Quicklaw) no 2780 (B.C.S.C.).

La victime est décédée à la suite d'une violente bagarre. L'accusé, âgé de 37 ans, était un homme violent faisant un usage excessif de l'alcool et des drogues. Il n'a démontré aucun signe d'une volonté réelle de se réhabiliter. La peine a été fixée à sept ans d'emprisonnement.

▪ R. c. T.J.N., [2004] B.C.J. (Quicklaw) no 1341 (B.C.C.A.).

La victime cohabitait avec l'accusé. Elle est morte par strangulation. Âgé de 20 ans, le délinquant en était à sa première offense. Il a plaidé coupable et sa situation ne révélait aucun autre cas de violence. La peine a été fixée à huit ans et demi d'emprisonnement.

▪ R. c. E.H., [2004] B.C.J. (Quicklaw) no 1486 (B.C.S.C.).

La victime a été battue par les deux accusés. On voulait lui donner une leçon. La victime était sous l'effet des drogues, plus faible que les deux attaquants et était incapable de se défendre. La victime avait des problèmes de drogue et avait, d'une certaine façon, provoqué l'attaque. L'accusé, qui avait des problèmes d'alcool, a admis l'entière responsabilité de ses actes et a vu la peine prononcée contre lui à huit années d'emprisonnement.

▪ R. c. B.D., [2004] A.N.-B. (Quicklaw) no 468 (C.B.R.N.-B.).

La victime était âgée de 20 ans et a été tuée par balle. L'accusé était sous l'influence de l'alcool et de la drogue et présentait certains problèmes de comportement. Bien qu'il ait admis sa responsabilité et qu'il ait plaidé coupable, la Cour avait des doutes sur la sincérité de ses remords. Il a été condamné à une peine d'emprisonnement de huit ans.

▪ R. c. LaFantaisie, [2004] A.J. (Quicklaw) no 691 (A.P.C.).

Ce délinquant a étranglé sa mère. Il a ensuite placé le corps de celle-ci dans des sacs de plastique qu'il a cachés dans une garde-robe au sous-sol de la résidence. Deux semaines plus tard, il a avisé la police de la situation. Il a manifesté certains remords tout en imputant la responsabilité de son acte à l'usage de l'alcool et des drogues. La peine qui a été dans ce cas trouvée adéquate était une peine d'emprisonnement de huit ans.

[17] La Cour d'appel du Québec confirmait, récemment[3], une peine d'emprisonnement de huit ans pour un individu trouvé coupable d'homicide involontaire coupable. Il avait étouffé sa victime à l'occasion d'une chicane relative à sa conjointe.

[18] D'autres décisions ont été rendues plus récemment. À titre d'illustration, en voici quelques-unes :

▪ R. c. Langlais, 2007 QCCS 3361 (CanLII), [2007] J.Q. no 7391, 2007 QCCS 3361.

Langlais a causé la mort de Gagnon en utilisant une arme à feu. Il hébergeait la victime temporairement. Sous l'effet des drogues, la victime a eu un comportement bizarre, en insultant sa femme, en le poussant, en menaçant de le frapper, et a même lancé différents objets en sa direction. Voulant faire peur à la victime, Langlais a choisi d'aller chercher un fusil. Voyant l'agressivité de la victime, Langlais a décidé de prendre des munitions. La victime a empoigné le bout du canon du fusil et, pendant l'altercation, le coup de feu est parti. Langlais avait de nombreux antécédents judiciaires et le rapport pré-décisionnel lui était défavorable. En précisant qu'un verdict de culpabilité à un homicide involontaire avec usage d'une arme à feu emporte une privation importante de la liberté, monsieur le juge Moulin, de cette Cour, a privilégié des facteurs de dénonciation et de dissuasion. Langlais a été condamné à une peine de neuf ans d'emprisonnement de laquelle a été déduite la période de sa détention provisoire.

▪ R. c. Macryllos, 2007 QCCS 4541 (CanLII), [2007] J.Q. no. 11430, 2007 QCCS 4541.

À la suite d'une altercation, Macryllos est coupé à la main avec un couteau par la victime. Macryllos a pris possession du couteau et a donné une quarantaine de coups à la victime qui en est décédée. Le délinquant a plaidé coupable à un homicide involontaire coupable. Il n'avait aucun antécédent judiciaire. Macryllos et la poursuite ont suggéré une peine de quatorze ans et demi d'emprisonnement. Reconnaissant qu'il s'agissait là d'un quasi-meurtre, notre collègue madame la juge Cohen a accepté la recommandation commune et a fixé la peine à quatorze ans et demi de détention.

▪ R. c. Ellis, 2007 QCCS 5719 (CanLII), [2007] J.Q. no 13731, 2007 QCCS 5719.

À la suite d'une dispute avec la victime, Ellis l'a poignardée à plusieurs reprises. Ellis a témoigné en disant qu'il n'avait pas voulu tuer la victime et que son geste résultait d'une mauvaise réaction provoquée par la peur. Ellis était âgé de 63 ans. Considérant que l'homicide involontaire, dans ce cas, se rapprochait plus de l'accident que du meurtre, monsieur le juge Zigman, de cette Cour, a prononcé une peine de huit ans d'emprisonnement.

▪ R. c. Laplante, 2008 QCCS 13 (CanLII), [2008] J.Q. no 42, 2008 QCCS 13.

À l'occasion d'une transaction de drogue, Laplante et Helgen se rendent à l'endroit prévu où l'attendait la victime. La transaction a mal viré. Lefebvre a sorti une arme et l'a pointée vers Helgen. Laplante a sauté sur Lefebvre qui a déchargé son arme à feu sur Helgen. Helgen a ensuite tiré sur Lefebvre, qui est décédé presque instantanément. Laplante, âgé de 28 ans, a des antécédents judiciaires impliquant la violence. Helgen est condamné à sept ans d'emprisonnement et Laplante à six ans, les dix-huit mois de détention provisoire ayant été pris en compte. Le juge Martin, de notre Cour, mentionne que :

« (…) Il y avait cependant un comportement, même amateur jusqu’à un certain point, qui faisait fi de la sécurité, non seulement des acteurs principaux mais celle des autres personnes présentes. Les conséquences étaient tout à fait prévisibles. »

▪ R. c. Escamilla, 2008 QCCS 2005 (CanLII), [2008] J.Q. no 4143, 2008 QCCS 2005.

Les événements sont survenus dans un contexte de transaction liée au trafic de drogue. Espinosa et Hueman devaient vendre de la drogue à Escamilla, pour une somme de 15 000 $. Après avoir encaissé l'argent, Espinosa et Hueman n'ont jamais donné la drogue à Escamilla. Quelques semaines après la transaction, Escamilla les a retrouvés et a tiré sur eux. Il plaide que son intention était d'envoyer un message clair aux victimes qu'il voulait son argent. Il voulait seulement leur faire peur, non les blesser, encore moins les tuer. Les antécédents judiciaires d'Escamilla sont nombreux et concernent des infractions de vols, de voies de faits et de possession d'arme prohibée. La poursuite réclame une peine de pénitencier de quinze ans alors que la défense considère qu'une sentence d'incarcération de dix ans moins le temps passé en détention préventive est une sentence juste dans les circonstances. Notre collègue, madame la juge Bourque, a estimé que la peine appropriée était une peine de treize ans d'emprisonnement dont on devait soustraire trente mois de détention provisoire.

▪ R. c. Tremblay, 2008 QCCS 5923 (CanLII), [2008] J.Q. no 13065, 2008 QCCS 5923.

Tremblay s'était rendu à Montréal, muni d'une arme à feu, pour compléter une transaction de stupéfiants. La transaction n'a pas été complétée car la victime, Séguin, a plutôt choisi de lui voler l'argent qu'il lui avait demandé d'amener avec lui pour acheter le cannabis. Séguin a sorti une arme à feu pour la pointer vers Tremblay qui lui a donné un coup sur le bras et une balle a été tirée dans la jambe de Tremblay. Profitant du fait que l'arme de Séguin s'était enrayée, Tremblay, qui croyait pour sa vie, a utilisé sa propre arme, tirant à deux reprises sur Séguin. Tremblay est un père de famille qui a la garde partagée d'une petite fille de 2 ans. Il est charpentier-menuisier à l'emploi d'un entrepreneur de sa région. Il se décrit comme une victime dans un contexte de légitime défense. Il a été incarcéré en détention préventive durant quatre mois. Les antécédents de Tremblay sont mineurs et il n'y a aucune information concernant une implication criminelle depuis sa remise en liberté. La défense suggère le sursis d'emprisonnement et la poursuite réclame l'imposition d'une peine de sept ans. Monsieur le juge Cournoyer, de cette Cour, y écrit, entre autres :

« [51] Une peine sévère doit être imposée en raison de la dénonciation nécessaire, de l'exigence de dissuasion générale et spécifique, de même qu'en raison de la gravité de l’infraction et du degré de responsabilité de M. Tremblay.

[52] Une peine sévère est nécessaire en vertu du principe de l'harmonisation des peines en semblables matières. Il faut se rappeler que la peine qu'impose le Tribunal ne doit pas s'écarter «de façon marquée et substantielle des peines qui sont habituellement infligées à des délinquants similaires ayant commis des crimes similaires». » [référence omise]

Il conclut qu'une peine de six ans d'emprisonnement doit être imposée, de laquelle il déduit la période de détention provisoire, laissant une période d'emprisonnement de cinq ans et quatre mois.

[19] D'autres décisions méritent aussi d'être considérées :

▪ R. c. Mazzara, 2009 QCCS 836 (CanLII), 2009 QCCS 836 (CanLII).

Cette affaire illustre un cas de rage au volant. Excédé par l'attitude de la victime qui lui avait préalablement bloqué le chemin dans le stationnement d'un restaurant, l'accusé était sorti de son véhicule et avait utilisé un bâton de baseball pour frapper la victime qui est décédée des coups qui lui ont été portés et qui avaient provoqué de sérieuses fractures. L'accusé était gradué de l'université et avait vécu dans une famille qui supportait de bonnes valeurs. Il n'avait aucun passé d'utilisation de drogue non plus que d'abus d'alcool et ne possédait aucun antécédent judiciaire. Notre collègue, madame la juge Charbonneau, a considéré qu'une peine de quatre ans et demi d'emprisonnement de laquelle il fallait déduire une détention préventive de six mois était, dans les circonstances, une peine appropriée.

▪ R. c. Blanchard, 1992 CanLII 3744 (QC C.A.), 1992 CanLII 3744 (Q.C.C.A.).

À l'occasion d'un vol de dépanneur, Blanchard utilise une arme à feu. À la suite d'un faux mouvement, un coup de feu est tiré presque accidentellement. Blanchard était âgé de 26 ans et ne possédait aucun antécédent judiciaire. La Cour d'appel a accepté de réduire la peine de quinze ans qui avait été imposée à une période de cinq ans d'emprisonnement. La Cour d'appel mentionne que :

« (…) On peut constater que deux des quatre principes sont satisfaits par la conduite de l'accusé pendant les sept années précédant son procès. En effet, le besoin de protection de la société ne requiert pas une mise à l'écart et, en second lieu, sa réhabilitation est, sinon accomplie, du moins aussi près qu'on puisse imaginer du but recherché par une sentence. »

▪ R. c. Laroche, C.S. 415-01-008489-013, 11 février 2003.

Cette affaire expose la situation malheureuse où un jeune homme, confronté à de multiples problèmes existentiels, en est venu, exaspéré en raison des injures répétées et outrancières de son père, à décharger une arme à feu sur lui. Notre collègue, monsieur le juge Grenier, a accepté la suggestion commune des parties et a fixé la peine à une période d'emprisonnement de six ans.

▪ R. c. Quévillon, 1999 CanLII 13599 (QC C.A.), 1999 CanLII 13599 (Q.C.C.A.).

Dans cette affaire particulière où la victime est décédée après avoir été happée par le véhicule conduit par Quévillon, et traînée sur plus de 28 kilomètres, notre Cour d'appel a réduit à cinq ans la peine d'emprisonnement qui avait été fixée à dix ans par le juge du procès.

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