samedi 2 octobre 2010

Lorsqu'un policier n'est pas en mesure de respecter les exigences de l'article 254(2), il doit faire le nécessaire pour faciliter la consultation avec un avocat, y compris lui demander s'il a un téléphone cellulaire

R. c. Gauthier, 2010 QCCQ 7725 (CanLII)

[7] Dans l'affaire Orbanski, la Cour suprême établit que même si le droit à l'assistance d'un avocat garanti par l'article 10 (b) de la Charte pourrait être violé lorsque sont prises les mesures de détection pour déterminer la sobriété d'un accusé, cela est raisonnable et nécessaire. L'objectif étant de réduire le carnage attribuable à l'alcool au volant, le recours à des mesures de détection raisonnables est rationnel compte tenu de l'objectif poursuivi et compte tenu également des faits limités auxquels peut servir l'élément de preuve auto-incriminant.

[12] Dans l'affaire Grant, la Cour suprême détermine qu'un délai de 30 minutes entre la détection de l'odeur d'alcool et le test de dépistage est trop long. Il y a alors violation du droit de l'accusé à l'assistance d'un avocat pendant cette période de détention.

[13] Bien sûr, les policiers n'ont pas l'obligation d'avoir l'appareil de dépistage avec eux en toutes occasions. Le texte de l'article 254(2) prévoit que l'agent de la paix qui a des motifs raisonnables de soupçonner qu'une personne a de l'alcool dans son organisme peut ordonner à cette personne de fournir immédiatement un échantillon convenable pour le test de l'appareil de détection.

[14] En certaines circonstances exceptionnelles, notamment lorsque des policiers sont appelés sur une scène d'accident, la jurisprudence reconnaît qu'il est normal que les policiers donnent la priorité aux personnes blessées. En conséquence, après s'être exécutés, les policiers sont bien fondés d'administrer le test de dépistage puisqu'il est alors raisonnablement possible de le faire.

[16] Dans l'affaire Higgins, la Cour d'appel du Manitoba précise que le facteur déterminant dans l'appréciation du délai de l'article 254(2) n'est pas tant la longueur du délai - qui doit tout de même être très court - mais plutôt, la raison du délai. Dans cette affaire, l'ordre a été considéré avoir été donné "immédiatement" lorsque la prise d'échantillon est effectuée 14 minutes après que l'ordre ait été donné, parce que l'agent de la paix a dû attendre sur les lieux de recevoir l'appareil de détection approuvé et que l'accusé ne pouvait avoir d'opportunité réelle de contacter un avocat.

[17] Dans l'affaire George, la Cour d'appel de l'Ontario précise que lorsqu'un policier n'est pas en mesure de respecter les exigences de l'article 254(2), il doit faire le nécessaire pour faciliter la consultation avec un avocat, y compris lui demander s'il a un téléphone cellulaire.

[18] L'auteur Karl-Emmanuel Harrison est également de cette opinion:

Dans la mesure où s'écoule un délai entre l'ordre et la prise d'un échantillon d'haleine, notamment lorsque les agents de la paix n'ont pas en leur possession

un appareil de détection approuvé, des mesures raisonnables doivent être prises pour faciliter le droit à l'avocat de la personne détenue. D'une part, ils doivent aviser la personne détenue de son droit à l'avocat. D'autre part, ils doivent alors vérifier s'il existe une possibilité réelle d'exercice du droit à l'avocat. Pour ce faire, ils peuvent vérifier la possession par la personne détenue d'un cellulaire, la présence d'un téléphone public environnant ou se rendre à un poste de police situé à proximité. À moins que le prélèvement ne soit effectué immédiatement, la disponibilité d'un téléphone impose l'obligation d'informer le détenu de son droit à l'avocat. S'il existe une possibilité réelle d'exercice du droit à l'avocat entre le moment où l'ordre de soumettre à un test de dépistage est donné et la prise d'échantillon d'haleine, l'ordre est invalide et la violation du doit constitutionnel à l'avocat ne constitue plus une limite raisonnable.

[19] En fait, l'omission du droit à l'avocat dans le cas de tests de dépistage en bordure de la route est justifiée en autant que le test soit administré immédiatement.

[20] À compter du moment où, comme en l'espèce, le test n'est pas administré immédiatement, il doit y avoir dénonciation du droit à l'avocat, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.

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