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samedi 2 août 2025

Que signifie ''une seule affaire / une même transaction''?

Bédard c. R., 2018 QCCA 659

Lien vers la décision


[41]        L’article 581(1) C.cr. édicte que chaque chef d’accusation doit s’appliquer à une seule affaire:

581(1) Substance de l’infraction – Chaque chef dans un acte d’accusation s’applique, en général, à une seule affaire; il doit contenir en substance une déclaration portant que l’accusé ou le défendeur a commis l’infraction qui y est mentionnée.

581(1) Substance of offence – Each count in an indictment shall in general apply to a single transaction and shall contain in substance a statement that the accused of defendant committed an indictable offence therein specified.

[42]        L’auteur Tim Quigley définit ainsi cette règle de la « transaction » unique :

Subsection 581(1) requires that each count refer to just one transaction (although the qualifier “in general” has some importance too). The concept referred to is that of “legal sufficiency”. That is, the count must allege an offence that arose out of a single transaction.

“Transaction” normally refers to a single incident or pattern of events. However, it has been given a much broader interpretation in many cases. For example, it is not uncommon in a sexual abuse cases, where the abuse consists of repeated acts over a long period of time, to charge but one offence that occurred over a span of time set out in the indictment. Much the same applies to theft charges, where it is alleged that the theft was a continuous offence.

Much of this flexibility has to do with the discretion accorded the prosecution in drafting charges. In the sexual abuse and theft examples, the Crown could choose to lay separate counts for each act. Frequently, though, it is preferable to allege a single count covering a series of acts.

[…]

In addition to a broad definition of “transaction”, the qualifier in subsection 581(1), “in general”, has been interpreted to permit a count to encompass several acts of the same type, subject to the defence’s right to apply for particulars under section 587 of for division into separate counts under section 590. A good example is again the sexual abuse situation where the abuse consists of many different acts over a long period of time.[8]

                                                                        [Renvois omis; italique dans l’original]

[43]        E.G. Ewaschuk fait quant à lui les distinctions suivantes entre la règle de la « transaction unique » et celle interdisant la duplicité (ou multiplicité) d’un chef:

There exists a fundamental difference between a count which violates the single transaction rule and a count which violates the duplicity rule since s. 581(1) statutorily prohibits a count applying in general to more than one factual transaction, whereas s. 590(1)(b) prescribes that a count is not objectionable by reason only that it is double or multifalarious (by referring to more than one legal offence). Although a count framed in the disjunctive may be duplicitous, it will by definition refer to only a single transaction (the same conduct). By contrast, a count framed in the conjunctive may not only be duplicitous but may in the odd case refer to more than a single transaction (i.e., different conduct), e.g., a count charging multiple but separate conspiracies.[9]

[44]        L’auteur Tim Quigley reprend ainsi la distinction faite par Ewaschuk:

Another area that has given rise to much confusion is the concept of duplicity. The common law rule against duplicity prevents the Crown from alleging more than one offence in a single count, even if the offences relate to the same transaction. Thus, the distinction between the single transaction rule for sufficiency and the rule against duplicity is that the former generally confines a charge to a single factual transaction, while the duplicity rule bars the charging of more than one offence in a single count, even if both offences refer to the same transaction.[10]

                                                                                                [Soulignement ajouté]

[45]        La Cour d’appel d’Ontario a récemment affirmé dans l’arrêt Rocchetta qu’un « lien de connexité suffisant » [traduction libre] doit exister entre différentes actions pour qu’elles constituent une transaction unique:

[44] A series of acts that are sufficiently connected will make up a single transaction for the purposes of s. 581(1). The sufficiency of the connection will depend on the circumstances. The requisite connection may be established by the proximity in time or place of the acts, the identity of the parties to the acts, the similarities of the conduct involved in the acts, the ongoing relationship of the parties to the acts, or other factors tending to show that each act is properly viewed as part of the larger whole: see R. v. Hulan (1969), 1969 CanLII 306 (ON CA)2 O.R. 283 (C.A.).[11]

[46]        Tel qu’elle l’enseigne, ce lien dépend d’abord des circonstances de chaque affaire dont (1) la proximité des actions dans le temps ou l’espace (2) l’identité des parties concernées par celles-ci (3) une conduite similaire pour chacune d’elles (4) la relation continue existant entre les parties concernées (5) tout autre facteur démontrant que les actions, prises ensemble, font partie d’une seule opération.

[47]        Plusieurs cours d’appel canadiennes ont également affirmé à de nombreuses occasions qu’un chef d’accusation peut concerner plusieurs incidents malgré l’exigence de ne viser qu’« une seule affaire »[12].

[48]        Plus récemment, la Cour rappelait qu’« il est depuis longtemps acquis que cette règle n’interdit pas le regroupement d’une série d’incidents relevant d’une activité ou d’une conduite similaire, s’ils font partie d’une seule et même opération […] »[13]. Elle ajoute que le choix de poursuivre suivant un chef plutôt que deux ou plusieurs est à la discrétion du ministère public:

Bien que la poursuite eût très bien pu rédiger un chef d’accusation par événement, on ne saurait lui reprocher d’avoir regroupé les infractions sous-jacentes de même nature et relevant de la même conduite dans un seul et même chef d’accusation. Cette façon de faire n’est pas contraire aux exigences du par. 581(1) C.cr[14]

[49]        La Cour est ici d’avis que la juge de première instance a eu raison de conclure que les documents, au dépôt desquels l’appelant s’objectait, présentaient un lien de connexité suffisant avec le reste de la preuve et se rapportaient à une seule et même transaction criminelle découlant de la même affaire.  

[50]        Elle fait siens les propos du ministère public lorsqu’il écrit :

[…] la preuve administrée démontrait une seule infraction continue. En effet, la théorie de la poursuite est à l’effet qu’une fraude avait été commise par l’accusé sur une période de temps continue et que cette fraude concernait la même victime dans le cadre d’une relation d’affaire s’étant terminée par la découverte de la fraude alléguée. L’accusé, par différents moyens frauduleux (la production de codes producteurs ou par la fabrication de faux) avait le même objectif soit de détourner la clientèle de la victime à son profit dans le but de récupérer des sommes d’argent (des commissions sur les produits d’assurance des clients).

                                                                                             [Soulignements ajoutés] 

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