Reyes c. R., 2014 QCCS 4434
[32] L’article 36 est reproduit plus haut.
[33] Il prévoit que le fait d’être condamné[5] au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable par mise en accusation emporte, sauf pour le résident permanent, une interdiction de territoire pour criminalité.
[34] Même si l’appelant a été déclaré coupable de deux infractions punissables sur procédure sommaire, le paragraphe 36(3) prévoit que l’infraction sommaire est assimilée à une infraction punissable par mise en accusation[6].
[35] Le texte clair du paragraphe 36(2) de la LIPR n’exige aucune interprétation[7]. Son objet a été décrit par le juge Décary de la Cour d’appel fédérale dans Cha : « [l]'objet de l'article 36 est clair : les non-citoyens qui commettent certains types d'infractions criminelles ne doivent pas entrer ou demeurer au Canada »[8].
[36] Les condamnations de l’appelant emportent automatiquement une interdiction de territoire pour criminalité[9]. Il est vrai que des considérations humanitaires peuvent entrer en jeu et pourraient faire l’objet d’une demande par un étranger[10].
[37] Cependant, il serait inopportun de conclure que l’intérêt véritable de l’accusé n’a pas été établi au sens de l’article 730 C.cr. parce que la LIPR prévoit la possibilité de faire valoir de tels motifs.
[38] Dans la présente affaire, le juge d’instance a été informé des conséquences indirectes par l’avocate de l’appelant, mais il n’en a pas tenu compte.
[39] Il semble qu’il n’ait pas correctement identifié la portée du paragraphe 36(2) et son effet qui est indéniable.
[40] Contrairement à l’affirmation de la poursuite, le juge ne peut avoir eu à l’esprit les principes de l’arrêt Pham et les avoir appliqués s’il n’a pas tenu compte du texte même de l’art. 36 de la LIPR.
[41] En pratique, pour reprendre l’expression utilisée dans l’arrêt Pham, le juge n’était pas au courant de ces conséquences indirectes.
[42] Par ailleurs, le juge d’instance ne pouvait considérer que l’omission pour l’avocate de l’appelant de présenter une preuve au sujet des conséquences en matière d’immigration était une décision stratégique de sa part.
[43] En effet, il n’était pas nécessaire de présenter une preuve, car les conséquences de la condamnation découlent tout simplement de l’application de la LIPR. La condamnation de l’appelant emporte l’interdiction de territoire.
[44] Finalement, il faut souligner « qu'il n'est pas nécessaire de démontrer que ces conséquences se manifesteront réellement; il suffit qu'une possibilité existe »[11].
[45] La conséquence juridique qui découle de l’application automatique de l’article 36 de la LIPR suffit pour établir que l’absolution est dans l’intérêt de l’appelant au sens de l’article 730.
[46] Cette erreur de droit ayant été établie, le Tribunal ne peut toutefois accueillir l’appel et ordonner une nouvelle audience de détermination de la peine.
[47] En effet, en pareilles circonstances, le tribunal d’appel « inflige une peine juste dans ce qui équivaut à une nouvelle audience de détermination de la peine »[12] en fonction du dossier tel que produit devant lui.
[48] La conclusion que l’absolution est dans l’intérêt véritable de l’appelant ne suffit pas pour justifier l’octroi d’une absolution. Les conséquences indirectes en matière d’immigration sont un facteur pertinent, mais ne justifie pas automatiquement une absolution[13]. Il convient d'évaluer maintenant si l’absolution nuira à l’intérêt public.
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