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samedi 6 septembre 2025

Lorsque la police n'a que des soupçons et ne peut légalement obtenir d'autres éléments de preuve, elle doit alors laisser le suspect tranquille et il lui est impossible de faire une perquisition périphérique sans mandat

R. c. Kokesch, 1990 CanLII 55 (CSC)



 Pour ces motifs, je suis d'avis de conclure que la perquisition périphérique sans mandat de la maison d'habitation de l'appelant a été effectuée sans autorisation légitime de la loi ou de la common law.  En l'absence d'autorisation légitime, la perquisition périphérique doit être déclarée abusive:  R. c. Debot1989 CanLII 13 (CSC)[1989] 2 R.C.S. 1140, à la p. 1147, le juge Lamer.  Vu cette conclusion, il ne m'est pas nécessaire, à proprement parler, d'examiner les deuxième et les troisième critères du caractère raisonnable établis dans l'arrêt Collins, précité.  Cependant, il me semble bien, indépendamment de la question de l'autorisation légitime, que la police ne possède pas un droit illimité du point de vue constitutionnel d'entrer sur une propriété privée.  À mon avis, la Cour d'appel de la Colombie‑Britannique a commis une erreur dans sa conclusion que la perquisition, bien qu'effectuée sans autorisation légitime, était néanmoins raisonnable.  Par conséquent, je suis d'avis de conclure que les droits que l'art. 8 de la Charte reconnaît à l'appelant ont été violés par la perquisition périphérique sans mandat de sa maison d'habitation.

 

3.  L'admissibilité de la preuve

 

   Vu la conclusion que la perquisition sans mandat a violé le droit que l'art. 8 de la Charte reconnaît à l'appelant, la seconde question à examiner est de savoir si la Cour d'appel a commis une erreur en ne concluant pas que l'administration de la justice serait déconsidérée par l'utilisation des éléments de preuve obtenus au moyen d'une perquisition subséquente effectuée en application d'un mandat valide.

 

   À mon avis, le lien entre la perquisition périphérique sans mandat, et donc inconstitutionnelle, de la maison d'habitation et la découverte ultérieure de la preuve est suffisamment étroit pour conclure que les éléments de preuve "ont été obtenus dans des conditions qui portent atteinte" à l'art. 8 de la Charte.  Dans l'arrêt R. c. Strachan1988 CanLII 25 (CSC)[1988] 2 R.C.S. 980, notre Cour a examiné cette question préliminaire qu'il faut considérer en vertu du par. 24(2) et a dit qu'il fallait aborder la question cas par cas (p. 1006).  De plus, la Cour a formulé le principe général suivant (à la p. 1005):

 

. . . la première étape de l'examen prévu au par. 24(2) consisterait à déterminer si une violation de la Charte a été commise en recueillant des éléments de preuve.  L'existence d'un lien temporel entre la violation de la Charte et la découverte des éléments de preuve revêt une importance particulière dans cette évaluation . . .

 

En l'espèce, des observations faites par des agents de police au cours d'une perquisition inconstitutionnelle ont servi de fondement à un mandat obtenu le lendemain autorisant la perquisition des lieux observés.  Le lien temporel n'a pas été interrompu par des événements survenus dans l'intervalle et il s'ensuit que les éléments de preuve ont été obtenus d'une manière qui viole les droits constitutionnels de l'appelant.  Par conséquent, il faut, en application du par. 24(2) de la Charte, examiner l'admissibilité des éléments de preuve obtenus au cours de la perquisition constitutionnelle subséquente.


(...)

À mon humble avis, l'inexistence d'autres méthodes d'enquête, admissibles sur le plan constitutionnel, n'est ni une excuse ni une justification pour utiliser des méthodes d'enquête inadmissibles sur le plan constitutionnel.  Dans l'arrêt R. c. Dyment1988 CanLII 10 (CSC)[1988] 2 R.C.S. 417, le juge La Forest (avec l'appui du juge en chef Dickson) a réitéré l'exigence énoncée dans l'arrêt Hunter c. Southam Inc.1984 CanLII 33 (CSC)[1984] 2 R.C.S. 145, selon laquelle il faut, dans la mesure du possible, obtenir un mandat et il a déclaré, à la p. 437:

 

. . . si on examine les faits de près, on se rend compte que le motif le plus probable pour lequel aucun mandat n'a été obtenu est que l'agent n'avait pas la conviction requise que l'accusé avait commis une infraction et que la saisie serait susceptible de fournir des éléments de preuve établissant l'existence de cette infraction.  Non seulement les circonstances ne révèlent‑elles pas des conditions pouvant justifier l'omission d'obtenir un mandat, mais encore elles montrent que le policier ne s'est pas conformé à l'exigence constitutionnelle minimale qu'il y ait des motifs raisonnables et probables de croire que la saisie permettrait de réunir des éléments de preuve.  [Je souligne.]

 

   Lorsque la police n'a que des soupçons et ne peut légalement obtenir d'autres éléments de preuve, elle doit alors laisser le suspect tranquille, et non aller de l'avant et obtenir une preuve d'une manière illégale et inconstitutionnelle.  Si elle agit ainsi, la violation de la Charte est beaucoup plus grave qu'elle ne le serait autrement, elle ne l'est pas moins.  Toute autre conclusion entraînerait une érosion indirecte mais importante des critères énoncés dans l'arrêt Hunter:  La poursuite concéderait volontiers qu'il y a eu violation de l'art. 8 si elle pouvait systématiquement obtenir l'utilisation de la preuve en vertu du par. 24(2) en prétendant que la police n'a pas obtenu de mandat parce qu'elle n'avait pas de motifs raisonnables et probables pour ce faire.  L'ironie de ce résultat est évidente.  Il ne faut pas oublier que la justification après coup des fouilles et perquisitions par leurs résultats est précisément ce que les critères énoncés dans l'arrêt Hunter visaient à éviter:  voir l'arrêt Hunter, précité, le juge Dickson (tel était alors son titre), à la p. 160; et l'arrêt Greffe, précité, le juge Lamer, aux pp. 790 et 798.

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