Rechercher sur ce blogue

mardi 3 juin 2025

La jurisprudence reconnaît l’interdiction générale de contre-interroger un témoin sur son opinion quant à la véracité d’un autre témoignage

J.L. c. R., 2017 QCCA 398

Lien vers la décision


[85]        La jurisprudence reconnaît l’interdiction générale de contre-interroger un témoin sur son opinion quant à la véracité d’un autre témoignage : R. c. Markadonis1935 CanLII 44 (SCC), [1935] R.C.S. 657; R. c. M.J.B., 2012 ABCA 119, par. 32-39, 46-49 (C.A.A.) ; LSJPA - 07232007 QCCA 48, par. 90R. c. A.(T.).1994 CanLII 5536 (C.A.Q); R. c. L.L., 2009 ONCA 413, par. 14-16 (C.A.O.) ; R. c. Ellard, 2003 BCCA 68, par. 21R. v. P.L.F.N, 1999 CanLII 18637, par. 24 (C.A.M.) ; R. c. Marsaw (1998), 1997 CanLII 17154 (CACM), 119 C.C.C. (3d) 3, 18 (C.M.A.); R. c. C. (G.) (1997), 1996 CanLII 6634 (NL CA), 110 C.C.C. (3d) 233, 251 (C.A.T.-N.). C'est précisément ce qui s’est produit en l’espèce.

[86]        L’arrêt R. c. Ambrose2000 ABCA 125, fait office d’orphelin en la matière, même s’il a été cité dans l’arrêt R. c. M.J.B.2012 ABCA 119. Il faut dire qu’en discutant une possible exception à la règle, la Cour constate qu’Ambrose avait lui-même accusé les témoins de la poursuite d’un complot à son égard, un sujet dont l’exploration par le ministère public devenait légitime. Autrement, ce type de question est prohibé.

[87]        En outre, le danger est réel de détourner l’attention de la véritable question au procès qui est de savoir si la poursuite a présenté une preuve hors de tout doute raisonnable de la culpabilité : R. c. L.L., 2009 ONCA 413, par. 16 (C.A.O.) ou de tirer une inférence défavorable devant l’absence de réponse « raisonnable et persuasive » selon les propos du juge Brooke dans l’arrêt R. c. F. (C.), 1996 CanLII 623 (C.A.O.), cité dans l’arrêt R. c. L.(L.), précité.

L’erreur dans l’appréciation de la crédibilité de l’appelant

J.L. c. R., 2017 QCCA 398

Lien vers la décision


[74]        L’arrêt W. (D.) n’édicte pas une règle que doit servilement suivre le juge : R. c. Dinardo2008 CSC 24 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 788, par. 23R. c. C.L.Y., 2008 CSC 2 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 5, par. 9R. c. Boucher2005 CSC 72 (CanLII), [2005] 3 R.C.S. 499, par. 29.

[75]        Cependant, comme le rappelle la Cour dans l’arrêt R. c. Dubé2012 QCCA 1710, par. 14, la démarche est vertueuse et met en évidence le but de l’exercice qui n’est surtout pas de choisir entre les versions. Elle force une démarche intellectuelle correcte pour éviter les raisonnements interdits. De manière générale ici, et l’appelant est d’accord, le juge adopte le modèle préconisé par l’arrêt W. (D.).

[76]        C'est dans son application que le juge aurait erré. Selon l’appelant, le juge conclut à une preuve hors de tout doute raisonnable uniquement parce qu’il rejette son témoignage. Il souligne que le rejet du témoignage d’un accusé ne met pas un terme à l’analyse. L’appelant a raison puisqu’il n’y a pas d’«équation directe entre le fait [de ne pas croire] l'appelant et le fait que la poursuite se soit déchargée de son fardeau »: R. c. Willard, 2007 QCCA 1483, par. 3. Je ne suis pas convaincu que le juge soit tombé dans ce piège, même si son analyse est courte.

[77]        Enfin, l’appelant reproche au juge d’avoir fait une mauvaise application de l’arrêt W. (D.) en analysant son témoignage au regard de l’ensemble de la preuve à la « première étape ». Or, non seulement il le pouvait, il le devait. Le juge a raison.

[78]        Si un certain débat semble exister sur ce point, il découle sans doute d’une lecture trop étroite de l’arrêt W. (D.). La Cour suprême y dit bien que si l’accusé est cru, il doit être acquitté, mais elle n’a ni infirmé ni mis de côté l’autre important principe voulant que les éléments de preuve ne doivent jamais être évalués en vase clos : R. c. Morin1988 CanLII 8 (CSC), [1988] 2 R.C.S. 345.

[79]        Aussi, le juge doit toujours évaluer la preuve dans son ensemble, y compris le témoignage de l’accusé. Déjà en 1994, la Cour avait indiqué, sous la plume du juge Fish, que tel était le cas. Fort de l’enseignement de W. (D.), le juge Fish énumère les points importants à communiquer à un jury confronté à des versions contradictoires de l’accusé et de la victime. Notamment, il écrit dans l’arrêt R. c. Potvin1994 CanLII 5460 (QC CA), [1994] R.J.Q. 640, à la page 643 :

 (7) If the jury, after considering all of the evidence, believes the testimony of the accused, then the accused must be acquitted. […]

(Je souligne)

Voir aussi, au même effet, les décisions suivantes: R. c. Dinardo2008 CSC 24 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 788, par. 23R. c. El Faf2009 QCCA 556, par. 23 et 39R. c. Fournier2014 QCCA 1758, par. 9LSJPA – 15212015 QCCA 1229, par. 39R. c. Takri2015 QCCA 690, par. 28-29R. c. Threefingers2016 ABCA 225, par. 67R. v. Hoohing2007 ONCA 577, par. 15R. c. Wadforth, 2009 ONCA 716,  par. 67 (C.A.O.).

Ce que doit faire l'agent de la paix dans les meilleurs délais selon l'article 320.28 Ccr

R v Kluz, 2025 SKKB 9

Lien vers la décision


[13]                                 As noted, s. 320.28(1) requires that peace officers perform two tasks “as soon as practicable”:

a.      Make a demand on the accused for a breath sample; and

b.      Obtain the breath samples.

[14]                                 There are no issues taken on this appeal with the officer making the breath demand as soon as practicable. The issue is whether the breath samples were taken as soon as practicable.

[15]                                 In interpreting the phrase “as soon as practicable”, courts have made the following determinations:

a.      The phrase is not synonymous with as soon as possible: R v Vanderbruggen (2006), 2006 CanLII 9039 (ON CA)206 CCC (3d) 489 (Ont CA) at para 12;

b.      The phrase is also not synonymous with the term “forthwith”: R v Racine2014 SKCA 73 at para 16438 Sask R 310;

c.      The “as soon as practicable” standard requires that breath samples be taken within a reasonably prompt time in the circumstances: R v Prestupa2016 SKCA 118 at para 16485 Sask R 152 [Prestupa];

d.      The test is grounded in common sense: Prestupa at para 19;

e.      The touchstone for determining whether breath samples were taken as soon as practicable is whether the police acted reasonably: R v Burwell2015 SKCA 37 at para 18472 Sask R 1 [Burwell];

f.      The Crown does not need to provide a detailed explanation of what occurred during every minute that the accused was detained: Burwell at para 18R v Peepeetch2018 SKQB 65 at para 4323 MVR (7th) 257; and

g.      A delay caused by waiting for a tow truck does not necessarily create a situation where the sample is not taken as soon as practicable: R v Wetzel2013 SKCA 143 at para 22427 Sask R 261.

État du droit quant aux prélèvements sanguins en lien avec l'infraction de capacité de conduite affaiblie par l'alcool

R. c. Bergeron, 2024 QCCS 1034 

Lien vers la décision


[23]        L’agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a conduit un moyen de transport, alors que sa capacité de conduire était affaiblie à un quelconque degré par l’effet de l’alcool, peut lui ordonner de fournir un échantillon de sang à condition de le faire dans les meilleurs délais[3].

[24]        Les prélèvements sanguins ne peuvent être effectués que par un médecin ou un technicien qualifié et s’ils ne risquent pas de mettre en danger la santé de cette personne[4].

[25]        L’analyse des délais, avant d’obtenir l’avis d’un médecin et la prise d’un échantillon sanguin en milieu hospitalier, requiert une analyse minutieuse et adaptée au contexte[5]. L’action policière est fort limitée dans un milieu hospitalier; les obligations des policiers prévues au Code criminel[6] se confrontent aux propres obligations et priorités du personnel médical[7].

[26]        Sauf en de rares circonstances, il serait inopportun d’exiger que la poursuite assigne, lors d’un procès, un gestionnaire de l’hôpital ou le personnel médical afin d’expliquer le délai écoulé dans l’attente du prélèvement de l’échantillon sanguin[8].

[27]        La poursuite n’a pas à démontrer, minute par minute, l’intervention policière; il suffit de démontrer le caractère raisonnable du délai à l’intérieur duquel les échantillons sont prélevés. Un échantillon de sang prélevé dans un délai raisonnablement rapide, compte tenu des circonstances, répond aux exigences du Code criminel. Il n’y a aucune obligation que les prélèvements soient effectués le plus rapidement possible. Il faut plutôt se demander si les policiers ont agi raisonnablement compte tenu de l’ensemble des circonstances[9].

[28]        Un tribunal d’appel doit examiner avec déférence les conclusions du juge du procès. Il ne peut intervenir qu’en cas d’erreur manifeste et dominante, de verdict déraisonnable ou d’erreur judiciaire. Le rôle du Tribunal n’est pas de déterminer si d’autres conclusions sont raisonnables, mais plutôt si l’inférence tirée par le juge d’instance est raisonnable à l’égard de la preuve[10].

L’exigence de la mens rea de l'infraction prévue à l’art. 215

R. c. Goforth, 2022 CSC 25

Lien vers la décision


[27]                        L’article 215 crée une infraction de négligence pénale. Il « a en effet pour but l’établissement d’un niveau minimal uniforme de soins à fournir pour les personnes auxquelles il s’applique. Or, cela ne peut se réaliser que si ceux auxquels incombe l’obligation sont tenus de respecter dans leur conduite une norme de la société plutôt qu’une norme personnelle » (R. c. Naglik1993 CanLII 64 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 122, p. 141-142 (soulignement omis)). La responsabilité repose sur ce dont une personne raisonnable dans une situation semblable à celle de l’accusé aurait eu connaissance ou prévu, de sorte que la « faute consiste dans l’absence de l’état mental de diligence requis » (R. c. Beatty2008 CSC 5, [2008] 1 R.C.S. 49, par. 8). La disposition sanctionne le comportement qui constitue un écart marqué par rapport à une norme objective de diligence raisonnable. Plus précisément, la mens rea requise dans le cas de l’art. 215 est établie lorsque la Couronne prouve que la conduite de l’accusé constitue « un écart marqué par rapport à la conduite d’un parent raisonnablement prudent dans des circonstances où il était objectivement prévisible que l’omission de fournir les choses nécessaires à l’existence risquerait de mettre en danger la vie de l’enfant ou d’exposer sa santé à un péril permanent » (Naglik, p. 143; voir aussi R. c. J.F.2008 CSC 60, [2008] 3 R.C.S. 215, par. 8).

[28]                        Dans l’arrêt R. c. Roy2012 CSC 26, [2012] 2 R.C.S. 60, par. 36, le juge Cromwell a fourni un cadre d’analyse utile afin de déterminer si la mens rea objective a été établie :

      Il est utile d’aborder le sujet en posant deux questions. La première est de savoir si, compte tenu de tous les éléments de preuve pertinents, une personne raisonnable aurait prévu le risque et pris les mesures pour l’éviter si possible. Le cas échéant, la deuxième question est de savoir si l’omission de l’accusé de prévoir le risque et de prendre les mesures pour l’éviter si possible constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé. [En italique dans l’original.]

[29]                        En l’espèce, la Couronne devait prouver, hors de tout doute raisonnable, que M. Goforth avait la mens rea requise pour l’infraction sous‑jacente prévue à l’art. 215 ainsi que la mens rea requise pour les infractions d’homicide involontaire coupable et d’infliction illégale de lésions corporelles.

[30]                        Pour satisfaire à l’exigence de la mens rea dans le cas de l’art. 215, la Couronne devait prouver : a) qu’il était objectivement prévisible, pour une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé, que l’omission de fournir de la nourriture, des liquides ou des soins médicaux risquerait de mettre en danger la vie de l’enfant ou d’exposer sa santé à un péril permanent; et b) que le comportement de l’accusé s’écartait de façon marquée de celui auquel on se serait attendu d’un parent, d’un parent d’accueil, d’un gardien ou d’un chef de famille raisonnablement prudent dans les circonstances.

La police doit agir avec diligence pour assurer l'exercice du droit à l'avocat si elle est forcée de décaler l'exercice de ce droit pour une raison sérieuse

R. v. Keshavarz, 2022 ONCA 312

Lien vers la décision


[71]      In Rover, this court recognized that in specific circumstances the implementational component of the right to counsel may be suspended. Those specific circumstances often involve concerns over police or public safety or the preservation of evidence: see Rover, at para. 26. See also Suberu, at para. 42Griffith, at para. 38. Indeed, the suspension of the implementational component of the right to counsel has been recognized in the context of needing to execute search warrants, just like this case: see Strachan, at pp. 998-99; Rover, at para. 26R. v. Learning, 2010 ONSC 3816, 258 C.C.C. (3d) 68, at paras. 71-75; and Griffith, at para. 38.  

[72]      The difficulty with suspending the facilitation of contact with counsel is that the seriousness of doing so cannot be gainsaid. As noted by Doherty J.A. in Rover, at para. 45, the right to counsel is a “lifeline” for all those who are detained. The right to counsel assists detainees with regaining their liberty and acts as a “guard against the risk of involuntary self-incrimination”: Suberu, at para. 40. As well, there is a recognized “psychological value” to providing access to counsel, a value that “should not be underestimated”: Rover, at para. 45.

[73]      At the same time, the critical importance of protecting the safety of the public and law enforcement, as well as preserving evidence – particularly evidence such as deadly weapons that are illegal to possess – cannot be refuted.

[74]      To resolve the inherent tension that arises when these laudable goals collide, the law permits a delay in the facilitation of the right to counsel, but only where the police have turned their minds to the specific circumstances of the case and concluded “on some reasonable basis, that police or public safety, or the need to preserve evidence, justifies some delay in granting access to counsel”: Rover, at para. 27. Doherty J.A. explained the test as follows in Rover, at para. 33:

[T]o fall within the exception to the requirement that an arrested person be allowed to speak to counsel without delay, the police must actually turn their mind to the specific circumstances of the case, and they must have reasonable grounds to justify the delay. The justification may be premised on the risk of the destruction of evidence, public safety, police safety, or some other urgent or dangerous circumstance.

[75]      Where those circumstances prevail, the police must move as efficiently and reasonably as possible to minimize any ensuing delay: see Rover, at para. 27Griffith, at para. 38. They must also suspend any questioning of the detainee until such time as the implementational component of the right to counsel has been accommodated.

Les policiers peuvent exceptionnellement retarder la mise en application du droit prévu à l’alinéa 10b) de la Charte après avoir considéré les circonstances particulières entourant leur intervention et avoir raisonnablement conclu qu’il en ressort que leur protection, celle du public ou la nécessité de préserver un élément de preuve le requiert

R. v. Griffith, 2021 ONCA 302

Lien vers la décision


[38]      Courts have recognized that specific circumstances, including concerns for police safety, public safety, or the preservation of evidence, may justify some delay in providing a detainee access to counsel: Suberu, at para. 42Rover, at para. 26; and La, at para. 38. Such concerns must be case-specific rather than general concerns applicable to virtually any case: Rover, at para. 27; La, at paras. 39-40. As Doherty J.A. explained in Rover — decided almost a year after the execution of the warrants in this case — the police may delay access to counsel “only after turning their mind to the specifics of the circumstances and concluding, on some reasonable basis, that police or public safety, or the need to preserve evidence, justifies some delay in granting access to counsel”: Rover, at para. 27. Even if such circumstances exist, the police must take reasonable steps to minimize the delay in granting access to counsel: Rover, at para. 27; La, at para. 40.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun

R. v. Atwell, 2022 NSSC 304 Lien vers la décision [ 8 ]              The Crown has a duty to make disclosure of all relevant information to ...