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dimanche 22 juin 2025

Certains facteurs neutres lors de la détermination de la peine

R. c. Abdul Jabar, 2023 QCCQ 405

Lien vers la décision


5.1         L’absence d’un plaidoyer de culpabilité

[63]      Un plaidoyer de culpabilité constitue un facteur atténuant important[94]. Le fait qu’un accusé maintienne sa version des faits lors de la détermination de la peine ne constitue pas un facteur aggravant[95]. Un accusé ne doit jamais se voir imposer une peine plus sévère parce qu’il a exercé son droit d’avoir un procès ou maintenu son innocence[96].

[64]      Toutefois, après procès, un accusé est mal venu de réclamer une identité de traitement avec ceux qui ont pu bénéficier de la clémence du Tribunal pour avoir plaidé coupable[97]. De même, le refus de reconnaître les torts causés prive un délinquant d’un facteur atténuant et peut être considéré lors de l’évaluation des chances de réhabilitation[98].

5.2         Le respect des conditions de mise en liberté

[65]      Le respect des conditions de mise en liberté est généralement un facteur neutre[99]. Toutefois, le respect de conditions « sévères et contraignantes » peut devenir un facteur atténuant[100], mais son poids relatif est variable[101]. Sa considération relève de la discrétion du Tribunal[102].

[66]      En l’espèce, l’accusé a été libéré par une promesse de comparaître. Les conditions qu’il devait respecter étaient peu contraignantes[103]. D’ailleurs, aucune preuve n’a été faite pour démontrer qu’elles étaient onéreuses ou lui ont imposé un lourd fardeau.

[67]      À cet égard, le Tribunal souligne que durant son contre-interrogatoire, l’accusé indique qu’il retourne vivre avec sa femme vers le 17 août 2020. Or, à ce moment-là, il avait toujours des interdits de contacts avec sa conjointe.

5.3         L’absence de remords ou de regrets

[68]        L’absence de remords sincères et véritables de la part d’un accusé ne constitue pas un facteur aggravant[104].

[69]        Il s’agit généralement d’un facteur neutre[105].

[70]        Par ailleurs, on ne peut reprocher à un accusé de nier sa culpabilité lorsque le jugement le déclarant coupable est porté en appel[106]. Cela ne lui fait perdre qu’un élément favorable sur sentence[107], notamment dans l’analyse de son intérêt véritable[108] et celui de l’intérêt public[109], lors d’une demande d’absolution.

[71]        En outre, l’absence de remords est un élément que le Tribunal peut considérer lorsqu’il analyse le besoin de dissuasion spécifique, le degré de réhabilitation d’un accusé ou pour analyser le risque qu’un délinquant représente pour la société[110].

5.4         L’absence de blessures physiques

[72]        Il est reconnu que la présence de séquelles physiques constitue un facteur d’aggravation de la peine.

[73]        Toutefois, il ne faut pas croire que l’absence de blessures physiques constitue un facteur atténuant[111].

[74]        Il s’agit, tout au plus, d’un facteur neutre ou de l’absence d’un facteur aggravant[112].

[75]        Par ailleurs, comme le souligne la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt R. v. Carson :

[25]        (…) The extent of injuries resulting from the use of force, while an important factor, is not the sole determinative of the personal or societal interest in a crime.  The harm to society occasioned by domestic violence, even of a minor nature, cannot be understated[113].

5.5         L’absence de collaboration

[76]        Le défaut de collaborer d’un accusé avec les policiers dans le processus d’enquête ne constitue pas un facteur aggravant. Cela l’empêche uniquement de bénéficier d’un facteur atténuant important[114].

5.6         L’âge de l’accusé

[77]      Au moment des évènements, l’accusé est un adulte de 40 ans. On ne peut parler ici d’une erreur de jeunesse[115] ou d’un crime commis dans un contexte d’immaturité[116].

[78]      Normalement, la maturité amène la capacité à se contrôler[117].

5.7         L’absence d’effet du processus judiciaire sur l’accusé

[79]      En l’espèce, rien n’indique que le processus judiciaire ait eu un bénéfice quelconque sur l’accusé. Au contraire, lors du procès, lui et sa femme ont tenté d’induire en erreur le Tribunal en déposant des photographies de la cour arrière de leur maison qui ne correspondait nullement avec la réalité qui prévalait le 17 juillet 2020.

5.8         L’absence de preuve d’un pattern de violence physique dans le couple

[80]      La preuve au procès et lors des observations sur la peine ne révèle pas que les incidents de juillet 2020 s’inscrivent dans une historique de violence physique au sein du couple. Le Tribunal souligne que l’absence d’un facteur aggravant ne se transforme pas en facteur atténuant[118].

La fourchette des peines pour des voies de fait punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire comportant plusieurs facteurs aggravants

R. c. Abdul Jabar, 2023 QCCQ 405


[53]      Les infractions de menaces de mort et de voies de fait simple, lorsque poursuivi par voie sommaire, sont visées par une peine maximale de deux ans moins un jour et d’une amende de 5 000 $[85].

[54]      Le fait que le poursuivant ait choisi de poursuivre l’accusé par procédure sommaire ne diminue en rien la gravité des crimes et n’affecte pas de manière significative la peine à être imposée[86] ni n’empêche le Tribunal de prononcer une peine qui soit dissuasive et dénonciatrice[87]. En effet, dans R. c. Brassard, le juge Guy Cournoyer (aujourd’hui siégeant à la Cour d’appel) indique que le mode de poursuite n’a pas d’impact sur l’application des principes en matière de détermination de la peine[88]. Dit autrement, la détermination de la peine ne dépend pas du mode de poursuite choisie, mais bien du profil de l’accusé et des circonstances entourant les infractions[89].

[55]      Lorsque la victime visée par ces infractions est une partenaire intime, le Code criminel contient des dispositions particulières, édictées afin de bien marquer la volonté de la société canadienne à dénoncer et à enrayer la violence conjugale[90].

[56]      Selon les auteurs Hugues Parent et Julie Desrosiers, la fourchette des peines pour des voies de fait punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire comportant plusieurs facteurs aggravants, va de la sentence suspendue assortie d’une probation à quelques mois de prison dans les cas les plus graves[91].

Les principes applicables à l'octroi d'une absolution

R. c. Abdul Jabar, 2023 QCCQ 405

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[35]        Qu’elle soit conditionnelle ou inconditionnelle, l’absolution constitue une peine[52]. Elle est la sanction la plus douce prévue par le législateur[53]. Sans être une mesure d’exception[54], l’absolution est un remède qu’il faut appliquer judicieusement et non d’une façon routinière[55].

[36]        En accord avec le principe qu’il faille résister à adopter des principes rigides[56], l’absolution n’exclut aucune catégorie de personnes[57] ni aucun crime[58], sauf ceux qui ne remplissent pas les conditions statutaires prévues à l’article 730 du Code criminel.

[37]        Une absolution ne doit pas être automatiquement refusée dans les cas où la dissuasion est un objectif important[59]. Dans des circonstances appropriées, une absolution peut répondre aux objectifs de dénonciation et de dissuasion[60]. Bien que rien n’empêche, en soi, qu’une absolution puisse être octroyée dans une situation qui interpelle normalement les objectifs de dénonciation et de dissuasion[61], elle est généralement une mesure inappropriée lorsque ces facteurs doivent d’être priorisés.[62].

[38]        Le test applicable est celui d’assurer un équilibre entre l’intérêt véritable de l’accusé et ceux de la société[63].

[39]        Généralement, l’absolution répond à des infractions de gravité relative qui résultent de gestes ponctuels, irréfléchis et de courte durée[64]. La règle d’or en la matière est qu’un accusé ne doit pas subir un châtiment qui n’a aucune mesure avec sa faute[65].

[40]        Pour bénéficier d’une absolution, un accusé doit avoir été déclaré coupable d’une infraction pour laquelle la loi ne prescrit pas de peine minimale et qui n’est pas punissable d’un emprisonnement de quatorze ans ou plus.

[41]        Par ailleurs, le Tribunal doit considérer que l’absolution est dans l’intérêt véritable de l’accusé et qu’elle ne nuit pas à l’intérêt public[66].

[42]        La mise en balance de l’intérêt véritable de l’accusé et de l’intérêt public est un exercice délicat. C’est le devoir des tribunaux de première instance de déceler les cas où une absolution doit être ou non accordée[67].

[43]        Pour ce faire, les juges d’instance jouissent d’une discrétion importante[68].

3.1      L’intérêt véritable de l’accusé

[44]        L’intérêt véritable d’un accusé est une question de fait relevant de l’appréciation du Tribunal[69]. L’analyse de l’intérêt véritable de l’accusé exige un examen contextuel de ses caractéristiques personnelles et un examen approfondi des conséquences d’une condamnation[70].

[45]        Le critère de l’intérêt véritable suppose que l’accusé est une personne de bonne moralité, qu’il n’a pas d’antécédent judiciaire, qu’il n’est pas nécessaire d’enregistrer une condamnation pour le dissuader de commettre d’autres infractions ou pour qu’il se réhabilite et que cette mesure aurait à son égard des conséquences particulièrement négatives[71].

[46]        Le simple fait d’être jeune et sans antécédent judiciaire ne rend pas automatique l’octroi d’une absolution[72].

[47]        De plus, le fait que l’emploi d’un accusé puisse être menacé par une condamnation peut servir d’assise à une absolution[73], sans toutefois entraîner automatiquement l’application de cette mesure[74]. Cependant, il ne doit pas s’agir d’une simple possibilité théorique ou d’une hypothèse[75].

[48]        Il est inapproprié de présumer qu’il est toujours dans l’intérêt véritable d’un accusé de pouvoir bénéficier d’une absolution[76]. Il appartient à l’accusé de démontrer qu’il est dans son intérêt véritable de bénéficier d’une telle mesure[77].

[49]        Si le critère de l’intérêt véritable de l’accusé n’est pas satisfait, le Tribunal n’a pas à se pencher sur le critère de l’intérêt public[78].

3.2         Nuit pas à l’intérêt public

[50]        Cette exigence ne signifie pas que l’absolution doit être elle-même dans l’intérêt public, mais plutôt que rien ne s’oppose à son octroi. L’intérêt public est une notion vaste, générale et à géométrie variable[79], qui prend en compte divers facteurs, dont les objectifs de dénonciation et de dissuasion, la gravité de l’infraction, son incidence dans la communauté, l’attitude du public à son égard et la confiance de ce dernier dans le système judiciaire[80].

[51]        Quant à la confiance du public, il faut se demander si la « personne raisonnable et bien renseignée »[81], perdrait confiance dans le système judiciaire si l’accusé devait recevoir une absolution[82]. Plus l’infraction reprochée est objectivement et subjectivement grave, plus l’intérêt public requerra une condamnation et, inversement, moins le degré de responsabilité de l’accusé est élevé, plus un public informé pourra se satisfaire d’une sanction autre qu’une condamnation[83].

[52]        Il appartient au délinquant d’établir que l’octroi d’une absolution ne nuit pas à l’intérêt public[84].

Ce que signifie une preuve accablante dans l'application de la disposition réparatrice

R. c. Trochym, 2007 CSC 6 

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82                              L’affaire qui nous est soumise appartient nettement à la seconde catégorie, soit celle des erreurs graves qui justifieront la tenue d’un nouveau procès, à moins que la preuve produite soit à ce point accablante qu’une déclaration de culpabilité est inévitable ou serait forcément prononcée.  Cette norme ne doit pas être assimilée à la norme de la preuve hors de tout doute raisonnable qui s’applique ordinairement dans un procès criminel.  L’application de la disposition réparatrice aux erreurs graves répond à une norme plus rigoureuse, appropriée à une procédure d’appel.  La norme que la juridiction d’appel doit utiliser, à savoir déterminer si la preuve contre un accusé est à ce point accablante qu’une déclaration de culpabilité est inévitable ou serait forcément prononcée, est beaucoup plus élevée que celle voulant que le ministère public prouve ses allégations « hors de tout doute raisonnable » lors du procès.  Cette norme plus élevée tient compte du fait qu’il est difficile pour une juridiction d’appel, surtout dans le cas d’un procès avec jury où elle ne dispose pas de conclusions détaillées sur les faits, de déterminer rétroactivement quel effet, par exemple, l’exclusion de certains éléments de preuve aurait raisonnablement pu avoir sur l’issue du procès.

La disposition réparatrice peut trouver application si le verdict du jury n'est pas entaché d'erreur juridique à même les directives qu'il a reçu et que ses conclusions sont révélées sans ambiguïté par le verdict

R. v. Ronald, 2019 ONCA 971

Lien vers la décision


[68]      There is, however, at least one situation in which the court has applied the curative proviso to the erroneous failure to leave a possible verdict on an included offence. In considering the applicability of the proviso, the court can take into account findings of fact implicit in the verdict or verdicts returned by the jury as long as those verdicts are not tainted by the legal error, and those findings are unambiguously revealed by the verdict: HaughtonR. v. Elkins (1995)1995 CanLII 3510 (ON CA), 26 O.R. (3d) 161, at pp. 170-172, leave to appeal refused, [1996] S.C.C.A. No. 62; R. v. Mulligan (2006)2006 CanLII 15625 (ON CA), 80 O.R. (3d) 537, at para. 60 (C.A.); Sarrazin (ONCA), at paras. 70-72; Sarrazin (SCC), at paras. 30-31; R. v. Pilon2009 ONCA 248, 243 C.C.C. (3d) 109, at paras. 76-80R. v. Humaid (2006), 2006 CanLII 12287 (ON CA), 81 O.R. (3d) 456, at paras. 88-90 (C.A.), leave to appeal refused, [2006] S.C.C.A. No. 232.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les déclarations d'un accusé à son complice ne sont pas du ouï-dire

R v Ballantyne, 2015 SKCA 107 Lien vers la décision [ 58 ]             At trial, Crown counsel attempted to tender evidence of a statement m...