R. c. El Gharbi, 2007 CanLII 42946 (QC C.M.)
[ 41 ] L’article 129 du Code criminel prévoit que : «Quiconque… entrave… ou résiste… un fonctionnaire public…» commet une entrave.
[ 42 ] La trame factuelle dans le présent dossier s’est déroulée en deux (2) étapes : la première étant les circonstances entourant l’arrestation du défendeur pour entrave et la deuxième étant sa résistance aux tentatives des agents de le faire asseoir dans le véhicule de police.
[ 43 ] Il est à noter que la dénonciation se limite à reprocher au défendeur d’avoir entravé (et non résister) les agents de la paix. L’art. 129 du Code criminel fait une distinction entre "entrave" et "résiste".
[ 44 ] Il n’est pas contesté que les agents, clairement identifiés par leurs uniformes, sont dans l’exécution de leurs fonctions lorsqu’ils interceptent le véhicule du défendeur pour lui remettre un constat.
[ 45 ] Deux (2) autres éléments essentiels doivent être prouvés :
i) l’entrave;
ii) le caractère volontaire de l’entrave.
i) Caractère volontaire
[ 46 ] Entraver volontairement un agent de la paix signifie de façon délibérée, de façon consciente :
«… sachant que ce geste est susceptible d’entraver, de nuire, de déranger… »
[ 47 ] R. c. Huard définit cette intention ainsi :
«… est la prévisibilité de cette conséquence pour l’auteur des gestes intentionnels… c’est la négligence de l’accusé.»
ii) Définition d’entrave
[ 48 ] Le Code criminel ne définit pas ce que constitue une "entrave". C’est la jurisprudence qui la définit.
«L’entrave… est une offense d’intention générale pénale, dont la composante factuelle est simplement d’avoir posé un geste… un comportement qui rend plus difficile – pas nécessairement qui empêche – mais qui rend plus difficile, plus onéreux… le travail de l’agent de la paix…»
[ 49 ] Il est à noter qu’une entrave peut être commise même en l’absence d’un geste physique. À titre d’exemple, constitue une entrave :
- un avocat qui dit à son client de quitter les lieux afin d’éviter de se faire arrêter;
- détruire ou cacher la preuve;
- aviser des citoyens de la présence policière.
[ 50 ] Une entrave peut aussi être commise par le refus d’obéir à un ordre d’un agent de la paix. Cet ordre doit, par contre, avoir comme fondement une assise juridique fondée sur une disposition législative (i.e. : loi, règlement, Code criminel) ou sur la common law.
[ 51 ] Lorsque la poursuite invoque une disposition législative, cette disposition doit être claire quant au pouvoir d’émettre un ordre et l’obligation par le citoyen de s’y soumettre.
[ 52 ] Il est à noter qu’il n’existe aucune obligation générale d’obéir à un ordre émis par un agent de la paix
[ 53 ] Un tel pouvoir peut être fondé sur la common law qui peut se retrouver soit dans un cas où un tel pouvoir a déjà été reconnu par les tribunaux ou il peut être créé par le juge dans l’instance devant lui.
[ 54 ] En droit criminel, de tels pouvoirs sont créés par le judiciaire pour permettre au service de police d’accomplir leurs fonctions de «… preserve the public peace, as it relates to the protection of life and property… effectively investigate and prevent crimes» et appliquer les règlements municipaux.
[ 55 ] Voici des exemples de pouvoirs fondés sur la common law :
- refus par un tiers d’obtempérer à un ordre de quitter la salle d’interrogatoire;
- refus d’arrêter de fuir les lieux;
- défier un ordre de se disperser;
- refus d’ouvrir la porte pour permettre à l’agent de vérifier une plainte pour de la musique excessive;
- refus de quitter les lieux;
- refus d’un photographe de cesser de faire des photos d’une patiente.
[ 56 ] Dans R. c. Knowlton, la Cour suprême a reconnu un pouvoir, fondé sur la common law, pour les policiers, d’établir un périmètre de sécurité sur la voie publique pour protéger un diplomate en visite au Canada. Un citoyen qui tente d’y pénétrer commet une entrave.
[ 57 ] Dans l’arrêt R. c. Worrell, le juge utilise ce principe pour conclure qu’un agent de la paix peut établir un périmètre de sécurité autour de son véhicule de police alors qu’il y a un attroupement sur les lieux.
[ 58 ] Les tribunaux reconnaissent par contre qu’un citoyen qui fait l’objet d’une arrestation, ainsi que toute personne se trouvant à proximité, peut soumettre de l’information ou une explication pertinente quant à la légalité de l’arrestation; surtout dans le cas où l’agent n’est pas un témoin oculaire de l’incident.
[ 59 ] Il est à noter qu’un refus de l’agent d’écouter les explications ne transforme pas une arrestation légale en arrestation illégale uniquement de ce fait.
[ 60 ] Toutefois, ce droit de fournir des explications doit être exercé sans troubler la paix et d’une façon qui ne nuit pas à un agent dans l’exécution de ses fonctions. L’exercice de ce droit ne constitue pas une entrave «… unless it is intemperate, unduly persistent, irrelevant or be made in an unreasonable manner».
[ 61 ] Dans R. v. J.L.R., alors qu’un agent procède à l’arrestation d’un prévenu, le défendeur (un ami) s’approchait constamment des agents. Il a refusé de quitter les lieux et a été arrêté et trouvé coupable d’entrave.
[ 62 ] Finalement, il est évident que lors de l’interception d’un véhicule pour une infraction en vertu du Code de sécurité routière, le défendeur est détenu
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