samedi 19 septembre 2009

L'état du droit sur la preuve d'occasion (exclusive ou accompagnée d'autres éléments de preuve incriminants)

R. c. Yebes, 1987 CanLII 17 (C.S.C.)

Lorsqu'il est démontré qu'un crime a été commis et que les éléments de preuve incriminants retenus contre l'accusé ont principalement trait à l'occasion, la culpabilité de l'accusé n'est pas la seule déduction rationnelle qui peut en être tirée à moins que l'accusé n'ait eu une occasion exclusive de toute autre possibilité. Dans une affaire où la preuve de l'occasion est accompagnée d'autres éléments de preuve incriminants, une occasion qui n'exclut pas tout à fait une autre possibilité peut suffire

Bien que le mobile puisse être un élément important joint à d'autres faits probants et significatifs pour établir la culpabilité, le mobile en soi, pris de façon isolée, n'équivaut à rien ou à presque rien pour prouver que l'accusé a commis le crime dont il est accusé en vertu du premier chef d'accusation: Best on Evidence, 12th ed. 3845.

La preuve de l'occasion, à moins qu'elle ne soit une occasion exclusive de toute autre possibilité, est à peu près sur le même pied que la preuve du mobile. La simple occasion n'est pas acceptée à titre de corroboration lorsque la corroboration est nécessaire ou souhaitable: Burbury v. Jackson, [1917] 1 K.B. 16, 25 Cox C.C. 555 à la p. 558, Forsythe v. The King, [1943] R.C.S. 98, 79 C.C.C. 129, [1943] 2 D.L.R. 737, 5 Abr. Con. (2nd) 361. Les accusés ou une personne engagée par l'un d'eux ne sont pas les seules personnes qui ont eu l'occasion de commettre le crime. Logiquement, quiconque se trouvait dans l'immeuble vers minuit avait l'occasion de le commettre.

À notre avis, même si on considère l'effet cumulatif de l'occasion de commettre le crime et du mobile en l'espèce, cela n'est pas suffisant pour justifier une déclaration de culpabilité en vertu du chef d'accusation de complot en vue de commettre le crime d'incendie.

Le même principe a été énoncé plus récemment dans l'arrêt R. v. MacFarlane reflex, (1981), 61 C.C.C. (2d) 458 (C.A. Ont.), où le juge Martin au nom de la Cour, composée également des juges Weather‑ ston et Morden, a dit à la p. 460:

[TRADUCTION] En l'absence de toute autre circonstance reliant l'appelant au fait d'avoir mis le feu, il incombait au ministère public, pour appuyer la déclaration de culpabilité, de démontrer que l'occasion qu'il a eue d'allumer un incendie exclut toute autre possibilité. Il y avait des éléments de preuve dont le jury pouvait conclure que l'appelant a eu une occasion de mettre le feu qui excluait toute autre possibilité, mais les éléments de preuve n'étaient pas assez probants pour imposer cette conclusion. Le juge du procès a dit au jury que la preuve à charge contre l'appelant était fondée sur l'occasion et le mobile et à notre avis cette directive peut avoir incité le jury à conclure que ces circonstances étaient suffisantes en l'absence d'une directive claire quant à la nécessité de démontrer l'occasion exclusive de toute autre possibilité pour justifier une déclaration de culpabilité.

On peut alors conclure que, lorsqu'il est démontré qu'un crime a été commis et que les éléments de preuve incriminants retenus contre l'accusé ont principalement trait à l'occasion, la culpabilité de l'accusé n'est pas la seule déduction rationnelle qui peut en être tirée à moins que l'accusé ait eu une occasion exclusive de toute autre possibilité de le commettre. Toutefois, dans une affaire où la preuve de l'occasion est accompagnée d'autres éléments de preuve incriminants, une occasion qui n'exclut pas tout à fait toute autre possibilité peut suffire. C'est l'opinion exprimée par le juge Lacourcière dans l'arrêt R. v. Monteleone reflex, (1982), 67 C.C.C. (2d) 489 (C.A. Ont.), à la p. 493, où il a dit:

[TRADUCTION] Il n'est pas obligatoire que la poursuite démontre que l'intimé a eu, dans une affaire où d'autres circonstances incriminantes sont démontrées, une occasion qui exclut toute autre possibilité.

Cette opinion est également appuyée par d'autres observations du juge Martin dans l'arrêt R. v. Stevens reflex, (1984), 11 C.C.C. (3d) 518 aux pp. 534 et suiv., et voir également Imrich c. La Reine, 1977 CanLII 27 (C.S.C.), [1978] 1 R.C.S. 622, le juge Ritchie à la p. 627.

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