lundi 8 mars 2010

La jurisprudence en matière de violence à l'égard des enfants : la dénonciation / dissuasion sont prédominants - Exemples jurisprudentiels des peines

R. c. J.B., 2008 QCCQ 3733 (CanLII)

[34] La jurisprudence est constante en matière de violence à l'égard des enfants : les principes de dénonciation et de dissuasion sont prédominants.

[35] Les nombreuses décisions en la matière ont toutes en commun la condamnation à des peines d'emprisonnement, parfois purgées dans la collectivité.

[36] Dans la cause de R. C. Gadbois, l'honorable juge Carole Cohen de la Cour supérieure du Québec, fait une remarquable revue des décisions relatives à des causes d'enfants secoués.

[37] Certaines ont effectivement résulté en une peine de deux ans moins un jour, avec sursis. Je tire de la décision de la juge Cohen l'extrait suivant:

Note 2 : […] R. c. Habib, [2000] O.J. No 306 (O.C.A.), une gardienne coupable de voies de fait graves suite à un seul évènement de violence avec aucune séquelle et un excellent rapport pré-sententiel; R. c. Kierkegaard, [1998] B.C.J. No 2991 (BCSC), une mère d'accueil (mère monoparentale et elle-même victime de violence) qui avait plaidé coupable à la négligence criminelle causant des lésions à un nourrisson de 2 mois; R. c. L. (L.), [2001] J.Q. no 6063 (C.A.Q.), une mère d'accueil (issue elle-même d'une famille dysfonctionnelle avec violence conjugale) qui avait plaidé coupable à l'homicide involontaire d'une fillette handicapée de 3 ans et qui avait exprimé des remords; R. c. J.-L.L., [2003] J.Q. no 2725 (C.Q.), un père qui avait plaidé coupable d'homicide involontaire et qui avait exprimé beaucoup de regret; R. c. Klotz, [2004] B.C.J. no 3033 (B.C.S.C.), un père de 26 ans sous l'influence du crystal-meth au moment de l'infraction qui avait plaidé coupable à des voies de fait graves, qui avait exprimé des remords - aucune séquelle permanente chez l'enfant; R. c. Jackson, (2006) Carswell 3347 (O.S.C.), une mère monoparentale qui a plaidé coupable aux voies de fait graves suite à un seul incident de secouage; R. c. Pawis, [2006] O.J. no 4158 (O.C.J.), une mère amérindienne de 23 ans qui avait plaidé coupable aux voies de fait graves sur un bébé de 9 mois - elle n'avait aucun soutien familial et était issu d'une famille brutale, elle a exprimé des remords; R. c. C.(J.), [2007] J.Q. no 7885, EYB 2007-122412 (C.Q.), un père, qui avait 23 ans au moment de l'infraction, a plaidé coupable aux voies de fait graves sur un nourrisson de 6 semaines - l'enfant avait des légers retards moteurs et le père avait des antécédents judiciaires.

[38] D’autres décisions citées par la juge Cohen ont, quant à elles, résulté en une peine de prison de moins de deux ans:

Note 2 (suite) : […] R. c. McNeely [1995] O.J. No 4371 (O.C.J.), dans laquelle un père de jumeaux a plaidé coupable aux voies de fait avec lésions corporelles et a reçu une peine de 18 mois, ayant exprimé des remords; R. c. W.T.T., [2002] J.Q. no 5653 (C.Q.), un père qui a été trouvé coupable de voies de fait avec lésions corporelles sur un bébé de 4 mois qui n'avait pas de séquelles et qui a reçu une peine de 20 mois d'emprisonnement; R. c. McCauley, [2007] O.J. no 1593 (O.S.C.), une mère de 20 ans qui consommait des stupéfiants et qui avait plaidé coupable à une accusation de voies de fait graves contre un nourrisson de 31 jours qui n'avait pas de séquelles permanentes - elle a reçu une sentence de 12 mois d'emprisonnement; R. c. Kennedy-Alcius, [2007] J.Q. no 1153, EYB 2007-114908 (C.A.Q.), un cas d'homicide involontaire d'un garçon de 3 ans et demi - l'accusé était le fils de la conjointe de l'accusée, suite à un seul incident de violence, et a reçu une peine d'emprisonnement de 24 mois moins un jour.

[39] La juge Cohen cite finalement une série de décisions sur la peine et ayant donné lieu à des peines de pénitencier:

Note 10 : R. c. B.(L.), C.Q. Terrebonne, 700-01-035036-014, 13 décembre 2002, Beaulieu j., J.E. 2003-193 : le père de jumeaux (l'un est mort, l'autre est blessé) a reçu une peine de 5 ans de pénitencier sur un chef d'homicide involontaire et 1 an de pénitencier sur un chef de voies de fait graves, et le juge note, au paragraphe 59 : "[...] les sentences les moins lourdes sont imposées à des personnes au prise avec des problèmes de dépression majeure ou des problèmes psychologiques importants[...] Par ailleurs, les sentences les plus lourdes sont imposées à des personnes en pleine possession de leurs facultés mentales et qui ont fait usage de violence antérieurement ou sur une longue période."; R. c. Baldwin, 2002 NSSC 102 (CanLII), (2002) 204 N.S.R. (2d) 237 (N.S.S.C.) : un père trouvé coupable de voies de fait avec lésions corporelles (1 épisode de violence) a reçu une sentence de 2 ans de pénitencier, au paragraphe 44 : "[...] on the basis of need for general deterrence, that is an expression of abhorrence for a father of a tiny baby who, knowing he had some anger control problems, allowed himself to be criminally negligent to the extent resulting in the fracture of his daughter's ribs, a conditional sentence would, in my view, fall markedly short of meeting the purpose and principles of sentencing"; R. c. Colak, [1999] J.Q. no 5069, C.Q.M. 500-01-051584-974, 22 octobre 1999, Parent j. : un père trouvé coupable de voies de fait graves à l'endroit de sa fille de 2 mois (1 épisode de violence) a reçu une peine de 30 mois de pénitencier, malgré plusieurs facteurs atténuants; R. c. M. (S.W.), [2006] B.C.J. No. 231, [2006] B.C.W.L.D. 2417 (B.C.S.C.) : un père autochtone trouvé coupable de voies de fait graves (1 épisode de violence) a reçu une peine de 54 mois de pénitencier.

[40] La Couronne a, par ailleurs, soumis diverses décisions dont les suivantes:

[41] R. c. M.P. J.E. 2002- 326 (C.Q.)
L'accusé est condamné à 6 ans de pénitencier pour voies de fait graves sur un bébé de 11 semaines. La victime demeurera lourdement handicapée; elle présente des séquelles sévères et aura besoin de réadaptation à long terme, i.e. un suivi impliquant une équipe multidisciplinaire.
L’accusé a 24 ans et n'a aucun antécédent judiciaire. Il s'agit d'un événement unique. Il regrette les gestes posés et a entrepris une thérapie pour hommes violents.

[42] R. c. Mc Crindle (60 O.T.C. 211) - (1997)
L'accusé est condamné à 6 ans de pénitencier pour deux événements de voies de fait graves sur l'enfant de sa conjointe. L'enfant avait alors 8 mois. L'accusé a beaucoup de remords, pas d'antécédent et avait consulté un spécialiste. Les blessures ont occasionné des dommages au cerveau.

[43] R. c. Trudeau J.E. 2004-32 (C.Q.)
L'accusé est condamné à 4 ans de pénitencier, pour un événement de voies de fait graves. Le bébé avait 4 mois. Il a des séquelles importantes qui font qu'il aura besoin de soins de réhabilitation constants et d'un programme scolaire spécialisé. L'accusé, âgé de 38 ans, a un dossier judiciaire. Le rapport présentenciel indique que les risques de récidive demeureraient présents tant qu'une démarche thérapeutique à long terme n'aurait pas été entreprise.

[44] Le procureur de la défense a quant à lui soumis des décisions dans lesquelles des peines de pénitencier ont été prononcées, mais soutient que les faits dans la cause actuelle sont beaucoup moins graves, du moins au niveau des séquelles observées chez la victime.

[45] Par exemple, dans la cause de R. c. L. B., le juge Jean Beaulieu a condamné l'accusé à 5 ans pour homicide involontaire coupable sur un de ses fils et à un an consécutif pour son autre fils. Ce dernier a subi des lésions corporelles graves soit 19 fractures aux côtes, vraisemblablement causées en deux épisodes de violence.

[46] De même, dans R. c. M. B., le juge Claude P. Bigué, de la Cour du Québec, a condamné l'accusé à 3 ans de pénitencier pour voies de fait graves sur sa fille, alors âgée de 7 semaines. Le bébé a été secoué violemment à une reprise. Les séquelles suivantes ont été constatées, alors que la victime avait 2 ans :

- elle marche avec une jambe raide;

- elle dit quelques mots, mais ne fait pas de phrases complètes;

- elle a un problème persistant au niveau des yeux ( amblyopie et strabisme);

- son cerveau a subi des dommages permanents.

[47] Enfin, la cause de R. c. A., peine prononcée le 11 novembre 2006, par l'honorable Gilles Gagnon. L'accusé a été condamné à deux ans de pénitencier, pour voies de fait graves sur un bébé de 3 mois dont il avait la garde pour un court laps de temps. L'enfant a eu de nombreuses fractures et il avait le corps couvert d'ecchymoses. Il n'en a par ailleurs gardé aucune séquelle. L'accusé était âgé de 23 ans, n'avait pas d'antécédent en semblable matière et son quotient intellectuel de 72 se situait à la limite entre l'intelligence frontière et la déficience intellectuelle légère. De plus, peu de temps avant le prononcé de la sentence, l'accusé avait été déclaré non responsable criminellement pour cause de troubles mentaux dans un autre dossier.

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