mercredi 25 août 2010

Le mauvais état de santé de l'accusé ne constitue pas en soi un facteur décisif, sauf circonstances exceptionnelles

R. c. D.B., 2008 QCCA 798 (CanLII)

Lien vers la décision

[20] Comme il l'explique d'ailleurs dans ce même arrêt, aucune infraction, aussi grave soit-elle, ne peut être exclue de la possibilité d'une ordonnance d'emprisonnement avec sursis, hormis celles où une peine minimale d'emprisonnement est prévue, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

[21] La Cour a déjà rendu plusieurs arrêts sur l'impact que peut avoir la santé de l'accusé sur la peine. Cette jurisprudence, comme d'ailleurs celles des autres provinces canadiennes, est à l'effet que le mauvais état de santé de l'accusé ne constitue pas en soi un facteur décisif, sauf circonstances exceptionnelles.

[22] Dans Savard c. La Reine, notre Cour a permis que la peine d'emprisonnement soit purgée dans la communauté parce que l'appelant était atteint d'un cancer incurable et que son décès était imminent.

[23] Dans Grégory c. La Reine, la Cour a permis à l'intimée qui avait contracté le virus du sida et dont la mort était imminente de purger sa peine dans une maison de transition.

[24] Dans U.D. c. La Reine, la Cour a autorisé l'emprisonnement avec sursis (avec le consentement du ministère public) dans le cas d'un homme de 70 ans affligé d'une condition médicale morbide nécessitant des traitements constants.

[25] Au Manitoba, on peut signaler également deux affaires où, dans des circonstances exceptionnelles, la Cour d'appel a imposé une peine d'emprisonnement avec sursis. Dans le premier cas, l'accusé de 71 ans souffrait de dystrophie musculaire. Dans le second, l'accusé était en phase terminale d'un cancer.

[26] Par contre, notre Cour a refusé d'appliquer cette mesure dans le cas d'une personne déclarée coupable d'homicide involontaire d'un enfant de trois ans et qui, au moment du procès, avait été victime d'un infarctus. M. le juge Hilton écrivait à cet égard :

Moreover, as the case-law shows, there has to be a considerable degree of medical misfortune or disability in place before health factors can be considered as a compassionate basis to impose a sentence on incarceration less than what it might be otherwise, especially as it relates to a crime of violence such as this one. Such is not the case of Mr. Alcius. Quite simply, the trial judge ought not to have taken this factor into account as an attenuating factor.

[27] Les mêmes principes ont été appliqués dans les affaires A.D. c. La Reine, Champagne c. La Reine, Colas c. La Reine, Ekuban c. La Reine, J.C.B. c. La Reine, Martin c. La Reine et plus récemment dans P.L. c. La Reine et R. c. J.P. Ce n'est donc pas parce que l'état de santé de l'accusé est douteux ou même précaire et le fait que l'emprisonnement puisse constituer un fardeau additionnel que le sursis doit ou peut être prononcé.

[28] En l'espèce, l'intimé n'est pas en phase terminale, mais en traitement qui d'après la preuve au dossier a des chances de réussir. Il est en preuve, en outre, que les autorités carcérales sont tout à fait en mesure de lui assurer les soins requis.

[29] Avec respect pour le premier juge, la peine prononcée ne reflète pas la gravité des crimes commis. Celui-ci note en effet, n'eût été de l'état de santé de l'intimé, qu'une peine de six ans aurait dû normalement être imposée. Or, l'état de santé de l'intimé selon la preuve au dossier et en tenant compte des paramètres jurisprudentiels examinés plus haut n'est pas tel qu'il pouvait permettre pour des raisons humanitaires d'appliquer le sursis.

[30] En somme, la peine imposée par le premier juge ne reflète pas la gravité des crimes commis et ne saurait se justifier simplement par l'individualisation de celle-ci dans les circonstances précédemment décrites.

*** Voir le billet diffusé sur ce blog le 27 juillet 2010, qui reprend la revue de la jurisprudence du juge de 1ère instance R. c. D.B., 2007 QCCQ 12664 (CanLII) ***

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