Lien vers la décision
[116] Lorsque le ministère public entame une poursuite complexe, il a l’obligation d’élaborer un plan concret afin de réduire au minimum les délais occasionnés par cette complexité. Dans R. c. Bordo, 2016 QCCS 477 (CanLII), le juge Cournoyer a expliqué que ce plan concret doit inclure une divulgation de la preuve qui est accessible, facilement consultable et inventoriée de façon appropriée lorsque le volume de la preuve l’exige :
As noted by the Court of Appeal in R. v. Auclair, "the prosecution must ensure that it is prepared to proceed within a reasonable time and that it has a plan. The expectation is "a well thought-out plan" in order "to bring proceedings to completion." The case management judge must ensure that trials are "held under acceptable conditions. But it must be remembered that "courts cannot base their management decision on a lack of planning" by the prosecution. (par. 195)
In short, as the Supreme Court stated in its judgment upholding the decision of the Court of Appeal, the prosecution must have "a realistic plan for taking […] charges to trial and conducting the trial within a reasonable time." (par. 197)
There is also a consensus that no manageable trial may be held unless a number of conditions are present. Timely disclosure has to be provided. Disclosure should be accessible, searchable and appropriately inventoried where the volume of disclosure warrants it. (par. 198) (Notes de bas page omises). (Souligné ajouté)
[117] Dans Jordan, lorsque la Cour discute du changement de mentalité imposé par le nouveau cadre d’analyse et de la nécessité de coordonner les efforts de tous les intervenants, elle explicite ainsi ses attentes envers le ministère public :
Pour l’avocat du ministère public, cela signifie qu’il devra prendre des décisions raisonnables et responsables lorsqu’il s’agira de déterminer qui — et pour quelle infraction — poursuivre, de s’acquitter de ses obligations de communication de la preuve rapidement en collaboration avec la police, d’établir des plans pour les poursuites complexes et d’utiliser de façon efficace le temps du tribunal.(Souligné ajouté)
[118] L’obligation de la poursuite de divulguer la preuve ne peut constituer un événement imprévisible ou inattendu. Dans R. v. Keyes, 2017 ONCJ 5 (CanLII), au paragraphe 38, le juge Melvyn Green a rappelé que c’est la poursuite qui a la capacité d’administrer et de contrôler la divulgation de la preuve. De ce fait, il n’appartient pas à la Cour d’excuser les manquements de la poursuite dans l’exécution de ses devoirs constitutionnels en traitant des erreurs de routine comme des circonstances exceptionnelles :
There may well be occasions – last-minute witnesses, sudden recantations, fresh forensics, for but a few examples – when late disclosure proves unforeseen or unavoidable. For the most part, however, disclosure, and its timing, is a matter entirely within the Crown’s control. There is always a risk of oversight or mistake in the provision of disclosure, even one that may imperil a prosecution, but the risk is both foreseeable and avoidable. The obligation to make complete and opportune disclosure is within the administrative capacity of the Crown’s office. It is the Crown’s job to monitor and manage the process of disclosure. It is not the court’s function to excuse the Crown’s miscarriage of its constitutional duties by elevating routine “mistakes” into exceptional circumstances”. Such an approach would only condone, even encourage, the very trial delays Jordan is at pains to diminish if not eliminate.
[119] Des propos semblables ont été tenus par le Juge Daniel Bédard dans, R. c. Giroux, 2017 QCCQ 7375 (CanLII), au paragraphe 53 :
L’obligation de divulgation de la poursuite est une obligation continue soit, mais qui doit avoir une fin et cette fin doit arriver au moment opportun, c’est-à-dire plus proche dans le temps, de la date de la dénonciation que de la date du procès. C’est la poursuite qui, sous réserve d’une ordonnance du Tribunal, gère et contrôle la communication de la preuve et c’est donc elle qui se voit imputer ses délais pour toute lacune ou tout manquement à l’exécution de son obligation.
[120] Lorsque le dépôt des accusations est précédé par une enquête de longue haleine, on peut présumer que le ministère public avait le temps nécessaire pour ramasser, classer et divulguer la preuve en temps opportun. Une divulgation parcellaire et désordonnée de la preuve suppose l’absence d’un plan concret de la part du ministère public et les retards. Comme l’a expliqué le juge Bédard aux paragraphes 60 à 63 dans Giroux:
Sans simplifier à l’extrême, en droit criminel il y a des accusations qui sont suivies d’une enquête et il y a des enquêtes qui sont suivies d’accusations. Par exemple, un meurtre commis en plein jour, en public qui mène à une arrestation la journée même et donc une enquête qui commence dès la commission du crime.
Et il y a l’enquête qui précède l’accusation. Donc une enquête qui peut être de longue haleine, avec des outils à la disposition de l’État qu’elle utilise pour mener à bien son enquête. Dans ce cas, lorsque l’accusation est portée, la cueillette et l’analyse des éléments recueillis doivent être terminées, puisqu’il y a une accusation. Comment pourrait-on accuser une personne, si l’analyse de la preuve n’est pas complétée ?
À moins de circonstances particulières ou exceptionnelles, lorsque l’enquête précède l’accusation, la poursuite doit être prête, avec un plan concret, un échéancier et une stratégie. Ce qui précède suppose une divulgation ordonnée, structurée et opportune. Sinon elle court le danger de se retrouver à la remorque d’une défense qui agit avec insistance, empressement et célérité. Ce qui est la situation dans la présente affaire.
Lorsque l’État porte des accusations dont la gravité objective est élevée, des accusations qui résonnent fort dans l’oreille publique, des accusations qui ont, entre autres, un impact économique, sérieux, grave et immédiat pour les personnes accusées, il doit après quatre d’enquêtes, être prêt. Rien de moins. (Soulignés ajoutés)
[121] On ne peut pas attribuer à un accusé les délais résultant de demandes légitimes en vue de répondre aux accusations
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