[61] Dans sa requête[55], la requérante reproche à la Couronne d’avoir refusé de tenir compte de preuves pouvant l’innocenter. Elle se plaint également du fait de faire l’objet de plaintes criminelles non fondées, notamment pour fraude ou harcèlement criminel.
[62] D’abord, le bien‑fondé des plaintes criminelles sera évalué par le juge du procès.
[63] Quant au prétendu refus de la Couronne ou de la police de considérer des preuves supposément disculpatoires[56], il demeure que la poursuite est maître de sa preuve au procès. On ne peut lui imposer le devoir de citer certains témoins. Si elle omet de faire certaines preuves, elle risque de perdre sa cause. De plus, pourvu que l’obligation de divulgation de la preuve soit respectée, la défense sera toujours libre de présenter elle‑même les preuves qu’elle croit lui être favorables[57].
[64] Pour ce qui est de la collecte d’informations pendant l’enquête et la considération d’éléments de preuve dans son analyse préalable au procès, il est bien reconnu que ni l’accusé ni le Tribunal ne jouit d’un droit de diriger le déroulement d’une enquête ou d’exiger qu’une enquête policière soit la plus adéquate possible[58]. Un accusé ne peut exiger que la poursuite entreprenne des démarches d’enquête dans le but d’élaborer sa défense[59]. Évidemment, les lacunes de l’enquête pourront potentiellement soulever un doute raisonnable sur sa culpabilité[60].
[65] Toute lacune dans une enquête sera considérée par le Tribunal dans l’analyse finale de l’ensemble de la preuve et des inférences logiques qui peuvent en découler.
[66] Certes, s’il y a possibilité d’infraction, une enquête prompte et approfondie vise à rassembler tous les éléments de preuve pertinents de manière à permettre une prise de décision judicieuse et éclairée sur l’opportunité de porter des accusations[61]. En principe, les enquêteurs doivent se garder d’adopter une vision tunnel en concentrant leurs efforts sur la seule preuve de culpabilité d’une personne, au détriment de toute preuve disculpatoire[62]. Ils ont le devoir d’enquêter sur les crimes[63].
[67] Par ailleurs, comme le soussigné l’a rappelé dans sa décision portant sur la légalité de l’arrestation de madame Meilleur, en droit, un policier n’a aucune obligation préalable de rencontrer ou d’interroger le suspect afin d’obtenir sa version avant de procéder à l’arrestation[64]. Le policier n’est pas tenu d’épuiser toutes les avenues possibles. Il n’a pas non plus l’obligation de pousser l’enquête pour trouver des facteurs disculpatoires avant d’arrêter un suspect[65].
[68] Foncièrement, le refus d’accepter ou de recueillir une preuve offerte par la suspecte ou par l’accusée ne constituera pas en soi un abus de procédure et il n’entraînera surtout pas automatiquement un arrêt des procédures. Un tel remède, rappelons‑le, est réservé aux cas les plus manifestes d’abus de procédure. Les circonstances d’un cas d’espèce sont de la plus haute importance et il faut évaluer le comportement des agents de l’État à l’aune de celles‑ci[66].
[76] La requête ne révèle aucun fondement pouvant étayer une inférence d’abus ou de mauvaise foi de la part de l’État.
[77] Au contraire, relativement à certains courriels que l’accusée désire obtenir, le DPCP s’est engagé par écrit à faciliter le processus d’obtention des courriels qui seraient encore en possession de tiers, soit la compagnie plaignante. Malheureusement, étant donné l’absence de détails fournis par l’accusée dans sa demande, la démarche du ministère public s’avère difficile[73]. À cet égard, le procureur du poursuivant fait preuve d’une ouverture et d’une collaboration exemplaires.
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