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mardi 5 août 2025

Le ministère public a-t-il compétence pour demander l'annulation d'un subpoena ?

R. c. Poulin Laurin, 2013 QCCQ 16378

Lien vers la décision


[7]           Les accusés invoquent deux décisions[1] selon lesquelles une requête visant l'annulation ("to quash") de l'assignation d'une personne doit être présentée par la personne en question. Les accusés soutiennent que le ministère public n'a pas  compétence pour demander l'annulation des assignations des personnes mises en cause puisqu'il ne les représente pas. En effet, le ministère public invoque, dans le cadre de la requête en communication de la preuve, que les entités pour lesquelles ces personnes travaillent constituent des tierces parties à son égard au sens de l'arrêt R. c. O'Connor[2] de la Cour suprême du Canada.

[8]           Les accusés sont d'avis qu'il importe peu de distinguer si le Tribunal est saisi d'une demande visant l'annulation d'une assignation parce qu'elle ne rencontre pas les exigences du paragraphe 698(1) C. cr. ou d'une demande en vue d'excuser les témoins au sens du paragraphe 700(2) C. cr.. Ces deux moyens sont invoqués par le ministère public au soutien de sa requête en annulation d'assignation.

[9]           Avec respect, le Tribunal est d'avis que cette distinction est importante. Dans les deux décisions citées par les accusés, une cour de juridiction supérieure était saisie d'une requête en annulation d'assignation. Les pouvoirs du paragraphe 700(2) C.crn'étaient pas invoqués.

[10]        Le droit commun confère aux tribunaux, y compris les cours provinciales, un pouvoir discrétionnaire inhérent de contrôler leur propre procédure et d'empêcher qu'on en abuse[3]. Les tribunaux ont statué que ce pouvoir comporte celui d'excuser un témoin en vertu du paragraphe 700(2) C. cr.:

" My power to excuse witnesses under 700(2) of the Criminal Code relates to my duty to make determinations about the admissibility of evidence, and also my power to protect and control the processes of the court.[4]"

[11]        Le pouvoir des tribunaux de contrôler leur propre procédure est essentiel à la bonne administration de la justice. Ce pouvoir peut être invoqué par une partie, comme en l'espèce, ou peut être soulevé d'office par le tribunal.

[12]        L'argument des accusés n'est donc pas retenu. Le Tribunal peut, et doit, contrôler sa propre procédure et éviter qu'on en abuse.  Il peut excuser un témoin en vertu du paragraphe 700(2) C. cr., et ce même si le ministère public, et non le témoin lui-même, soulève cette question.

[13]        Étant donné que le Tribunal a compétence pour excuser un témoin à la demande du ministère public, en vertu du paragraphe 700(2) du C. cr., il n'est pas nécessaire de se pencher sur sa compétence à l'égard de la requête en annulation d'assignation.

2. Les accusés ont-ils fait la démonstration que les personnes assignées sont susceptibles de fournir quelque preuve substantielle ?

[14]        Lorsque l'assignation d'une personne est contestée, la partie qui a procédé à cette assignation doit faire la démonstration qu'il est raisonnablement probable que la preuve amenée par le témoin aidera à résoudre les questions en litige[5]. Le paragraphe 698(1) C.crqualifie cette preuve de « substantielle ».

[15]        Au voir-dire sur la communication de la preuve, les accusés ont le fardeau de démontrer que les éléments de preuve dont ils demandent divulgation leur seront d'une certaine utilité, c'est-à-dire qu'ils ne sont pas manifestement sans pertinence. Dans les cas d'un élément dont l'existence est mise en doute par le ministère public, les accusés doivent également établir un fondement par lequel le Tribunal pourrait conclure qu'il y a des motifs de croire que l'élément existe[6]

[23]        À cet égard, le Tribunal rappelle que l'assignation d'un témoin relativement à la requête en communication a pour objectif limité de démontrer l'existence d'un élément de preuve et le fait que celui-ci n'est pas manifestement sans pertinence. Les tribunaux supérieurs ont rappelé à maintes occasions que l'assignation d'un témoin ne doit pas servir de prétexte pour une recherche à l'aveuglette ou  pour vérifier si la divulgation est complète:

 « La requête (en arrêt des procédures au motif d'une divulgation de preuve incomplète) ne peut pas devenir un prétexte, pour la défense, d'interroger des témoins dans l'espoir que ceux-ci fourniront des témoignages permettant d'établir la violation alléguée. Accepter une telle pratique équivaudrait à permettre sous l'enseigne d'une requête en vertu de la Charte, de vastes enquêtes à partir d'allégations hypothétiques fondées sur des postulats erronées. De la même façon, l'assignation de témoins ne saurait être accordée pour vérifier si la divulgation est complète. »[7] (La parenthèse est de nous.)

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