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dimanche 15 octobre 2017

Détermination de la peine - production de cannabis

Melançon c. R., 2017 QCCQ 11197


Décisions
Facteurs soulignés
Peine
R. c. Yargeau, 2013 QCCQ 11957
·         Accusée âgée de 47 ans
·         2 sites de production avec 7 867 et 1 515 plants
·         Plaide coupable
·         Facteurs aggravants : deux sites de production.
·         Facteurs atténuants : plaidoyer de culpabilité à la première occasion; entraînée par son frère en qui elle avait confiance; situation personnelle et financière difficiles; risque de récidive très faible; aucuns antécédents judiciaires;rapport prédécisionnel très favorable, emploi d’éducatrice menacé par un casier judiciaire.

·         Absolution conditionnelle.
·         Probation de 2 ans;
125 heures de travaux communautaires; don de 2 000 $.
R. c. Duclos, 2014QCCQ 5111
·         Âgé de 30 ans
·         500 plants
·         Facteurs aggravants : quantité de plants; choix délibéré pour l’appât du gain; infraction commise en association avec une organisation criminelle.
·         Facteurs atténuants : plaidoyer de culpabilité; aucuns antécédents judiciaires; rôle limité à celui d’un propriétaire non-occupant; remords sincères; faible risque de récidive; reconnaissance de responsabilité; stabilité occupationnelle; collaboration avec les autorités; rapport prédécisionnel favorable.

·         Absolution conditionnelle.
·         Période de probation de 12 mois; 200 heures de travaux communautaires; don de 1 000 $.
R. c. Morissette, 2017 QCCQ 4052
·         Âgé de 40 ans
·         900 plants
·         Une infraction de production de cannabis et cinq infractions d’entreposage négligent d’armes à feu et de munitions.
·         Facteurs atténuants : plaide coupable; aucuns antécédents judiciaires; effet dissuasif du processus judiciaire; rôle limité à l’installation du système de
réfrigération; présent sur les lieux que deux fois; collaboration avec les policiers; actif pour la société; une peine de prison risque de lui faire perdre sa licence d’entrepreneur.

·         Absolution conditionnelle; don de 5 000 $.
·         Absolution aussi pour les 5 infractions d’armes à feu;  don de 1 000 $.
R. c. Bilodeau, 2013 QCCQ 16468
·         Âgé de 56 ans
·         Plaide coupable
·         382 plants et équipements
·         Antécédents judiciaires : conduite avec plus de 80 milligrammes d’alcool dans le sang, possession de stupéfiants, possession non autorisée d’armes prohibées ou à autorisation restreinte; conduite avec facultés affaiblies.
·         Facteurs aggravants : production de bonne qualité; planification du crime; motivé par l’appât du gain; antécédents judiciaires mais pas en semblable matière.
·         Facteurs atténuants : accusé est un actif pour la communauté; manifeste des regrets et des remords; faible risque de récidive; rapport prédécisionnel positif.

·         90 jours d’emprisonnement discontinus; amende de 1 500 $; probation de 2 ans; don de 1 500 $.
R. c. Cotroni et al, 2011 QCCQ 12731
·         4 accusés, âgés dans la vingtaine
·         900 plants, et 9,57 kg de cannabis
·         Facteurs aggravants : préméditation; motivés par l’appât du gain; antécédents judiciaires (pas en semblable matière).
·         Facteurs atténuants : plaidoyer de culpabilité; jeune âge; expression de regrets; profil et démarches propices à la réinsertion sociale; risque de récidive minime.








·         N.B. Cotroni et F.B. Cotroni : 6 mois de prison; probation de 2 ans.
·         Lévesque : 5 mois de prison, probation de 2 ans.
·         Bonome : 90 jours d’emprisonnement discontinus, probation de 2 ans; don de 1 500 $.
Valiquette c. R., [2004] J.Q. No. 6838 (C.A.Q.)
·         Accusé âgé de 26 ans
·         440 plants et 22,05 kg de cannabis en vrac à Mascouche, et 754 plants à Lachenaie.
·         Facteurs atténuants : plaide coupable; aucuns antécédents judiciaires; faible risque de récidive; reconnaissance de sa responsabilité.
·         Facteurs aggravants : cannabis délibérément cultivé dans un but de lucre; fléau régional.

·         Appel de la peine rejeté : deux peines d’emprisonnement d’un an, concurrentes. Le sursis n’est pas approprié.

R. c. Valence, [2003] J.Q. No. 3590 (C.A.Q)
·         Entreprise sophistiquée, étendue dans six résidences ainsi qu’un entrepôt.
·         Facteurs atténuants : plaide coupable à la première occasion; aucuns antécédents judiciaires; rapport prédécisionnel favorable; risque de récidive minime; employé avec dépendants et situation familiale stable.
·         Facteurs aggravants : amplitude de l’organisation; degré de planification ; grande quantité de plants; but de lucre poursuivi; nombre de personnes impliquées (12); le rôle directeur de l’accusé.

·         CAQ modifie la peine de sursis à 2 ans moins un jour de prison ferme, avec une probation de 3 ans.
St-Germain c. R., 2015 QCCA 1108
·         Accusé déclaré coupable
·         320 plants
·         Facteurs aggravants :
exploitation relativement sophistiquée, dans le but d’en faire le trafic; fléau dans le district de Joliette; motivé par le lucre.
·         Facteurs atténuants : aucuns antécédents judiciaires; stabilité d’emploi; absence de risque de récidive; milieu stable, charges familiales.

·         Appel de la peine rejeté :
emprisonnement de 8 mois, probation d’un an.
Parenteau c. R., 2007 QCCA 910
·         Trois chefs de production de cannabis et un chef de possession pour fins de trafic.
·         Aucuns antécédents judiciaires.
·         Absence de remords et risque réel de récidive.

·         Appel de la peine rejeté : emprisonnement de 18 mois.
Rivard c. R., 2008 QCCA 1509
·         Accusé âgé de 40 ans
·         1 250 plants (1 chef de production et 1 chef de possession en vue d’en faire le trafic).
·         Facteurs atténuants : plaide coupable, collaboration à l’enquête, aucuns antécédents judiciaires; remords.
·         Facteurs aggravants : motivé par l’appât du gain; planification et préméditation.


·         Appel rejeté : emprisonnement de 12 mois.
Brousseau et Pothier c. R., 2010 QCCA 1292
·         Accusés âgés de 25 et 26 ans, trouvés coupables.
·         331 plants dans un endroit isolé en forêt, exploitation d’une production artisanale, non sophistiquée.
·         Facteurs atténuants : aucuns antécédents judiciaires, ils occupent des emplois stables.
·         Facteurs aggravants : motivés par l’appât du gain.

·         Appel rejeté
·         9 mois de prison; probation de 2 ans.
Nguyen c. R., 2010 QCCA 1053
·         Accusée trouvée coupable
·         Plus de 300 plants avec une installation sophistiquée.
·         Facteurs atténuants: mère de trois jeunes enfants; aucuns antécédents judiciaires.

·         Appel rejeté : 12 mois de prison; probation de 2 ans.
Nguyen c. R., 2007 QCCA 1500
·         444 plants
·         Facteurs atténuants : mère de trois enfants, démunie.
·         Facteurs aggravants : fléau dans la région; motivée par l’appât du gain.

·         Appel rejeté : 12 mois de prison.
Moreau c. R., 2008 QCCA 1508
·         Accusé âgé de 40 ans.
·         Accusations de production de cannabis et possession en vue d’en faire le trafic : 610 plants et 21 kg de cannabis, ainsi que 29 gr de cocaïne.
·         Facteurs atténuants : faible risque de récidive; aucuns antécédents judiciaires; plaide coupable; employé depuis 18 mois; père d’une jeune fille.
·         Facteurs aggravants : motivé par l’appât du gain.


·         Appel rejeté : 18 mois d’emprisonnement; 2 mois d’emprisonnement pour possession de crack en vue d’en faire le trafic.
Tran c. R., 2009 QCCA 527
·         216 plants
·         Facteurs aggravants : location d’un immeuble; planification et financement; remords semblent peu sincères.
·         Facteurs atténuants : aucuns antécédents judiciaires; plaide coupable; voulait libérer ses parents d’une dette de jeu.


·         Appel rejeté : emprisonnement de 9 mois, probation de 2 ans.
R. c. Beaudin et Pelland, 2012 QCCQ 9043
·         Accusés plaident coupable.
·         51 plants de cannabis, nombreuses boutures, 63 gr de haschich, 1 805 gr de cannabis.
·         Beaudin, âgée de 52 ans - responsable de la mise en place de la serre pour sa consommation personnelle. Peu d’antécédents judiciaires et a réduit sa consommation depuis son arrestation.
·         Pelland, âgé de 49 ans, grand consommateur de cocaïne, avant son arrestation. Il a un antécédent judiciaire de culture de cannabis en 1997 (a reçu une amende de 1 500 $); motivé par l’appât du gain.




·         Beaudin : 12 mois de prison.
·         Pelland : 18 mois de prison.
R. c. Parent, 2012 QCCQ 4916
·         Accusé âgé de 39 ans
·         725 plants dans le garage, 15 plants dans la résidence.
·         Facteurs atténuants : plaide coupable; reconnaissance de sa responsabilité; rapport prédécisionnel favorable; aucuns antécédents judiciaires; effet dissuasif du processus judiciaire.
·         Facteurs aggravants : quantité saisie; l’investissement pour l’équipement; sophistication de l’entreprise; planification et préméditation; durée de l’infraction; but de lucre; le fait d’avoir impliqué sa conjointe; sa consommation de cannabis.


·         12 mois de prison, 18 mois de probation.
R. c. Lanthier, 2012 QCCQ 875
·         755 plants, 616 boutures.
·         Plaide coupable aussi au vol d’électricité et d’eau de la municipalité et un bris d’engagement.
·         Facteurs aggravants : entreprise sophistiquée requérant un investissement important; motivé par l’appât du gain; risque de récidive est toujours présent à moyen terme; planification; financement, antécédents de l’accusé; et le fait qu’il était sous engagement lors de la commission du crime.
·         Facteurs atténuants : plaide coupable ; emploi légitime trouvé; potentiel de réhabilitation; collaboration avec la police; implication secondaire.


·         12 mois de prison pour la production et la possession en vue d’en faire le trafic.
·         3 mois pour les chefs de vol.
·         15 jours pour le bris de condition.
·         Probation de 18 mois avec conditions.

Décisions
Facteurs soulignés
Peine
DPCP c. Martin, 2016QCCQ 5592
·         Accusé âgé de 51 ans, père de quatre enfants, dont l’un d’eux nécessitait des soins de santé dispendieux.
·         260 plants
·         Facteurs atténuants : plaide coupable; aucuns antécédents judiciaires, collabore à l'enquête; rôle de simple jardinier; il avait accepté, pour rendre service à un ami, de prendre la responsabilité du compte d'Hydro-Québec; ignorait le détournement d'électricité et avait remboursé Hydro-Québec de la valeur détournée; rapport prédécisionnel hautement favorable avec conclusion de fort peu de risque de récidive; appât du gain mitigé par une période financière difficile et des coûts de soins de santé élevés pour un de ses enfants.
·         Facteur aggravant : utilisation de la propriété d’un tiers.


·         La peine minimale prévue à l’al. 7(2)(b)(iii) de la LRCDAS déclarée inconstitutionnelle.
·         Emprisonnement de 90 jours discontinus; probation de 2 ans; 125 heures de travaux communautaires; amende de 500 $.
R. c. Landry, 2016QCCQ 16626
·         Accusé âgé de 38 ans
·         408 plants
·         Facteurs aggravants : participation avec une organisation criminelle; but de lucre; fléau social.
·         Facteurs atténuants : aucuns antécédents judiciaires; plaide coupable; stabilité occupationnelle; risque de récidive improbable; prise de conscience profonde; pertes subies à la suite de son arrestation (pertes financières, perte de son emploi); situation familiale stable; effet dissuasif du processus judiciaire.





·         La peine minimale prévue à l’al. 7(2)(b)(iii) de la LRCDAS déclarée inconstitutionnelle.
·         Emprisonnement de 90 jours discontinus; 2 ans de probation; 240 heures de travaux communautaires; don de 5 000 $.
R. v. Pham, 2016 ONSC 5312
·         Accusée âgée de 45 ans déclarée coupable
·         1 110 plants
·         Facteurs aggravants : l’étendue de l’opération; appât du gain; danger pour le public créé par la production installée dans un bloc-appartements; dommages causés à l’appartement.
·         Facteurs atténuants : aucuns antécédents judiciaires; mère de deux enfants; souffre d’un traumatisme psychologique depuis son arrestation; rôle limité dans l’opération; longs délais dans le dossier qui ne sont pas imputables à la défense.

·         Les peines minimales prévues aux al. 7(2)(b)(v) et (vi) de la LRCDAS sont déclarées inconstitutionnelles.
·         10 mois de prison; probation de 18 mois.
R. v. Nguyen, 2013 OJ 2688
·         Accusée âgée de 45 ans, mère de quatre enfants.
·         136 plants
·         Plaide coupable aux infractions de production, possession de marijuana en vue d’en faire le trafic et vol d’électricité.
·         Facteurs aggravants : antécédent de production de marijuana en 2102, pour lequel elle a reçu une peine de 15 mois avec sursis; crime commis pendant ce sursis, en présence de ses enfants et malgré leurs protestations; plantation sophistiquée; motivée par le lucre.

·         4 ans concurrents pour les chefs de production et possession en vue d’en faire le trafic; 2 ans concurrents  pour le vol.
R. v. Hanna, 2015, BCSC 986
·         Accusé âgé de 38 ans
·         Plus de 1 300 plants
·         Facteurs atténuants : aucuns antécédents judiciaires; remords et conscientisation; plaide coupable.
·         Facteurs aggravants : l’étendue et le caractère sophistiqué de la plantation; motivé par l’appât du gain; plantation située dans un quartier résidentiel; vol d’eau et d’électricité.



·         Contestation de la constitutionnalité de l’al. 7(2)(b)(v) de la LRCDAS
·         La fourchette, sans égard à la peine minimale, aurait été de 9 à 15 mois de prison.
·         La peine de 2 ans n’est pas exagérément disproportionnée.
R. v. Hofer, 2016 BCSC 1442
·         Accusé âgé de 41 ans
·         1 628 plants
·         Facteurs atténuants : plaide coupable; peu d’antécédents judiciaires (le dernier remonte à 1997, d’une gravité moindre); rapport prédécisionnel favorable.
·         Facteurs aggravants : âge mûr de l’accusé, motivé par l’appât du gain; choix délibéré de participer à une production à grande échelle.


·         Contestation de la constitutionalité de l’al.7(2)(b)(v) de la LRCDAS 
·         La peine minimale ne contrevient pas à l’article 12 de la Charte : peine de 2 ans imposée.
R. v. Li, 2016 ONSC 1757
·         Accusé âgé de 28 ans
·         475 plants
·         Facteurs aggravants : le caractère sophistiqué de la plantation.
·         Facteurs atténuants : rôle limité; aucuns antécédents judicaires; il est le soutien familial; l’infliction de la peine minimale mènerait à sa déportation et à celle de sa conjointe.

·         Contestation de la constitutionnalité de la peine minimale prévue à l’al. 7(2)(b)(iii) de la LRCDAS.
·         La peine appropriée, en absence de la peine minimale obligatoire, aurait été de 6 mois moins un jour, compte tenu du statut précaire de l’accusé.
La peine minimale de 12 mois, quoique sévère, n’est pas exagérément disproportionnée.

R. v. Landry, 2017 QCCQ 3468
·         Accusé âgé de 49 ans
·         318 plants, 22 sacs de ½ livre, et plus de 30 kg de cannabis, ainsi qu’une arme à feu à autorisation restreinte.
·         Facteurs atténuants : plaide coupable; aucuns antécédents judiciaires; s’est remis sur le plan professionnel; actif tant pour son employeur que pour la société.
·         Facteurs aggravants : motivé par l’appât du gain; regrets ne semblent pas sincères.


·         Contestation de la constitutionnalité des articles 7(2)(b)(iii) et (iv) de la LRCDAS.
·         Peine minimale de 18 mois est appropriée en l’espèce.

La norme d'appréciation de la raisonnabilité des verdicts en appel

Richard c. R., 2015 QCCA 1523 (CanLII)

Lien vers la décision

[22]        Les trois questions litigieuses que soulève l’appelant peuvent être fusionnées en une seule qui cible la raisonnabilité des verdicts prononcés.
[23]        L’article 686(1)a)i) C.cr. prévoit qu’une cour d’appel peut, lors d’un appel portant sur une déclaration de culpabilité, accueillir l’appel et infirmer le verdict pour le motif qu’il est déraisonnable ou qu’il ne peut s’appuyer sur la preuve.


[24]        La juge McLachlin (alors juge puînée) écrivait dans R. c. W. (R.) :
Il est donc clair que, pour déterminer si le juge des faits aurait pu raisonnablement conclure à la culpabilité de l’accusé hors de tout doute raisonnable, la Cour d’appel doit réexaminer et du moins, dans une certaine mesure, réévaluer l’effet de la preuve.
[25]        Il y a lieu de retenir des arrêts plus récents de la Cour suprême dans R. c. SinclairR. c. R. (P.) et R. c. W. (H.), les enseignements suivants :
1.         Le tribunal d’appel doit d’abord déterminer si le verdict est un de ceux qu’un jury ayant reçu les directives appropriées et agissant de manière judiciaire aurait rendus au vu de l’ensemble de la preuve;
2.         Le verdict est déraisonnable si le juge des faits a tiré une inférence essentielle au verdict qui est clairement contredite par la preuve invoquée à l’appui de l’inférence;
3.         Le verdict est déraisonnable si le raisonnement qui le soutient est à ce point irrationnel ou incompatible avec la preuve qu’il a pour effet de vicier le verdict;
4.         Il faut faire preuve d’une grande déférence dans l’appréciation de la crédibilité faite en première instance lorsqu’il s’agit de déterminer si le verdict est déraisonnable;
5.         La cour d’appel qui se prononce sur un verdict de culpabilité doit dûment prendre en compte la position privilégiée des juges des faits qui ont assisté au procès et entendu les témoignages et ne doit pas conclure au verdict déraisonnable pour le seul motif qu’elle entretient un doute raisonnable après l’examen du dossier. Il doit plutôt examiner et analyser la preuve et se demander, à la lumière de son expérience, si l’appréciation judiciaire des faits exclut la déclaration de culpabilité.
[26]        Dans l’arrêt unanime Pardi c. R., notre collègue, Yves-Marie Morissette, écrivait relativement aux paramètres d’intervention d’une cour d’appel lorsque le moyen d’appel est celui du verdict déraisonnable :
[28]      À cette étape, je résume ce qui précède afin de bien situer dans leur cadre les questions à résoudre. Un verdict déraisonnable ou qui ne peut s’appuyer sur la preuve est réformable en appel, et la question de savoir s’il peut être qualifié de tel en est une de droit. Il sera ainsi qualifié s’il s’agit d’un verdict qu’un jury qui aurait reçu les directives appropriées et aurait agi de manière judiciaire n’aurait pu raisonnablement rendre. Dans le cas d’un verdict prononcé par un juge seul, une cour d’appel peut tenir compte des motifs exprimés par le juge pour statuer sur le caractère raisonnable de son verdict, ce qui accroît quelque peu la portée de l’examen à effectuer. Ainsi, une inférence ou une conclusion de fait essentielle au verdict, mais qui est clairement contredite par la preuve à son appui, ou dont on démontre l’incompatibilité avec une preuve qui n’est ni contredite par d’autres éléments de preuve ni rejetée par le juge, autorise une cour d’appel à casser le verdict qu’elle sous-tend au motif qu’il est déraisonnable. Cela ne va pas jusqu’à permettre aux juges d’une cour d’appel de considérer qu’ils ont « le droit d’avoir une perception subjective de la preuve et [le droit] de se demander s’ils sont convaincus du caractère inattaquable du verdict ». Un doute persistant peut justifier un examen plus approfondi de la preuve pour déterminer si, en effet, le verdict est déraisonnable selon la norme que je viens de rappeler. Cela vaut pour le verdict d’un jury comme pour celui d’un juge siégeant seul mais examiné dans ce second cas à la lumière des motifs prononcés par le juge. En tout état de cause, cependant, une cour d’appel n’apporte rien de particulier à l’évaluation de la preuve lorsque le juge expose des motifs de jugement détaillés.

mardi 10 octobre 2017

Ce qu'on entend, en droit, par la garde et le contrôle d’un véhicule

Scazzosi c. R., 2015 QCCS 111 (CanLII)

Lien vers la décision

[14]        Le Code criminel prévoit à l’art. 258(1)a) que si la preuve établit que l’accusé occupait la place du conducteur, cette preuve suffit à établir qu’il a la garde et le contrôle du véhicule. Mais si la preuve n’est pas concluante sur ce point, alors la poursuite doit faire la preuve que l’accusé avait la garde ou le contrôle du véhicule autrement.
[15]        Ainsi, la question de la garde ou du contrôle du véhicule s’est posée suite à la conclusion du juge d’instance que l’appelant a soulevé un doute quant à savoir s’il occupait la place du conducteur à l’arrivée des policiers.
[16]        C’est l’arrêt R. c. Boudreault 2012 CSC 56 (CanLII) de la Cour suprême du Canada qui a défini ce qu'on entend, en droit, par la garde et le contrôle d’un véhicule. Le juge d’instance s’y réfère à bon droit en citant les passages suivants de cette décision:
[9] Pour les motifs qui suivent, j’estime que, pour avoir « la garde ou le contrôle » au sens où il faut l’entendre pour l’application du par. 253(1) du Code criminel, il faut (1) une conduite intentionnelle à l’égard du véhicule; (2) par une personne dont la capacité de conduire est affaiblie ou dont l’alcoolémie dépasse la limite légale; (3) dans des circonstances entraînant un risque réaliste, et non une infimepossibilité, de danger pour autrui ou pour un bien.
(…)
[41] Un risque réaliste que le véhicule soit mis en mouvement constitue un risque réaliste de danger, cela va de soi.  Ainsi, l’intention de mettre le véhicule en mouvement suffit à elle seule à créer le risque de danger que vise l’infraction de garde ou de contrôle.  Par contre, l’accusé qui convainc le tribunal qu’il n’avait pas pareille intention ne sera pas forcément acquitté. En effet, la personne trouvée ivre, assise à la place du conducteur et capable de mettre le véhicule en mouvement — même sans en avoir l’intention à ce moment‑là — pourrait néanmoins présenter un risque réaliste de danger.
[42] En l’absence d’une intention concomitante de conduire, il peut survenir un risque réaliste de danger d’au moins trois façons.  D’abord, une personne ivre qui, initialement, n’a pas l’intention de conduire peut, ultérieurement, alors qu’elle est encore intoxiquée, changer d’idée et prendre le volant.  Ensuite, une personne ivre assise à la place du conducteur peut, involontairement, mettre le véhicule en mouvement.  Enfin, par suite de négligence ou d’un manque de jugement ou autrement, un véhicule stationnaire ou qui n’est pas en état de fonctionner peut mettre des personnes ou des biens en danger.
[17]        Puis, analysant la preuve faite devant lui et appliquant le droit à cette preuve il s’exprime ainsi :
Alors, dans le présent dossier, l’accusé n’a pas témoigné qu’il n’avait pas l’intention de conduire le véhicule d’aucune façon, il a plutôt témoigné à l’effet contraire, à l’effet que du moment où le véhicule pourrait être sorti de l’enlisement dans lequel il était, son intention était de conduire le véhicule et de retourner chez lui. 
Alors, cette preuve et cette déclaration de l’accusé font en sorte que l’accusé a eu une conduite intentionnelle à l’égard du véhicule. La preuve révèle, je le répète, qu’il était la seule personne présente, qu’il avait les clés du véhicule sur lui et que son intention était de conduire le véhicule du moment qu’il sortirait de l’enlisement dans lequel il était. Et toute cette conduite intentionnelle à l’égard du véhicule était faite alors qu’il avait une alcoolémie qui dépassait la limite légale.
En conséquence, comme l’accusé avait comme intention de mettre le véhicule en mouvement, qu’il avait à ce moment-là plus que le taux légal d’alcoolémie, il créait du fait même le risque de danger que vise l’infraction de garde et de contrôle.  
[18]        La question de savoir si l’appelant avait la garde ou le contrôle de son véhicule est une question de fait, comme l’a dit le juge Kasirer de la Cour d’appel du Québec dans Scott Hugues v Her Majesty the Quee2014 QCCA 1095 (CanLII)n, 500-10-005599-145, 28 mai 2014 :
[5] In my view, despite its formulation, the first ground of appeal seeks to raise questions of fact relating to whether or not the petitioner had care and control of the vehicle in the circumstances. In particular, the petitioner seeks to challenge the finding of the existence of a realistic risk of danger to persons or property given that the petitioner was « merely present » in the back seat of a car and had no intention to drive. I am of the view that this ground fails to disclose a question of law.
[6] It is true that the presence of a realistic risk of danger to persons or property is a legally required element of the offence as set out in Boudreault, para. (33). The judge of the Superior Court made no mistake in this regard, recalling correctly, in my view, the law on point.  
[19]        Plus loin le juge Kasirer ajoute :
[8] As the Supreme Court reminds us at para. (50) of Boudreault, « (t)he existence or not of a realistic risk of danger is a finding of fact ». Courts can be expected to come to different conclusions, on the facts, as to whether such a risk exists.    
[20]        L’appelant plaide qu’il ne représentait pas un danger ou une menace pour autrui et qu’il se trouvait à l’abri dans un autre véhicule. Par cet argument, il demande à la Cour d'intervenir sur les faits et de substituer son évaluation de la preuve à celle du juge d’instance et de conclure qu'il n'avait pas la garde et le contrôle de son véhicule.

L’al. 258 (1) c) du Code criminel et le prélèvement des échantillons d’haleine dès que matériellement possible

Simard c. R., 2016 QCCS 2712 (CanLII)

Lien vers la décision

[17]        Dans une affaire de conduite avec un taux d’alcoolémie dépassant la limite légale, la poursuite doit notamment prouver que les résultats des analyses obtenus au moyen de l’alcootest sont exacts et qu’ils donnent une indication de l’alcoolémie au moment de la commission de l’infraction.
[18]        L’al. 258 (1) c) du Code criminel prévoit une présomption pour faciliter la tâche de la poursuite à cet égard. Si la poursuite établit les faits énoncés aux sous-al. (ii) à (iv) de cette disposition, dont le prélèvement des échantillons d’haleine dès que matériellement possible selon le sous-al. (ii), les résultats des analyses sont tenus comme démontrant l’alcoolémie de l’accusé tant au moment des analyses qu’au moment où l’infraction a été commise, ceci à moins que l’accusé ne présente une preuve, avec certaines restrictions, soulevant un doute raisonnable sur le bon fonctionnement  ou l’utilisation correcte de l’alcootest (R. c. St-Onge Lamoureux2012 CSC 57 (CanLII)[2012] 3 RCS 187R. c. Gibson2008 CSC 16 (CanLII)[2008] 1 RCS 397R. c. Boucher2005 CSC 72 (CanLII)[2005] 3 RCS 499R. c. St. Pierre1995 CanLII 135 (CSC)[1995] 1 RCS 791).
[19]        Les exigences préalables à l’application de la présomption se lisent comme suit:
(ii) chaque échantillon a été prélevé dès qu’il a été matériellement possible de le faire après le moment où l’infraction aurait été commiseet, dans le cas du premier échantillon, pas plus de deux heures après ce moment, les autres l’ayant été à des intervalles d’au moins quinze minutes,
(iii) chaque échantillon a été reçu de l’accusé directement dans un contenant approuvé ou dans un alcootest approuvé, manipulé par un technicien qualifié,
(iv) une analyse de chaque échantillon a été faite à l’aide d’un alcootest approuvé, manipulé par un technicien qualifié;
[Soulignement ajouté]
[20]        Bien évidemment, le fardeau d’établir les prérequis à l’application de la présomption, mentionnés aux sous-al. 258 (1) c) (ii) à (iv), incombe à la poursuite (R. c. Burwell2015 SKCA 37 (CanLII), par. 93; R. c. O’Meara2012 ONCA 420 (CanLII), par. 28; R. c. Vanderbruggen (2006), 2006 CanLII 9039 (ON CA)206 CCC (3d) 489 (CAO), par. 8 à 17; R. c. Maroussis2016 QCCS 209 (CanLII), par. 29 et 30).
[21]        Ainsi, contrairement à ce qu’a avancé l’intimée, une requête en exclusion de preuve en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés n’est pas requise lorsqu’il s’agit de décider de l’application de la présomption eu égard aux exigences préalables mentionnées aux sous-al. 258 (1) c) (ii) à (iv) du Code criminel. En effet, dans ce contexte, l’enjeu n’est pas l’admissibilité en preuve des résultats de l’alcootest mais plutôt les effets de ceux-ci. Il n’est pas non plus question de déterminer si les échantillons d’haleine ont été obtenus en vertu d’un ordre valide au sens du par. 254 (3) du Code et des droits garantis par la Charte, c’est-à-dire un ordre qui est notamment fondé sur des « motifs raisonnables de croire ». Il y a donc lieu de distinguer la situation sous études de celles examinées dans les arrêts R. c. Anderson,2013 QCCA 2160 (CanLII)R. c. Forsythe2009 MBCA 123 (CanLII); et R. c. Charrette2009 ONCA 310 (CanLII).
[22]        L’arrêt ontarien Vanderbruggen, précité, aux par. 12 et 13, expose, dans les termes suivants, le droit relatif à l’exigence de la prise d’échantillons d’haleine dès que matériellement possible:
[12]      That leaves the question that is at the heart of this appeal—the meaning of as soon as practicable.  Decisions of this and other courts indicate that the phrase means nothing more than that the tests were taken within a reasonably prompt time under the circumstances. (…) There is no requirement that the tests be taken as soon as possible. The touchstone for determining whether the tests were taken as soon as practicable is whether the police acted reasonably.  (…)
[13]      In deciding whether the tests were taken as soon as practicable, the trial judge should look at the whole chain of events bearing in mind that the Criminal Code permits an outside limit of two hours from the time of the offence to the taking of the first test.   The “as soon as practicable” requirement must be applied with reason.  In particular, while the Crown is obligated to demonstrate that—in all the circumstances—the breath samples were taken within a reasonably prompt time, there is no requirement that the Crown provide a detailed explanation of what occurred during every minute that the accused is in custody. (…)
[Citations omises]

[26]        Ce moyen est sans fondement. Selon la preuve, les policiers ont fait remorquer le véhicule de l’appelante pour les deux motifs invoqués ci-dessus. Une lecture attentive du jugement de première instance ne révèle aucune erreur sur ce point. De toute façon, l’un et l’autre des motifs de remorquage étaient raisonnables et, en définitive, ils étaient tous deux imputables à l’appelante. Par ailleurs, le juge examine avec justesse les agissements des policiers à cet égard. Dans les circonstances de la présente affaire, l’attente de la dépanneuse était raisonnable. De plus, il fallait prendre le temps nécessaire pour inspecter le véhicule et préparer la documentation requise pour le remorquage et le remisage du véhicule.
[27]        Ensuite, l’appelante plaide que le juge a commis une erreur en considérant que le délai total écoulé jusqu’à la prise du premier échantillon d’haleine était bien en deçà de la limite de deux heures fixée par le sous-al. 258 (1) c) (ii). Elle soutient que l’exigence de prélever les échantillons d’haleine dès que matériellement possible et celle du délai maximal de deux heures sont bien distinctes et qu’elles ne doivent pas être amalgamées.
[28]        Dans son jugement, le juge du procès ne confond aucunement les exigences distinctes du sous-al. 258 (1) c) (ii). De plus, il est tout à fait approprié de considérer la limite de deux heures, parmi l’ensemble des circonstances, pour décider du caractère raisonnable du délai. Dans Vanderbruggen, précité, au par. 13, il est précisément affirmé que le juge doit avoir à l’esprit la limite de deux heures lorsqu’il cherche à déterminer si le test a été effectué dès que matériellement possible: « In deciding whether the tests were taken as soon as practicable, the trial judge should look at the whole chain of events bearing in mind that the Criminal Code permits an outside limit of two hours from the time of the offence to the taking of the first test ».  
[29]        Enfin, l’appelante soutient que le témoignage du policier n’explique pas avec suffisamment de précision le délai survenu entre l’arrestation et le début de la prise des échantillons d’haleine pour les fins de l’alcootest. Elle souligne certaines lacunes dans le récit de l’agent. En substance, elle plaide qu’il était déraisonnable de conclure que le test a été fait dès que matériellement possible en se fondant sur la preuve présentée au procès par l’intimée.
[30]        Il est vrai que le policier a été incapable d’expliquer en détail certains aspects du déroulement des évènements. Cependant, comme le mentionne l’arrêt Vanderbruggen, précité, au par. 13, la poursuite n’avait pas à présenter une preuve parfaite: « there is no requirement that the Crown provide a detailed explanation of what occurred during every minute that the accused is in custody ».
[31]        Bien que l’exigence de la prise d’échantillons d’haleine dès que matériellement possible soit une norme juridique dont l’interprétation soulève une question de droit, l’appréciation de la preuve relative à son application dans un cas donné soulève une question de fait qui doit être examinée avec déférence en appel (R. c. Vanderbruggen, précité, par. 14; R. c. Burwell, précité, par. 87; R. c. Duong2015 ONSC 5676 (CanLII), par. 14).

vendredi 29 septembre 2017

Immobilisation d’un véhicule pour vérification documentaire

Malenfant c. R., 2006 QCCS 7246 (CanLII)

Lien vers la décision

[18]            Lorsqu’il est rejoint par les policiers, l’appelant a déjà immobilisé son véhicule sur un terrain privé et en est même descendu.  En pareilles circonstances, les tribunaux reconnaissent le pouvoir d’interpellation de l’agent de la paix, indépendamment du fait que le véhicule soit en mouvement ou non.
[19]            En l’espèce, les actions subséquentes de l’agente Beaulieu sont dictées par les articles du Code de sécurité routière qui obligent le conducteur à être porteur de certains documents qu’il est tenu d’exhiber à l’agent de la paix sur demande.  Les articles 61(2)65 et 97stipulent les exigences de la loi relativement au permis de conduire pendant que les articles 35(1) et 36 énoncent des impératifs à peu près similaires relativement aux certificats d’immatriculation et d’assurance:
« 65.     Pour conduire un véhicule routier sur un chemin public, sur les chemins soumis à l’administration du ministère des Ressources naturelles ou entretenus par celui-ci, sur un chemin privé ouvert à la circulation publique des véhicules routiers ainsi que sur les terrains de centres commerciaux et autres terrains où le public est autorisé à circuler, une personne doit être titulaire d’un permis de la classe appropriée à la conduite de ce véhicule tel que déterminé par règlement et comportant, le cas échéant, les mentions prescrites par ce règlement.
97.        La personne qui conduit un véhicule routier ou qui en a la garde ou le contrôle doit avoir avec elle son permis.
            En outre des chemins publics, le présent article s’applique sur les chemins soumis à l’administration du ministère des Ressources naturelles ou entretenus par celui-ci, sur les chemins privés ouverts à la circulation publique des véhicules privés ouverts à la circulation publique des véhicules routiers ainsi que sur les terrains de centres commerciaux et autres terrains où le public est autorisé à circuler.
61.        La Société délivre les permis suivants autorisant la conduite de véhicules routiers : le permis d’apprenti-conducteur, le permis probatoire, le permis de conduire et le permis restreint.
            Le titulaire d’un permis n’est tenu de produire celui-ci qu’à la demande d’un agent de la paix ou de la Société et à des fins de sécurité routière uniquement.
35.               La personne qui conduit un véhicule routier ou qui en a la garde ou le contrôle doit avoir avec elle le certificat d’immatriculation du véhicule, sauf dans les dix jours de l’immatriculation, ainsi que l’attestation d’assurance ou de solvabilité prévue par la Loi sur l’assurance automobile (chapitre A-25).
36.               La personne qui conduit un véhicule routier ou qui en a la garde ou le contrôle doit, à la demande d’un agent de la paix, lui remettre pour examen les pièces visées à l’article 35. »
(Nos soulignés)
[20]            Le Code de la sécurité routière (L.R.Q.c, C-24.2) précise de plus, à son article premier, que ces dispositions régissent l’utilisation des véhicules sur les chemins publics et sur certains chemins et terrains privés dont ne fait pas partie l’allée du 65 Taché.
[21]            Pour recourir au pouvoir d’immobilisation au hasard d’un véhicule, l’agent de la paix n’est pas tenu d’avoir des motifs raisonnables et probables de croire à la commission d’une infraction au Code de sécurité routière.
[22]            En sauvegardant les dispositions législatives qui autorisent les agents de la paix à intercepter au hasard des automobilistes, à des fins de vérification, la Cour suprême constatait que, bien que ces interpellations violaient les garanties constitutionnelles de l’article 9 de la Charte canadienne des droits et libertés, ces atteintes étaient justifiables dans une société libre et démocratique comme la nôtre.
[23]            Monsieur le juge Cory écrit, dans l’arrêt Ladouceur :

« Reconnaître la validité de la vérification de routine au hasard, c’est se rendre à la réalité.  Dans la régions rurales, il sera impossible de mettre sur pied un programme structuré efficace.  Pourtant, les infractions en matière de circulation dans ces régions entraînent des conséquences tout aussi tragiques que dans les plus grands centres urbains.
(…)
Ceux qui conduisent des véhicules automobiles sur la route n’ont aucun droit civil de le faire.  Ils ne peuvent le faire que s’ils sont titulaires d’un permis à cette fin.  Cette exigence ne constitue pas une atteinte aux droits civils.  Il n’y a aucune raison pour laquelle un conducteur d’un véhicule automobile sur la route ne puisse être tenu de démontrer à l’agent d’un organisme chargé d’appliquer la loi qu’il possède un permis à cette fin.  Si la police a le pouvoir d’interroger le conducteur d’un véhicule automobile pour vérifier son droit de le conduire, le certificat d’immatriculation du véhicule et le nom et l’adresse du propriétaire et du conducteur, tous les pouvoirs d’arrestation draconiens dont nous avons discuté paraîtraient peu ou pas nécessaires.
Bien que le concept de ce qui peut constituer une violation des droits civils puisse être quelque peu différent de nos jours, la qualification par le juge McRuer de la nature de la conduite et la nécessité de la contrôler sont aussi valides aujourd’hui qu’elles l’étaient à ce moment-là.  Afin d’assurer un contrôle approprié, la société doit être en mesure d’exiger que des interpellations au hasard soient effectuées sans motif précis et en dehors de tout programme formel.
(Nos soulignés).
[24]            L’agent de la paix peut donc, ainsi, intercepter un véhicule de façon aléatoire et exiger de son conducteur de lui exhiber ses permis de conduire et certificats d’immatriculation ou d’assurance afin de s’assurer que l’usager de la route est en droit d’y opérer un véhicule qui répond à toutes les exigences de la loi et qu’il a avec lui tous les documents requis à cette fin.  L’automobiliste doit alors s’exécuter sous peine de sanctions pénales.
[25]            En agissant de cette façon, le policier se conforme non seulement aux pouvoirs que lui confère le Code de sécurité routière mais répond également à la mission qui est sienne en vertu de l’article 39.1 de la Loi de police (L.R.Q. c. P-19), soit celle de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité du public dans tout le territoire du Québec et d’y prévenir le crime et les infractions aux lois du Québec.
[26]            Monsieur le juge Cory exprime avec justesse, toujours dans l’arrêt Ladouceur, ce qui soutend un tel principe et qui justifie les interceptions aléatoires à des fins de vérifications documentaires :
« L’interception et la vérification des véhicules constituent le seul moyen de vérifier le bon fonctionnement des freins et des ceintures de sécurité.  Il est encore plus important de déterminer si un conducteur possède un permis et des assurances.  Encore une fois, cela ne peut se faire qu’en interceptant des véhicules.  Les statistiques démontrent que le conducteur sans permis constitue une menace sur la route.  En outre, un tel conducteur démontre un mépris de la loi et de l’irresponsabilité ainsi qu’une tendance marquée à être impliqué dans des accidents graves.  Tous ceux qui circulent sur les routes ont intérêt à ce que les conducteurs sans permis soient arrêtés et chassés de la route.  De même, la société dans son ensemble a intérêt à réduire les frais des services médicaux, d’hospitalisation et de réadaptation qui doivent être assurés aux victimes d’accidents ainsi que le préjudice émotionnel causé à leur famille.  Il est certain que le remède préventif que prévoit le par. 189a(1) et qui consiste à obliger les conducteurs à s’arrêter est préférable à la tragédie terminale incurable que représentent la victime d’un accident mortel et la victime handicapée de façon permanente.  Il vaut certainement mieux permettre les interpellations au hasard et empêcher qu’un accident ne survienne que refuser le droit d’interpeller et confirmer de façon répétée les tristes statistiques à la morgue et à l’hôpital. »

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun

R. v. Atwell, 2022 NSSC 304 Lien vers la décision [ 8 ]              The Crown has a duty to make disclosure of all relevant information to ...