José c. R., 2023 QCCQ 4460
[108] Le paragraphe 606(1.1) C.cr. stipule que le tribunal ne peut accepter un plaidoyer de culpabilité que s’il est convaincu que les conditions suivantes sont remplies:
a) le prévenu fait volontairement le plaidoyer;
b) le prévenu :
(i) comprend que, en le faisant, il admet les éléments essentiels de l’infraction en cause,
(ii) comprend la nature et les conséquences de sa décision,
(iii) sait que le tribunal n’est lié par aucun accord conclu entre lui et le poursuivant;
c) les faits justifient l’accusation.
[109] Un plaidoyer de culpabilité doit être libre, sans équivoque et éclairé. Et pour que le plaidoyer soit éclairé, l'accusé doit être au courant de la nature des allégations faites contre lui, ainsi que des effets et des conséquences de son plaidoyer[27].
[110] L’accusé a le fardeau de convaincre le Tribunal que son plaidoyer n’était pas valide[28] selon la prépondérance des probabilités[29].
[111] Un plaidoyer de culpabilité enregistré par un accusé en salle d’audience devant le juge, alors qu’il est représenté par avocat, est présumé volontaire[30]. Il y a alors présomption que l’accusé connaissait la nature et les conséquences de son plaidoyer[31]. En absence de preuve contraire, le Tribunal présumera que l’avocat a pris les mesures nécessaires pour s’assurer que l’accusé comprenne la nature et les conséquences de son plaidoyer [32].
[112] Le cadre d'analyse pour l'annulation d'un plaidoyer de culpabilité non éclairé comporte deux volets distincts: (1) l'accusé a été mal informé au sujet de renseignements pouvant entraîner des conséquences suffisamment graves; (2) ce manque de renseignements donne lieu à un préjudice[33].
[113] Quant à une conséquence indirecte juridiquement pertinente, l'accusé doit tout d'abord établir qu'il n'était pas au courant de cette conséquence au moment de plaider coupable[34].
[114] L’accusé qui souhaite retirer son plaidoyer de culpabilité doit prouver l'existence d'un préjudice au moyen d'un affidavit établissant la possibilité raisonnable qu'il aurait (1) enregistré un plaidoyer différent ou (2) plaidé coupable, mais à d'autres conditions[35]. Dans ce dernier cas, un plaidoyer ne peut être retiré que si un accusé affirme de façon crédible qu'à l'étape de la négociation menant au plaidoyer, il aurait insisté pour que celui-ci soit assorti d'autres conditions sans lesquelles il n'aurait pas plaidé coupable[36]. Bref, l'accusé doit formuler une façon d'agir clairement différente de celle qu'il a suivie, afin de justifier l'annulation d'un plaidoyer, et il doit convaincre la cour de l'existence d'une possibilité raisonnable qu'il aurait agi de cette façon[37].
[115] Pour établir l'existence d'un préjudice, l'accusé qui souhaite retirer son plaidoyer de culpabilité doit prouver qu'il est raisonnablement possible que, s'il avait été informé de la conséquence juridiquement pertinente, il aurait enregistré un plaidoyer différent ou plaidé coupable à d'autres conditions[38].
Bref, une fois prouvée sa méconnaissance d’une conséquence indirecte, mais juridiquement pertinente, méconnaissance qui entache le caractère éclairé du plaidoyer, l’accusé doit donc également démontrer l’existence d’un préjudice en établissant la « possibilité raisonnable qu’[il aurait] soit (1) opté pour un procès et plaidé non coupable, soit (2) plaidé coupable, mais à d’autres conditions. Et, ajoutent les juges majoritaires dans Wong, « [p]our évaluer la véracité de cette prétention, les cours peuvent examiner des éléments de preuve concomitants et objectifs. L’analyse est donc subjective vis-à-vis de l’accusé, mais permet d’évaluer objectivement la crédibilité de la prétention subjective avancée par l’accusé ».
[117] Il existe une forte présomption que la conduite de l’avocat se situe à l’intérieur du large éventail de l’assistance professionnelle raisonnable et il incombe à l’accusé de démontrer que les actes ou omissions reprochées à l’avocat ne découlaient pas de l’exercice d’un jugement professionnel raisonnable[40].
[118] Dans Lajoie c. R., la Cour d’appel du Québec explique le fardeau de la partie qui invoque l'assistance inadéquate de l'avocat :
La partie qui invoque un tel moyen doit faire la preuve prépondérante des gestes qu'elle reproche à son avocat. Il lui faut ensuite établir que ces gestes se situent à l'extérieur du vaste éventail de la représentation adéquate. Enfin, il est nécessaire de démontrer que cette assistance inadéquate a été source d'une erreur judiciaire, soit parce qu'elle a eu pour effet de compromettre l'équité du procès ou soit parce que, sans cette assistance inadéquate, il existe une possibilité raisonnable que le verdict aurait été différent.[41]
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