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dimanche 3 août 2025

Droit applicable à l'infraction au profit d’une organisation criminelle

Drouin c. R., 2020 QCCA 1378 

Lien vers la décision


[193]   Le paragr. 467.1(1) C.cr. définit l’expression « organisation criminelle », alors que l’art. 467.12 C.cr. prévoit l’infraction de gangstérisme :

 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

[…]

 

organisation criminelle Groupe, quel qu’en soit le mode d’organisation :

 

a) composé d’au moins trois personnes se trouvant au Canada ou à l’étranger;

 

b) dont un des objets principaux ou une des activités principales est de commettre ou de faciliter une ou plusieurs infractions graves qui, si elles étaient commises, pourraient lui procurer — ou procurer à une personne qui en fait partie — , directement ou indirectement, un avantage matériel, notamment financier.

 

La présente définition ne vise pas le groupe d’individus formé au hasard pour la perpétration immédiate d’une seule infraction. (criminal organization)

 

[…]

 

467.1 (1) The following definitions apply in this Act.

 

 

 

criminal organization means a group, however organized, that

 

 

(a) is composed of three or more persons in or outside Canada; and

 

 

(b) has as one of its main purposes or main activities the facilitation or commission of one or more serious offences that, if committed, would likely result in the direct or indirect receipt of a material benefit, including a financial benefit, by the group or by any of the persons who constitute the group.

 

 

It does not include a group of persons that forms randomly for the immediate commission of a single offence. (organisation criminelle)

 

 

[…]

467.12 (1) Every person who commits an indictable offence under this or any other Act of Parliament for the benefit of, at the direction of, or in association with, a criminal organization is guilty of an indictable offence and liable to imprisonment for a term not exceeding fourteen years.

 

(2) In a prosecution for an offence under subsection (1), it is not necessary for the prosecutor to prove that the accused knew the identity of any of the persons who constitute the criminal organization.

 

[194]   En vertu de ces dispositions, la poursuivante doit démontrer les éléments suivants hors de tout doute raisonnable :

1.   La commission d’une infraction sous-jacente;

2.   L’existence d’une organisation criminelle; et

3.   La connaissance subjective de l’accusé que l’infraction sous-jacente a été perpétrée au profit ou sous la direction de cette organisation ou en association avec elle.

[195]   Dans l’arrêt O'Reilly c. R.[188], notre collègue le juge Mainville fait une revue du droit applicable à cette infraction. Il écrit :

[169]   Pour constituer une « organisation criminelle », un « groupe » doit être « composé d’au moins trois personnes » et – même si ce n’est pas expressément énoncé au paragraphe 467.1 (1) – faire preuve d’une structure et d’un certain caractère continu, tel que le prévoit la définition exprimée à la Convention [des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée][189]. Ce sont ces éléments de structure et de continuité qui permettent de distinguer un simple complot impliquant trois personnes et plus d’une organisation criminelle et qui permettent ainsi d’éviter d’étendre indûment la portée des dispositions du Code criminel concernant de telles organisations.

[…]

[172]   Selon le paragraphe 467.1(1), l’organisation doit aussi avoir comme l’un de ses « objets principaux » ou une de ses « activités principales » le fait « de commettre ou de faciliter une ou plusieurs infractions graves qui, si elles étaient commises, pourraient lui procurer – ou procurer à une personne qui en fait partie –, directement ou indirectement, un avantage matériel, notamment financier ». La Cour d’appel de l’Ontario a récemment précisé dans R. v. Beauchamp que les adjectifs « principaux » et « principales » s’entendent dans un sens qualitatif et non pas nécessairement quantitatif; ainsi, selon le contexte, même si des activités licites sont principalement menées par l’organisation, cela n’empêche pas de qualifier comme « principales » les activités illicites si les circonstances s’y prêtent[190].

[…]

[173]   Les infractions graves de l’organisation doivent aussi « lui procurer — ou procurer à une personne qui en fait partie —, directement ou indirectement, un avantage matériel, notamment financier ». Il suffit qu’un seul membre de l’organisation reçoive un avantage matériel pour répondre à la définition.

[174]   Une des questions qui se posent en l’espèce est celle de savoir à quelles conditions une personne peut être considérée comme faisant partie d’une organisation criminelle. La question est importante puisque, selon le paragraphe 467.1 (1) du Code criminel, il ne peut y avoir d’organisation criminelle sans un groupe « composé d’au moins trois personnes ».

[175]   À cette fin, l’analyse doit porter sur les liens effectifs entre les prétendus membres du groupe. Ceux-ci doivent avoir des liens d’interdépendance au sein de l’organisation. Il n’est pas nécessaire que ce lien soit caractérisé par un rôle décisionnel au sein de l’organisation[191]. Néanmoins, les membres doivent jouer un rôle au sein de l’organisation établissant leur interdépendance et non pas être simplement associés à l’organisation[192] aux fins d’« une transaction mutuellement avantageuse entre deux parties qui n’[ont] aucun lien de dépendance »[193].

[176]   Certains facteurs peuvent être considérés à cet égard :

(a) nature du lien : la personne exerce-t-elle des fonctions bien déterminées sous le contrôle ou la direction d’un autre membre de l’organisation ou de concert avec celui-ci ou, au contraire, agit-elle avec une grande indépendance dénotant l’absence de lien de dépendance avec l’organisation?[194];

(b) degré de loyauté et d’engagement : la personne démontre-t-elle une certaine loyauté ou un certain engagement continu envers l’organisation ou, au contraire, sa participation est-elle ponctuelle?[195]; en effet, les liens entre les membres du groupe doivent normalement être « continus et organisés » puisque l’objet de la loi « consiste à identifier et à déstabiliser les groupes de trois personnes ou plus qui présentent un risque élevé pour la société en raison des liens continus et organisés entre leurs membres »[196];

(c) intérêt : la personne possède-t-elle un intérêt direct ou indirect dans la viabilité de l’organisation, notamment un intérêt financier?[197]

Ces facteurs ne sont ni cumulatifs ni limitatifs. C’est l’analyse de l’ensemble des circonstances qui permet de décider si une personne est membre d’une organisation criminelle.

[177]   Pour obtenir la condamnation d’un accusé en vertu de l’article 467.12 du Code criminel, le ministère public doit prouver, en sus de l’actus reus et de la mens rea de l’infraction sous-jacente, l’existence d’une organisation criminelle et la connaissance de l’accusé que l’infraction a été perpétrée au profit ou sous la direction de cette organisation ou en association avec elle. Cependant, il n’est pas nécessaire d’établir que l’accusé est effectivement membre de l’organisation criminelle, comme l’a confirmé le juge Fish dans R. c. Venneri : […]

[53]      L’expression « en association avec » doit être interprétée selon son sens ordinaire et dans le contexte de la disposition. En l’occurrence, elle est accompagnée des expressions « sous la direction » de et « au profit » de. Ces expressions ne s’excluent pas l’une l’autre. Au contraire, elles ont le même objectif et se chevauchent souvent dans leur application. Elles ont pour objet commun d’éliminer le crime organisé. À cette fin, elles ciblent spécifiquement les infractions qui sont liées aux organisations criminelles et en servent les intérêts.

[54]      Envisagée sous cet angle, l’expression « en association avec » vise les infractions qui servent, au moins dans une certaine mesure, les intérêts d’une organisation criminelle — même si elles ne sont commises ni sous la direction de l’organisation ni principalement à son profit. […]

[55]      L’expression « en association avec » exige un lien entre l’infraction sousjacente et lorganisation, par opposition à un simple lien entre laccusé et lorganisation : […]

[56]      Rappelons qu’un contrevenant peut commettre une infraction « en association avec » une organisation criminelle dont il n’est pas membre. Le fait d’être membre d’une organisation demeure toutefois un facteur pertinent pour déterminer si le lien requis entre l’infraction et l’organisation a été établi (voir Drecic, par. 3).

[57]      Le ministère public doit également démontrer que l’accusé faisait sciemment affaire avec une organisation criminelle. La réprobation sociale associée à l’infraction exige de l’accusé une mens rea subjective quant à son association avec l’organisation (voir Lindsay (2004 C.S.J.), par. 64). [198]

[Soulignements dans l’original; certains renvois omis]

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