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lundi 25 août 2025

L’élément matériel et moral de l’infraction de proférer une menace de causer la mort ou des lésions corporelles

R. c. Dufour, 2020 QCCA 1802

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[18]      L’appelante plaide que le juge a erré en concluant que les propos de l’intimé ne constituent pas une menace. Malgré la clarté des mots utilisés par l’intimé, le juge aurait spéculé sur leur sens et retenu qu’ils ont pu être prononcés à la manière d’une histoire, sans considérer le sens qu’une personne raisonnable aurait donné à ces propos.

[19]      L’infraction de proférer une menace de causer la mort ou des lésions corporelles est prévue à l’alinéa 264.1(1)aC.cr:

264.1 (1) Commet une infraction quiconque sciemment profère, transmet ou fait recevoir par une personne, de quelque façon, une menace :

a) de causer la mort ou des lésions corporelles à quelqu’un;

264.1 (1) Every one commits an offence who, in any manner, knowingly utters, conveys or causes any person to receive a threat

(a) to cause death or bodily harm to any person;

[20]      Dans l’arrêt McRae, la Cour suprême écrit que l’acte prohibé de l’infraction de proférer une menace sera prouvé si une personne raisonnable tout à fait consciente des circonstances dans lesquelles les mots ont été prononcés ou transmis les aurait perçus comme une menace de mort ou de lésions corporelles :

[11]  Le point de départ de l’analyse doit toujours être le sens ordinaire des mots proférés. Lorsqu’ils constituent manifestement une menace et qu’il n’y a aucune raison de croire qu’ils avaient un sens secondaire ou moins évident, il n’est pas nécessaire de pousser plus loin l’analyse. Toutefois, dans certains cas, le contexte révèle que des mots qui seraient à première vue menaçants ne constituent peutêtre pas des menaces au sens où il faut l’entendre pour l’application de l’al. 264.1(1)a) (voir, p. ex., O’Brien, par. 1012). Dans d’autres cas, des facteurs contextuels peuvent avoir pour effet d’élever au rang de menaces des mots qui seraient, à première vue, relativement anodins (voir, p. ex., R. c. MacDonald (2002), 2002 CanLII 14251 (ON CA), 166 O.A.C. 121, où les paroles proférées étaient [traduction] « t’es la prochaine »).

[…]

[15]  Par conséquent, pour l’application de ce critère objectif, bien que l’on puisse examiner le témoignage de personnes qui ont entendu la menace ou qui en ont été l’objet, la question relative à l’acte prohibé n’est pas de savoir si des personnes se sont effectivement senties menacées. Comme l’a dit la Cour d’appel de l’Ontario dans Batista, les opinions de témoins sont pertinentes pour l’application du critère de la personne raisonnable; toutefois, elles ne sont pas décisives, vu qu’elles équivalent à des opinions personnelles et [traduction] « ne satisf[ont] pas nécessairement aux exigences du critère juridique » (par. 26).

[16]  Pour conclure sur ce point, l’acte prohibé de l’infraction d’avoir proféré des menaces sera prouvé si une personne raisonnable tout à fait consciente des circonstances dans lesquelles les mots ont été proférés ou transmis les avait perçus comme une menace de mort ou de lésions corporelles.[6]

[21]      Le moyen de l’appelante est mal fondé.

[22]      Sa proposition est non seulement théorique, mais elle occulte l’appréciation de la preuve par le juge. Il n’est pas question ici d’une menace manifeste. Vu le contexte et le manque de fiabilité du témoignage de la plaignante, le juge conclut qu’une personne raisonnable, placée dans les mêmes circonstances, n’aurait pas perçu ces mots comme une menace, mais plutôt comme un appel à l’aide d’une personne mal en point et démunie, laquelle cherche à se procurer de la drogue.

[23]      Selon l’appelante, le juge a commis une erreur en concluant que l’intimé n’était pas animé de l’intention nécessaire pour commettre le crime. Elle plaide que l’élément de faute requis par l’alinéa 264(1)aC.cr. est disjonctif : « avait l’intention d’intimider » ou « entendait que ses menaces soient prises au sérieux ». Le juge aurait ici négligé de tenir compte du deuxième volet.

[24]      Dans l’arrêt McRae, la Cour suprême résume les principes applicables à l’élément de faute de l’infraction de proférer une menace de causer la mort ou des lésions corporelles :

[23]  En somme, l’élément de faute de l’infraction est établi si l’accusé entendait que les mots proférés ou transmis intimident ou soient pris au sérieux.  Il n’est pas nécessaire de prouver l’intention que les mots soient transmis à la personne visée par la menace. Une norme subjective de faute s’applique. Toutefois, pour déterminer ce que l’accusé avait en tête, le tribunal devra souvent tirer des conclusions raisonnables des mots et des circonstances, y compris de la façon dont les mots ont été perçus par ceux qui les ont entendus.[7]

[25]      Dans cette affaire, le juge d’instance n’avait pas considéré le caractère disjonctif de l’élément moral de l’infraction : « l’intention soit d’intimider, soit d’être pris au sérieux »[8]. Puisque cette erreur de droit avait eu une incidence significative sur le verdict d’acquittement, la Cour suprême avait ordonné la tenue d’un nouveau procès[9].

[26]      Dans l’arrêt Daley, la Cour suprême observe que l’intoxication avancée constitue « un état d’intoxication tel que l’accusé n’a pas d’intention spécifique, lorsque l’atteinte à sa capacité de prévoir les conséquences de ses actes est suffisante pour susciter un doute raisonnable concernant l’existence de la mens rea requise »[10].

[27]      Dans sa courte analyse de l’élément moral de l’infraction de proférer une menace de causer la mort ou des lésions corporelles, le juge de première instance a commis l’erreur constatée par la Cour suprême dans l’arrêt McRae[11]. Il s’est demandé si l’intimé avait l’intention de « susciter une crainte ou intimider la plaignante »[12], mais il a omis d’examiner si l’intimé avait l’intention d’être pris au sérieux. Les parties reconnaissent d’ailleurs cette omission de la part du juge.

[28]      Compte tenu des faits de l’affaire, l’erreur du premier juge n’a pas eu une incidence significative sur le verdict d’acquittement[13]. Sa conclusion selon laquelle l’état d’intoxication avancée de l’intimé soulève un doute raisonnable quant à son intention n’aurait pas été différente en regard de l’intention de susciter la crainte ou d’intimider ou de celle de l’intention d’être pris au sérieux.

[29]      Selon les faits retenus par le juge, l’intimé est fortement intoxiqué au point où il est démuni et cherche de l’aide :

Lorsque l’accusé s’y présente, son état d’intoxication est manifeste. Il a l’air magané, selon Mme Paillé, alors que la plaignante affirme qu’il ne file pas bien. Il présente une bouche pâteuse, ses yeux sont fermés et son corps est mou. Il a de la difficulté à parler et, lorsqu’il le fait, il parle lentement. Il bouge et semble nerveux. Il recherche de l’aide. Il recherche des stupéfiants.[14]

[…] l’accusé, un homme qui présente des signes d’intoxication évidents et qui recherche de l’aide. […] Par exemple, selon l’agent Drolet, Mme Paillé et M. Sergerie, l’accusé présente un corps mou et parle avec des difficultés dans la prononciation.[15]

Enfin, il faut garder à l’esprit que l’accusé recherche des stupéfiants et qu’il est dans un état d’intoxication avancé. Il apparaît même démuni, il recherche de l’aide.[16]

Encore une fois, le Tribunal se répète, l’accusé dans le présent dossier était fortement intoxiqué lorsqu’il se présente chez la plaignante. Il présente cet état tout au long de l’évènement en question.[17]

[30]      Ces conclusions factuelles sont appuyées par la preuve et ne sont pas contestées par l’appelante.

[31]      Rappelons les explications du professeur Rainville, citées avec approbation par la Cour[18], concernant l’intention requise pour l’infraction de proférer une menace de causer la mort ou des lésions corporelles :

Le degré de prise de conscience de l’accusé suppose quelques remarques supplémentaires. Sa perception du sens de ses paroles est déterminante. Il a droit à l’acquittement si l’idée ne lui effleure pas l’esprit que ses paroles puissent être prises au sérieux. Même l’insouciance possible du plaisantin quant aux conséquences de ses paroles ne saurait, selon nous, suffire à le faire condamner. L’insouciance suppose la réalisation par l’accusé du risque que ses paroles revêtent une signification intimidante. Cette prise de conscience est insuffisante. Le crime de menaces exige un dessein criminel. Cette infraction obéit au principe classique du droit pénal canadien selon lequel un crime d’intention spécifique ne saurait se satisfaire de l’insouciance du prévenu. Le crime de menaces exige l’intention spécifique d’intimider autrui. La Cour suprême préconise la définition suivante dans l’arrêt McCraw : « Une menace est un moyen d’intimidation visant à susciter un sentiment de crainte chez son destinataire ». Et la Cour de renchérir dans l’arrêt Clemente : « La menace est une manifestation par laquelle on marque à quelqu’un sa colère, avec l’intention de lui faire craindre le mal qu’on lui prépare ».[19]

[32]      Considérant l’état d’intoxication avancée de l’intimé et la conclusion du juge selon laquelle il était démuni et cherchait de l’aide, il est raisonnable de penser que, s’il avait examiné les deux volets de l’élément de la faute, le juge aurait conclu à l’absence de preuve de l’intention spécifique requise par l’infraction de menace : « l’intention soit d’intimider, soit d’être pris au sérieux ».

On peut séquestrer quelqu’un en usant « de la peur, de l’intimidation et de moyens psychologiques ou autres »

R. c. Dufour, 2020 QCCA 1802

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[9]         L’appelante plaide que le juge a erré en concluant que la plaignante n’était pas restreinte dans ses mouvements. Il aurait retenu l’absence de contrainte physique, sans considérer l’existence d’une contrainte psychologique. Or, selon l’appelante, les propos tenus par l’intimé, les raisons qui ont motivé la plaignante à agir comme elle l’a fait et le point de vue de la personne raisonnable militaient en faveur d’un tel constat de contrainte psychologique.

[10]      L’infraction de séquestration est prévue au paragraphe 279(2) C.cr:

279 (2) Quiconque, sans autorisation légitime, séquestre, emprisonne ou saisit de force une autre personne est coupable :

a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans ;

b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

279 (2) Everyone who, without lawful authority, confines, imprisons or forcibly seizes another person is guilty of

(a) an indictable offence and liable to imprisonment for a term not exceeding ten years; or

(b) an offence punishable on summary conviction.

[11]      Dans l’arrêt R. c. Magoon, la Cour suprême résume les éléments constitutifs de l’infraction de séquestration et le fardeau du ministère public en pareil cas de la façon suivante :

[64]  Pour l’application du par. 279(2) du Code criminel, le ministère public doit établir (1) que l’accusé a séquestré la victime, et (2) qu’il s’agissait d’une séquestration illégale. Dans l’arrêt Pritchard, le juge Binnie a statué qu’il y a séquestration si « pendant un laps de temps assez long [la victime] a été soumise à la contrainte physique ou forcée d’agir contre sa volonté, de sorte qu’elle n’était pas libre de ses mouvements » (par. 24). Dans R. c. Bottineau[2006] O.J. No. 1864 (QL) (C.S.J.), conf. par 2011 ONCA 194, 269 C.C.C. (3d) 227, autorisation d’appel refusée [2012] 1 R.C.S. vi, le juge Watt a conclu que [traduction] « séquestrer quelqu’un illégalement [...] consiste à restreindre la liberté de la victime, mais non sa capacité de s’enfuir. Il n’est pas nécessaire que la restriction de liberté prenne place dans un endroit particulier ou qu’elle comporte l’application d’une contrainte physique totale » (par. 116 (en italique dans l’original); voir aussi R. c. Gratton (1985), 18 C.C.C. (3d) 462 (C.A. Ont.)). Le fait que la contrainte à laquelle a été soumise la victime ait été exercée au moyen d’actes de violence physique est suffisant — mais n’est pas nécessaire — pour établir l’existence d’une séquestration illégale. On peut séquestrer quelqu’un en usant [traduction] « de la peur, de l’intimidation et de moyens psychologiques ou autres » (R. c. Kematch2010 MBCA 18, 252 C.C.C. (3d) 349, par. 89).[5]

[12]      Le moyen de l’appelante est mal fondé.

[13]      Premièrement, le juge n’a pas limité son analyse de la notion de « restriction de mouvements » à la seule idée d’une contrainte physique, comme le plaide l’appelante. Il a conclu que la plaignante n’avait pas été restreinte dans ses mouvements malgré la peur et la détresse émotionnelle ressenties lors des évènements — éléments reconnus de façon explicite dans son jugement — parce que, selon son analyse de la preuve, la plaignante n’a pas été forcée d’agir contre sa volonté et elle est toujours demeurée libre de ses mouvements.

[14]      Le fait qu’un accusé suscite de la peur chez une autre personne et que cette dernière agisse en conséquence n’entraîne pas nécessairement l’existence d’une restriction dans ses mouvements. La preuve d’une contrainte physique ou psychologique et celle de son effet sur la liberté de mouvements de la présumée victime sont nécessaires. L’appréciation des faits par le juge l’a amené à conclure que ce n’était pas le cas ici.

[15]      Le juge mentionne l’absence de confrontation verbale entre les parties et l’absence de « contact physique, [de] prise aux bras, aux épaules ou autre » dans son analyse de la question. Ces éléments ne sont cependant pas les seuls dont il tient compte pour soutenir sa conclusion juridique selon laquelle la plaignante n’a pas été restreinte dans ses mouvements. Parmi les éléments retenus par le juge, soulignons que la plaignante avait un téléphone cellulaire en sa possession et qu’elle l’a utilisé à de nombreuses reprises. La conclusion du juge est fondée sur son appréciation de la preuve selon laquelle celle-ci « maîtrise et contrôle volontairement sa situation ». Autrement dit, selon le juge, la plaignante n’était pas « forcée d’agir contre sa volonté, de sorte qu’elle n’était pas libre de ses mouvements ».

[16]      Deuxièmement, la prise en compte par le juge des réactions de la plaignante pour décider si celle-ci a été restreinte dans ses mouvements ne constitue pas une erreur de droit. Il a conclu qu’elle « maîtrise et contrôle volontairement sa situation », et ce, en raison des diverses actions posées par la plaignante tout au long des évènements, actions qui établissent sa capacité de décider de ses faits et gestes. Le raisonnement du juge est exempt d’erreur. Selon la jurisprudence, il y a séquestration lorsque « pendant un laps de temps assez long [la victime] a été soumise à la contrainte physique ou forcée d’agir contre sa volonté, de sorte qu’elle n’était pas libre de ses mouvements ». Les faits retenus par le juge, dont ceux en lien avec la maîtrise de la situation par la plaignante, lui ont permis de conclure que cette dernière était, au contraire, libre de ses mouvements.

[17]      Troisièmement, même si le juge n’a pas référé de façon explicite aux propos qui auraient été tenus par l’intimé dans son jugement oral, il a tenu compte des agissements de l’intimé et noté les éléments suivants : (i) le ton normal de la conversation de l’intimé avec la plaignante, sans agressivité et sans cris; (ii) l’état d’intoxication avancée de l’intimé; (iii) le fait que ce dernier est demeuré à l’extérieur du logement lorsqu’il est revenu du bar; (iv) le fait que l’intimé a obtempéré à la demande de M. Sergerie (le conjoint de la plaignante arrivé plus tard sur les lieux) de quitter l’endroit; et (v) l’omission de la plaignante de mentionner qu’elle avait fait l’objet de menaces ou de séquestration lors de son appel au service d’urgence 911. Ces éléments s’ajoutent à l’élément déterminant suivant : (vi) le juge exprime un doute sur la fiabilité du témoignage de la plaignante en lien avec les paroles prononcées par l’intimé.

Il y a une différence entre la crédibilité et la fiabilité et le juge Doyon précise ces deux concepts différents

Lachance c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2021 QCCS 5321

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[58]        La juge a eu raison de noter la distinction entre la crédibilité de l’appelant et la fiabilité de son témoignage. Effectivement, il y a une différence entre la crédibilité et la fiabilité[24]. La crédibilité d’un témoin n’est pas un gage de fiabilité. Un témoin crédible peut témoigner de manière non fiable. Le fait que la preuve ne soit pas contredite ne signifie pas nécessairement qu’elle doit être acceptée[25].

[59]        Le juge Doyon[26] a précisé comme suit que fiabilité et crédibilité sont deux concepts différents[27] :

La crédibilité se réfère à la personne et à ses caractéristiques, par exemple son honnêteté, qui peuvent se manifester dans son comportement. On parlera donc de la crédibilité du témoin. La fiabilité se réfère plutôt à la valeur du récit relaté par le témoin on parle de fiabilité de son témoignage autrement dit il a un témoignage digne de confiance. Ainsi, il est bien connu que le témoin crédible peut honnêtement croire que sa version des faits est véridique alors qu'il n'en est rien, et ce, tout simplement parce qu'il se trompe. La crédibilité du témoin ne rend donc pas nécessairement son récit fiable

                                                                        [Caractères gras ajoutés]

L’utilisation de Google Street View et son authentification en salle de Cour

Lachance c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2021 QCCS 5321

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[51]        Dans Granger c. Montcalm (Municipalité de)[22], le juge Cournoyer, alors qu’il siégeait à cette Cour, mentionne ce qui suit relativement à l’utilisation de Google Street View et son authentification :

[90]     L'admissibilité des images tirées de Google Street View, de Google Earth ou d’outils similaires de navigation virtuelle soulève plusieurs questions. La consultation de la jurisprudence laisse paraître des incertitudes quant aux conditions d’utilisation de ces outils. 

[91]    En l'espèce, quatre règles doivent être examinées : 1) les exigences relatives à l'authentification de ce moyen de preuve matérielle de même que les règles suivantes de la procédure pénale accusatoire et contradictoire : 2) la communication de la preuve, 3) le principe de la « preuve complète » et 4) les critères de la contre-preuve.

[92]    L’utilisation de l’outil de navigation virtuelle Google Street View présente les attributs de différents moyens traditionnels de preuve matérielle.  

[93]      Il comporte les propriétés et caractéristiques d’une photographie, celle d’une vidéo ou de la visite des lieux. Le visionnement à l'aide de Google Street View constitue l'équivalent moderne d'une visite des lieux

                                                [Caractères gras ajoutés – références omises]

[52]        Le juge Cournoyer poursuit comme suit, relativement à l’admission de cette preuve, la nécessité de l’authentification et la nécessité que les lieux n’ont pas changé depuis :

[100]     Par contre, l’authentification d’images tirées de Google Street View doit être établie selon les principes décrits par l’auteur Vauclair qui résume ainsi les principes formulés par la Cour suprême dans R. c. Nikolovski :

1235.   Il est maintenant acquis que les mêmes règles d’admissibilité régissent la preuve audio, photographique ou vidéo, ces deux dernières étant le prolongement naturel de la preuve audio. Le juge devra tenir un voir-dire pour déterminer si, d’une manière prépondérante, on a démontré (1) que la preuve décrit bien la scène du crime, (2) qu’elle est présentée équitablement et sans intention de tromper, notamment qu’elle n’a pas été retouchée ou modifiée et (3) qu’un témoin peut attester de ces faits sous serment.

[…]

[Les appels de notes sont omis]

[101]     Watt énonce la règle au sujet de l'admissibilité des photographies en ces termes :

The admissibility of photographs depends upon accuracy, fairness and proper authentication. They must constitute a true representation of what they purport to depict and not be calculated to mislead. They must be verified on oath by the person who took them, or someone in a position to attest to their accuracy.

A photograph is a graphic portrayal of oral testimony. It may be excluded where its probative value is exceeded by its prejudicial effect.

[Le soulignement est ajouté]

[102]     Il formule celle relative aux enregistrements vidéo de la manière suivante :

The admissibility of videotape is governed by considerations similar to those applicable to photographs and audiotape. It must be authenticated by the operator of the recorder or another who has viewed it and can attest to the time, date, location and circumstances of the recording, as well the accuracy of the picture. The recording may be direct or circumstantial evidence.

The proliferation of enhancement techniques in connection with videotape may create admissibility problems with portions, but not necessarily all of the tape.

[Le soulignement est ajouté]

[103]     Finalement, il décrit la visite des lieux et souligne qu’il devient essentiel de s’assurer que les lieux visités n’aient pas changés depuis le moment pertinent pour les fins du procès :

A view is an observation made of a person, place, or thing during the course of the trial after the jury has been sworn, but before it has rendered its verdict. Views are authorized by s. 652 of the Criminal Code and may be taken by a judge (in a trial by judge alone) or jury. Views take place in the presence of all the participants, including D, counsel, and the court reporter.

A determination whether to order a view may include consideration of several factors, for example:

i. the importance to an issue to be decided of the information that may be gained by the view;

ii. the extent to which the information has been or could be obtained from other sources, including maps, diagrams, models, photographs, or videotapes; and

iii. the extent to which the place, person, or thing to be viewed has changed in appearance since the material time, and the consequent danger that the view may mislead.

It is unclear whether a view is real evidence, circumstantial in nature, from which the trier of fact may draw its own inferences, or is simply a clarification of the testimony of witnesses.

[Le soulignement est ajouté]

[104]     Comme on le constate, l’authentification des images tirées de Google Street View s’avère particulièrement cruciale en raison de la possibilité que les lieux représentés aient changé, ce qui, en l’espèce, ne peut être déterminé.

[53]        Dans le présent cas, la situation se présente différemment, puisque les images tirées de Google Street View sont produites en défense. Il ne saurait donc être question des règles de la communication de la preuve, du principe de la preuve complète et des critères de la contre-preuve.

[54]        Cela dit, l’authentification des images devait être établie selon les principes formulés par la Cour suprême dans R. c. Nokolovski[23]. Même si la juge ne tient pas de voir-dire, à proprement parler, les conditions suivantes sont établies par l’appelant à la satisfaction de la juge et sans opposition de l’intimé :

1-   Les images décrivent bien la scène;

2-   Les images sont présentées équitablement et sans intention de tromper;

3-   Les images n’ont pas été retouchées ou modifiées.

[55]        En outre, il ressort du témoignage de l’appelant que les lieux n’ont pas changé entre le moment de l’infraction et le moment où les images sont tirées de Google Street View.

[56]        La juge ne commet donc pas d’erreur en permettant la production des images.

dimanche 24 août 2025

Le poursuivant peut mettre de l’avant différentes théories de cause si celles-ci sont étayées par la preuve, sans pour autant brimer les droits de l’accusé, mais cette possibilité accordée au poursuivant de modifier sa théorie de cause en fonction de la preuve ne doit pas conduire à une injustice à l’accusé

R. v. Kelly, 2017 ONCA 920 



[30] The Crown is not bound to prove its case according to any factual or legal theory. Liability for an offence charged is determined by an application of the law relating to parties to an offence, found primarily in s. 21 of the Criminal Code, to the facts as found by the jury or trial judge. Culpability depends on the evidence and the legal principles applicable to that evidence. The Crown is entitled to rely on any route to liability available [page250] on the evidence: see R. v. Pickton[2010] 2 S.C.R. 198[2010] S.C.J. No. 322010 SCC 32, at para. 19R. v. Khawaja  (2010), 103 O.R. (3d) 321[2010] O.J. No. 54712010 ONCA 862273 C.C.C. (3d) 415, at paras. 143-45, approved without reference to this point, [2012] 3 S.C.R. 555[2012] S.C.J. No. 692012 SCC 69R. v. Ranger (2003), 2003 CanLII 32900 (ON CA)67 O.R. (3d) 1[2003] O.J. No. 3479 (C.A.), at pp. 41-42 O.R.; R. v. Pawluk[2017] O.J. No. 58172017 ONCA 863, at para. 29.

[31] The defence must be taken to know that liability depends on an application of the applicable legal principles to the evidence. There is nothing per se unfair in the Crown relying on different or alternate theories of liability, as long as each is rooted in the evidence. The argument that the Crown should be bound by the particular theory it advances is essentially an argument in favour of a formalistic pleadings-type approach to criminal justice, or perhaps a plea for the return of the now discredited "sporting theory" of criminal justice. The contemporary approach favours the adjudication of criminal allegations on their merits.

[32] The general rule that the Crown can rely on any legal basis of culpability available on the evidence is circumscribed by the overriding need to ensure trial fairness and, specifically, the accused's right to make full answer and defence: Ranger, at para. 133. There can be circumstances in which the defence, based on particulars provided by the Crown, specific representations made by the Crown, or the overall conduct of the trial, is justifiably led to believe that the accused's potential liability is limited to a specific factual or legal theory and conducts the defence accordingly. In those circumstances, the defence may be able to successfully argue that any departure from the specific basis of liability put forward, especially after the evidence is complete, would unfairly prejudice the accused's ability to make full answer and defence: Pawluk, at para. 30.

La présentation d'une requête de Charte ne peut pas devenir une occasion pour la défense de s'adonner à une partie de pêche dans l'espoir de trouver des témoignages permettant d'établir la violation alléguée

R. c. Imbeault, 2008 QCCS 5015

Lien vers la décision


[5]               La défense a affirmé que Roy a menti lors de la rédaction de l'affidavit au soutien du mandat de perquisition obtenu pour perquisitionner le domicile de l'accusé. La défense a demandé à interroger Santos pour connaître les circonstances du mensonge de Roy. Après avoir insisté pour savoir quelles informations la défense entendait mettre en preuve au soutien de sa requête en interrogeant Santos, la défense a candidement admis ignorer complètement ce que le témoin viendrait dire.

[6]               Devant ces faits, le Tribunal n'a pas permis que Santos soit entendu étant donné l'incapacité de la défense de démontrer qu'il est raisonnablement probable que cette audience aidera à résoudre la question de l'arrêt des procédures. (cf. R. c. PiresR. c. Lising[2005] 3 R.C.S. 343, 2005 CSC 66, paragraphe 35).

[7]               De plus, comme l'a mentionné la juge Côté, alors juge à la Cour supérieure, dans R. c. Sansfaçon2000 CanLII 18527 (QC CS), REJB 2000-19966, aux paragraphes 22 et 30, «…la présentation d'une requête en vertu de la Charte ne suffit pas à exiger la présence de plusieurs témoins pour étayer le bien-fondé de la requête. Le requérant doit indiquer le fondement de sa demande lorsque les assignations sont contestées. … La requête ne peut pas devenir un prétexte pour la défense d'interroger des témoins dans l'espoir que ceux-ci fourniront des témoignages permettant d'établir la violation alléguée ».

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le droit applicable à la preuve de la conduite postérieure à l’infraction

R. c. Cardinal, 2018 QCCS 2441 Lien vers la décision [ 33 ]             L’essentiel du droit applicable à la preuve de la conduite postérieu...