R. c. Jean-Jacques, 2012 QCCA 1628 (CanLII)
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[5] Les principes applicables sont bien connus. Dans l'arrêt Morin, la Cour suprême a pondéré sa jurisprudence relative à l'article 11 b) de la Charte, énoncée initialement dans les arrêts Smith et Askov. Par la suite, elle a interprété dans l'arrêt Godin les principes dégagés de l'arrêt Morin précité. Lues ensemble, ces décisions font ressortir trois constantes : la difficulté que pose l'évaluation du préjudice, l'importance à accorder à l'ensemble du dossier dans l'exercice de pondération requis ainsi que la nécessaire conciliation des intérêts de l'accusé avec ceux de la société :
[18] Notre Cour a établi le cadre juridique applicable en l'espèce dans Morin, aux p. 786-789. Pour déterminer si un délai est déraisonnable, il faut considérer la longueur du délai, déduction faite des périodes auxquelles la défense a renoncé, puis examiner les raisons du délai, le préjudice subi par l'accusé et les intérêts que l'al. 11b) vise à protéger. Par la force des choses, cette démarche demande souvent un examen minutieux de différentes périodes et d'une foule de questions factuelles concernant les raisons de certains retards. Toutefois, au cours de cet examen minutieux, il faut veiller à ce que l'attention que nous portons aux détails ne nous fasse pas perdre de vue l'ensemble de la situation.
[6] L'intimé prétend que la norme d'intervention applicable en pareille matière fait en sorte que les tribunaux d'appel doivent faire preuve d'une retenue considérable. Il a tort. À cet égard, il convient de citer la Cour d'appel de l'Ontario :
[5] Second, the respondent’s counsel submitted that the trial judge’s findings are findings of fact deserving of deference, absent palpable or overriding error. I do not agree. In R. v. Chatwell 1998 CanLII 3560 (ON CA), (1998), 122 C.C.C. (3d) 162 (Ont. C.A.), appeal to S.C.C. quashed 1998 CanLII 784 (SCC), (1998), 125 C.C.C. (3d) 433 (S.C.C.), this court applied the normal standard of review to the assessment of institutional delay. The court said (at para. 10):
The determination of whether certain factors constitute institutional delay for the purpose of an analysis pursuant to s. 11(b) of the Charter is one which, in our opinion, attracts the normal standard of appellate scrutiny. The adjudication of the s. 11(b) rights of an accused is not akin to the exercise of judicial discretion.
[6] In R. v. Qureshi, 2004 CanLII 40657 (ON CA), (2004), 190 C.C.C. (3d) 453 at para. 27 (Ont. C.A.), Laskin J.A. stated that a trial judge’s accounting of the inherent time requirements is to be reviewed on a standard of correctness. In my view, this applies to the process of assessing the various periods of delay, ascribing legal character to them and allocating them to the various categories set out in R. v. Morin, 1992 CanLII 89 (SCC), (1992), 71 C.C.C. (3d) 1 (S.C.C.). For example, whether the Crown had produced documents by a certain date is a question of fact. However, the questions of whether the failure to produce those documents constitutes a failure of the Crown’s duty of disclosure and whether such failure makes the Crown responsible for ensuing delay, involve the application of legal principles. The questions raised by this appeal primarily involve alleged errors in the way the trial judge accounted for various time periods, which is reviewable on a standard of correctness.
[7] En somme, s'il est acquis qu'il faut faire preuve d'une grande déférence quant aux conclusions de fait du juge de première instance, il en va autrement de la qualification des délais. Quant à l'évaluation du préjudice, il s'agit d'une question pouvant donner lieu à une erreur mixte de fait et de droit.
[8] En l'espèce, bien que le juge de première instance ait correctement identifié les principes applicables, la Cour est d'avis qu'il a commis des erreurs révisables dans la qualification de certains délais et l'application de la grille d'analyse relative à l'évaluation du préjudice.
[9] Lorsqu'un délai découle d'un acte de l'accusé, il faut en tenir compte dans l'exercice de pondération et attribuer le délai en résultant à ce dernier et non au système. C'est le cas, notamment, de l'accusé qui change d'avocat, qui demande une remise pour mieux se préparer, qui demande une enquête préliminaire ce qui ne pourra que reporter la date de tenue du procès, qui demande un report du procès pour quelque raison que ce soit (ce qui entraînera, vraisemblablement, un nouveau délai institutionnel), etc. Il ne s'agit pas alors de blâmer l'accusé, mais de reconnaître que l'exercice d'un tel droit est susceptible d'engendrer des délais dont il ne peut ensuite légitimement se plaindre (dans la mesure où ceux-ci sont normaux dans le cas de délais institutionnels).
[13] En somme, une qualification correcte des délais donne le résultat suivant : délais inhérent : 6 mois, délais institutionnels : 21 mois, délais imputables à l'intimé : 15 mois. De plus, aucun n'est attribuable au ministère public. Des délais institutionnels de 21 mois peuvent sembler longs, mais ils s'expliquent par la procédure en deux étapes (enquête préliminaire (à la demande de l'accusé malgré la simplicité de l'affaire) et procès; nécessité de reporter le procès pour une circonstance imprévisible (maladie)).
[14] Quant à la question du préjudice subi par l'intimé, un examen de la preuve permet de conclure que la longueur du délai n'est pas ici une source d'un préjudice sérieux. La perte de l'emploi lucratif résulte de l'accusation et non des délais. Quant aux restrictions imposées lors de la remise en liberté, certes elles imposaient des contraintes sur la vie sociale de l'intimé, mais il demeure qu'il pouvait en demander la modification si elles l'empêchaient d'occuper un emploi, ce qu'il n'a fait que deux ans après leur imposition. Quant à la présomption qu'un délai excessif est susceptible d'entraîner un préjudice, rien ne démontre en l'espèce une possibilité d'une quelconque atteinte au droit à une défense pleine et entière. Il faut aussi souligner qu'en aucun moment l'intimé n'a manifesté un empressement quant à la tenue de son procès.
[15] Enfin, vu la gravité du crime reproché (que le juge reconnaît à deux reprises dans son jugement), les intérêts de l'intimé devaient être contrebalancés avec ceux de la société. Ceux qui sont accusés d'avoir transgressé la loi doivent être traduits en justice, sauf dans des circonstances incontestablement préjudiciables à un accusé. Les circonstances de la présente affaire ne sont pas de cet ordre.
[16] Si le juge de première instance avait correctement qualifié les délais et pris en considération tous les autres éléments mentionnés précédemment, il est manifeste qu'il aurait rejeté la requête en arrêt des procédures, une réparation exceptionnelle.
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mardi 16 octobre 2012
lundi 15 octobre 2012
Toute peine imposée pour un crime commis intra-muros doit être purgée de manière consécutive à toute autre peine
Anglehart c. R., 2012 QCCA 771 (CanLII)
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[9] Comme autre facteur aggravant, le juge retient que le crime a été perpétré à l'intérieur d'un établissement carcéral et exprime son accord avec l'opinion exprimée par la Cour supérieure dans R. c. Charette selon laquelle toute peine imposée pour un crime commis intra-muros doit être purgée de manière consécutive à toute autre peine purgée par le contrevenant.
[14] Le juge de première instance a identifié correctement les facteurs atténuants et aggravants. Il a, de plus, avec raison, décidé que la peine serait purgée de manière consécutive parce que l'infraction a été commise alors que l'appelant était incarcéré. Il n'y a pas lieu pour la Cour de revenir sur cette partie de son jugement, étant entendu qu'il ne s'agit pas là d'une règle absolue ne pouvant souffrir d'exceptions
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[9] Comme autre facteur aggravant, le juge retient que le crime a été perpétré à l'intérieur d'un établissement carcéral et exprime son accord avec l'opinion exprimée par la Cour supérieure dans R. c. Charette selon laquelle toute peine imposée pour un crime commis intra-muros doit être purgée de manière consécutive à toute autre peine purgée par le contrevenant.
[14] Le juge de première instance a identifié correctement les facteurs atténuants et aggravants. Il a, de plus, avec raison, décidé que la peine serait purgée de manière consécutive parce que l'infraction a été commise alors que l'appelant était incarcéré. Il n'y a pas lieu pour la Cour de revenir sur cette partie de son jugement, étant entendu qu'il ne s'agit pas là d'une règle absolue ne pouvant souffrir d'exceptions
vendredi 12 octobre 2012
Le pouvoir de common law de la Cour de prononcer des ordonnances préventives en vertu de l'article 810 Ccr
Gouin c. R., 2012 QCCS 4457 (CanLII)
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[6] Les auteurs-juges Béliveau et Vauclair dans leur ouvrage Traité général de preuve et de Procédure pénales, 16e édition, nous enseigne que :
1464. Le Code criminel comporte des dispositions particulières qui autorisent l'intervention préventive du tribunal. En effet, les article 810 et suivants permettent, dans différents contextes, de rendre des ordonnances en vue de prévenir certaines infractions. Ces dispositions qui ne créent pas d'infraction sont néanmoins de nature pénale dans la mesure où elles visent la prévention du crime.
1465. L'article 810 du Code est la disposition générale qui permet à quiconque, ou à un tiers agissant en son nom, ayant des motifs raisonnables de craindre qu'une autre personne porte atteinte à sa sécurité, à celle de son conjoint, à celle de son enfant ou à ses biens, de déposer une dénonciation à cet effet devant un juge de paix en vue de forcer cette personne à signer un engagement de garder la paix et de se plier à certaines conditions…
1466. Pour trouver application, cette intervention de la cour doit être mise en œuvre par une dénonciation. Il ne s'agit donc pas d'une mesure de rechange offerte à un juge qui préside un procès ou d'une mesure que ce dernier peut invoquer proprio motu…
[…]
1474. Indépendamment des dispositions du Code, la common law semble reconnaître au juge le pouvoir de prononcer des ordonnances préventives. C'est ce qu'a évoqué le juge Lamer dans l'arrêt Parks…
1475. Toutefois, son opinion ne rallie pas la majorité de la Cour qui, néanmoins, nous indique que si ce pouvoir de common law n'a pas été codifié par l'article 810 du Code, il comporte plusieurs restrictions et, notamment, il devra respecter l'article 7 de la Charte. Entre autres, une telle ordonnance ne peut être prononcée sans une demande de la part de la poursuite et sans la tenue d'une audition. De même, elle doit être de durée déterminée et ne peut se fonder sur des spéculations. La preuve doit démontrer que les motifs de crainte sont raisonnables.
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[6] Les auteurs-juges Béliveau et Vauclair dans leur ouvrage Traité général de preuve et de Procédure pénales, 16e édition, nous enseigne que :
1464. Le Code criminel comporte des dispositions particulières qui autorisent l'intervention préventive du tribunal. En effet, les article 810 et suivants permettent, dans différents contextes, de rendre des ordonnances en vue de prévenir certaines infractions. Ces dispositions qui ne créent pas d'infraction sont néanmoins de nature pénale dans la mesure où elles visent la prévention du crime.
1465. L'article 810 du Code est la disposition générale qui permet à quiconque, ou à un tiers agissant en son nom, ayant des motifs raisonnables de craindre qu'une autre personne porte atteinte à sa sécurité, à celle de son conjoint, à celle de son enfant ou à ses biens, de déposer une dénonciation à cet effet devant un juge de paix en vue de forcer cette personne à signer un engagement de garder la paix et de se plier à certaines conditions…
1466. Pour trouver application, cette intervention de la cour doit être mise en œuvre par une dénonciation. Il ne s'agit donc pas d'une mesure de rechange offerte à un juge qui préside un procès ou d'une mesure que ce dernier peut invoquer proprio motu…
[…]
1474. Indépendamment des dispositions du Code, la common law semble reconnaître au juge le pouvoir de prononcer des ordonnances préventives. C'est ce qu'a évoqué le juge Lamer dans l'arrêt Parks…
1475. Toutefois, son opinion ne rallie pas la majorité de la Cour qui, néanmoins, nous indique que si ce pouvoir de common law n'a pas été codifié par l'article 810 du Code, il comporte plusieurs restrictions et, notamment, il devra respecter l'article 7 de la Charte. Entre autres, une telle ordonnance ne peut être prononcée sans une demande de la part de la poursuite et sans la tenue d'une audition. De même, elle doit être de durée déterminée et ne peut se fonder sur des spéculations. La preuve doit démontrer que les motifs de crainte sont raisonnables.
mardi 2 octobre 2012
L'État du droit concernant l'échantillon reçu directement & l'absence du mot directement
Lavoie c. R., 2012 QCCS 4456 (CanLII)
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[9] L'honorable Richard Grenier dans R. c. Karl Tanguay, 2011 QCCS 4152 (CanLII), 2011 QCCS 4152 a écrit aux paragraphes 22 et 23 :
[22] Si la poursuite n'a pas produit un certificat du technicien qualifié indiquant que « chaque échantillon a été reçu directement de l'accusé dans un contenant approuvé ou dans un alcootest approuvé, manipulé par lui » cela ne met pas nécessairement fin au débat.
[23] Le témoignage du technicien qualifié, pourrait, par exemple, faire la preuve, hors de tout doute raisonnable, que des échantillons d'haleine ont été reçus directement de l'accusé, dans les circonstances prévues à l'article 258(1)(g)(iii) du Code criminel.
[10] L'honorable Martin Vauclair dans R. c. Durand, 2011 QCCS 2595 (CanLII), 2011 QCCS 2595 a écrit aux paragraphes 13 et 14 :
[13] Le premier grief attaque la décision du juge sur le non-lieu. Outre le certificat du technicien qualifié, le témoignage du policier Paterson pouvait supporter les inférences que les échantillons avaient été reçus directement de M. Durand…
[14] Dans les circonstances, il n'y avait pas absence de preuve et le juge devait rejeter la requête. Ce n'était pas un cas où le certificat est le seul élément de preuve administré par la poursuite. Le juge doit, à défaut d'un certificat clair, évaluer si l'ensemble de la preuve permet de conclure que les échantillons ont été reçus directement par l'accusé : …
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[9] L'honorable Richard Grenier dans R. c. Karl Tanguay, 2011 QCCS 4152 (CanLII), 2011 QCCS 4152 a écrit aux paragraphes 22 et 23 :
[22] Si la poursuite n'a pas produit un certificat du technicien qualifié indiquant que « chaque échantillon a été reçu directement de l'accusé dans un contenant approuvé ou dans un alcootest approuvé, manipulé par lui » cela ne met pas nécessairement fin au débat.
[23] Le témoignage du technicien qualifié, pourrait, par exemple, faire la preuve, hors de tout doute raisonnable, que des échantillons d'haleine ont été reçus directement de l'accusé, dans les circonstances prévues à l'article 258(1)(g)(iii) du Code criminel.
[10] L'honorable Martin Vauclair dans R. c. Durand, 2011 QCCS 2595 (CanLII), 2011 QCCS 2595 a écrit aux paragraphes 13 et 14 :
[13] Le premier grief attaque la décision du juge sur le non-lieu. Outre le certificat du technicien qualifié, le témoignage du policier Paterson pouvait supporter les inférences que les échantillons avaient été reçus directement de M. Durand…
[14] Dans les circonstances, il n'y avait pas absence de preuve et le juge devait rejeter la requête. Ce n'était pas un cas où le certificat est le seul élément de preuve administré par la poursuite. Le juge doit, à défaut d'un certificat clair, évaluer si l'ensemble de la preuve permet de conclure que les échantillons ont été reçus directement par l'accusé : …
mercredi 26 septembre 2012
Les principes qui régissent l'admissibilité d'une preuve recueillie par écoute électronique
Laflamme c. R., 2010 QCCS 5621 (CanLII)
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[20] L'interception d'une communication privée participative ou consensuelle est régie par les dispositions de l'article 184.2 du Code criminel. Un juge de la Cour du Québec ou un juge de la Cour supérieure peut l'autoriser, s'il est convaincu :
(3) a) qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction à la présente loi ou à toute autre loi fédérale a été ou sera commise;
b) que l’auteur de la communication privée ou la personne à laquelle il la destine a consenti à l’interception;
c) qu’il existe des motifs raisonnables de croire que des renseignements relatifs à l’infraction seront obtenus grâce à l’interception.
[21] La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt R. c. Pires; R. c. Lising enseigne les principes qui régissent l'admissibilité d'une preuve recueillie par écoute électronique :
« [8] L’admissibilité de la preuve recueillie par écoute électronique est donc régie par les principes suivants.
(1) L’écoute électronique constitue une perquisition ou une saisie au sens de l’art. 8 de la Charte (R. c. Duarte, 1990 CanLII 150 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 30). En conséquence, les dispositions législatives en vertu desquelles elle est autorisée doivent respecter les exigences constitutionnelles minimales de l’art. 8.
(…)
(2) Si elle n’est pas conforme pour l’essentiel au régime établi par la loi, l’écoute électronique est illégale et, vu la correspondance entre les dispositions législatives et les exigences constitutionnelles, elle est également inconstitutionnelle.
Les conditions légales préalables à la délivrance d’une autorisation d’écoute électronique varient selon le libellé de la disposition pertinente. Les demandes d’autorisation sont présentées ex parte et par écrit à un juge, lequel doit être convaincu, sur la foi d’une preuve par affidavit, que les conditions prescrites par la loi sont remplies.
(3) Lorsque l’accusé soutient par la suite que l’écoute électronique a porté atteinte au droit que lui garantit l’art. 8 de la Charte, le juge siégeant en révision doit déterminer si l’interception constitue une perquisition ou une saisie abusive, ce qui implique de vérifier s’il y a eu respect des conditions légales préalables.
La révision porte sur les documents relatifs à l’autorisation (que la défense peut obtenir sur demande suivant le par. 187(1.4) du Code criminel) et les observations des avocats, ainsi que sur les éléments de preuve additionnels qui peuvent y être présentés. Si le juge qui préside l’audience estime que, vu les documents dont disposait le juge ayant accordé l’autorisation et le complément de preuve présenté, rien ne permettait d’établir la présence des conditions préalables à la délivrance de l’autorisation, il conclura que la fouille, perquisition ou saisie contrevenait à l’art. 8 de la Charte. La révision ne constitue pas une nouvelle audition de la demande. La norme de contrôle applicable a été expliquée comme suit dans l’arrêt Garofoli:
Le juge qui siège en révision ne substitue pas son opinion à celle du juge qui a accordé l’autorisation. Si, compte tenu du dossier dont disposait le juge qui a accordé l’autorisation et complété lors de la révision, le juge siégeant en révision, conclut que le juge qui a accordé l’autorisation pouvait le faire, il ne devrait pas intervenir. Dans ce processus, la fraude, la non-divulgation, la déclaration trompeuse et les nouveaux éléments de preuve sont tous des aspects pertinents, mais au lieu d’être nécessaires à la révision leur seul effet est d’aider à décider s’il existe encore un fondement quelconque à la décision du juge qui a accordé l’autorisation. [p. 1452]
(4) Dans les cas où il estime que l’écoute électronique contrevenait à l’art. 8 de la Charte, le juge siégeant en révision décide si la preuve doit être écartée en application du par. 24(2) de la Charte. »
[22] Notre Cour d'appel précise, dans l'arrêt Lepage :
« [33] D'autre part, l'autorisation en matière d'écoute électronique participative n'exige pas davantage que ce qui est énoncé à l'article 184.2 C.cr. Selon l'appelante, comme l'affidavit au soutien de la demande d'autorisation ne réfère qu'à l'espoir d'obtenir des aveux, sans plus, cela ne saurait constituer des motifs raisonnables de croire que des renseignements relatifs à l'infraction seront obtenus.
[34] En matière d'autorisation d'écoute consensuelle, l'agent de la paix doit énoncer qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise et le juge qui autorise l'écoute doit s'assurer qu'il existe des motifs raisonnables de croire que des renseignements relatifs à l'infraction visée seront obtenus. Le juge qui siège en révision de l'autorisation ne doit pas substituer son opinion à celle du juge qui l'a accordée, mais doit plutôt s'assurer qu'il existe des éléments de preuve auxquels le juge a ajouté foi pour faire droit à la demande. Le fait que l'affidavit réfère à l'opération d'infiltration, ayant pour but d'obtenir une admission de l'appelante de sa participation aux crimes commis en 1981, n'affecte en rien la conclusion de l'existence de motifs raisonnables de croire que des renseignements seront obtenus. Un aveu ou des informations relatives à la commission d'un crime constituent des renseignements à l'égard de ce crime. L'interception consensuelle avait donc pour objectif de recueillir des éléments de preuve. »
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[20] L'interception d'une communication privée participative ou consensuelle est régie par les dispositions de l'article 184.2 du Code criminel. Un juge de la Cour du Québec ou un juge de la Cour supérieure peut l'autoriser, s'il est convaincu :
(3) a) qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction à la présente loi ou à toute autre loi fédérale a été ou sera commise;
b) que l’auteur de la communication privée ou la personne à laquelle il la destine a consenti à l’interception;
c) qu’il existe des motifs raisonnables de croire que des renseignements relatifs à l’infraction seront obtenus grâce à l’interception.
[21] La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt R. c. Pires; R. c. Lising enseigne les principes qui régissent l'admissibilité d'une preuve recueillie par écoute électronique :
« [8] L’admissibilité de la preuve recueillie par écoute électronique est donc régie par les principes suivants.
(1) L’écoute électronique constitue une perquisition ou une saisie au sens de l’art. 8 de la Charte (R. c. Duarte, 1990 CanLII 150 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 30). En conséquence, les dispositions législatives en vertu desquelles elle est autorisée doivent respecter les exigences constitutionnelles minimales de l’art. 8.
(…)
(2) Si elle n’est pas conforme pour l’essentiel au régime établi par la loi, l’écoute électronique est illégale et, vu la correspondance entre les dispositions législatives et les exigences constitutionnelles, elle est également inconstitutionnelle.
Les conditions légales préalables à la délivrance d’une autorisation d’écoute électronique varient selon le libellé de la disposition pertinente. Les demandes d’autorisation sont présentées ex parte et par écrit à un juge, lequel doit être convaincu, sur la foi d’une preuve par affidavit, que les conditions prescrites par la loi sont remplies.
(3) Lorsque l’accusé soutient par la suite que l’écoute électronique a porté atteinte au droit que lui garantit l’art. 8 de la Charte, le juge siégeant en révision doit déterminer si l’interception constitue une perquisition ou une saisie abusive, ce qui implique de vérifier s’il y a eu respect des conditions légales préalables.
La révision porte sur les documents relatifs à l’autorisation (que la défense peut obtenir sur demande suivant le par. 187(1.4) du Code criminel) et les observations des avocats, ainsi que sur les éléments de preuve additionnels qui peuvent y être présentés. Si le juge qui préside l’audience estime que, vu les documents dont disposait le juge ayant accordé l’autorisation et le complément de preuve présenté, rien ne permettait d’établir la présence des conditions préalables à la délivrance de l’autorisation, il conclura que la fouille, perquisition ou saisie contrevenait à l’art. 8 de la Charte. La révision ne constitue pas une nouvelle audition de la demande. La norme de contrôle applicable a été expliquée comme suit dans l’arrêt Garofoli:
Le juge qui siège en révision ne substitue pas son opinion à celle du juge qui a accordé l’autorisation. Si, compte tenu du dossier dont disposait le juge qui a accordé l’autorisation et complété lors de la révision, le juge siégeant en révision, conclut que le juge qui a accordé l’autorisation pouvait le faire, il ne devrait pas intervenir. Dans ce processus, la fraude, la non-divulgation, la déclaration trompeuse et les nouveaux éléments de preuve sont tous des aspects pertinents, mais au lieu d’être nécessaires à la révision leur seul effet est d’aider à décider s’il existe encore un fondement quelconque à la décision du juge qui a accordé l’autorisation. [p. 1452]
(4) Dans les cas où il estime que l’écoute électronique contrevenait à l’art. 8 de la Charte, le juge siégeant en révision décide si la preuve doit être écartée en application du par. 24(2) de la Charte. »
[22] Notre Cour d'appel précise, dans l'arrêt Lepage :
« [33] D'autre part, l'autorisation en matière d'écoute électronique participative n'exige pas davantage que ce qui est énoncé à l'article 184.2 C.cr. Selon l'appelante, comme l'affidavit au soutien de la demande d'autorisation ne réfère qu'à l'espoir d'obtenir des aveux, sans plus, cela ne saurait constituer des motifs raisonnables de croire que des renseignements relatifs à l'infraction seront obtenus.
[34] En matière d'autorisation d'écoute consensuelle, l'agent de la paix doit énoncer qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise et le juge qui autorise l'écoute doit s'assurer qu'il existe des motifs raisonnables de croire que des renseignements relatifs à l'infraction visée seront obtenus. Le juge qui siège en révision de l'autorisation ne doit pas substituer son opinion à celle du juge qui l'a accordée, mais doit plutôt s'assurer qu'il existe des éléments de preuve auxquels le juge a ajouté foi pour faire droit à la demande. Le fait que l'affidavit réfère à l'opération d'infiltration, ayant pour but d'obtenir une admission de l'appelante de sa participation aux crimes commis en 1981, n'affecte en rien la conclusion de l'existence de motifs raisonnables de croire que des renseignements seront obtenus. Un aveu ou des informations relatives à la commission d'un crime constituent des renseignements à l'égard de ce crime. L'interception consensuelle avait donc pour objectif de recueillir des éléments de preuve. »
L'arrêt des procédures pour cause de délai préinculpatoire
Lepage c. R., 2008 QCCA 105 (CanLII)
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[21] Tout d'abord, le délai préinculpatoire, en lui-même, n'est pas suffisant pour justifier un arrêt des procédures, à moins que l'accusé n'établisse un préjudice réel dû à ce délai. Le seul écoulement du temps avant l'inculpation ne peut constituer une violation des droits d'un accusé puisque cela équivaudrait à imposer une prescription à l'égard des infractions criminelles. De plus, l'arrêt des procédures ne sera accordé que dans « les cas les plus manifestes » lorsqu'il serait impossible de remédier au préjudice causé au droit de l'accusé à une défense pleine et entière ou lorsque la continuation des procédures causerait un préjudice irréparable.
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[21] Tout d'abord, le délai préinculpatoire, en lui-même, n'est pas suffisant pour justifier un arrêt des procédures, à moins que l'accusé n'établisse un préjudice réel dû à ce délai. Le seul écoulement du temps avant l'inculpation ne peut constituer une violation des droits d'un accusé puisque cela équivaudrait à imposer une prescription à l'égard des infractions criminelles. De plus, l'arrêt des procédures ne sera accordé que dans « les cas les plus manifestes » lorsqu'il serait impossible de remédier au préjudice causé au droit de l'accusé à une défense pleine et entière ou lorsque la continuation des procédures causerait un préjudice irréparable.
mardi 25 septembre 2012
Le fait que l'intimé n'a pas tenté de dissimuler ses activités n'est pas une défense recevable contre une accusation d'utilisation non autorisée d'ordinateur
R. c. Parent, 2012 QCCA 1653 (CanLII)
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[58] L'intimé soutient avoir agi en toute transparence, étant conscient que ses utilisations de l'ordinateur étaient facilement repérables. Il ajoute que, dans ces circonstances, il n'a pu avoir l'intention criminelle nécessaire à la commission des infractions reprochées ayant agi au vu et au su des autorités.
[59] Le fait que l'intimé n'a pas tenté de dissimuler ses activités ne tempère en rien le caractère malhonnête des actes qui lui sont reprochés. C'est ce qu'a décidé la Cour d'appel d'Alberta dans l'arrêt Neve avec lequel je suis d'accord :
29 We agree with this interpretation. The reality is that many thefts and robberies are committed openly, without deception or trickery. The fact that an offender openly and blatantly takes property from a victim makes little difference to the victim. Or to anyone else for that matter. The result is the same; the victim's property has been wrongly taken. And the person is a victim of theft whether that taking was accomplished through deceptive guile or physical force. Further s. 322(3) of the Code recognizes the common sense inherent in this approach, making it clear that the mere fact that something is done openly does not, by itself, make it any less fraudulent for purposes of proving theft:
A taking or conversion of anything may be fraudulent notwithstanding that it is effected without secrecy or attempt at concealment
Lien vers la décision
[58] L'intimé soutient avoir agi en toute transparence, étant conscient que ses utilisations de l'ordinateur étaient facilement repérables. Il ajoute que, dans ces circonstances, il n'a pu avoir l'intention criminelle nécessaire à la commission des infractions reprochées ayant agi au vu et au su des autorités.
[59] Le fait que l'intimé n'a pas tenté de dissimuler ses activités ne tempère en rien le caractère malhonnête des actes qui lui sont reprochés. C'est ce qu'a décidé la Cour d'appel d'Alberta dans l'arrêt Neve avec lequel je suis d'accord :
29 We agree with this interpretation. The reality is that many thefts and robberies are committed openly, without deception or trickery. The fact that an offender openly and blatantly takes property from a victim makes little difference to the victim. Or to anyone else for that matter. The result is the same; the victim's property has been wrongly taken. And the person is a victim of theft whether that taking was accomplished through deceptive guile or physical force. Further s. 322(3) of the Code recognizes the common sense inherent in this approach, making it clear that the mere fact that something is done openly does not, by itself, make it any less fraudulent for purposes of proving theft:
A taking or conversion of anything may be fraudulent notwithstanding that it is effected without secrecy or attempt at concealment
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Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine
Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun
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