R c Anderson, 2011 NBBR 317 (CanLII)
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18. Les principes généraux régissant la manière dont les juges de première instance doivent aborder l’examen des mandats de perquisition peuvent se résumer comme suit :
(1) Le mandat et la dénonciation en vue de l’obtenir sont présumés valides.
(2) C’est à celui qui conteste qu’il incombe de convaincre le juge saisi de la révision que la dénonciation en vue d’obtenir un mandat ne satisfait pas aux exigences substantielles prescrites par la loi.
(3) Le juge qui décerne le mandat a le pouvoir de faire toutes les déductions raisonnables et de tirer des inférences des éléments de preuve exposés dans la dénonciation.
(4) La dénonciation doit être considérée dans son contexte et dans son ensemble, sans que chacune de ses parties soit soumise à un examen microscopique.
(5) La norme à appliquer est celle de savoir s’il existait des éléments de preuve sur lesquels le juge, agissant de façon judiciaire, pouvait s’appuyer pour décerner le mandat.
(6) Le juge saisi de la révision ne peut pas substituer sa propre opinion concernant la suffisance de la preuve.
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mardi 23 octobre 2012
Quiconque demande une autorisation ex parte a l’obligation juridique d’exposer de manière complète et sincère les faits considérés
R. c. Araujo, 2000 CSC 65 (CanLII)
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46 D’un point de vue pratique et afin de tirer des enseignements pour l’avenir, il faut se demander quel genre d’affidavit la police devrait présenter à l’appui d’une demande d’autorisation d’écoute électronique. Quiconque demande une autorisation ex parte a l’obligation juridique d’exposer de manière complète et sincère les faits considérés: cf. Dalglish c. Jarvie (1850), 2 Mac. & G. 231, 42 E.R. 89; R. c. Kensington Income Tax Commissioners, [1917] 1 K.B. 486 (C.A.); Re Church of Scientology and The Queen (No. 6) 1987 CanLII 122 (ON CA), (1987), 31 C.C.C. (3d) 449 (C.A. Ont.), à la p. 528; United States of America c. Friedland, [1996] O.J. No. 4399 (QL) (Div. gén.), aux par. 26 à 29, le juge Sharpe. Tant que l’affidavit satisfait à la norme juridique applicable, il n’est pas nécessaire qu’il soit aussi long qu’À la recherche du temps perdu, aussi sémillant que le Kama Sutra ni aussi détaillé qu’un guide de réparation d’automobiles. Il doit simplement énoncer les faits de manière complète et sincère pour que le juge saisi de la demande d’autorisation puisse déterminer s’ils remplissent le critère juridique applicable et justifient l’autorisation. Idéalement, il devrait non seulement être complet et sincère, mais aussi clair et concis. Nul besoin de faire état par le menu de l’enquête policière menée jusqu’alors, depuis des mois ou même des années.
47 En plus d’être complet et sincère, l’affidavit ne devrait jamais viser à tromper le lecteur. Dans le meilleur des cas, le recours à un libellé standard ne fait qu’ajouter au verbiage et se révèle rarement utile. Dans le pire des cas, il peut inciter le lecteur à penser que l’affidavit a un sens qu’il n’a pas. Même si le recours à un libellé standard ne fait pas automatiquement obstacle à l’autorisation (après tout, aucune disposition ne l’interdit formellement), j’invite fortement les juges à le décourager. On ne peut reprocher au déposant — il faudrait plutôt l’en féliciter — d’énoncer les faits de manière sincère, complète et simple. Les avocats et les policiers qui présentent des documents à l’appui d’une demande d’autorisation d’écoute électronique devraient résister à la tentation d’induire le juge en erreur en utilisant certaines formules ou en omettant stratégiquement certains éléments.
48 Enfin, bien qu’il n’existe pas d’obligation juridique en ce sens, il serait bon d’obtenir des affidavits des personnes ayant la connaissance la plus directe des faits en cause, par exemple, les policiers qui mènent l’enquête criminelle ou qui sont responsables des indicateurs. Cela donnerait plus de poids aux documents du fait qu’ils seraient plus fiables. Si tel avait été le cas en l’espèce, on aurait pu éviter que l’affaire ne sombre dans l’impasse actuelle, toujours en appel, après des années de débats sur des questions préliminaires, sans qu’un jugement définitif n’ait été rendu quant à la culpabilité ou à l’innocence des appelants.
49 Cela m’amène à examiner la conclusion défavorable à la crédibilité du déposant en l’espèce. Sur le plan pratique, ces questions et une bonne partie du litige auquel elles ont donné lieu auraient pu être évitées dans une large mesure, si la police avait simplement demandé à chacun des responsables d’indicateurs de signer un affidavit portant sur les éléments dont il avait une connaissance particulière. Il en aurait presque certainement résulté une vérification plus rigoureuse des faits attestés par affidavit, ce qui aurait peut‑être permis d’éviter certaines des erreurs qui se sont retrouvées dans l’affidavit. De plus, la demande d’autorisation aurait été moins liée à la crédibilité de l’agent qui, en fin de compte, s’est porté garant de la véracité de tous les faits allégués.
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46 D’un point de vue pratique et afin de tirer des enseignements pour l’avenir, il faut se demander quel genre d’affidavit la police devrait présenter à l’appui d’une demande d’autorisation d’écoute électronique. Quiconque demande une autorisation ex parte a l’obligation juridique d’exposer de manière complète et sincère les faits considérés: cf. Dalglish c. Jarvie (1850), 2 Mac. & G. 231, 42 E.R. 89; R. c. Kensington Income Tax Commissioners, [1917] 1 K.B. 486 (C.A.); Re Church of Scientology and The Queen (No. 6) 1987 CanLII 122 (ON CA), (1987), 31 C.C.C. (3d) 449 (C.A. Ont.), à la p. 528; United States of America c. Friedland, [1996] O.J. No. 4399 (QL) (Div. gén.), aux par. 26 à 29, le juge Sharpe. Tant que l’affidavit satisfait à la norme juridique applicable, il n’est pas nécessaire qu’il soit aussi long qu’À la recherche du temps perdu, aussi sémillant que le Kama Sutra ni aussi détaillé qu’un guide de réparation d’automobiles. Il doit simplement énoncer les faits de manière complète et sincère pour que le juge saisi de la demande d’autorisation puisse déterminer s’ils remplissent le critère juridique applicable et justifient l’autorisation. Idéalement, il devrait non seulement être complet et sincère, mais aussi clair et concis. Nul besoin de faire état par le menu de l’enquête policière menée jusqu’alors, depuis des mois ou même des années.
47 En plus d’être complet et sincère, l’affidavit ne devrait jamais viser à tromper le lecteur. Dans le meilleur des cas, le recours à un libellé standard ne fait qu’ajouter au verbiage et se révèle rarement utile. Dans le pire des cas, il peut inciter le lecteur à penser que l’affidavit a un sens qu’il n’a pas. Même si le recours à un libellé standard ne fait pas automatiquement obstacle à l’autorisation (après tout, aucune disposition ne l’interdit formellement), j’invite fortement les juges à le décourager. On ne peut reprocher au déposant — il faudrait plutôt l’en féliciter — d’énoncer les faits de manière sincère, complète et simple. Les avocats et les policiers qui présentent des documents à l’appui d’une demande d’autorisation d’écoute électronique devraient résister à la tentation d’induire le juge en erreur en utilisant certaines formules ou en omettant stratégiquement certains éléments.
48 Enfin, bien qu’il n’existe pas d’obligation juridique en ce sens, il serait bon d’obtenir des affidavits des personnes ayant la connaissance la plus directe des faits en cause, par exemple, les policiers qui mènent l’enquête criminelle ou qui sont responsables des indicateurs. Cela donnerait plus de poids aux documents du fait qu’ils seraient plus fiables. Si tel avait été le cas en l’espèce, on aurait pu éviter que l’affaire ne sombre dans l’impasse actuelle, toujours en appel, après des années de débats sur des questions préliminaires, sans qu’un jugement définitif n’ait été rendu quant à la culpabilité ou à l’innocence des appelants.
49 Cela m’amène à examiner la conclusion défavorable à la crédibilité du déposant en l’espèce. Sur le plan pratique, ces questions et une bonne partie du litige auquel elles ont donné lieu auraient pu être évitées dans une large mesure, si la police avait simplement demandé à chacun des responsables d’indicateurs de signer un affidavit portant sur les éléments dont il avait une connaissance particulière. Il en aurait presque certainement résulté une vérification plus rigoureuse des faits attestés par affidavit, ce qui aurait peut‑être permis d’éviter certaines des erreurs qui se sont retrouvées dans l’affidavit. De plus, la demande d’autorisation aurait été moins liée à la crédibilité de l’agent qui, en fin de compte, s’est porté garant de la véracité de tous les faits allégués.
Une ordonnance de la Cour est présumée valide
R. v. Collins, 1989 CanLII 264 (ON CA)
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There is no doubt that the facts set forth in the information sworn in support of the application for a search warrant were sufficient to enable a justice of the peace to act judicially and properly issue a search warrant pursuant to the provisions of s.443 of the Criminal Code of Canada [now R.S.C. 1985 c. C-46 s.487]. There is, of course, a presumption of validity with respect to a search warrant and the sworn information supporting it. A motion may be made by way of certiorari to quash a search warrant but if it is desired to adduce evidence from the informant or other witnesses in support of such an application, there must be allegations of deliberate falsehood or omission or a reckless disregard for the truth with respect to the material used to obtain the issuance of the warrant. Such allegations must be made out, as to the facts, to the extent of a prima facie case which may be established by inspection of the material or by affidavit except in the most exceptional cases. (See Re Church of Scientology and the Queen (No. 4) reflex, (1985), 17 C.C.C. (3d) 499, per Osler J. at pp. 509-10.) The deliberate falsity, omission or reckless disregard alleged must be that of the affiant to the "information and not that of an informant who has provided him with the alleged facts
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There is no doubt that the facts set forth in the information sworn in support of the application for a search warrant were sufficient to enable a justice of the peace to act judicially and properly issue a search warrant pursuant to the provisions of s.443 of the Criminal Code of Canada [now R.S.C. 1985 c. C-46 s.487]. There is, of course, a presumption of validity with respect to a search warrant and the sworn information supporting it. A motion may be made by way of certiorari to quash a search warrant but if it is desired to adduce evidence from the informant or other witnesses in support of such an application, there must be allegations of deliberate falsehood or omission or a reckless disregard for the truth with respect to the material used to obtain the issuance of the warrant. Such allegations must be made out, as to the facts, to the extent of a prima facie case which may be established by inspection of the material or by affidavit except in the most exceptional cases. (See Re Church of Scientology and the Queen (No. 4) reflex, (1985), 17 C.C.C. (3d) 499, per Osler J. at pp. 509-10.) The deliberate falsity, omission or reckless disregard alleged must be that of the affiant to the "information and not that of an informant who has provided him with the alleged facts
lundi 22 octobre 2012
L'absence d'antécédents judiciaires en matière de fraude n'est pas déterminante, car un profil de vie rassurant et parfois exemplaire dans la société devient l'arme offensive du fraudeur
R. c. N'Drin Beugré, 2011 QCCS 5363 (CanLII)
[89] Pour atténuer la durée d'incarcération de leurs clients, les procureurs des accusés soulignent les aspects positifs des parcours de vie de leurs clients respectifs. L'absence d'antécédents judiciaires et la poursuite d'emplois légitimes de façon continue sont des considérants importants à leurs yeux.
[90] Encore une fois, le Tribunal fait siens les propos du juge Wagner lorsqu'il prononce la peine de Lacroix :
« En l'espèce, l'absence d'antécédents judiciaires en matière de fraude n'est pas déterminante. La bonne réputation ou l'absence d'antécédents d'un individu reconnu coupable de fraude n'a pas la même portée que si cette personne, sous le coup d'une émotion passagère, commet un autre acte criminel isolé.
La planification, la réputation, le savoir et l'utilisation des connaissances par l'auteur d'une fraude et la fabrication de faux documents à grande échelle ne permettent pas au Tribunal de retenir comme un facteur atténuant l'absence d'antécédents judiciaires. »
[91] Un profil de vie rassurant et parfois exemplaire dans la société devient l'arme offensive du fraudeur.
[92] C'est pour cela que le passé apparemment sans tache et la bonne réputation de Beugré et de Cholette ne peut, en l'espèce, avoir un effet déterminant sur leurs peines.
[93] Les propos de l'auteur Clayton Ruby sont pertinents sur ce point :
« The high rate of "white-collar" crimes committed by persons of prior excellent reputation tends to blunt the otherwise mitigating effect of good background, and many first offenders have received high sentences for sophisticated frauds. »
[94] Tout est une façade dans le dossier Norbourg et le profil rassurant des responsables de la fraude fait partie de l'illusion fictive qui a réussi à berner autant de gens. Cette criminalité se camoufle dans des apparences de normalité et de décence.
[95] Malgré le rôle de soutien qu'exerçaient les contrevenants auprès de Lacroix, la dissuasion générale et la dénonciation constituent des facteurs déterminants dans la fixation de leurs peines.
[96] Bien qu'ils n'occupent pas une position de premier plan dans l'élaboration d'un système frauduleux de transfert de fonds, leur participation était à tout le moins nécessaire à son fonctionnement. Leur participation était essentielle à la réussite des stratagèmes mis en place pour camoufler les détournements. Sans la complicité soutenue de Beugré et Cholette, Lacroix aurait échoué plus rapidement dans son œuvre maléfique.
Le mode de participation à une infraction peut être un motif pertinent dans la détermination du degré de responsabilité d'un délinquant
R. c. N'Drin Beugré, 2011 QCCS 5363 (CanLII)
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[83] Le mode de participation à une infraction peut être un motif pertinent dans la détermination du degré de responsabilité d'un délinquant. Ainsi, la peine de l'auteur principal d'un crime peut être plus sévère que celle de la personne qui prête assistance à l'auteur principal. Chaque cas est unique. Le Tribunal a déjà expliqué cette distinction en référant au rôle exclusif d'instigateur de Lacroix lorsque comparé aux rôles d'exécutants de Beugré et de Cholette.
[84] Par contre, le Tribunal rejette l'argument qu'une connaissance des fraudes fondée sur l'ignorance volontaire correspond à un état d'esprit moins condamnable que si les contrevenants avaient eu une connaissance réelle que Lacroix détournait des fonds illégalement.
[85] Selon les enseignements de la Cour suprême du Canada, la connaissance imputée à l'ignorance volontaire est l'équivalent d'une connaissance réelle. L'ignorance volontaire opère en remplacement d'une connaissance réelle. L'ignorance volontaire ne définit pas la mens rearequise pour une infraction particulière. Ainsi, que l'infraction soit commise avec la connaissance réelle ou par ignorance volontaire, elle reste la même et la peine prévue par le législateur également. Il n'y a donc aucune distinction quant à la détermination de la culpabilité.
[86] Cependant, cela ne signifie pas que dans les circonstances particulières d'une affaire, que la distinction entre la connaissance réelle et l'ignorance volontaire n'aura aucun effet quant à la détermination de la peine à infliger.
[87] De l'avis du Tribunal, dans la présente affaire, la connaissance des fraudes commises par Lacroix par une ignorance volontaire n'est pas un facteur atténuant quant à la détermination de la peine à infliger à Beugré et à Cholette.
Le calcul de la détention provisoire post-22 février 2010
R. c. Alonso, 2012 QCCQ 7919 (CanLII)
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[12] Le 22 février 2010 marque l’entrée en vigueur des articles 719(3) et (3.1) qui se lisent comme suit :
(...)
[13] Deux approches ont été considérées par les tribunaux dans l’analyse de l’exception prévue à l’article 719(3.1). Il s'agit des approches dites quantitative et qualitative.
[14] Les tenants de l'approche quantitative ont comparé des peines de durée équivalente qui seraient imposées à un accusé détenu provisoirement et à un autre qui aurait bénéficié d’une mise en liberté pendant les procédures.
[15] Ainsi, dans le cas d’une même peine prononcée le même jour, l’accusé détenu purgerait une peine plus longue que celui en liberté puisque la période de détention provisoire n’est pas prise en compte dans le calcul de la peine aux fins de la libération conditionnelle.
[16] Dans R. c. Gosselin, 2011 QCCQ 11688 (CanLII), 2011 QCCQ 11688, mon collègue Denis Lavergne, se basant sur plusieurs décisions, a procédé à une analyse de l’expression « si les circonstances le justifient » mentionnée au paragraphe 3.1. Pour lui, la méthode quantitative doit être écartée parce que l’exception prévue par le législateur deviendrait la règle s’il fallait accorder automatiquement le crédit d’un jour et demi aux accusés en détention provisoire parce que pour une même peine, ils purgeraient une peine plus longue que ceux remis en liberté en attendant l'issue des procédures.
[17] Cette règle quasi automatique n'a certainement pas été voulue par le législateur dont on doit présumer qu'il connaissait cette situation.
[18] Je partage l'opinion du juge Lavergne et je ne retiens pas l'approche quantitative. Mes collègues Provost et Marleau ont fait de même dans leur décision respective soit dans R. c. Beaudry, 505-01-090819-109, le 25 avril 2012 et dans R. c. Lefrançois, 2012 QCCQ 5655 (CanLII), 2012 QCCQ 5655.
[19] Le crédit majoré sur la base de cette approche n’est donc pas accordé.
[20] Dans l’approche qualitative, on considère les conditions et les divers aspects affairant à la période de détention provisoire et je cite mon collègue Lavergne dans l’affaire Gosselin, précitée :
[49] Ainsi le délai écoulé entre le plaidoyer de culpabilité et la détermination de la peine, l’indisponibilité du tribunal pour raison de maladie, l’éloignement de la famille du détenu, l’impossibilité financière du détenu de verser la caution exigée et les conditions difficiles représentent autant de circonstances dont les tribunaux ont tenu compte pour accorder un crédit d’un jour et demi.
[50] Toutefois, dans R. c. Velez-Lau, 2011 ONSC 4805 (CanLII), 2011 ONSC 4805, le tribunal laisse entendre que les conditions difficiles de détention provisoire ne déclenchent pas un automatisme déterminant à tous coups un crédit d’un jour et demi. Les circonstances doivent être établies.
[21] Le juge Lavergne ajoute que la méthode qualitative exprimée dans l’affaire R. v. Morris, 2011 ONSC 5206 (CanLII), 2011 ONSC 5206, semble être majoritairement suivie par les tribunaux du pays malgré la décision de principe du juge Green de la Cour de justice de l'Ontario dans R. v. Johnson, 2011 ONCJ 77 (CanLII), 2011 ONCJ 77, où l’approche quantitative avait été retenue.
[22] Le 6 septembre dernier, dans l'affaire R. c. Mayers, 2011 BCCA 365 (CanLII), 2011 BCCA 365, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, en raison de l'absence de fondement factuel, a refusé de déterminer si les circonstances justifiaient le crédit majoré. La Cour a aussi conclu que l'accusé n'avait pas droit au crédit majoré. Cette décision, qui serait la seule d'une cour d'appel, n'apporte aucun éclairage sur les deux approches.
[23] Dans R. c. Bérubé, 2012 QCCS 1379 (CanLII), 2012 QCCS 1379, le juge Richard Grenier a conclu que les circonstances suivantes justifiaient l’application de l’exception prévue à 719(3.1). Je le cite :
[58] Au surcroît, le ministère public a, à l’origine, accusé monsieur Bérubé dans les districts de Longueuil et de Rimouski alors que tout cela aurait pu se faire dans le même district.
[59] Pendant un an et demi, on l’a transporté de Rimouski à Longueuil en passant par Québec et Trois-Rivières.
[60] À chaque occasion, il a dû interrompre ses activités intra-muros, être reclassé dans un nouveau secteur et subir différents préjudices qu’il a relatés dans son témoignage.
[61] Après le transfert à Rimouski du dossier de Longueuil et l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité, le Tribunal a dû, à deux occasions, rendre des ordonnances, pour empêcher le transport de l’accusé à Longueuil, parce que la poursuite s’entêtait à ne pas faire rayer le dossier du rôle.
[24] En l’espèce, la défense allègue essentiellement la barrière linguistique pour appuyer sa demande de crédit majoré sans présenter de preuve des préjudices et des inconvénients occasionnés par cette situation.
[25] Même si je suis prêt à convenir que l’accusé a pu subir certains inconvénients inhérents à cette situation, cela ne relève pas de la connaissance judiciaire d’en mesurer l’ampleur ou d’en soupeser le poids sans élément de preuve sur lesquels s’appuyer.
[26] Il appartient à l’accusé de présenter une preuve afin d’obtenir le crédit majoré prévu à l’exception et il ne l’a pas fait.
[27] La simple demande basée sur la barrière linguistique n’est pas suffisante pour me permettre de conclure que les circonstances justifient l’exception du crédit majoré.
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[12] Le 22 février 2010 marque l’entrée en vigueur des articles 719(3) et (3.1) qui se lisent comme suit :
(...)
[13] Deux approches ont été considérées par les tribunaux dans l’analyse de l’exception prévue à l’article 719(3.1). Il s'agit des approches dites quantitative et qualitative.
[14] Les tenants de l'approche quantitative ont comparé des peines de durée équivalente qui seraient imposées à un accusé détenu provisoirement et à un autre qui aurait bénéficié d’une mise en liberté pendant les procédures.
[15] Ainsi, dans le cas d’une même peine prononcée le même jour, l’accusé détenu purgerait une peine plus longue que celui en liberté puisque la période de détention provisoire n’est pas prise en compte dans le calcul de la peine aux fins de la libération conditionnelle.
[16] Dans R. c. Gosselin, 2011 QCCQ 11688 (CanLII), 2011 QCCQ 11688, mon collègue Denis Lavergne, se basant sur plusieurs décisions, a procédé à une analyse de l’expression « si les circonstances le justifient » mentionnée au paragraphe 3.1. Pour lui, la méthode quantitative doit être écartée parce que l’exception prévue par le législateur deviendrait la règle s’il fallait accorder automatiquement le crédit d’un jour et demi aux accusés en détention provisoire parce que pour une même peine, ils purgeraient une peine plus longue que ceux remis en liberté en attendant l'issue des procédures.
[17] Cette règle quasi automatique n'a certainement pas été voulue par le législateur dont on doit présumer qu'il connaissait cette situation.
[18] Je partage l'opinion du juge Lavergne et je ne retiens pas l'approche quantitative. Mes collègues Provost et Marleau ont fait de même dans leur décision respective soit dans R. c. Beaudry, 505-01-090819-109, le 25 avril 2012 et dans R. c. Lefrançois, 2012 QCCQ 5655 (CanLII), 2012 QCCQ 5655.
[19] Le crédit majoré sur la base de cette approche n’est donc pas accordé.
[20] Dans l’approche qualitative, on considère les conditions et les divers aspects affairant à la période de détention provisoire et je cite mon collègue Lavergne dans l’affaire Gosselin, précitée :
[49] Ainsi le délai écoulé entre le plaidoyer de culpabilité et la détermination de la peine, l’indisponibilité du tribunal pour raison de maladie, l’éloignement de la famille du détenu, l’impossibilité financière du détenu de verser la caution exigée et les conditions difficiles représentent autant de circonstances dont les tribunaux ont tenu compte pour accorder un crédit d’un jour et demi.
[50] Toutefois, dans R. c. Velez-Lau, 2011 ONSC 4805 (CanLII), 2011 ONSC 4805, le tribunal laisse entendre que les conditions difficiles de détention provisoire ne déclenchent pas un automatisme déterminant à tous coups un crédit d’un jour et demi. Les circonstances doivent être établies.
[21] Le juge Lavergne ajoute que la méthode qualitative exprimée dans l’affaire R. v. Morris, 2011 ONSC 5206 (CanLII), 2011 ONSC 5206, semble être majoritairement suivie par les tribunaux du pays malgré la décision de principe du juge Green de la Cour de justice de l'Ontario dans R. v. Johnson, 2011 ONCJ 77 (CanLII), 2011 ONCJ 77, où l’approche quantitative avait été retenue.
[22] Le 6 septembre dernier, dans l'affaire R. c. Mayers, 2011 BCCA 365 (CanLII), 2011 BCCA 365, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, en raison de l'absence de fondement factuel, a refusé de déterminer si les circonstances justifiaient le crédit majoré. La Cour a aussi conclu que l'accusé n'avait pas droit au crédit majoré. Cette décision, qui serait la seule d'une cour d'appel, n'apporte aucun éclairage sur les deux approches.
[23] Dans R. c. Bérubé, 2012 QCCS 1379 (CanLII), 2012 QCCS 1379, le juge Richard Grenier a conclu que les circonstances suivantes justifiaient l’application de l’exception prévue à 719(3.1). Je le cite :
[58] Au surcroît, le ministère public a, à l’origine, accusé monsieur Bérubé dans les districts de Longueuil et de Rimouski alors que tout cela aurait pu se faire dans le même district.
[59] Pendant un an et demi, on l’a transporté de Rimouski à Longueuil en passant par Québec et Trois-Rivières.
[60] À chaque occasion, il a dû interrompre ses activités intra-muros, être reclassé dans un nouveau secteur et subir différents préjudices qu’il a relatés dans son témoignage.
[61] Après le transfert à Rimouski du dossier de Longueuil et l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité, le Tribunal a dû, à deux occasions, rendre des ordonnances, pour empêcher le transport de l’accusé à Longueuil, parce que la poursuite s’entêtait à ne pas faire rayer le dossier du rôle.
[24] En l’espèce, la défense allègue essentiellement la barrière linguistique pour appuyer sa demande de crédit majoré sans présenter de preuve des préjudices et des inconvénients occasionnés par cette situation.
[25] Même si je suis prêt à convenir que l’accusé a pu subir certains inconvénients inhérents à cette situation, cela ne relève pas de la connaissance judiciaire d’en mesurer l’ampleur ou d’en soupeser le poids sans élément de preuve sur lesquels s’appuyer.
[26] Il appartient à l’accusé de présenter une preuve afin d’obtenir le crédit majoré prévu à l’exception et il ne l’a pas fait.
[27] La simple demande basée sur la barrière linguistique n’est pas suffisante pour me permettre de conclure que les circonstances justifient l’exception du crédit majoré.
vendredi 19 octobre 2012
L’étranglement en droit criminel
Rapport du groupe de travail sur l’étranglement de la section du droit pénal
Lien vers le rapport en question
Les infractions principales applicables à cette conduite sont celles de voies de fait, voies de fait causant des lésions corporelles et voies de fait graves. L’infraction de tentative de meurtre pourrait également s’appliquer lorsque l’intention expresse peut être démontrée. D’autres infractions de tentative pourraient également être applicables.
L’infraction d’étouffement ou d’étranglement en vue de vaincre la résistance est évidemment aussi applicable. Il faut toutefois que la conduite s’accompagne de l’intention de rendre possible la perpétration d’un autre acte criminel ou d’y contribuer.
L’étranglement constituerait manifestement au moins des voies de fait simples. Compte tenu des circonstances, il pourrait bien aussi constituer des voies de fait causant des lésions corporelles ou une tentative de commettes de telles voies de fait selon la nature de la blessure résultante.
Cependant, étant donné les conséquences possiblement mortelles décrites plus précisément ci-dessous, l’accusation la plus appropriée pourrait être celle de voies de fait graves ou tentative de voies de fait grave. Ces infractions sont respectivement assorties de peines maximales de quatorze et de sept ans d’emprisonnement.
Les blessures consécutives à l’étranglement peuvent être suffisantes pour satisfaire aux définitions de blesser, mutiler ou défigurer, que l’on retrouve dans la jurisprudence; dans de nombreux cas, toutefois, l’étranglement constituera une infraction de mettre en danger la vie ou de tenter de le faire. Dans R. c. Williams, la Cour suprême a résumé ainsi la définition de cet élément :
Dans Godin, précité, le juge Cory a déclaré, à la p. 485 : « [l]e paragraphe se rapporte à des voies de fait qui ont pour conséquence de blesser, mutiler ou défigurer » (je souligne) ou (pour compléter la liste) de mettre la vie en danger. Le mot « danger » renvoi à la notion de péril ou de risque, tout comme le terme « endanger », utilisé dans la version anglaise et qui signifie « [p]ut in danger . . . put in peril . . . [i]ncur the risk » : New Shorter Oxford English Dictionary on Historical Principles (1993), vol. 1, p. 816.
Les lésions corporelles ne constituent pas une condition à l’infraction de mettre la vie en danger dans le cas de voies de fait graves. Cependant, les voies de fait commises doivent avoir réellement mis en danger la vie de la victime et non seulement avoir comporté la possibilité d’une telle conséquence. Voici des exemples hypothétiques d’une telle conduite :
[TRADUCTION] Par exemple, si D. et V. se trouvent debout sur un balcon au vingtième étage d’un édifice et que D. pousse V. et fait passer V. de l’autre côté du garde-fou que V. réussit à s’accrocher miraculeusement jusqu’à ce qu’on vienne à son secours, peut-on douter que les voies de fait de D. ont mis en danger la vie de V. ? Dans cet exemple, D. a commis des voies de fait sur V. et ces voies de fait ont mis la vie de V. en danger même si V. n’a pas subi de lésion corporelle. On pourrait en dire autant si D. avait poussé V. dans un carrefour achalandé malgré la possibilité que des véhicules ne heurtent V. Même si un automobiliste attentif a été capable d’éviter de heurter V., peut-on douter que la vie de V. était en danger ?
Lorsque cet élément n’est pas démontré, une déclaration de culpabilité pour voies de fait graves peut néanmoins être prononcée si l’élément moral de l’infraction est établi et si les actions du délinquant dépassent la simple préparation
Tiré de : Rapport du groupe de travail sur l’étranglement de la section du droit pénal
http://www.ulcc.ca/fr/poam2/Strangulation_Rep_Fr.pdf
Lien vers le rapport en question
Les infractions principales applicables à cette conduite sont celles de voies de fait, voies de fait causant des lésions corporelles et voies de fait graves. L’infraction de tentative de meurtre pourrait également s’appliquer lorsque l’intention expresse peut être démontrée. D’autres infractions de tentative pourraient également être applicables.
L’infraction d’étouffement ou d’étranglement en vue de vaincre la résistance est évidemment aussi applicable. Il faut toutefois que la conduite s’accompagne de l’intention de rendre possible la perpétration d’un autre acte criminel ou d’y contribuer.
L’étranglement constituerait manifestement au moins des voies de fait simples. Compte tenu des circonstances, il pourrait bien aussi constituer des voies de fait causant des lésions corporelles ou une tentative de commettes de telles voies de fait selon la nature de la blessure résultante.
Cependant, étant donné les conséquences possiblement mortelles décrites plus précisément ci-dessous, l’accusation la plus appropriée pourrait être celle de voies de fait graves ou tentative de voies de fait grave. Ces infractions sont respectivement assorties de peines maximales de quatorze et de sept ans d’emprisonnement.
Les blessures consécutives à l’étranglement peuvent être suffisantes pour satisfaire aux définitions de blesser, mutiler ou défigurer, que l’on retrouve dans la jurisprudence; dans de nombreux cas, toutefois, l’étranglement constituera une infraction de mettre en danger la vie ou de tenter de le faire. Dans R. c. Williams, la Cour suprême a résumé ainsi la définition de cet élément :
Dans Godin, précité, le juge Cory a déclaré, à la p. 485 : « [l]e paragraphe se rapporte à des voies de fait qui ont pour conséquence de blesser, mutiler ou défigurer » (je souligne) ou (pour compléter la liste) de mettre la vie en danger. Le mot « danger » renvoi à la notion de péril ou de risque, tout comme le terme « endanger », utilisé dans la version anglaise et qui signifie « [p]ut in danger . . . put in peril . . . [i]ncur the risk » : New Shorter Oxford English Dictionary on Historical Principles (1993), vol. 1, p. 816.
Les lésions corporelles ne constituent pas une condition à l’infraction de mettre la vie en danger dans le cas de voies de fait graves. Cependant, les voies de fait commises doivent avoir réellement mis en danger la vie de la victime et non seulement avoir comporté la possibilité d’une telle conséquence. Voici des exemples hypothétiques d’une telle conduite :
[TRADUCTION] Par exemple, si D. et V. se trouvent debout sur un balcon au vingtième étage d’un édifice et que D. pousse V. et fait passer V. de l’autre côté du garde-fou que V. réussit à s’accrocher miraculeusement jusqu’à ce qu’on vienne à son secours, peut-on douter que les voies de fait de D. ont mis en danger la vie de V. ? Dans cet exemple, D. a commis des voies de fait sur V. et ces voies de fait ont mis la vie de V. en danger même si V. n’a pas subi de lésion corporelle. On pourrait en dire autant si D. avait poussé V. dans un carrefour achalandé malgré la possibilité que des véhicules ne heurtent V. Même si un automobiliste attentif a été capable d’éviter de heurter V., peut-on douter que la vie de V. était en danger ?
Lorsque cet élément n’est pas démontré, une déclaration de culpabilité pour voies de fait graves peut néanmoins être prononcée si l’élément moral de l’infraction est établi et si les actions du délinquant dépassent la simple préparation
Tiré de : Rapport du groupe de travail sur l’étranglement de la section du droit pénal
http://www.ulcc.ca/fr/poam2/Strangulation_Rep_Fr.pdf
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