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vendredi 15 janvier 2016

La jurisprudence confirme l’existence du pouvoir d’un tribunal d’exercer un contrôle préliminaire sur les requêtes (requête Kutynec)

Montréal (Ville de) c. Blumberger, 2012 QCCM 5 (CanLII)

Lien vers la décision
[60]   À cet égard, rappelons qu’il est maintenant bien établi que la présentation d’une requête fondée sur la Charte ne donne pas automatiquement le droit à une audition complète sur les questions soulevées. Une abondante jurisprudence confirme l’existence du pouvoir d’un tribunal d’exercer un contrôle préliminaire sur ces requêtes, afin de vérifier qu’il existe une base factuelle et légale suffisante pour tenir une audition. Voir notamment : R. v. Vukelich, 1996 CanLII 1005 (BC CA), par. 26; R. v. Gaudaur, 2010 BCCA 157 (CanLII), par. 7 et 15; R. v. Kutynec, 1992 CanLII 7751 (ON CA)[1992] O.J. No. 347 (Ont. C.A.), par. 31-33.

Le bon déroulement des instances - Requête Kutynec

R. c. Tshiamala, 2013 QCCS 7071 (CanLII)


[51]         Pour que notre système de justice fonctionne, les juges qui président les procès doivent être en mesure de veiller au bon déroulement des instances.  L’un des mécanismes leur permettant d’y arriver est le pouvoir de refuser de procéder à une audition de la preuve lorsque la partie qui en fait la demande est incapable de démontrer qu’il est raisonnablement probable que cette audience aidera à résoudre les questions pertinentes soumises au tribunal. R. c. Pires, précité, par. 35, 24; R. c. Kutynec1992 CanLII 7751 (ON CA)[1992] O.J. No. 347 (C.A.); R. c. Vukelich1996 CanLII 1005 (BC CA)[1996] B.C.J. No. 1535 (C.A.), par. 26; R. c. Sproule (1975), 26 C.C.C. (2d) 92, (C.A. Ont.), pp. 97-98; R. c. Dietrich(1971),1970 CanLII 377 (ON CA)1 C.C.C. (2d) 49 (C.A. Ont.), demande d’autorisation d’appel rejetée, [1970] R.C.S. xi.
[52]         La Cour d’appel de la Colombie-Britannique, dans R. c. Vukelich, précité, a dit (par. 26) :
      Based on these authorities, it does not follow that an accused is always entitled as of right to a voir dire in the course of a criminal trial in order to challenge the constitutionality of a search. The trial judge must control the course of the proceedings, and he or she need not embark upon an enquiry that will not assist the proper trial of the real issues. […]

mercredi 13 janvier 2016

jeudi 26 novembre 2015

L'arrêt Wagg


Même si déterminer le moment où l’on doit ordonner la production de la preuve documentaire de la poursuite est un exercice hautement contextuel, certaines lignes directrices sont en cours d’élaboration. Dans l’affaire D P c. Wagg de 2004, la Cour d’appel de l’Ontario a adopté un processus de sélection qui a depuis été grandement utilisé quand ces documents sont demandés dans le cadre d’une affaire civile. Dans l’affaire Wagg, la demanderesse a intenté une poursuite civile pour les préjudices que lui aurait causés l’agression sexuelle du défendeur. Le défendeur n’avait pas été reconnu coupable au pénal puisque les accusations avaient été suspendues en raison d’un retard déraisonnable. À l’appui de sa poursuite civile, la demanderesse a réclamé la production des déclarations que le défendeur avait fournies à la police durant l’enquête criminelle. Ces déclarations avaient été jugées inadmissibles au procès parce que le tribunal avait conclu que le droit de l’accusé d’avoir recours à un avocat en vertu de l’alinéa 10b) de la Charte avait été enfreint.
En raison d’une divulgation dans le cadre du procès pénal, le défendeur dans l’affaire Wagg était en possession des dossiers de l’enquête policière détenus par la poursuite. Dans les Règles des procédures civiles de l’Ontario, il n’existait pas de mécanisme pour informer le ministère public de la demande de production ni de moyen de permettre au ministère public de se prononcer sur cette question. Afin d’aborder ce problème, et plus particulièrement les préoccupations relatives à la vie privée et à l’intégrité du processus pénal, la Cour d’appel de l’Ontario a confirmé l’utilisation d’un processus qui est maintenant connu sous le nom de « mécanisme de filtrage Wagg » et a ordonné la production de la preuve. Tout en soulignant l’importance d’avoir la forme de communication préalable la plus complète dans les poursuites civiles, le juge Rosenberg a accepté qu’il puisse y avoir des raisons d’intérêt public impérieuses justifiant la décision de ne pas divulguer certains renseignements.
Le processus adopté par la Cour d’appel dans l’arrêt Wagg est le suivant :
  • Une personne en possession de documents de la poursuite doit divulguer leur existence dans l’affidavit de documents si elle est partie à une instance civile où ces documents pourraient être pertinents.
  • La personne ne devrait pas divulguer le contenu intégral des documents tant que le poursuivant, la police ou les deux n’auront pas consenti à leur divulgation ou tant qu’une ordonnance du tribunal n’a pas été rendue pour forcer leur divulgation. Quand le tribunal détermine s’il doit rendre obligatoire la divulgation d’un document, il doit s’assurer que le document en question contient des renseignements qui pourraient être pertinents.
  • Dans l’affirmative, le tribunal entreprend ensuite un processus d’évaluation afin de déterminer s’il [traduction] « existe dans le cas particulier une valeur sociale dominante et un intérêt public à la non-divulgation qui prévaut sur celui de favoriser l’administration de la justice par l’accès libre et entier des parties à l’information pertinente ».
Le juge Rosenberg a reconnu que le mécanisme de filtrage Wagg pourrait retarder considérablement le règlement du litige et en augmenter grandement le coût. Toutefois, il croyait que la plupart des demandes de production pourraient être résolues sur consentement. Il a affirmé ce qui suit :
[traduction] Je m’attends à ce que les parties et les agents de l’État soient généralement en mesure de s’entendre sur la divulgation des documents dans bien des cas. Quand la partie en possession de la preuve documentaire de la poursuite a accès aux documents, l’équité exige normalement que l’autre partie y ait également accès. [...] 
De plus, les parties et les agents de l’État devraient accepter de produire tous les renseignements qui ont été utilisés par le tribunal dans le cadre de la poursuite pénale s’ils revêtent un intérêt d’importance supérieure, par exemple des documents privés de plaignants dans des affaires d’agression sexuelle ou des dossiers médicaux confidentiels.
Bien qu’il n’ait pas été adopté dans toutes les provinces et tous les territoires, le mécanisme de filtrage Wagg a été utilisé à l’intérieur et à l’extérieur de l’Ontario et a été cité et approuvé par la Cour suprême du Canada.
Puisque l’affaire Wagg porte sur des parties privées plaidant une affaire civile, on s’est rapidement demandé si le mécanisme Wagg s’appliquait quand des organismes publics comme les SAE voulaient obtenir l’accès aux documents de la poursuite. En effet, parmi le nombre considérable de demandes faites au ministère du Procureur général de l’Ontario après l’affaire Wagg, 20 % concernaient des affaires de protection de la jeunesse, juste derrière les accidents automobiles. Une décision rendue en 2007, Children’s Aid Society of Algoma c. D P , a permis de régler la question et de confirmer que le mécanisme Wagg s’applique aux demandes des SAE pour les dossiers des tiers.
Dans l’affaire Algoma, la SAE craignait que les enfants vivant dans une famille où il y avait semble-t-il de la violence et beaucoup de conflits soient à risque de subir des problèmes affectifs et d’être exposés à une conduite inappropriée. La SAE a demandé que le procureur général de l’Ontario divulgue les casiers judiciaires, le contenu des documents de la poursuite, ainsi que les dossiers de probation et de libération conditionnelle concernant la mère de l’enfant et son petit ami. Le procureur général a invoqué le droit à la vie privée des tiers nommés dans les dossiers. Il a également affirmé que, si ces renseignements étaient produits, cela pourrait entraîner des craintes de poursuites pénales : les témoins pourraient être réticents à coopérer avec la police si leurs noms risquaient ensuite d’être divulgués à la SAE .
La SAE a soutenu que la nécessité de protéger l’intérêt supérieur de l’enfant devrait l’emporter sur le droit à la vie privée des tiers. Dans cette affaire, il n’y avait pas d’enquête criminelle en cours dont l’intégrité pouvait être entravée par la production de documents. La juge Pardu a indiqué qu’il était vrai que des préoccupations d’intérêt public et des préoccupations relatives à la vie privée pourraient restreindre la production, mais que ce serait une situation rare étant donné que des [traduction] « motifs d’intérêts publics importants justifient le travail des sociétés d’aide à l’enfance ». La SAE a fini par obtenir accès aux dossiers, à l’exception des codes policiers internes, des numéros du service d’empreintes digitales et des noms des informateurs confidentiels qui ont été retirés. En outre, pour les copies fournies aux parents de l’enfant, le tribunal a également ordonné le retrait des numéros d’assurance sociale, des permis de conduire et des plaques d’immatriculation des tiers, ainsi que leur date de naissance, leurs numéros de téléphone et leurs adresses. Le tribunal a conclu que :
[traduction] Les personnes qui donnent aux policiers des renseignements qui suscitent des préoccupations quant au bien-être d’un enfant devraient s’attendre à ce que ces renseignements soient transmis à une société d’aide à l’enfance, car les policiers sont obligés d’informer ces sociétés quand ils ont des motifs raisonnables de soupçonner qu’un enfant pourrait être en danger. [...] Bien qu’il pourrait y avoir des dossiers de nature extrêmement délicate qui portent sur des questions extrêmement personnelles et ne devraient être divulgués à personne, même à une société d’aide à l’enfance, parce qu’ils ne sont pas d’une grande utilité pour l’enquête, dans la plupart des cas, la remise des dossiers judiciaires appropriés à la société d’aide à l’enfance ne portera pas atteinte aux attentes raisonnables en matière de vie privée auxquelles on fait allusion dans ces dossiers.
Il faut souligner que les pratiques diffèrent selon les provinces et les territoires en ce qui a trait aux requêtes de typeWagg, puisque les degrés de coopération entre les organismes de protection de la jeunesse et les services des poursuites pénales varient.

Tiré de : http://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/vf-fv/elcvf-mlfvc/p8.html

La partialité affecte la compétence du juge



91.              Pour mériter le respect et la confiance de la société, le système de justice doit faire en sorte que les procès soient équitables et qu’ils paraissent équitables aux yeux de l’observateur renseigné et raisonnable. Tel est le but fondamental assigné au système de justice dans une société libre et démocratique.

92.              C’est un principe bien établi que tous les tribunaux juridictionnels et les corps administratifs sont tenus d’agir équitablement envers les parties qui ont à comparaître devant eux. Voir à titre d’exemple Newfoundland Telephone Co. c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities)1992 CanLII 84 (CSC)[1992] 1 R.C.S. 623, à la p. 636. Afin de remplir cette obligation, le décideur doit être impartial et paraître impartial. La portée de cette obligation et la rigueur avec laquelle elle s’applique varieront suivant la nature du tribunal en question.

96.              Habituellement, c’est l’accusé qui, dans un procès criminel, allègue la partialité, réelle ou apparente, du tribunal.  Toutefois, rien n’empêche le ministère public de faire une allégation similaire. Il y est même tenu lorsque les circonstances l’exigent. Même s’il ne fait pas l’objet d’une protection constitutionnelle explicite, c’est un important principe de notre système juridique que le procès doit être équitable pour toutes les parties -- pour le ministère public comme pour l’accusé. Voir à titre d’exemple R. c. Gushman[1994] O.J. No. 813 (Div. gén.). Dans l’arrêt Curragh, précité, notre Cour a récemment maintenu une allégation de crainte de partialité suscitée par la conduite du juge du procès envers un substitut du procureur général.  Dans un contexte légèrement différent, on a conclu que si le juge forme ou paraît former une opinion partiale contre un témoin du ministère public, par exemple la victime d’une agression sexuelle, il y a possibilité que le procès soit inéquitable envers le ministère public: arrêt Wald, précité, à la p. 336.

99.              Si les paroles ou la conduite du juge suscitent une crainte de partialité ou dénotent réellement sa partialité, il excède sa compétence. Voir les décisions Curragh, précitée, au par. 5; Gushman, précitée, au par. 28. On peut remédier à cet excès de compétence en présentant une requête en récusation adressée au juge présidant l’instance si celle-ci se poursuit, ou en demandant l’examen en appel de la décision du juge. Dans le cadre de l’examen en appel, on a jugé récemment que la «conclusion correctement tirée qu’il existe une crainte raisonnable de partialité mène habituellement, de façon inexorable, à la décision qu’il doit y avoir un nouveau procès»: arrêt Curragh, précité, au par. 5.

100.            S’il y a crainte raisonnable de partialité, c’est l’ensemble des procédures du procès qui sont viciées et la décision subséquente aussi bien fondée soit-elle ne peut y remédier. Voir l’arrêt Newfoundland Telephone, précité, à la p. 645; voir aussi l’arrêt Curragh, précité, au par. 6. Ainsi, le simple fait que le juge paraît, sur certains points, avoir tiré des conclusions justes quant à la crédibilité ou qu’il arrive à un résultat correct ne peut dissiper les effets de la crainte raisonnable de partialité que d’autres paroles ou actes du juge ont pu susciter. Dans le contexte d’une requête en récusation du juge siégeant dans une poursuite donnée, on a statué que lorsqu’il y a crainte raisonnable de partialité, «on ne peut rendre une décision finale à partir de conclusions sur la crédibilité formulées dans de pareilles conditions»: Blanchette c. C.I.S. Ltd.1973 CanLII 3 (CSC)[1973] R.C.S. 833, à la p. 843. Toutefois, si les paroles ou la conduite du juge, eu égard au contexte, ne suscitent pas de crainte raisonnable de partialité, ses conclusions n’en seront pas entachées, quelque inquiétantes qu’elles puissent être.

101.            Par conséquent, si l’appelant a raison de dire que les cours d’appel ont, avec sagesse, adopté une norme d’examen fondée sur la retenue en ce qui concerne l’analyse des conclusions factuelles des tribunaux d’instance inférieure, dont les conclusions relatives à la crédibilité des témoins, il est quelque peu trompeur de définir la question en litige dans le présent pourvoi comme se ramenant à une question de crédibilité. Si les conclusions du juge Sparks sur la crédibilité étaient entachées de partialité ou de crainte de partialité, elles avaient été tirées sans compétence, et elles ne justifiaient pas le respect de la cour d’appel. Par contre, si ses conclusions n’étaient pas entachées de partialité, alors l’affaire portait entièrement sur lesdites conclusions et la cour d’appel ne devait pas les modifier, sauf si elles étaient manifestement déraisonnables ou ne s’appuyaient pas sur la preuve. Voir à titre d’exemple R. c. W. (R.)1992 CanLII 56 (CSC)[1992] 2 R.C.S. 122, aux pp. 131 et 132.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les déclarations d'un accusé à son complice ne sont pas du ouï-dire

R v Ballantyne, 2015 SKCA 107 Lien vers la décision [ 58 ]             At trial, Crown counsel attempted to tender evidence of a statement m...