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lundi 23 septembre 2024

Les éléments constitutifs de la possession

R. c. Bouaouina, 2020 QCCQ 1856

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2.1      LA CONNAISSANCE

[28]      La connaissance et le contrôle peuvent être établis par une preuve directe, par une preuve circonstancielle ou une combinaison des deux[27].

[29]      Le niveau de connaissance et de contrôle requis doit être plus que de l’indifférence ou qu’un simple acquiescement passif à la présence de l’objet ou à son contrôle par d’autres[28].

[30]      Le fait qu’un objet se trouve en « plain view » infère souvent la connaissance[29].   Par ailleurs, le fait qu’un objet soit caché dans un endroit régulièrement utilisé par un accusé peut quelquefois permettre une inférence de connaissance[30].

[31]      La connaissance peut aussi s’inférer de la grande valeur d’un objet[31]. De même, une odeur envahissante de drogue constitue un indice permettant d’inférer la connaissance[32].

[32]      Cela dit, c’est souvent le comportement d’un accusé envers une chose qui permet de déterminer s’il en a la possession au sens de la loi[33]. La connaissance peut également être prouvée par le biais de l’aveuglement volontaire d’un accusé[34].

[33]      La détermination de la connaissance nécessite une analyse subjective, car la question est de savoir ce qu’un accusé sait, et non ce qu’il aurait dû savoir[35].

[34]      Par ailleurs, dans les cas impliquant un véhicule, les tribunaux sont souvent réticents à inférer la connaissance de la présence d’un objet, lorsque celui-ci n’est pas visible, accessible ou près d’un accusé[36].

2.2      LE CONSENTEMENT

[35]      En ce qui a trait au consentement, la preuve doit indiquer qu’un accusé avait le pouvoir de donner ou de retirer celui-ci[37]. De même, pour être en mesure de consentir à la possession d’une chose, la personne doit avoir un certain pouvoir sur la chose en question[38].

[36]      De plus, la connaissance et l’inaction ne reflètent pas nécessairement un consentement[39]. Le Tribunal rappelle que l’inaction n’est pas en soi criminelle[40].

2.3      LE CONTRÔLE

[37]      Le contrôle se définit comme l’autorité ou le pouvoir qu’une personne a sur un objet, qu’il soit exercé ou non[41]. La possession d’un objet n’exige pas un contrôle absolu, exclusif ou même prédominant[42]. Une certaine mesure de contrôle est suffisante[43].

[38]      En matière de possession, il importe peu de savoir pendant combien de temps une personne conserve un objet en sa possession[44]. Le contrôle exercé sur un bien n’a pas à être de longue durée. Un contrôle momentané, qui n’est pas accidentel ou involontaire, est suffisant[45]. Un exemple de contrôle est la manipulation physique d’un objet pouvant être démontrée par la présence d’empreintes digitales[46].

[39]      Dans les cas impliquant un véhicule, le conducteur n’est pas dans la même position qu’un simple passager. En effet, le conducteur contrôle l’accès au véhicule en déterminant qui peut entrer et y demeurer[47]. Par ailleurs, la poursuivante n’a pas l’obligation de démontrer qu’un accusé est propriétaire de l’objet en question ni qu’il possède un intérêt particulier vis-à-vis celui-ci[48].

3.            CHAQUE CAS EST UN CAS D’ESPÈCE

[40]        Toute possession constitue une question de fait qui dépend des circonstances et de l’ensemble de la preuve[49].

[41]      La seule présence d’un accusé sur les lieux d’un crime ou près de celui-ci ne peut servir de fondement à un verdict de culpabilité, à moins qu’il existe d’autres éléments de nature à fonder un tel verdict[50].

[42]      Il n’existe pas de présomption de possession du seul fait qu’une personne occupe un logement[51]. De même, le seul fait de conduire un véhicule ne crée pas une présomption de possession des objets s’y trouvant[52]. Par ailleurs, la présence d’une personne comme passager dans un véhicule, sans plus, ne constitue pas une preuve qu’il a en sa possession les objets présents dans celui-ci[53]. Toutefois, ce sont tous des faits que le Tribunal peut considérer pour déterminer la possession d’une chose par une personne[54].

Les types de possession en droit criminel

R. c. Bouaouina, 2020 QCCQ 1856

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[20]      L’article 2(1) LRCDAS attribue au terme « possession » le sens que lui confère l’article 4(3) du Code criminel. Suivant celui-ci, la possession ne se résume pas au simple contrôle physique, puisqu’il édicte que:

Article 4(3) Possession - Pour l’application de la présente loi:

a)     Une personne est en possession d’une chose lorsqu’elle l’a en sa possession personnelle ou que, sciemment :

(i)      Ou bien elle l’a en sa possession ou garde réelle d’une autre personne,

(ii)    Ou bien elle l’a dans un lieu qui lui appartient ou non ou qu’elle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d’une autre personne;

b)   Lorsqu’une de deux ou plusieurs personnes, au su et avec le consentement de l’autre ou des autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et chacune d’elles.

[21]      L’article 4(3) du Code criminel reconnaît trois types de possession[9]: la possession personnelle[10], la possession putative[11] et la possession conjointe[12]. Toutes ces possessions comportent les éléments constitutifs suivants: la connaissance, le consentement et le contrôle[13].

1.1      LA POSSESSION PERSONNELLE[14]

[22]      La possession personnelle s’entend généralement de la garde physique d’un bien[15]. Pour établir une possession personnelle, la poursuivante doit démontrer que l’accusé : manipulait ou savait qu’il avait la garde physique d’un objet; qu’il avait une connaissance subjective de la nature particulière de cet objet; et qu’il avait un minimum de contrôle sur celui-ci[16].

[23]      La seule présence d’une personne dans un endroit ou un véhicule où l’on trouve de la drogue ou des armes, de surcroît cachées, ne permet pas de conclure à une possession personnelle de ces choses[17]. Cela dit, la connaissance de la présence d’un objet illégal ne saurait suffire. Il faut également prouver que l’accusé consentait à la possession et qu’il avait un certain contrôle sur l’objet[18].

1.2      LA POSSESSION PUTATIVE[19]

[24]      Il s’agit du cas où une personne est réputée être en possession d’un bien alors qu’elle n’en a pas la détention physique[20].

[25]      Pour établir une possession imputée, la poursuivante doit démontrer que l’accusé: a connaissance de la nature d’un objet; en confie volontairement la possession ou la garde à une autre personne, ou met ou garde volontairement l’objet dans un lieu donné, que ce lieu lui appartienne ou pas; et a l’intention d’avoir l’objet dans ce lieu pour son « propre usage ou avantage » ou celui d’une autre personne[21]. Cette possession n’exige pas la preuve d’une manipulation physique de l’objet ou un contrôle réel effectif par l’accusé[22].

1.3      LA POSSESSION CONJOINTE[23]

[26]      Comme le résume fort bien le juge David Simon dans la décision R. c. Brideau:

[91]      La possession conjointe vise la possession d’une chose donnée par une personne au su et avec le consentement de l’autre ou des autres. Dans un tel cas, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et de chacune d’elles. En conséquence, lorsqu’il s’agit d’une possession conjointe, l’élément essentiel du consentement s’ajoute aux éléments de connaissance et de contrôle[24].

[27]      Pour établir une possession conjointe, la poursuivante doit démontrer que quelqu’un, autre que l’accusé, avait l’objet en sa possession; avec sa connaissance et son consentement; et qu’il avait un certain contrôle s

Le contrôle aux fins de la notion de possession imputée implique un pouvoir ou une autorité sur l'objet

R. v. Savory, 1996 CanLII 2001 (ON CA)

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Control for the purpose of constructive possession does not require that the accused did in fact exercise control over the object in question.  In R. v. Terrence (1980), 1980 CanLII 74 (ON CA)55 C.C.C. (2d) 183 (Ont. C.A.), aff'd (1983), 1983 CanLII 51 (SCC)4 C.C.C. (3d) 193 (S.C.C.), the Supreme Court accepted that control means power or authority over the object in question.  Similarly, in R. v. Chambers (1985), 1985 CanLII 169 (ON CA)20 C.C.C. (3d) 440 (Ont. C.A.), the court held that the right to grant or withhold consent to drugs being stored in a bedroom was sufficient to constitute control.  Again, control is established if there is the right to grant or withhold consent.  It is not necessary that the consent in fact be granted or withheld.

dimanche 22 septembre 2024

Une intervention policière, soustrayant une partie d'une cargaison de stupéfiants, temporairement ou définitivement, au contrôle du prévenu, n'a pas pour effet de lui faire perdre la possession légale de celui-ci, au sens de l'article 4(3) C.cr.

R. c. Duguay, 1992 CanLII 3281 (QC CA)

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L'article 2 de la Loi sur les stupéfiants (L.R.C., 1985, c. N-1) attribue au terme "possession" le sens que lui confère l'article 4(3) du Code criminel.  Suivant celui-ci, la possession ne se résume pas au simple contrôle physique: (...)

 

Cette définition comprend plusieurs types de possession.  Elle inclut la possession physique et réelle mais aussi, la possession personnelle autre que physique et, surtout, la possession par interprétation (voir Leboeuf c. R., C.A.M. 500-10-000011-781, 18 février 1980, monsieur le juge Bernier p. 3).  B.A. MacFarlane, Drug Offences in Canada, 2nd ed., Aurora, Canada Law Book Inc., 1986, utilise les expression "personal, physical or actual possession, attributed, constructive or presomptive possession and joint possession, dual possession", pour désigner les différents types de possession prévus à l'article 4(3) C.cr. (op. cit., pp. 45-58, personal possession, pp. 58-62, attributed possession, pp. 62-67, joint possession).  La possession physique n'est pas nécessaire.  Il doit cependant exister une connaissance de la nature de la substance et un élément de contrôle, tel que le concluait la Cour suprême dans l'arrêt Beaver c. R., (1957) 1957 CanLII 14 (SCC)26 C.R. 193, p. 205.  La Cour suprême faisait siennes alors les observations du juge O'Halloran dans l'affaire R. c. Hess, (no 1), (1948) 1948 CanLII 349 (BC CA)94 C.C.C. 48 (B.B.C.A.), pp. 50-51:

 

«To constitute "possession" within the meaning of the criminal law it is my judgment, that where as here there is manual handling of a thing, it must be co-existent with knowledge of what the thing is, and both these elements must be co-existent with some act of control (outside public duty).» (voir aussi: R. c. Martin, (1948) 92 C.C.C. (2d) 257 (Ont. C.A.); R. c. Caldwell(1972) 1972 ALTASCAD 33 (CanLII)7 C.C.C. (2d) 285, pp. 290-291 (Alta S.C. App. Div.)R. c. Smith(1973) 1973 CanLII 1546 (BC CA)10 C.C.C. (2d) 384, pp. 390-391 (B.B.C.A.)Gagné c. R., C.A.M. 1991 CanLII 3334 (QC CA)500-10-000076-883, 24 octobre 1991, monsieur le juge Fish, p. 7, p. 10, J.E. 91-1766Godon c. La Reine, C.A.Q. 200-10-00019-889, 19 juin 1991, opinion de madame le juge  Tourigny, pp. 10-11, J.E. 91-1168(1991) 38 Q.A.C. 71)

  

(...) La poursuite argumente, avec raison, à mon avis, que l'intervention policière, soustrayant une partie d'une cargaison de stupéfiants, temporairement ou définitivement, au contrôle du prévenu, n'a pas pour effet de lui faire perdre la possession légale de celui-ci, au sens de l'article 4(3) C.cr

 

Le contrôle qu'exerce la police en prenant possession des stupéfiants n'exclut pas une sorte de possession conjointe de la part du prévenu (voir notamment: R. c. Miller(1984) 1984 CanLII 637 (BC CA)12 C.C.C. 54 (B.C.C.A.), p. 90, monsieur le juge Lambert; R. c. Harrison and Alonso, (1982) C.C.C. 1982 ABCA 152 (CanLII)67 C.C.C. (2d) 401, pp. 416-417, monsieur le juge McDermid (Alta C.A.); voir aussi: McFarlane, op. cit., p. 67).

Le consentement à la possession d'un objet ne peut pas exister sans la possibilité d'exercer un certain contrôle sur lui

R v Nyuon, 2014 ABCA 130

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[16]           Section 2 of the Controlled Drugs and Substances Act, SC 1996 c19 adopts the definition of possession from section 4(3) of the Criminal CodeRelevant to this appeal is section 4(3)(b) which deems possession where an individual has knowledge of and consents to another person’s possession of a drug. Knowledge and consent cannot co-exist without the coexistence of some measure of control over the subject matter: R v Colvin and Gladue (1942) 1942 CanLII 245 (BC CA), 78 CCC 282 (BCCA) at para 20, [1943] 1 DLR 20;  R v Terrence1983 CanLII 1629 (ON SC), [1983] 1 SCR 357, 147 DLR (3d) 193. Further, there must be evidence that the accused had the power to grant or withhold consent: Colvin at para 20.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

L’accusé qui soulève un doute raisonnable sur le consentement de la victime à l’emploi de la force sera acquitté d'une infraction de voies de fait et cette détermination du consentement s’effectue selon un critère subjectif

Bérubé-Gagnon c. R., 2020 QCCA 1389 Lien vers la décision [ 22 ]        L’absence de consentement de la victime est un élément essentiel de ...