Service de police de la Ville de Montréal c. Me A, 2020 QCCS 1830
[28] Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, le juge Cromwell explique « l’attente raisonnable à l’égard de la confidentialité des communications protégées par le secret professionnel de l’avocat est invariablement élevée, peu importe le contexte »[18].
[29] Il ajoute que « [l]e principal élément moteur de cette attente élevée en matière de respect de la vie privée est la nature particulièrement protégée de la relation avocat-client, et non le contexte dans lequel l’État cherche à s’ingérer dans cette zone particulièrement protégée »[19].
VII- Le privilège relatif au litige
[32] Le privilège relatif au litige complète la protection offerte par le secret professionnel de l’avocat.
[33] Le juge Gascon en trace le pourtour dans l’arrêt Lizotte c. Aviva, Compagnie d’assurance du Canada[22] :
[24] S’il est vrai que l’arrêt Blank établit ainsi des distinctions claires entre le privilège relatif au litige et le secret professionnel de l’avocat, il leur reconnaît par contre certains traits communs. La Cour rappelle en effet que les deux privilèges « servent une cause commune : l’administration sûre et efficace de la justice conformément au droit » (par. 31). Plus particulièrement, le privilège relatif au litige sert cette cause en « assur[ant] l’efficacité du processus contradictoire » (par. 27) et en maintenant une « zone protégée destinée à faciliter, pour l’avocat, l’enquête et la préparation du dossier en vue de l’instruction contradictoire » (par. 40, citant Sharpe, p. 165).
[63] Je suis en désaccord. Les exigences dont fait état l’arrêt Blood Tribe s’appliquent tout autant au privilège relatif au litige. Non seulement ce dernier est-il un privilège générique, mais il sert un « intérêt public » prépondérant au sens de l’arrêt Bisaillon. Cet intérêt public, l’arrêt Blank en fait état, est « l’administration sûre et efficace de la justice conformément au droit » (par. 31). Le privilège relatif au litige vise à « assurer l’efficacité du processus contradictoire » (Blank, par. 27) en maintenant une « zone protégée destinée à faciliter, pour l’avocat, l’enquête et la préparation du dossier en vue de l’instruction contradictoire » (par. 40, citant Sharpe, p. 165). En maintenant une zone protégée aux fins de la préparation des litiges, le privilège relatif au litige favorise à sa manière « l’accès à la justice » et la « qualité de la justice » (Blood Tribe, par. 9)[23].
[Le soulignement est ajouté]
[34] Dans ce même arrêt, le juge Gascon précise que « le privilège relatif au litige est opposable à tous, y compris à des enquêteurs administratifs ou criminels, et non simplement à l’autre partie au litige »[24].
VIII- Le privilège relatif aux règlements
[35] Dans l’arrêt Sable Offshore Energy Inc. c. Ameron International Corp., la juge Abella explique que le privilège relatif aux règlements favorise la conclusion de règlements et qu’il constitue un privilège générique[25]. Ce privilège bénéficie d’une présomption prima facie d’inadmissibilité, mais cette présomption souffre d’exceptions quand les considérations de justice le requièrent[26].
[37] Or, puisque « [l]e privilège souffre inévitablement d’exceptions »[28], celui qui souhaite avoir accès à une preuve présumée inadmissible, doit établir l’existence d’un « intérêt public opposé [qui] l’emporte sur l’intérêt public à favoriser le règlement amiable »[29].
[38] À cet égard, dans l’arrêt R. c. Babos, la Cour suprême était confrontée à un dossier où « des menaces [avaient été] proférées par la substitut du procureur général pour inciter les accusés à plaider coupable »[30].
[39] Dans l’ouvrage Traité général de preuve et de procédure pénales, les auteurs, s’appuyant sur l’arrêt Babos, affirment que le « privilège ne vaut pas »[31] si on veut prouver « qu’un des intervenants a proféré des menaces à un autre ou a autrement commis un acte illégal »[32].
[40] Les auteurs réfèrent aussi à la décision du juge Vertes de la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest dans R. c. Delorme[33] dans laquelle il reconnait l’existence d’une exception lorsque les communications dans le cadre d’un règlement contiennent des menaces :
[13] The third type of privilege is that which attaches to communications in furtherance of settlement. All admissions or communications in the course of negotiations toward a settlement are subject to a privilege and protected from disclosure and are not admissible in evidence. The privilege is held jointly by both sides to the negotiations. The notable exceptions to this privilege are when it is necessary to prove that a settlement was reached or if the communications contain threats or other illegal action.
[Le soulignement est ajouté]
[41] Les discussions relatives aux règlements doivent être encouragées.
[42] Toute conduite criminelle au cours de celles-ci s’avère incompatible avec la finalité de ces discussions.
[43] Il va de soi que les menaces et l’intimidation constituent une exception fermement reconnue par le privilège relatif aux règlements.
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