Siciliano c. R., 2025 QCCA 335
[65] Les appelants soutiennent que le juge a erré en incluant parmi les facteurs aggravants des éléments constitutifs de l’infraction, soit le refus répété de X et l’insistance des appelants à poursuivre, malgré celui-ci.
[66] Il est bien établi que les éléments constitutifs de l’infraction ne peuvent en soi constituer un facteur aggravant[50]. Les éléments essentiels de l’infraction de l’agression sexuelle incluent l’absence de consentement de la plaignante ainsi que la connaissance de l’accusé de cette absence de consentement[51]. En l’espèce, le juge ne retient pas ces éléments en soi comme un facteur aggravant, mais il évalue, à bon droit, leur manifestation dans le contexte précis de ce dossier.
[67] Tout en s’assurant de ne pas confondre un élément essentiel d’un crime avec un facteur aggravant, un juge peut — et doit — tenir compte des faits qui vont au-delà du minimum requis pour constituer un élément essentiel de l’infraction et qui ajoutent à la culpabilité morale du contrevenant. Par exemple, dans un dossier de conduite avec facultés affaiblies par l’alcool, la preuve de l’alcool dans le sang de l’accusé demeure un élément essentiel de l’infraction, mais une alcoolémie particulièrement élevée doit être considérée comme un facteur aggravant (al. 320.22e) C.cr.)[52]. De même, dans un dossier d’homicide involontaire avec usage d’une arme à feu, si l’usage de l’arme en soi n’est pas un facteur aggravant, mais un élément essentiel de l’infraction, les circonstances entourant cet usage peuvent toutefois être considérées comme aggravantes[53]. Enfin, en matière d’agression sexuelle, bien que les attouchements constituent un élément de l’actus reus[54], leur importance aggravera évidemment la peine à infliger[55].
[68] Dans toute accusation d’agression sexuelle, une preuve hors de tout doute raisonnable de la connaissance par l’accusé de l’absence de consentement de la plaignante satisfait à l’élément intentionnel de l’infraction. La passivité ne saurait équivaloir à consentement[56] et le poursuivant n’a pas à établir un refus clair exprimé par la victime. Cependant, lorsque, comme en l’espèce, la preuve démontre qu’il y a eu un refus communiqué et que l’accusé a poursuivi l’agression sexuelle malgré des protestations répétées, ces faits aggravent la culpabilité morale du contrevenant. Pour que cela soit clair, précisons que l’absence de protestations ne peut aucunement constituer un facteur atténuant la peine : nul besoin de développer sur le fait que l’absence de facteur aggravant ne constitue pas un facteur atténuant.
[69] En l’espèce, le juge ne commet aucune erreur lorsqu’il considère comme un facteur aggravant « la persistance des contrevenants et l’objectification sexuelle de la victime »[57] et qu’il souligne la volonté communiquée de X « maintes fois ignorée au profit de l’assouvissement des désirs des contrevenants »[58], tenant compte aussi du fait que « [l]es contrevenants constatent son absence de plaisir, mais poursuivent néanmoins l’agression sexuelle »[59].
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