A.G. c. R., 2008 QCCQ 11159 (CanLII)
[12] Au niveau des dispositions du Code criminel, l’article 490.023 prévoit qu’un juge peut accorder une dispense de l’obligation de s’y conformer.
[13] Une exception semblable est prévue à l’article 490.012(4) C.cr lorsque le Tribunal est invité à rendre une ordonnance après le prononcé d’une peine ou d’un verdict de non-responsabilité à l’égard d’une infraction désignée. C’est le requérant qui a le fardeau de prouver par prépondérance de preuve l’effet démesuré que peut avoir à son égard, notamment sur sa vie privée ou sa liberté, l’enregistrement de renseignements le concernant au registre des délinquants sexuels; l’intérêt public de protéger la société par la consultation des renseignements sur les délinquants sexuels étant présumé dans le cadre d’enquêtes efficaces à mener sur les crimes de nature sexuelle.
[14] Dans Redhead, la Cour d’appel d’Alberta dit :
Par. 42 :
« However, had Parliament intended that courts should determine whether there exists a public interest in registering an offender on a case-by-case basis, factoring in all of the individual circumstances surrounding each offender and his or her offence, it could have made that intention clear in the wording of the provision. Instead, Parliament has pronounced that there is a public interest in having those who commit the prescribed offences registered. The language of s. 490.012(4) presumes a “public interest in protecting society through the effective investigation of crimes of a sexual nature, to be achieved by the registration on information relating to sex offenders,” but questions whether the impact on the offender would be grossly disproportionate to that public interest. Thus, the focus of the inquiry is not on whether there is a public interest in having the offender registered, but rather on whether the impact on the offender would be grossly disproportionate to the public interest. »
[15] Le 19 juin 2008, la Cour d’appel de la Colombie britannique soumet dans R. c. S.S.C. :
Par. 86 :
« Mr Justice Barrow’s proposition that an offender must show an impact greater that that sustained potentially by all offenders is not inconsistent with the decision in Redhead and this Court’s decision in B.T.Y., Parliament intended that all sex offenders must register. Registration has the potential to affect the liberty and privacy interests of all offenders. The inquiry is whether the effect by registration on the offender seeking exemption is grossly disproportionate to the public interest. »
Par. 87 :
« I summarize the following points from these analysis :
1- The public interest requires all sex offenders to register, not just those wich the profile of predatory strangers or those with a heightened risk to re-offend;
2- The public interest is fixed; Parliament has declared that registration is in the public interest;
3- An offender seeking exemption is obliged to establish that his or her registration would be grossly disproportionate to the public interest, that is it is a given that registration has a potential minimum or treshold effect on all offenders;
4- Relevant to the consideration of the offender’s circumstances is the nature of the offence, the risk to re-offend, the offender’s criminal record and other similar matters personnal to the circumstances of the offender. »
[16] Récemment, reprenant en résumé l’ensemble des décisions ayant accordé une dispense, la juge Lacerte Lamontagne de notre Cour, dans R. c. Sturgeon3 les collige ainsi :
Par. 20 :
« Dans les décisions accordant une dispense, les principaux éléments retenus sont : l’absence d’antécédents judiciaires et l’infraction de moindre gravité4, l’infraction non reliée5, le faible risque de récidive6, la thérapie suivie7, l’incident isolé et les déplacements de l’accusé pour son travail8, l’âge9, le délinquant aux prises avec un problème psychiatrique10, physique et psychologique11 ou une combinaison de différents facteurs12. »
[17] Bien que le Tribunal doive tenir compte des circonstances particulières à chaque cas en l’espèce, il n’en demeure pas moins que l’analyse à être faite par le Tribunal sur les motifs invoqués visant à convaincre sur le « nettement démesuré » (grossly disproportionate) doit l’être en fonction d’un intérêt public présumé.
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mercredi 6 avril 2011
mardi 5 avril 2011
Dans le cas d'un vol à l'étalage, le fait de passer la caisse sans payer ne fait que renforcer la preuve d'intention de voler sans être un élément essentiel de l'infraction.
Courtemanche c. R., 2011 QCCS 1456 (CanLII)
[21] L'article 322(2) du Code criminel prévoit que :
« Un individu commet un vol quand, avec l’intention de voler une chose, il la déplace ou fait en sorte qu’elle se déplace, ou la fait déplacer, ou commence à la rendre amovible. »
[22] Le fait de passer la caisse sans payer ne fait que renforcer la preuve d'intention de voler sans être un élément essentiel de l'infraction.
[25] Évidemment, dans les cas de vol à l'étalage, l'interprétation des faits est plus complexe. Comme le mentionne le juge Discepola dans R. c. Nguyen:
« Lorsqu'une personne prend possession d'un bien et est interceptée avant la caisse l'intention est souvent difficile à inférer. Dans ces circonstances, il est clair que le propriétaire du magasin consent à ce que le client puisse prendre le bien pour fin d'inspection et transport à la caisse. Une prise de possession d'un article d'une façon habituelle, (par exemple : sans dissimulation) n'est pas concluant quant à l'intention. Dans ces cas, l'ensemble de preuve doit être évalué afin de déterminer si une intention de vol peut être inférée. »
[26] Après analyse de quelques causes de jurisprudence, le juge Discepola en vient à la conclusion que :
« Le Tribunal conclut par inférence, de ces faits, que l'article à été placé dans le sac par la défenderesse. Le Tribunal peut aussi inférer, par la prise de possession physique de l'article et sa dissimulation, qu'au moment où la défenderesse s'empare de l'article elle a l'intention de commettre le vol de cet article.
Il est clair que la défenderesse n'a pas déplacé l'article aux fins d'inspection ou transport à la caisse, ce que le propriétaire lui permet de faire. Elle a déplacé l'article pour en prendre possession avec l'intention d'en priver le propriétaire.
Il est vrai qu'habituellement un agent de sécurité intercepte un individu uniquement après qu'il ait franchi les caisses afin de dissiper tout doute quant à son intention réelle ; mais il est faux de croire que cet aspect devient un élément essentiel à prouver dans tous les cas. D'autres indices peuvent permettre au Tribunal de conclure à une intention de voler. »
[27] Franchir les caisses enregistreuses n'est pas un élément essentiel de l'infraction de vol à l'étalage. Et de toute façon, dans le présent cas, les caisses ont été franchies.
[21] L'article 322(2) du Code criminel prévoit que :
« Un individu commet un vol quand, avec l’intention de voler une chose, il la déplace ou fait en sorte qu’elle se déplace, ou la fait déplacer, ou commence à la rendre amovible. »
[22] Le fait de passer la caisse sans payer ne fait que renforcer la preuve d'intention de voler sans être un élément essentiel de l'infraction.
[25] Évidemment, dans les cas de vol à l'étalage, l'interprétation des faits est plus complexe. Comme le mentionne le juge Discepola dans R. c. Nguyen:
« Lorsqu'une personne prend possession d'un bien et est interceptée avant la caisse l'intention est souvent difficile à inférer. Dans ces circonstances, il est clair que le propriétaire du magasin consent à ce que le client puisse prendre le bien pour fin d'inspection et transport à la caisse. Une prise de possession d'un article d'une façon habituelle, (par exemple : sans dissimulation) n'est pas concluant quant à l'intention. Dans ces cas, l'ensemble de preuve doit être évalué afin de déterminer si une intention de vol peut être inférée. »
[26] Après analyse de quelques causes de jurisprudence, le juge Discepola en vient à la conclusion que :
« Le Tribunal conclut par inférence, de ces faits, que l'article à été placé dans le sac par la défenderesse. Le Tribunal peut aussi inférer, par la prise de possession physique de l'article et sa dissimulation, qu'au moment où la défenderesse s'empare de l'article elle a l'intention de commettre le vol de cet article.
Il est clair que la défenderesse n'a pas déplacé l'article aux fins d'inspection ou transport à la caisse, ce que le propriétaire lui permet de faire. Elle a déplacé l'article pour en prendre possession avec l'intention d'en priver le propriétaire.
Il est vrai qu'habituellement un agent de sécurité intercepte un individu uniquement après qu'il ait franchi les caisses afin de dissiper tout doute quant à son intention réelle ; mais il est faux de croire que cet aspect devient un élément essentiel à prouver dans tous les cas. D'autres indices peuvent permettre au Tribunal de conclure à une intention de voler. »
[27] Franchir les caisses enregistreuses n'est pas un élément essentiel de l'infraction de vol à l'étalage. Et de toute façon, dans le présent cas, les caisses ont été franchies.
lundi 4 avril 2011
Revue de la jurisprudence sur le vol par le juge Beauséjour
R. c. Poulette, 2009 CanLII 21571 (QC C.M.)
[173] Pour qu’il y ait vol, la poursuite se doit de prouver l’intention frauduleuse;
• Washington (État de) c. Johnson, 1988 CanLII 102 (C.S.C.), [1988] 1 R.C.S. 327, 62 C.R. (3d) 225, 40 C.C.C. (3d) 546
• R. c. Ouellette, REJB 1998-06056, [1998] A.Q. n° 1230 (C.A.)
• R. c. De Marco (1973), 22 C.R.N.S. 258, 13 C.C.C. (2d) 369 (C.A. Ont)
[174] L'élément de fraude ne saurait être déduit du seul fait de l'absence de restitution du bien dans un délai raisonnable. Une telle omission peut être expliquée par différents motifs tels l'oubli, une erreur ou une impossibilité de rendre :
• Washington (État de) c. Johnson, 1988 CanLII 102 (C.S.C.), [1988] 1 R.C.S. 327, 62 C.R. (3d) 225, 40 C.C.C. (3d) 546
[175] Le défaut de l'accusé de rapporter un véhicule loué dans le délai prévu au contrat de location ne constitue pas un vol lorsque l'accusé pensait honnêtement que le plaignant ne s'objecterait pas à ce qu'il garde pour une période plus longue le véhicule loué et qu'il avait l'intention de payer la location.
• R. c. Ouellette, REJB 1998-06056, [1998] A.Q. n° 1230 (C.A.)
• R. c. De Marco (1973), 22 C.R.N.S. 258, 13 C.C.C. (2d) 369 (C.A. Ont)
[176] La notion d'apparence de droit se présente sous deux volets, soit (1) la croyance honnête en un état de fait qui, s'il eût existé, aurait en droit justifié ou excusé l'acte reproché, et (2) une croyance honnête mais erronée en un droit légal (et non moral). L'apparence de droit peut donc découler d'une erreur de fait ou d'une erreur de droit.
• R. c. Investissements Contempra ltée (Remorquage québécois à vos frais), 1991 CanLII 3199 (QC C.A.), [1991] R.J.Q. 2519 (C.A.)
[177] La responsabilité criminelle d'une personne ne peut être engagée si un doute subsiste selon lequel elle a agi avec « apparence de droit ». L'accusé qui croit sincèrement en un droit légal dans la chose, et non seulement un droit moral, agit avec apparence de droit.
• R. c. Cuffaro, [1995] A.Q. n° 428, 1995 Carswell Que 944 (C.A.)
[178] Un accusé n'a pas à établir par prépondérance de preuve l'apparence de droit qu'il invoque : la règle générale du doute raisonnable s'applique.
• R. c. Violette, 1992 CanLII 3027 (QC C.A.), [1992] R.L. 115, [1992] A.Q. n° 705 (C.A.)
[179] Celui qui, honnêtement, soutient ce qu'il croit être une juste revendication n'agit pas « sans apparence de droit », même s'il s'avère que sa croyance est non fondée en droit ou en fait.
• R. c. Howson (1966), 47 C.R. 322, [1966] 3 C.C.C. 348, 55 D.L.R. (2d) 582 (C.A. Ont.)
[173] Pour qu’il y ait vol, la poursuite se doit de prouver l’intention frauduleuse;
• Washington (État de) c. Johnson, 1988 CanLII 102 (C.S.C.), [1988] 1 R.C.S. 327, 62 C.R. (3d) 225, 40 C.C.C. (3d) 546
• R. c. Ouellette, REJB 1998-06056, [1998] A.Q. n° 1230 (C.A.)
• R. c. De Marco (1973), 22 C.R.N.S. 258, 13 C.C.C. (2d) 369 (C.A. Ont)
[174] L'élément de fraude ne saurait être déduit du seul fait de l'absence de restitution du bien dans un délai raisonnable. Une telle omission peut être expliquée par différents motifs tels l'oubli, une erreur ou une impossibilité de rendre :
• Washington (État de) c. Johnson, 1988 CanLII 102 (C.S.C.), [1988] 1 R.C.S. 327, 62 C.R. (3d) 225, 40 C.C.C. (3d) 546
[175] Le défaut de l'accusé de rapporter un véhicule loué dans le délai prévu au contrat de location ne constitue pas un vol lorsque l'accusé pensait honnêtement que le plaignant ne s'objecterait pas à ce qu'il garde pour une période plus longue le véhicule loué et qu'il avait l'intention de payer la location.
• R. c. Ouellette, REJB 1998-06056, [1998] A.Q. n° 1230 (C.A.)
• R. c. De Marco (1973), 22 C.R.N.S. 258, 13 C.C.C. (2d) 369 (C.A. Ont)
[176] La notion d'apparence de droit se présente sous deux volets, soit (1) la croyance honnête en un état de fait qui, s'il eût existé, aurait en droit justifié ou excusé l'acte reproché, et (2) une croyance honnête mais erronée en un droit légal (et non moral). L'apparence de droit peut donc découler d'une erreur de fait ou d'une erreur de droit.
• R. c. Investissements Contempra ltée (Remorquage québécois à vos frais), 1991 CanLII 3199 (QC C.A.), [1991] R.J.Q. 2519 (C.A.)
[177] La responsabilité criminelle d'une personne ne peut être engagée si un doute subsiste selon lequel elle a agi avec « apparence de droit ». L'accusé qui croit sincèrement en un droit légal dans la chose, et non seulement un droit moral, agit avec apparence de droit.
• R. c. Cuffaro, [1995] A.Q. n° 428, 1995 Carswell Que 944 (C.A.)
[178] Un accusé n'a pas à établir par prépondérance de preuve l'apparence de droit qu'il invoque : la règle générale du doute raisonnable s'applique.
• R. c. Violette, 1992 CanLII 3027 (QC C.A.), [1992] R.L. 115, [1992] A.Q. n° 705 (C.A.)
[179] Celui qui, honnêtement, soutient ce qu'il croit être une juste revendication n'agit pas « sans apparence de droit », même s'il s'avère que sa croyance est non fondée en droit ou en fait.
• R. c. Howson (1966), 47 C.R. 322, [1966] 3 C.C.C. 348, 55 D.L.R. (2d) 582 (C.A. Ont.)
dimanche 27 mars 2011
La décision du juge Healy ordonnant à la poursuite de divulguer à la défense le registre d'entretien relié à l'appareil Alco-Sensor
R. c. Legault, 2009 QCCQ 15360 (CanLII)
[5] L'expert de la poursuite convient que le bon entretien d'un appareil doit contribuer à son bon fonctionnement et pour cette raison, entre autres, les registres d'entretien sont maintenus de façon scrupuleuse. Dans son témoignage, il accepte qu'un appareil puisse être affecté d'une défectuosité et il accepte aussi qu'une défectuosité puisse survenir entre l'entretien et l'utilisation d'un appareil. À cet égard, son témoignage ne contredit aucunement les deux possibilités affirmées par l'expert en défense. Surtout, il affirme qu'il peut y avoir un lien entre l'entretien d'un appareil et son fonctionnement.
[6] La question sur cette requête n'est pas de savoir si le registre d'entretien est pertinent et admissible au procès, mais de savoir s'il est pertinent aux fins de préparer la cause. La preuve des deux parties sur la requête démontre que l'entretien d'un Alco-Sensor IV RBT-IV peut affecter son fonctionnement dans un sens ou dans l'autre.
[7] La communication de la preuve par la poursuite est un principe de droit qui renforce le droit de l'accusé à une défense pleine et entière. Quant à l'étendue de ce droit, il est large:
Stinchcombe énonce clairement que l’information pertinente devant être communiquée par la partie principale comprend non seulement les renseignements ayant trait aux éléments que le ministère public a l’intention de présenter en preuve contre l’accusé, mais également ceux qui peuvent raisonnablement aider ce dernier à présenter une défense pleine et entière (p. 343‑344).
Le seuil à franchir n’est pas très élevé.
[8] La pertinence pourrait être aussi une question de droit, mais elle est plutôt une question de logique et d'expérience. L'existence d'un fait A rend-elle plus ou moins probable l'existence d'un autre fait B? Si oui, le fait A est pertinent par rapport au fait B. De plus, si l'existence du fait B est une question en litige, l'on doit dire non seulement que le fait A est pertinent sur le plan logique («la pertinence logique») mais qu'il est pertinent sur le plan juridique («la pertinence juridique»).
[9] En l'espèce, si le fait B est le fonctionnement de l'appareil, que peut être le lien logique entre cette question de fait et le registre d'entretien? Pour répondre à cette question, je me pose d'autres questions et j'y réponds.
Q. Le fonctionnement d’un appareil approuvé est-il une question pertinente?
R. Oui, et pertinente non seulement sur un plan logique mais aussi sur un plan juridique.
Q. Si c’est le cas, le dysfonctionnement de l’appareil serait-il une question pertinente?
R. De toute évidence – même réponse.
Q. Les causes d’un dysfonctionnement pourraient-elles être pertinentes?
R. Certainement.
Q. Si l’entretien d’un appareil approuvé pouvait être la cause d’un dysfonctionnement, l’entretien de l’appareil serait-il pertinent?
R. Encore, oui.
Q. Le registre qui fait état de l’entretien de l’appareil pourrait-il être pertinent?
R. Non seulement logiquement pertinent, mais peut-être même juridiquement pertinent.
Voici le raisonnement qui m'amène à la conclusion que le registre pourrait être pertinent aux fins de communication.
[10] Je tiens à souligner deux distinctions. Premièrement, la pertinence n'a rien à voir avec la force probante ou le poids d'un élément de preuve. La pertinence d'un élément de preuve existe ou elle n'existe pas. La réponse à toute question de pertinence est strictement binaire - oui ou non – et elle n'admet aucunement de gradation par degré. La valeur probante d'un élément de preuve qui est par ailleurs pertinent n'est qu'une question de degré lorsque tous les éléments sont évalués les uns avec les autres. Il s'ensuit que le registre d'entretien pourrait être aussi pertinent que les divers tests de contrôle effectués sur l'appareil, mais que, en ce qui concerne le fonctionnement de l'appareil au jour de l'infraction alléguée, il risque peu, dans le cours normal des choses, d'être aussi probant que les tests de contrôle.
[11] La deuxième distinction que je garde à l'esprit est celle entre la pertinence d’une information pour fins de communication par la poursuite et la recevabilité d'un élément de preuve au procès. Dans le cas qui nous occupe, le registre d'entretien serait également pertinent aux fins de divulgation ou aux fins du procès, mais cela n'implique pas que si le registre doit être communiqué à la défense il est également admissible ou recevable au procès. La pertinence du registre est une condition nécessaire dans les deux cas, mais elle n’est pas forcément suffisante pour que le registre soit reçu en preuve au procès.
[12] Le juge Sopinka a traité de cette question dans l’arrêt Mohan:
La pertinence est déterminée par le juge comme question de droit. Bien que la preuve soit admissible à première vue si elle est à ce point liée au fait concerné qu'elle tend à l'établir, l'analyse ne se termine pas là. Cela établit seulement la pertinence logique de la preuve. D'autres considérations influent également sur la décision relative à l'admissibilité. Cet examen supplémentaire peut être décrit comme une analyse du coût et des bénéfices, à savoir «si la valeur en vaut le coût.» Voir McCormick on Evidence (3e éd. 1984), à la p. 544. Le coût dans ce contexte n'est pas utilisé dans le sens économique traditionnel du terme, mais plutôt par rapport à son impact sur le procès. La preuve qui est par ailleurs logiquement pertinente peut être exclue sur ce fondement si sa valeur probante est surpassée par son effet préjudiciable, si elle exige un temps excessivement long qui est sans commune mesure avec sa valeur ou si elle peut induire en erreur en ce sens que son effet sur le juge des faits, en particulier le jury, est disproportionné par rapport à sa fiabilité. Bien qu'elle ait été fréquemment considérée comme un aspect de la pertinence juridique, l'exclusion d'une preuve logiquement pertinente, pour ces raisons, devrait être considérée comme une règle générale d'exclusion (voir Morris c. La Reine, 1983 CanLII 28 (C.S.C.), 1983 CanLII 28 (C.S.C.), [1983] 2 R.C.S. 190).
Voyons comment ces propos et les deux distinctions que j'ai notées s'appliquent ici.
[13] Je comprends aisément que le registre d'entretien pourrait être pertinent aux fins de communication et aux fins du procès. Quant à la communication, le registre répond parfaitement aux critères établis par la Cour suprême. Quant au procès, cette question n'est pas devant la cour à ce stade-ci. Pourtant, j'ajouterais quelques commentaires là-dessus.
[14] Même si, à strictement parler, le registre peut être pertinent au fonctionnement de l'appareil, il incombera à la défense lors du procès d'établir, non seulement la vraisemblance de sa prétention, mais aussi que la preuve qu'elle entend administrer sera suffisamment utile pour justifier sa réception. Dans un dossier comme le nôtre, lorsque le fonctionnement d'un appareil approuvé est contesté, le fonctionnement de l'Alco-Sensor IV RBT-IV sera normalement examiné à la lumière des divers tests de contrôle et fréquemment aussi avec l'aide du témoignage des experts. Même si la pertinence logique et juridique du registre n'était pas contestable, la valeur probante d'une telle preuve doit être démontrée par la défense. Pour ce faire, la défense aura le fardeau d'établir, à partir du registre, non seulement un lien entre l'entretien et le fonctionnement de l'appareil, mais un lien qui serait capable de soulever dans les faits un doute raisonnable quant au fonctionnement de la machine à la date et au moment en question. Autrement la preuve du registre doit être déclarée inadmissible pour le même motif que le juge Sopinka a énoncé dans Mohan: sa valeur ne vaut pas le coût.
[15] Sur le plan procédural, il y aurait lieu peut-être d'adapter les dispositions de la Partie VIII du Code criminel aux fins d'un voir-dire si ou lorsque la défense tente de mettre le registre d'entretien en preuve au procès. À la suite d’un avis signifié dans un délai raisonnable, la défense peut demander au juge du procès de tenir une audition en vue de décider si la preuve est admissible. Comme toute requête, la demande doit être formulée par écrit et doit fournir toutes les précisions au sujet de la preuve en question et le rapport de celle-ci avec un élément de la cause. Le juge doit motiver sa décision sur l'admissibilité du registre d'entretien en précisant les éléments de la preuve retenus et la façon dont la preuve à admettre, en tout ou en partie, se rattache à un élément de la cause. Les motifs de la décision sont consignés au procès-verbal des débats ou sont donnés par écrit.
[16] La jurisprudence au Québec sur la question devant la cour est partagée et pour cette raison je ne m’y arrêterai pas. Dans certains cas, il semble que la preuve tendait à démontrer que le registre d'entretien ne pouvait pas avoir une incidence sur le fonctionnement d'un appareil approuvé. Dans d'autres cas, il y avait une preuve qui allait dans les deux sens sur cette question. Je répète qu'ici la preuve des deux parties fait en sorte que l'entretien peut avoir une incidence sur le fonctionnement de l'appareil et, par conséquent, que le registre d'entretien pourrait être pertinent aux fins de communication par la poursuite. Dans la mesure où il y a des décisions de notre cour qui soutiennent que le registre ne peut jamais être pertinent pour ces fins, je ne partage pas cet avis.
[17] À mon avis, il est clair qu’on ne peut qualifier cette requête de théorique ou de farfelue. De plus, je ne vois aucunement comment la divulgation du registre d'entretien imposerait un lourd fardeau aux corps policiers ou à la poursuite. Même l'expert de la poursuite l'a affirmé clairement dans son témoignage.
[18] Dans le présent dossier on ignore de quelle façon, le cas échéant, l'entretien de l'appareil a pu avoir une incidence sur son utilisation et, finalement, sur la validité de la présomption d'exactitude. Mais je ne fermerai pas la porte sur cette question sans donner à la défense l'occasion de vérifier, en préparation du procès, si dans les faits cela a eu une incidence pertinente sinon importante.
[19] Pourtant, aux fins de cette requête seulement, je ne dis pas que la poursuite doit communiquer le registre d'entretien sans qu'une demande en soit faite. Cette question n'est pas devant la cour. Je dis que, par suite d’une requête de la défense, la preuve devant moi démontre que le registre en question dans ce dossier doit être communiqué à la défense pour la préparation du procès.
[5] L'expert de la poursuite convient que le bon entretien d'un appareil doit contribuer à son bon fonctionnement et pour cette raison, entre autres, les registres d'entretien sont maintenus de façon scrupuleuse. Dans son témoignage, il accepte qu'un appareil puisse être affecté d'une défectuosité et il accepte aussi qu'une défectuosité puisse survenir entre l'entretien et l'utilisation d'un appareil. À cet égard, son témoignage ne contredit aucunement les deux possibilités affirmées par l'expert en défense. Surtout, il affirme qu'il peut y avoir un lien entre l'entretien d'un appareil et son fonctionnement.
[6] La question sur cette requête n'est pas de savoir si le registre d'entretien est pertinent et admissible au procès, mais de savoir s'il est pertinent aux fins de préparer la cause. La preuve des deux parties sur la requête démontre que l'entretien d'un Alco-Sensor IV RBT-IV peut affecter son fonctionnement dans un sens ou dans l'autre.
[7] La communication de la preuve par la poursuite est un principe de droit qui renforce le droit de l'accusé à une défense pleine et entière. Quant à l'étendue de ce droit, il est large:
Stinchcombe énonce clairement que l’information pertinente devant être communiquée par la partie principale comprend non seulement les renseignements ayant trait aux éléments que le ministère public a l’intention de présenter en preuve contre l’accusé, mais également ceux qui peuvent raisonnablement aider ce dernier à présenter une défense pleine et entière (p. 343‑344).
Le seuil à franchir n’est pas très élevé.
[8] La pertinence pourrait être aussi une question de droit, mais elle est plutôt une question de logique et d'expérience. L'existence d'un fait A rend-elle plus ou moins probable l'existence d'un autre fait B? Si oui, le fait A est pertinent par rapport au fait B. De plus, si l'existence du fait B est une question en litige, l'on doit dire non seulement que le fait A est pertinent sur le plan logique («la pertinence logique») mais qu'il est pertinent sur le plan juridique («la pertinence juridique»).
[9] En l'espèce, si le fait B est le fonctionnement de l'appareil, que peut être le lien logique entre cette question de fait et le registre d'entretien? Pour répondre à cette question, je me pose d'autres questions et j'y réponds.
Q. Le fonctionnement d’un appareil approuvé est-il une question pertinente?
R. Oui, et pertinente non seulement sur un plan logique mais aussi sur un plan juridique.
Q. Si c’est le cas, le dysfonctionnement de l’appareil serait-il une question pertinente?
R. De toute évidence – même réponse.
Q. Les causes d’un dysfonctionnement pourraient-elles être pertinentes?
R. Certainement.
Q. Si l’entretien d’un appareil approuvé pouvait être la cause d’un dysfonctionnement, l’entretien de l’appareil serait-il pertinent?
R. Encore, oui.
Q. Le registre qui fait état de l’entretien de l’appareil pourrait-il être pertinent?
R. Non seulement logiquement pertinent, mais peut-être même juridiquement pertinent.
Voici le raisonnement qui m'amène à la conclusion que le registre pourrait être pertinent aux fins de communication.
[10] Je tiens à souligner deux distinctions. Premièrement, la pertinence n'a rien à voir avec la force probante ou le poids d'un élément de preuve. La pertinence d'un élément de preuve existe ou elle n'existe pas. La réponse à toute question de pertinence est strictement binaire - oui ou non – et elle n'admet aucunement de gradation par degré. La valeur probante d'un élément de preuve qui est par ailleurs pertinent n'est qu'une question de degré lorsque tous les éléments sont évalués les uns avec les autres. Il s'ensuit que le registre d'entretien pourrait être aussi pertinent que les divers tests de contrôle effectués sur l'appareil, mais que, en ce qui concerne le fonctionnement de l'appareil au jour de l'infraction alléguée, il risque peu, dans le cours normal des choses, d'être aussi probant que les tests de contrôle.
[11] La deuxième distinction que je garde à l'esprit est celle entre la pertinence d’une information pour fins de communication par la poursuite et la recevabilité d'un élément de preuve au procès. Dans le cas qui nous occupe, le registre d'entretien serait également pertinent aux fins de divulgation ou aux fins du procès, mais cela n'implique pas que si le registre doit être communiqué à la défense il est également admissible ou recevable au procès. La pertinence du registre est une condition nécessaire dans les deux cas, mais elle n’est pas forcément suffisante pour que le registre soit reçu en preuve au procès.
[12] Le juge Sopinka a traité de cette question dans l’arrêt Mohan:
La pertinence est déterminée par le juge comme question de droit. Bien que la preuve soit admissible à première vue si elle est à ce point liée au fait concerné qu'elle tend à l'établir, l'analyse ne se termine pas là. Cela établit seulement la pertinence logique de la preuve. D'autres considérations influent également sur la décision relative à l'admissibilité. Cet examen supplémentaire peut être décrit comme une analyse du coût et des bénéfices, à savoir «si la valeur en vaut le coût.» Voir McCormick on Evidence (3e éd. 1984), à la p. 544. Le coût dans ce contexte n'est pas utilisé dans le sens économique traditionnel du terme, mais plutôt par rapport à son impact sur le procès. La preuve qui est par ailleurs logiquement pertinente peut être exclue sur ce fondement si sa valeur probante est surpassée par son effet préjudiciable, si elle exige un temps excessivement long qui est sans commune mesure avec sa valeur ou si elle peut induire en erreur en ce sens que son effet sur le juge des faits, en particulier le jury, est disproportionné par rapport à sa fiabilité. Bien qu'elle ait été fréquemment considérée comme un aspect de la pertinence juridique, l'exclusion d'une preuve logiquement pertinente, pour ces raisons, devrait être considérée comme une règle générale d'exclusion (voir Morris c. La Reine, 1983 CanLII 28 (C.S.C.), 1983 CanLII 28 (C.S.C.), [1983] 2 R.C.S. 190).
Voyons comment ces propos et les deux distinctions que j'ai notées s'appliquent ici.
[13] Je comprends aisément que le registre d'entretien pourrait être pertinent aux fins de communication et aux fins du procès. Quant à la communication, le registre répond parfaitement aux critères établis par la Cour suprême. Quant au procès, cette question n'est pas devant la cour à ce stade-ci. Pourtant, j'ajouterais quelques commentaires là-dessus.
[14] Même si, à strictement parler, le registre peut être pertinent au fonctionnement de l'appareil, il incombera à la défense lors du procès d'établir, non seulement la vraisemblance de sa prétention, mais aussi que la preuve qu'elle entend administrer sera suffisamment utile pour justifier sa réception. Dans un dossier comme le nôtre, lorsque le fonctionnement d'un appareil approuvé est contesté, le fonctionnement de l'Alco-Sensor IV RBT-IV sera normalement examiné à la lumière des divers tests de contrôle et fréquemment aussi avec l'aide du témoignage des experts. Même si la pertinence logique et juridique du registre n'était pas contestable, la valeur probante d'une telle preuve doit être démontrée par la défense. Pour ce faire, la défense aura le fardeau d'établir, à partir du registre, non seulement un lien entre l'entretien et le fonctionnement de l'appareil, mais un lien qui serait capable de soulever dans les faits un doute raisonnable quant au fonctionnement de la machine à la date et au moment en question. Autrement la preuve du registre doit être déclarée inadmissible pour le même motif que le juge Sopinka a énoncé dans Mohan: sa valeur ne vaut pas le coût.
[15] Sur le plan procédural, il y aurait lieu peut-être d'adapter les dispositions de la Partie VIII du Code criminel aux fins d'un voir-dire si ou lorsque la défense tente de mettre le registre d'entretien en preuve au procès. À la suite d’un avis signifié dans un délai raisonnable, la défense peut demander au juge du procès de tenir une audition en vue de décider si la preuve est admissible. Comme toute requête, la demande doit être formulée par écrit et doit fournir toutes les précisions au sujet de la preuve en question et le rapport de celle-ci avec un élément de la cause. Le juge doit motiver sa décision sur l'admissibilité du registre d'entretien en précisant les éléments de la preuve retenus et la façon dont la preuve à admettre, en tout ou en partie, se rattache à un élément de la cause. Les motifs de la décision sont consignés au procès-verbal des débats ou sont donnés par écrit.
[16] La jurisprudence au Québec sur la question devant la cour est partagée et pour cette raison je ne m’y arrêterai pas. Dans certains cas, il semble que la preuve tendait à démontrer que le registre d'entretien ne pouvait pas avoir une incidence sur le fonctionnement d'un appareil approuvé. Dans d'autres cas, il y avait une preuve qui allait dans les deux sens sur cette question. Je répète qu'ici la preuve des deux parties fait en sorte que l'entretien peut avoir une incidence sur le fonctionnement de l'appareil et, par conséquent, que le registre d'entretien pourrait être pertinent aux fins de communication par la poursuite. Dans la mesure où il y a des décisions de notre cour qui soutiennent que le registre ne peut jamais être pertinent pour ces fins, je ne partage pas cet avis.
[17] À mon avis, il est clair qu’on ne peut qualifier cette requête de théorique ou de farfelue. De plus, je ne vois aucunement comment la divulgation du registre d'entretien imposerait un lourd fardeau aux corps policiers ou à la poursuite. Même l'expert de la poursuite l'a affirmé clairement dans son témoignage.
[18] Dans le présent dossier on ignore de quelle façon, le cas échéant, l'entretien de l'appareil a pu avoir une incidence sur son utilisation et, finalement, sur la validité de la présomption d'exactitude. Mais je ne fermerai pas la porte sur cette question sans donner à la défense l'occasion de vérifier, en préparation du procès, si dans les faits cela a eu une incidence pertinente sinon importante.
[19] Pourtant, aux fins de cette requête seulement, je ne dis pas que la poursuite doit communiquer le registre d'entretien sans qu'une demande en soit faite. Cette question n'est pas devant la cour. Je dis que, par suite d’une requête de la défense, la preuve devant moi démontre que le registre en question dans ce dossier doit être communiqué à la défense pour la préparation du procès.
La décision du juge Landry ordonnant à la poursuite de communiquer une copie du registre d’entretien de l’appareil
R. c. L'Écuyer, 2010 QCCQ 9173 (CanLII)
[23] À la lecture de ces différentes décisions, on peut conclure que la pertinence ne s’évalue pas nécessairement en fonction de l’utilité pour la poursuite de cette preuve mais plutôt en fonction de l’utilité pour la défense. Ce qui est pertinent pour la défense peut ne pas l’être pour la poursuite.
[24] Le document existe, le tribunal n’en a pas pris connaissance mais la poursuite mentionne que ce n’est pas un document volumineux.
[25] Cela étant, si la preuve est claire et précise que l’appareil a été bien entretenu, la communication de la preuve aura été utile à faire avancer le dossier pour convaincre l’accusé que la preuve est forte ou que la preuve est faible et contient des failles évidentes. Dans les deux cas, la recherche de la vérité s’impose.
[26] En conséquence, tenant compte du droit de l’accusé d’avoir une défense pleine et entière, tenant compte des nouvelles dispositions des paragraphes c) et d.01) de l’article 258 du Code criminel, le tribunal estime que le requérant a démontré, selon la balance des probabilités, l’existence d’une possibilité raisonnable que le registre d’entretien aurait pu être utilisé soit pour réfuter la preuve du ministère public soit pour présenter un moyen de défense ou par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense.
[27] Ce n’est pas au tribunal de quantifier cette utilité. À partir du moment où la défense aura démontré une certaine utilité, la preuve devra être communiquée.
[28] EN CONSÉQUENCE, la requête est accueillie et le tribunal ordonne à la poursuite de communiquer une copie du registre d’entretien de l’appareil ALCO-SENSOR IV – RBT IV, portant le numéro de série 032349 et 4372 utilisé sur le requérant d’ici quinze (15) jours.
[23] À la lecture de ces différentes décisions, on peut conclure que la pertinence ne s’évalue pas nécessairement en fonction de l’utilité pour la poursuite de cette preuve mais plutôt en fonction de l’utilité pour la défense. Ce qui est pertinent pour la défense peut ne pas l’être pour la poursuite.
[24] Le document existe, le tribunal n’en a pas pris connaissance mais la poursuite mentionne que ce n’est pas un document volumineux.
[25] Cela étant, si la preuve est claire et précise que l’appareil a été bien entretenu, la communication de la preuve aura été utile à faire avancer le dossier pour convaincre l’accusé que la preuve est forte ou que la preuve est faible et contient des failles évidentes. Dans les deux cas, la recherche de la vérité s’impose.
[26] En conséquence, tenant compte du droit de l’accusé d’avoir une défense pleine et entière, tenant compte des nouvelles dispositions des paragraphes c) et d.01) de l’article 258 du Code criminel, le tribunal estime que le requérant a démontré, selon la balance des probabilités, l’existence d’une possibilité raisonnable que le registre d’entretien aurait pu être utilisé soit pour réfuter la preuve du ministère public soit pour présenter un moyen de défense ou par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense.
[27] Ce n’est pas au tribunal de quantifier cette utilité. À partir du moment où la défense aura démontré une certaine utilité, la preuve devra être communiquée.
[28] EN CONSÉQUENCE, la requête est accueillie et le tribunal ordonne à la poursuite de communiquer une copie du registre d’entretien de l’appareil ALCO-SENSOR IV – RBT IV, portant le numéro de série 032349 et 4372 utilisé sur le requérant d’ici quinze (15) jours.
L'application du Règlement sur les appareils de détection d'alcool en regard des dispositions du Code criminel
Dufour c. R., 2009 QCCQ 7790 (CanLII)
[78] Dans l'examen de la pertinence, il importe d'analyser l'application du Règlement sur les appareils de détection d'alcool en regard des dispositions du Code criminel.
[79] Le règlement provincial sur les appareils de détection d'alcool a été adopté pour les fins du Code de la sécurité routière. Au Québec, les policiers doivent respecter les exigences du règlement et remplir les formulaires exigés. Contrairement au législateur provincial, le Parlement fédéral n'a pas légiféré en regard de l'entretien général des appareils de détection d'alcool. Le fait que le législateur québécois ait créé des documents qui par ailleurs n'existent pas dans les autres provinces canadiennes, ne les rend pas automatiquement pertinents. Il faut se rappeler que les législations provinciales ne s'appliquent pas aux dispositions du Code criminel.
[80] Sur cet aspect, certains tribunaux ont examiné des demandes d'exclusion de la preuve en vertu de la Charte lorsqu'un appareil de détection approuvé a été utilisé en contravention du Règlement sur les appareils de détection d'alcool.
[81] Dans R. c. Zrig, les policiers interrogés ne savaient pas si l'appareil de détection avait fait l'objet d'une vérification conformément au règlement provincial. La juge conclut au paragraphe 55 de sa décision qu'il n'y a pas lieu d'exclure les échantillons d'haleine obtenus puisque « un règlement adopté par la législation provinciale ne peut modifier la procédure dans une matière criminelle qui relève de la compétence du Parlement fédéral. »
[82] Dans R. c. Guèvremont, le délai de vérification aux 15 jours de l'appareil de détection exigé par la réglementation québécoise était expiré. Le juge conclut que le Code criminel n'impose aucune obligation de vérifier un appareil de détection approuvé et qu'en conséquence, les résultats des tests obtenus ne pouvaient être exclus.
[83] Dans R. c. Granger, comme dans la décision de Guèvremont, le délai de vérification aux 15 jours de l'appareil de détection était expiré. Le juge rappelle que cette exigence du règlement québécois ne s'applique pas au Code criminel.
[84] On peut inférer de ces décisions que les formulaires se rattachant aux dispositions du règlement provincial ne sont pas pertinents pour l'application des dispositions du Code criminel. Cependant, cela n'exclut pas qu'au cours du procès, l'accusé puisse démontrer qu'un de ces renseignements est pertinent.
[78] Dans l'examen de la pertinence, il importe d'analyser l'application du Règlement sur les appareils de détection d'alcool en regard des dispositions du Code criminel.
[79] Le règlement provincial sur les appareils de détection d'alcool a été adopté pour les fins du Code de la sécurité routière. Au Québec, les policiers doivent respecter les exigences du règlement et remplir les formulaires exigés. Contrairement au législateur provincial, le Parlement fédéral n'a pas légiféré en regard de l'entretien général des appareils de détection d'alcool. Le fait que le législateur québécois ait créé des documents qui par ailleurs n'existent pas dans les autres provinces canadiennes, ne les rend pas automatiquement pertinents. Il faut se rappeler que les législations provinciales ne s'appliquent pas aux dispositions du Code criminel.
[80] Sur cet aspect, certains tribunaux ont examiné des demandes d'exclusion de la preuve en vertu de la Charte lorsqu'un appareil de détection approuvé a été utilisé en contravention du Règlement sur les appareils de détection d'alcool.
[81] Dans R. c. Zrig, les policiers interrogés ne savaient pas si l'appareil de détection avait fait l'objet d'une vérification conformément au règlement provincial. La juge conclut au paragraphe 55 de sa décision qu'il n'y a pas lieu d'exclure les échantillons d'haleine obtenus puisque « un règlement adopté par la législation provinciale ne peut modifier la procédure dans une matière criminelle qui relève de la compétence du Parlement fédéral. »
[82] Dans R. c. Guèvremont, le délai de vérification aux 15 jours de l'appareil de détection exigé par la réglementation québécoise était expiré. Le juge conclut que le Code criminel n'impose aucune obligation de vérifier un appareil de détection approuvé et qu'en conséquence, les résultats des tests obtenus ne pouvaient être exclus.
[83] Dans R. c. Granger, comme dans la décision de Guèvremont, le délai de vérification aux 15 jours de l'appareil de détection était expiré. Le juge rappelle que cette exigence du règlement québécois ne s'applique pas au Code criminel.
[84] On peut inférer de ces décisions que les formulaires se rattachant aux dispositions du règlement provincial ne sont pas pertinents pour l'application des dispositions du Code criminel. Cependant, cela n'exclut pas qu'au cours du procès, l'accusé puisse démontrer qu'un de ces renseignements est pertinent.
Revue du droit sur la communication de la preuve
R. c. L'Écuyer, 2010 QCCQ 9173 (CanLII)
[15] La communication de la preuve est un élément essentiel dans l’application du droit criminel. Dans R. c. Taillefer, on mentionne :
P. 313 : « Dégagée par une jurisprudence née de la common law, explicitée à l’aide des principes constitutionnels de la Charte canadienne des droits et libertés, consacrée par l’arrêt prononcé par notre Cour dans R. c. Stinchcombe, [1991]3 R.C.S. 326, cette obligation a pris rang parmi les règles essentielles de la procédure pénale canadienne. Elle facilite le déroulement du procès, mais, d’abord, contribue à assurer la protection du droit des prévenus à une défense pleine et entière. D’ailleurs, dans le passé, une conception de la divulgation de la preuve comme un acte de bonne volonté et de coopération du ministère public a contribué à des erreurs judiciaires désastreuses. À ce propos, il suffit de rappeler que la Commission royale sur la poursuite de Donald Marshall Jr. a identifié l’omission de divulguer toute la preuve pertinente comme l’une des causes de l’erreur judiciaire qui a privé Donald Marshall de sa liberté durant 11 ans pour un crime qu’il n’avait pas commis (Royal Commission on the Donald Marshall, Jr., Prosecution : Findings and Recommendations (1989), vol. 1, p. 238 et suiv.). »
[16] Les principes généraux de la communication de la preuve se retrouvent dans l’arrêt R. c. Stinchcombe. De cette décision, on peut retenir entre autres les principes suivants :
« La divulgation de la preuve fait partie du droit de l’accusé de présenter une défense pleine et entière selon l’article 7 de la Charte.
La poursuite a l’obligation de divulguer tous les renseignements pertinents.
La poursuite a l’obligation de divulguer tout fait substantiel connu de la poursuite qui soit favorable ou non à l’accusé (si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion).
Il est bien entendu que l’obligation de divulguer n’est pas absolue. La poursuite peut refuser de divulguer certains documents pour absence de pertinence. »
[17] Quant à la pertinence, la Cour Suprême mentionne à la page 345 :
« Si les renseignements présentent une certaine utilité, alors ils sont pertinents et c’est à la défense et non à la poursuite de décider s’il s’agit d’une utilité suffisante pour qu’ils soient produits en preuve. »
[18] La Cour mentionne de plus à la page 339 :
« Si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion. Il n’est toutefois pas tenu de produire ce qui n’a manifestement aucune pertinence. »
[19] Dans R. c. Taillefer, déjà cité, à la page 334, la Cour Suprême s’exprime ainsi :
« Les règles encadrant l’obligation de divulgation de la preuve incombant au ministère public, après une période de développement graduel par les cours d’appel provinciales dans les dernières décennies, ont été précisées et consolidées par notre Cour dans l’arrêt Stinchcombe. Ces règles se résument en quelques propositions. Le ministère public doit divulguer à l’accusé tous les renseignements pertinents, qu’ils soient inculpatoires ou disculpatoires, sous réserve de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministère public de refuser de divulguer des renseignements privilégiés ou encore manifestement non pertinents. La pertinence s’apprécie tant à l’égard de l’accusation elle-même que des défenses raisonnablement possibles. Les renseignements pertinents doivent être divulgués, que le ministère public ait ou non l’intention de les produire en preuve et ce, avant que l’accusé n’ait été appelé à choisir son mode de procès ou à présenter son plaidoyer. »
[20] Dans R. c. Chaplin, la Cour Suprême mentionne à la page 743 :
« Par pertinence, il faut entendre qu’il y a possibilité raisonnable que ces renseignements puissent aider l’accusé à présenter une défense pleine et entière. »
[21] Dans R. c. Dixon, la Cour citait à la page 257 l’arrêt R. c. Egger, [1993]2 R.C.S. 451 sur la pertinence, page 467 :
« Une façon de mesurer la pertinence d’un renseignement dont dispose le ministère public est de déterminer son utilité pour la défense. S’il y a une certaine utilité, il est pertinent et devrait être divulgué – Stinchcombe précité à la page 345. Le juge qui effectue le contrôle doit déterminer si l’accusé peut raisonnablement utiliser la communication des renseignements pour réfuter la preuve et les arguments du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou autrement pour parvenir à une décision susceptible d’avoir un effet sur le déroulement de la défense comme par exemple de présenter ou non une preuve. »
[22] Plus loin, à la page 257, la Cour mentionne :
« Manifestement, le critère préliminaire fixé pour la divulgation est fort peu élevé et par conséquent, une vaste gamme de documents qu’ils soient disculpatoires ou inculpatoires sont assujettis à la communication. »
Page 258 : « Ainsi, lorsque l’accusé démontre l’existence d’une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués auraient été utilisés pour réfuter la preuve du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense, il se trouve également à établir l’existence d’une atteinte aux droits à la divulgation que garantit la charte. »
Page 258 : « Le droit à la communication de tous les documents pertinents est large et vise les documents qui peuvent n’avoir qu’une importance secondaire par rapport aux questions fondamentales au litige. »
Page 260 : « Pour réduire au minimum le risque de non-divulgation par inadvertance, le ministère public pourrait bien choisir de divulguer même les déclarations de témoins qui ne semblent pas pertinents au départ. Évidemment, la défense connaît mieux sa preuve que le ministère public et quelque chose qui semble non pertinent au ministère public pourrait avoir de l’importance pour la défense. »
[15] La communication de la preuve est un élément essentiel dans l’application du droit criminel. Dans R. c. Taillefer, on mentionne :
P. 313 : « Dégagée par une jurisprudence née de la common law, explicitée à l’aide des principes constitutionnels de la Charte canadienne des droits et libertés, consacrée par l’arrêt prononcé par notre Cour dans R. c. Stinchcombe, [1991]3 R.C.S. 326, cette obligation a pris rang parmi les règles essentielles de la procédure pénale canadienne. Elle facilite le déroulement du procès, mais, d’abord, contribue à assurer la protection du droit des prévenus à une défense pleine et entière. D’ailleurs, dans le passé, une conception de la divulgation de la preuve comme un acte de bonne volonté et de coopération du ministère public a contribué à des erreurs judiciaires désastreuses. À ce propos, il suffit de rappeler que la Commission royale sur la poursuite de Donald Marshall Jr. a identifié l’omission de divulguer toute la preuve pertinente comme l’une des causes de l’erreur judiciaire qui a privé Donald Marshall de sa liberté durant 11 ans pour un crime qu’il n’avait pas commis (Royal Commission on the Donald Marshall, Jr., Prosecution : Findings and Recommendations (1989), vol. 1, p. 238 et suiv.). »
[16] Les principes généraux de la communication de la preuve se retrouvent dans l’arrêt R. c. Stinchcombe. De cette décision, on peut retenir entre autres les principes suivants :
« La divulgation de la preuve fait partie du droit de l’accusé de présenter une défense pleine et entière selon l’article 7 de la Charte.
La poursuite a l’obligation de divulguer tous les renseignements pertinents.
La poursuite a l’obligation de divulguer tout fait substantiel connu de la poursuite qui soit favorable ou non à l’accusé (si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion).
Il est bien entendu que l’obligation de divulguer n’est pas absolue. La poursuite peut refuser de divulguer certains documents pour absence de pertinence. »
[17] Quant à la pertinence, la Cour Suprême mentionne à la page 345 :
« Si les renseignements présentent une certaine utilité, alors ils sont pertinents et c’est à la défense et non à la poursuite de décider s’il s’agit d’une utilité suffisante pour qu’ils soient produits en preuve. »
[18] La Cour mentionne de plus à la page 339 :
« Si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion. Il n’est toutefois pas tenu de produire ce qui n’a manifestement aucune pertinence. »
[19] Dans R. c. Taillefer, déjà cité, à la page 334, la Cour Suprême s’exprime ainsi :
« Les règles encadrant l’obligation de divulgation de la preuve incombant au ministère public, après une période de développement graduel par les cours d’appel provinciales dans les dernières décennies, ont été précisées et consolidées par notre Cour dans l’arrêt Stinchcombe. Ces règles se résument en quelques propositions. Le ministère public doit divulguer à l’accusé tous les renseignements pertinents, qu’ils soient inculpatoires ou disculpatoires, sous réserve de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministère public de refuser de divulguer des renseignements privilégiés ou encore manifestement non pertinents. La pertinence s’apprécie tant à l’égard de l’accusation elle-même que des défenses raisonnablement possibles. Les renseignements pertinents doivent être divulgués, que le ministère public ait ou non l’intention de les produire en preuve et ce, avant que l’accusé n’ait été appelé à choisir son mode de procès ou à présenter son plaidoyer. »
[20] Dans R. c. Chaplin, la Cour Suprême mentionne à la page 743 :
« Par pertinence, il faut entendre qu’il y a possibilité raisonnable que ces renseignements puissent aider l’accusé à présenter une défense pleine et entière. »
[21] Dans R. c. Dixon, la Cour citait à la page 257 l’arrêt R. c. Egger, [1993]2 R.C.S. 451 sur la pertinence, page 467 :
« Une façon de mesurer la pertinence d’un renseignement dont dispose le ministère public est de déterminer son utilité pour la défense. S’il y a une certaine utilité, il est pertinent et devrait être divulgué – Stinchcombe précité à la page 345. Le juge qui effectue le contrôle doit déterminer si l’accusé peut raisonnablement utiliser la communication des renseignements pour réfuter la preuve et les arguments du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou autrement pour parvenir à une décision susceptible d’avoir un effet sur le déroulement de la défense comme par exemple de présenter ou non une preuve. »
[22] Plus loin, à la page 257, la Cour mentionne :
« Manifestement, le critère préliminaire fixé pour la divulgation est fort peu élevé et par conséquent, une vaste gamme de documents qu’ils soient disculpatoires ou inculpatoires sont assujettis à la communication. »
Page 258 : « Ainsi, lorsque l’accusé démontre l’existence d’une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués auraient été utilisés pour réfuter la preuve du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense, il se trouve également à établir l’existence d’une atteinte aux droits à la divulgation que garantit la charte. »
Page 258 : « Le droit à la communication de tous les documents pertinents est large et vise les documents qui peuvent n’avoir qu’une importance secondaire par rapport aux questions fondamentales au litige. »
Page 260 : « Pour réduire au minimum le risque de non-divulgation par inadvertance, le ministère public pourrait bien choisir de divulguer même les déclarations de témoins qui ne semblent pas pertinents au départ. Évidemment, la défense connaît mieux sa preuve que le ministère public et quelque chose qui semble non pertinent au ministère public pourrait avoir de l’importance pour la défense. »
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