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mercredi 4 mars 2009

Contrôles visant des citoyens canadiens à un point d’entrée

Un citoyen canadien au sens de la Loi sur la citoyenneté a le droit d’entrer et de
demeurer au Canada aux termes de L19 (1).

Le L15 (1) permet à un agent de procéder à un contrôle visant une personne qui
présente une demande en vertu de la Loi. Le R28b) établit qu’une personne qui cherche à entrer au Canada présente du fait une demande.

De plus, le L18(1) établit l’obligation de toute personne qui cherche à entrer au Canada de se soumettre à un contrôle visant à déterminer si elle a le droit d’entrer au Canada ou si elle peut être autorisée à entrer au Canada et à y demeurer. Ces dispositions incluent les citoyens canadiens.

Normalement, un agent de l’ASFC responsable du contrôle secondaire de l’immigration
n’effectue un contrôle visant un citoyen canadien que dans le cas où l’agent de l’ASFC à la LIP a un doute sur la citoyenneté de l’intéressé. L’agent de l’ASFC au point d’entrée doit contrôler les citoyens canadiens de façon aussi expéditive que possible. Une fois que l’agent a pu établir que l’intéressé est un citoyen canadien, le contrôle doit prendre fin et la personne doit être autorisée à entrer au Canada sans autre délai. Il n’est pas alors approprié pour un agent de l’ASFC responsable du contrôle secondaire de l’immigration d’obtenir de plus amples renseignements personnels d’un citoyen canadien.
On peut demander à un citoyen canadien de fournir, sur une base volontaire, des
renseignements additionnels si ceux-ci peuvent aider un agent à déterminer
l’admissibilité d’un étranger qui accompagne le Canadien.

Les documents suivants constituent des preuves acceptables de citoyenneté canadienne
• passeport canadien;
• certificat de citoyenneté canadienne
• passeport canadien d’urgence
• certificat de naturalisation;
• certificat d’enregistrement d’une naissance à l’étranger;
• certificat de conservation de la citoyenneté canadienne.
Un certificat de naissance d’une province canadienne constitue un indicateur valable que son détenteur possède la citoyenneté canadienne. Mais comme ces certificats ne
comportent pas de photo, l’agent de l’ASFC doit s’assurer que le détenteur est bien le titulaire légitime du document.

Les citoyens canadiens qui reviennent au Canada par avion doivent habituellement
présenter une preuve d’identité et de citoyenneté avant de monter à bord. Cependant, il est fréquent que des Canadiens qui se présentent à un point d’entrée frontalier soient incapables de produire une preuve documentaire convaincante de leur citoyenneté. Dans un tel cas, l’agent de l’ASFC doit interroger l’intéressé jusqu’à qu’il soit convaincu qu’il est un citoyen canadien. Une fois convaincu, l’agent doit autoriser sans autre délai la personne à entrer au Canada.

Délai entre l’arrestation et l’ordre de fournir les échantillons / Délai d’attente de remorqueuse et de 25 min. entre les tests non-expliqués

R. c. Cuerrier, 2007 QCCQ 561 (CanLII)

[52] Dans R. v. Whitesell 1998 B.C.J. no. 333, un délai de 26 minutes entre l’arrestation et l’ordre de fournir les échantillons s’écoule. Les policiers complètent des documents et attendent une remorqueuse. Rien n’empêchait les policiers de donner l’ordre immédiatement. La Cour conclut qu’il y a perte pour la poursuite de la présomption prévue à l’article 258 du Code criminel.

[53] Dans R. v. Drohan 2004 B.C.J. no. 1909 malgré la présence des motifs dès 10 h 28, le conducteur n’est mis en état d’arrestation qu’à 10 h 48 et l’ordre de fournir des échantillons donné à 10 h 51. La Cour dans cette affaire réitère les principes de l’arrêt Whitesell et cite trois autres décisions où des délais de 10, 8 et 9 minutes entre l’arrestation et l’ordre de fournir les échantillons ne sont pas conformes aux exigences des mots « immédiatement ou dès que possible » de l’article 254 (3) du Code criminel. Voir au même effet R. c. Fisher 1995 A.J. no. 1999.

[54] Au présent dossier l’accusé a été mis en état d’arrestation à 3 h 23 et l’ordre de fournir les échantillons d’haleine donné à 4 h 5. Ce délai de 42 minutes ne respecte pas les prescriptions de l’article 254 (3) du Code criminel. L’ordre n’a pas été donné immédiatement ou dès que possible.

[55] Non seulement l’agent de la paix doit-il ordonner immédiatement ou dès que possible à l’accusé de lui fournir des échantillons d’haleine, mais ces échantillons doivent également être fournis immédiatement ou dès que possible au terme de l’article 254 (3) du Code criminel.

[56] Il existe une abondante jurisprudence sur « le délai de la remorqueuse ». Chaque cas doit être étudié au fond et les circonstances analysées dans chaque dossier.

[58] La Cour d’appel d’Ontario dans une décision du 28 avril 1988 dans Régina v. Phillips 42 CCC 3d 150, s’exprime ainsi : « The terms as soon as practisable does not means as soon as possible. The proper approach for a trial judge on a motion for a directed verdict is to determine whether there is any evidence upon which it could be found that the breathalyser test was taken as soon as reasonably practisable. »

[59] La Cour cite au soutien de cette affirmation les décisions de R. c. Ashby 1980 57 CCC (2d) 348 et R. v. Lightfoot (1980) 4 M.V.R. 238.

[60] La même Cour d’appel d’Ontario dans R. v. Letford, décision du 22 décembre 2000 rapportée à 150 CCC (3d) 225 réitère que « The Crown need not show that the police are organized to take breath sample as soon as possible in each case. However s. 258(1)c(ii) does require that in every case the Crown demonstrate that in all the circumstances including, where relevant, the way the police are organized and why, the breath samples were taken within a reasonably prompt time. » (par. 20)

[61] Dans R. v. Sevinis de la Cour supérieure d’Ontario rapportée à 1999 O.J. no. 5170, un délai d’une demie-heure à attendre la dépanneuse, sans explication valable, amène la Cour à conclure que les tests n’ont pas été fournis immédiatement ou dès que possible.

(63) Dans R. v. Keddy, décision de la Cour supérieure de Nouvelle-Écosse rapportée à 1995 N.S.J. no. 526, un délai de 33 à 36 minutes est jugé insatisfaisant d’autant plus que le véhicule de l’accusé une fois immobilité « posed no threat to any other vehicle… Once the truck had been secured there was no reason to remain to wait for the tow truck ». (par 16)

[62] Dans le présent dossier, aucune justification n’a été offerte par les policiers pour l’attente de la dépanneuse. Le fardeau de cette preuve incombe à la poursuite. En l’absence d’explication, le tribunal ne peut que conclure que ce délai était injustifié dans les circonstances.

[63] Les 25 minutes écoulées entre les deux tests d’ivressomètre posent aussi problème.

[64] Le Code criminel exige qu’un délai de 15 minutes sépare les deux tests. Tout délai supplémentaire doit être justifié.

[65] Dans R. v. Jackson, décision du 15 décembre 2005 rapportée à 2005 au O.J. 5764, la Cour s’exprime ainsi lorsqu’un délai de 29 minutes a séparé les deux tests :

« The Crown is not required to account for every minute. The issue is whether the police acted reasonably and expeditiously in all the circumstances. » (par. 15)

« In this particular case there was no admissible evidence to explain why the interval between the two breath samples was 29 minutes, almost twice the 15 minutes requirement under section 258. There was no admissible evidence that would provide any indication of what transpired between the first and second breath samples. » (par. 17)

« Clearly, the Crown is not required to account for every minute beyond the required interval of 15 minutes. There are no doubt reasonable explanations as to activities by the police or the accused that extended the time interval between the two breath samples beyond the minimum requirements. However, on these particular facts, there was no admissible direct or even circumstantial evidence of what transpired in that interval. » (par. 20)

« In order to rely on the presumption, the Crown must establish that each breath sample was taken “as soon as possible”. In the absence of any admissible evidence, I cannot make a finding that the Crown has met its burden of proof. The Crown is therefore not entitled to rely upon the presumption afforded in section 258(1)c) of the Criminal code. » (par. 21)

[66] Voir au même effet R. v. McInnis 1989 O.J. no. 1867 où l’Ontario District Court siégeant en appel en est venue à la même conclusion pour un délai de 29 minutes entre les deux tests.

[67] D’autres types de délais se retrouvent à R. v. Dzaja 2003 O.J. no. 2341 où un délai de 33 minutes entre l’arrivée au poste et l’appel à l’avocat n’a pas été expliqué, R. v. McCoy 1990 S.J. no. 657 où un délai de 44 minutes n’a pas été expliqué entre l’arrivée au poste et le premier test d’ivressomètre et R. v. Schouten 2002 O.J. no. 4777 où un délai de 18 minutes entre le moment où le technicien se déclare prêt et le premier test n’a pas été expliqué.

[68] Dans tous ces dossiers, les tribunaux en arrivent à la conclusion que la poursuite perd le bénéfice de la présomption prévue à l’article 258 (1) c) du Code criminel.

[69] Dans le présent dossier, aucune explication n’est donnée par l’agent Benoit pouvant justifier ce délai de 25 minutes. Le fardeau de cette preuve repose sur la poursuite. Dans ces circonstances, le tribunal réitère les mêmes énoncés que la Cour dans l’arrêt Jackson et en arrive à la même conclusion : la poursuite perd le bénéfice de la présomption de l’article 258 (1) c) du Code criminel.

[70] Comme tous les délais injustifiés peuvent s’additionner (voir R. v. Beninato 2005 O.J. no. 2193), un délai total et inexpliqué de 35 minutes est donc applicable au présent dossier pour l’attente de la remorqueuse et les 10 minutes inexpliquées entre les deux tests.

[71] Ni l’ordre de fournir les échantillons d’haleine, ni la prise des échantillons ne se sont faits immédiatement ou dès que possible tel que prescrit par l’art. 254 (3) du Code criminel.

[72] En conséquence, la poursuite ne peut bénéficier de la présomption prévue à l’article 258 (1) c) du Code criminel. Le certificat du technicien qualifié déposé par la poursuite est donc exclu de la preuve.

Un pistolet à air hors d’état de fonctionner peut constituer une «arme à feu»

R. c. Covin, [1983] 1 R.C.S. 725

Résumé des faits
Les intimés ont été déclarés coupables de vol à main armée et d’utilisation d’une arme à feu lors de la perpétration d’un acte criminel. L’arme utilisée était un pistolet à air; quatorze pièces manquaient à l’arme ou étaient endommagées et sept de ces pièces étaient essentielles à son fonctionnement.

Analyse
Donc, quelle que soit la chose utilisée sur les lieux du crime, la poursuite doit prouver que cette chose est susceptible, soit telle quelle, soit par adaptation ou montage, d’être chargée et de tirer des projectiles et, de ce fait, capable de causer des blessures corporelles graves pendant la perpétration de l’infraction ou pendant la fuite après la perpétration de l’infraction.

En l’espèce, l’arme utilisée par les intimés ne constituait pas une arme à feu au sens de l’art. 83. Le pistolet à air était hors d’état de fonctionner et ne pouvait être réparé ou adapté de manière à pouvoir tirer des projectiles et causer des blessures graves pendant la perpétration de l’infraction ou pendant la fuite après cette perpétration.

À la lecture de la définition de l’expression «arme à feu», il ressort d’abord que ce qui est principalement visé c’est une arme munie d’un canon qui peut effectivement «infliger des lésions corporelles graves ou la mort», parce qu’on peut la charger et faire feu. Cela, à mon sens, comprend les armes non chargées

À mon avis, pour que quelque chose demeure dans les limites de la définition, le degré acceptable d’adaptation et le temps requis pour la réaliser dépendent de la nature de l’infraction à laquelle la définition s’applique. Il faudra identifier le but de chaque article et déterminer la quantité, la nature de l’adaptation et le temps nécessaire à la réaliser de façon à donner effet à l’intention qu’avait le Parlement lorsqu’il a adopté cet article.

Un pistolet, un revolver ou un pistolet à air en état de fonctionner, mais non chargé, est une arme à feu parce qu’il peut, pendant la perpétration de l’infraction, si on le charge d’un projectile et si on fait feu, causer des blessures corporelles.

S’il n’est pas en état de fonctionner, il s’agit d’une arme à feu si, en regard de la nature des réparations ou modifications requises et de la disponibilité des pièces sur les lieux, ce qui a été utilisé aurait pu, pendant la perpétration de l’infraction, être adapté par quiconque ou par l’accusé s’il possède des aptitudes particulières de manière à pouvoir tirer des projectiles et causer des blessures graves.

Il incombe à la poursuite de le prouver

Définition pertinente
«arme à feu » Toute arme susceptible, grâce à un canon qui permet de tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile, d’infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne, y compris une carcasse ou une boîte de culasse d’une telle arme ainsi que toute chose pouvant être modifiée pour être utilisée comme telle.

Définition de « arme » / Sens du mot « blesser » dans la définition de « arme »

R. c. Lamy, [2002] 1 R.C.S. 860

Résumé des faits
L’accusé est déclaré coupable au procès d’agression sexuelle armée et de relations sexuelles anales. Pendant l’agression sexuelle, l’accusé pénètre la plaignante avec un long godemiché de bambou en forme de bâton de baseball.

Analyse
Si un objet est utilisé dans l’infliction d’une blessure (physique ou psychologique) dans une agression sexuelle, il n’est pas nécessaire que la blessure équivaille à des lésions corporelles pour que soit déclenchée l’application de l’al. 272(1)a) du Code criminel. « Blesser » à l’art. 2 n’est pas synonyme de « infliger des lésions corporelles ».

Pour ce qui est de l’élément moral requis pour faire d’un objet une arme, la version française de l’art. 2, prise littéralement, pourrait vouloir dire que l’objet doit être conçu ou utilisé, ou qu’une personne entende l’utiliser, dans le but de blesser. La version anglaise fournit une clarification indiquant que, lorsqu’un objet a été utilisé pour tuer ou blesser, il n’est pas exigé qu’il ait été utilisé dans le but de tuer ou blesser, mais seulement qu’il ait été utilisé en causant la mort ou une blessure. L’accusé doit sciemment ou inconsidérément utiliser l’objet sans le consentement de la victime dans des circonstances où la blessure est raisonnablement prévisible.

De toute évidence, il faut un lien de causalité entre la blessure causée par l’agression sexuelle et l’utilisation d’un objet au cours de l’agression. Par exemple, si l’accusé contraint la victime à porter un vêtement particulier pendant qu’il l’agresse sexuellement, il est évident que ce vêtement ne devient pas une arme même si la victime subit des blessures pendant l’agression. De même, l’accusé doit sciemment ou inconsidérément utiliser l’objet sans le consentement de la victime dans des circonstances où la blessure est raisonnablement prévisible. Lorsqu’un accusé, comme en l’espèce, agresse sexuellement la plaignante en employant la force contre elle sans qu’elle y consente, et que le recours à cette force, dont une pénétration de force avec un objet, lui a causé des blessures, j’estime qu’il est parfaitement compatible avec la définition de l’art. 2 de conclure que l’objet a été utilisé pour causer des blessures et peut donc être qualifié d’arme.

Définitions pertinentes
L’expression « lésions corporelles », qui est utilisée largement dans le contexte des voies de fait, est ainsi définie à l’art. 2 : « Blessure qui nuit à la santé ou au bien‑être d’une personne et qui n’est pas de nature passagère ou sans importance »

«arme » Toute chose conçue, utilisée ou qu’une personne entend utiliser pour soit tuer ou blesser quelqu’un, soit le menacer ou l’intimider. Sont notamment visées par la présente définition les armes à feu.

mardi 3 mars 2009

Harcèlement criminel - état du droit

R. c. Lamontagne, 1998 CanLII 13048 (QC C.A.)

L'art. 264 C.cr., précité, précise au par. (1) les éléments constitutifs de l'infraction qui doivent être prouvés tandis que le par. (2) décrit les quatre types de l'acte interdit auquel renvoie le par. (1). La Cour d'appel d'Alberta, dans l'arrêt R. v. Sillip 1997 CanLII 10865 (AB C.A.), (1997), 11 C.R. (5th) 71, p. 78, en dégage les cinq éléments essentiels suivants:

1) It must be established that the accused has engaged in the conduct set out in s. 264 (2) (a), (b), (c), or (d) of the Criminal Code.

2) It must be established that the complainant was harassed.

3) It must be established that the accused who engaged in such conduct knew that the complainant was harassed or was reckless or wilfully blind as to whether the complainant was harassed.

4) It must be established that the conduct caused the complainant to fear for her safety or the safety of anyone known to her; and

5) It must be established that the complainant's fear was, in all of the circumstances, reasonable.

Je souscris à cette analyse.

L'actus reus de cette infraction se compose de trois éléments, soit (1) l'acte interdit au par. (2), (2) que de fait la victime soit harcelée et (3) l'effet que cet acte provoque chez la victime.

Quand dans la version française il est stipulé que la connaissance ou l'insouciance que la plaignante se sente harcelée cela implique que l'auteur, par son fait, a contribué au harcèlement de la plaignante puisqu'on pourrait difficilement lui imputer une connaissance d'un état dont il n'est pas responsable.

Si l'on applique maintenant à l'instance le texte d'incrimination à la lumière de la dénonciation, il s'ensuit que la poursuite devait prouver les éléments essentiels suivants:

(1) que l'appelant s'est comporté d'une manière menaçante envers la plaignante;

(2) qu'en se comportant d'une manière menaçante cela a eu pour effet de faire raisonnablement craindre à la plaignante - compte tenu du contexte - pour sa sécurité; [j'ai regroupé ici dans un seul les éléments ci-haut énumérés aux par. 4) et 5)]

(3) que la plaignante a été harcelée;

(4) que l'appelant savait que la plaignante se sentait harcelée ou ne se souciait pas qu'elle se sente harcelée;

Le premier élément à prouver concerne la conduite prohibée par le par. 264(2) C.cr.; l'appelant s'est-il comporté d'une manière menaçante en prononçant les mots reprochés? Pour interpréter les mots «d'une manière menaçante», j'estime, à l'instar de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'arrêt R. v. Ryback, supra, qu'il y a lieu d'appliquer le test proposé par la Cour Suprême du Canada dans l'arrêt R. v. McCraw, 1991 CanLII 29 (C.S.C.), [1991] 3 R.C.S. 72, à l'égard de l'infraction qui consiste à «proférer des menaces» selon l'art. 264.1 du Code criminel, soit que la nature de la menace doit être examinée de façon objective, dans le contexte de tous les mots énoncés et compte tenu de la personne à qui ils s'adressent.

Si le premier élément soulevait l'existence même d'un comportement dit «menaçant» d'un point de vue purement objectif, le deuxième précise quel doit être l'effet de ce comportement, soit de «faire raisonnablement craindre à la plaignante - compte tenu du contexte - pour sa sécurité».

Encore là, il s'agit d'un test objectif en raison de l'emploi du mot «raisonnablement». Cela signifie que même si une plaignante affirmait avoir subjectivement craint pour sa sécurité, cela ne suffirait pas puisque le juge des faits doit être satisfait que «raisonnablement», donc d'un point de vue objectif (d'une personne raisonnable), ce comportement «menaçant», «compte tenu du contexte», a fait craindre à la plaignante pour sa sécurité (R. v. Ducey (W.J.) (reflex-logo) reflex, (1996), 142 Nfld. & P.E.I.R. 91 (C.A.T.N.), et La Reine c. Anne-Nicole Josile (inédit), C.S. Montréal, no 500-36-001209-975, 16 janvier 1998, j. Pinard.

Le «harcèlement» n'est pas défini par le législateur à l'art. 264.

Dans les arrêts Ryback et Sillipp, supra, l'on s'entend pour donner à ce mot une interprétation contextuelle. Il ne suffit pas que la plaignante soit «vexed, disquieted or annoyed», encore faut-il démontrer que la conduite prohibée ait «tormented, troubled, worried continually or chronically, plagued, bedeviled and badgered», soulignent ces arrêts

Les conditions pouvant être contenues dans une ordonnance de probation

Certaines conditions d’une ordonnance de probation sont obligatoires, alors que d’autres sont facultatives. L’article 732.1 (2) C.cr. énumère les conditions obliga-toires qu’une ordonnance doit comporter

Conditions obligatoires
(2) Le tribunal assortit l’ordonnance de probation des conditions suivantes, intimant au délinquant :

a) de ne pas troubler l’ordre public et d’avoir une bonne conduite;

b) de répondre aux convocations du tribunal;

c) de prévenir le tribunal ou l’agent de probation de ses changements d’adresse ou de nom et de les aviser rapidement de ses changements d’emploi ou d’occupation.

Conditions facultatives
(3) Le tribunal peut assortir l’ordonnance de probation de l’une ou de plusieurs des conditions suivantes, intimant au délinquant :

a) de se présenter à l’agent de probation :

(i) dans les deux jours ouvrables suivant l’ordonnance, ou dans le délai plus long fixé par le tribunal,

(ii) par la suite, selon les modalités de temps et de forme fixées par l’agent de probation;

b) de rester dans le ressort du tribunal, sauf permission écrite d’en sortir donnée par le tribunal ou par l’agent de probation;

c) de s’abstenir de consommer :

(i) de l’alcool ou d’autres substances toxiques,

(ii) des drogues, sauf sur ordonnance médicale;

d) de s’abstenir d’être propriétaire, possesseur ou porteur d’une arme;

e) de prendre soin des personnes à sa charge et de subvenir à leurs besoins;

f) d’accomplir au plus deux cent quarante heures de service communautaire au cours d’une période maximale de dix-huit mois;

g) si le délinquant y consent et le directeur du programme l’accepte, de participer activement à un programme de traitement approuvé par la province;

g.1) si le lieutenant-gouverneur en conseil de la province où doit être rendue l’ordonnance de probation a institué un programme de traitement curatif pour abus d’alcool ou de drogue, de subir, à l’établissement de traitement désigné par celui-ci, l’évaluation et la cure de désintoxication pour abus d’alcool ou de drogue qui sont recommandées dans le cadre de ce programme;

g.2) si le lieutenant-gouverneur en conseil de la province où est rendue l’ordonnance de probation a institué un programme visant l’utilisation par le délinquant d’un antidémarreur avec éthylomètre et s’il accepte de participer au programme, de se conformer aux modalités du programme;

h) d’observer telles autres conditions raisonnables que le tribunal considère souhaitables, sous réserve des règlements d’application du paragraphe 738(2), pour assurer la protection de la société et faciliter la réinsertion sociale du délinquant.

Conditions facultatives — organisations

(3.1) Le tribunal peut assortir l’ordonnance de probation visant une organisation de l’une ou de plusieurs des conditions ci-après, intimant à celle-ci :

a) de dédommager toute personne de la perte ou des dommages qu’elle a subis du fait de la perpétration de l’infraction;

b) d’élaborer des normes, règles ou lignes directrices en vue de réduire la probabilité qu’elle commette d’autres infractions;

c) de communiquer la teneur de ces normes, règles et lignes directrices à ses agents;

d) de lui rendre compte de l’application de ces normes, règles et lignes directrices;

e) de désigner celui de ses cadres supérieurs qui veillera à l’observation de ces normes, règles et lignes directrices;

f) d’informer le public, selon les modalités qu’il précise, de la nature de l’infraction dont elle a été déclarée coupable, de la peine infligée et des mesures — notamment l’élaboration des normes, règles ou lignes directrices — prises pour réduire la probabilité qu’elle commette d’autres infractions;

g) d’observer telles autres conditions raisonnables qu’il estime indiquées pour empêcher l’organisation de commettre d’autres infractions ou réparer le dommage causé par l’infraction.

Organismes de réglementation
(3.2) Avant d’imposer la condition visée à l’alinéa (3.1)b), le tribunal doit prendre en considération la question de savoir si un organisme administratif serait mieux à même de superviser l’élaboration et l’application des normes, règles et lignes directrices mentionnées à cet alinéa.

Détention présentencielle dans la situation d'une personne n'ayant pas la citoyenneté canadienne

Canada (Ministre de la Citoyennté et de l'Immigration) c. Atwal, 2004 CF 7 (CanLII)

[15] En adoptant l'article 64 de la LIPR, le législateur a voulu établir une norme objective de criminalité au regard de laquelle un résident permanent perd son droit d'appel. On peut présumer que le législateur était au courant du fait que, conformément à l' article 719 du Code criminel, la période de détention présentencielle est prise en considération lors de la détermination des peines. Appliquer l'article 64 de la LIRP en faisant abstraction de la période de détention présentencielle lorsque cette période a été expressément prise en compte dans la détermination de la peine serait contraire à l'intention qu'avait le législateur lors de l'adoption de cet l'article.

Cheddesingh c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 124 (CanLII)

[20] Dans l’arrêt R. c. Wust, 2000 CSC 18 (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 455, la juge Arbour écrivait ce qui suit, au paragraphe 41 :

[…] En conséquence, bien que la détention avant le procès ne se veuille pas une sanction lorsqu’elle est infligée, elle est, de fait, réputée faire partie de la peine après la déclaration de culpabilité du délinquant, par l’application du paragraphe 719(3) […]

[21] La demanderesse dit que dans la décision Atwal, précitée, le juge Pinard a mal interprété l’arrêt Wust lorsqu’il a considéré que le temps passé en détention présentencielle devrait être inclus dans l’emprisonnement dont parle l’article 64 de la Loi. Le juge Pinard écrivait ce qui suit, au paragraphe 15 :

En adoptant l’article 64 de la LIPR, le législateur a voulu établir une norme objective de criminalité au regard de laquelle un résident permanent perd son droit d’appel. On peut présumer que le législateur était au courant du fait que, conformément à l’article 719 du Code criminel, la période de détention présentencielle est prise en considération lors de la détermination des peines. Appliquer l’article 64 de la LIPR en faisant abstraction de la période de détention présentencielle lorsque cette période a été expressément prise en compte dans la détermination de la peine serait contraire à l’intention qu’avait le législateur lors de l’adoption de cet l’article.

[22] J’ai entendu les arguments très solides de l’avocat de la demanderesse, mais je ne puis souscrire à l’interprétation que propose la demanderesse sur ce qui constitue un emprisonnement pour l’application de l’article 64. Je partage les conclusions tirées par le juge Pinard dans la décision Atwal, précitée, et la jurisprudence de la Cour sur cette question est constante.

[23] Dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Smith, 2004 CF 63 (CanLII), 2004 CF 63, le juge Campbell a dit que l’emprisonnement visé au paragraphe 64(2) de la Loi comprenait la période de détention présentencielle, laquelle était prise en compte dans la détermination de la peine imposée à une personne. Dans la décision Jamil, précitée, la juge Mactavish est arrivée à la même conclusion. Elle écrivait ce qui suit, au paragraphe 33 :

Il convient de rappeler à cette étape que le paragraphe 64(2) de la LIPR ne concerne pas la durée de la peine infligée au délinquant, mais la punition infligée. Il ressort clairement de la jurisprudence qu’une fois qu’un individu est déclaré coupable d’un crime, la période qu’il passe en détention avant son procès est réputée faire partie de la punition infligée.

[24] Je suis donc d’avis que l’interprétation que préconise la demanderesse va à l’encontre de l’intention qu’avait le législateur lorsqu’il a rédigé le paragraphe 64(2) de la Loi, et j’arrive à la conclusion que le Tribunal n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle lorsqu’il a conclu que la période passée par la demanderesse en détention présentencielle faisait partie de son « emprisonnement ».

[29] Je souscris aux conclusions du juge Mosley sur ce point, conclusions qui ont été suivies dans la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Gomes, 2005 CF 299 (CanLII), 2005 CF 299, et dans la décision Sherzad, précitée. Dans la décision Sherzad, la juge Mactavish écrivait ce qui suit, aux paragraphes 57 à 61 :

C’est donc dire que la période passée en détention pour un délinquant avant sa condamnation est réputée faire partie de la « punition » qui lui est infligée. Il ne conviendrait pas, à mon avis, qu’un délinquant puisse faire valoir, en matière criminelle, qu’il faudrait réduire sa peine à cause de la période qu’il a passée en détention avant de subir son procès, et qu’il puisse ensuite faire volte‑face, en matière d’immigration, et dire qu’il ne faudrait pas prendre en compte la période passée en détention avant le procès, et que seule la durée de la peine devrait être prise en compte pour l’application du paragraphe 64(2) de la LIPR.

Comme l’a signalé le juge Mosley dans Cheddesingh (Jones), une telle interprétation irait à l’encontre des principes formulés dans l’arrêt Wust et de l’intention qu’avait le législateur en adoptant l’article 64 de la LIPR.

Par ailleurs, accepter l’interprétation que fait M. Sherzad du paragraphe 64(2) entraînerait un résultat absurde. Par exemple, si un individu inculpé d’une infraction plaidait coupable au moment de l’arrestation et était condamné à deux ans d’emprisonnement, son droit d’appel devant la SAI serait éteint par l’application du paragraphe 64(2). Par contre, un autre individu, inculpé de la même infraction dans des circonstances identiques, pourrait décider de subir un procès. S’il était déclaré coupable, la période qu’il a passée en détention avant le procès serait prise en compte et sa peine serait réduite en conséquence, devenant inférieure à deux ans. Dans de telles circonstances, le second délinquant aurait encore le droit d’interjeter appel devant la SAI.

Dans le même ordre d’idées, un délinquant qui passerait deux ans en détention avant de subir son procès et qui serait ensuite condamné « à la peine déjà purgée » n’aurait, suivant l’interprétation de M. Sherzad, reçu aucune « punition » aux fins de l’application du paragraphe 64(2).

Une telle interprétation inciterait concrètement les délinquants à invoquer les délais avant procès afin de contourner le paragraphe 64(2), ce qui n’est certes pas l’intention du législateur.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun

R. v. Atwell, 2022 NSSC 304 Lien vers la décision [ 8 ]              The Crown has a duty to make disclosure of all relevant information to ...