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mercredi 29 mai 2013

Corruption ‑‑ Éléments constitutifs de l'infraction ‑‑ Fonctionnaire ou employé du gouvernement ‑‑ Acceptation d'«une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice de quelque nature»

R. c. Hinchey, 1996 CanLII 157 (CSC)


L’objectif crucial de l'al. 121(1)c) n’est pas simplement de préserver l’intégrité du gouvernement, mais aussi de préserver l’apparence d’intégrité.  Compte tenu de la confiance et des lourdes responsabilités qui se rattachent aux charges publiques, il est normal que les fonctionnaires du gouvernement doivent se conformer à des codes d’éthique qui, pour un simple citoyen, seraient très sévères.  Un préjudice peut être causé à l’intégrité du gouvernement lorsque des fonctionnaires reçoivent des avantages, même en l’absence d’un motif illicite.  Il est tout à fait stérile qu’un gouvernement soit paralysé par des rumeurs et des insinuations pendant qu’une enquête se déroule au sujet des motifs à l’origine d’un avantage ou d’un bénéfice conféré à un fonctionnaire. Cette disposition criminalise le comportement du fonctionnaire ou employé du gouvernement qui, dans certaines circonstances, accepte un bénéfice d’une personne qui a des relations d’affaires avec le gouvernement.  L'infraction créée est un crime «lié au comportement», ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire qu’un résultat donné découle de la perpétration de l’acte interdit.

                  Le législateur a libellé l’al. 121(1)c) d’une façon large et n’avait pas l’intention d’en restreindre l’application uniquement aux situations dans lesquelles le cadeau était motivé par la fonction du récipiendaire dans le gouvernement. Il est possible d’en limiter l’application potentiellement large par le biais de l’interprétation statutaire sans y introduire d’élément additionnel. Le premier élément de cet alinéa est qu’une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice de quelque nature doit être donné par une personne qui a des «relations d’affaires avec le gouvernement».  Il faut accorder au terme «dealings» dans le texte anglais l’interprétation restreinte en vertu de laquelle seules les personnes qui ont des relations d’affaires avec le gouvernement au moment de la perpétration de l’infraction sont visées par l’alinéa.

                  Le deuxième élément de l’actus  reus est l’acceptation d’«une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice de quelque nature» par un fonctionnaire.  L’expression «de quelque nature» n'était pas destinée à élargir la portée de l’alinéa.  Elle n’était pas censée signifier «de quelque montant que ce soit» ou «de quelque valeur que ce soit», mais englober diverses formes de bénéfices autres que ceux d'une nature strictement pécuniaire.  Il est possible d’éluder une bonne partie des conséquences absurdes qui résulteraient de l'attribution d'un sens illimité aux termes «avantage ou bénéfice» en interprétant plus strictement les termes et en reconnaissant qu’ils exigent que, pour être visé par cet alinéa, le bénéficiaire ait obtenu un gain important ou concret.  Il est important d’examiner les liens qui existent entre les parties ainsi que l’étendue du bénéfice.  Plus les liens sont étroits, moins le cadeau devrait être considéré comme un avantage ou un bénéfice pour la personne qui le reçoit.  La question de savoir s'il s'agit d'un «bénéfice» réel est une question de fait sur laquelle le jury doit se prononcer en se fondant sur l’ensemble de la preuve.

                  En ce qui concerne la mens rea, étant donné que l'infraction est un crime «lié au comportement», elle exige, pour que l’accusé soit coupable, qu’il sache ce qu’il a fait et connaisse les circonstances dans lesquelles il a commis l’acte.  Pour prouver l’infraction prévue à l’al. 121(1)c), le ministère public doit donc établir les éléments suivants quant à la faute:  a) la décision prise sciemment par l’employé d’accepter ce qui en tout état de cause est «une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice de quelque nature» et b) le fait de savoir (ou d’ignorer volontairement), au moment de l’acceptation, que le donneur avait des relations d’affaires avec le gouvernement et que le supérieur de l’employé n’avait pas consenti à l’acceptation d’«une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice de quelque nature».  Étant donné que ce degré de mens rea est reconnu comme une forme valide de culpabilité criminelle, il n’est pas nécessaire d’ajouter d’autres éléments.  Les motifs pour lesquels un bénéfice est conféré ne sont pas sans pertinence; il s’agit d’un facteur important pour déterminer le degré de culpabilité.  Il est clair que le fonctionnaire qui a une intention de corruption lorsqu’il accepte un bénéfice méritera habituellement une peine plus sévère que la personne qui n’était pas animée d’un tel dessein.

État du droit concernant l'abus de confiance d'un fonctionnaire (pré-Boulanger de la Cour Suprême)

R. c. Tremblay, 2003 CanLII 17431 (QC CQ)

Lien vers la décision

[363]      Mon collègue, l'Honorable Carol St-Cyr a procédé récemment à une analyse de la notion d'abus de confiance, alors qu'il avait à rendre un verdict dans le dossier de la R. c. Denis Boulanger.
[364]      Je suis en accord avec les principes dégagés par son analyse, lesquels je résume de la façon suivante:
"Après avoir analysé l'origine de l'article 122 du Code criminel et son interprétation jurisprudentielle, l'Honorable juge Baudouin  de la Cour d'appel du Québec, signalait dans l'arrêt Perreault:
"À mon avis, ce que l'article 122 du Code criminel vise, c'est précisément la conduite vénale, la malversation, le conflit d'intérêts, la corruption, le trafic d'influence, la concession, le bénéfice indu, qui exigent tous à la base la poursuite d'un intérêt personnel ou, selon l'expression de la jurisprudence de common law, the furtherance of personal ends, donc l'utilisation d'une situation de pouvoir dans la fonction publique pour promouvoir des buts privés ou obtenir directement ou indirectement un bénéfice quelconque."
[365]      Relativement aux éléments essentiels de l'article 122, le juge Baudouin en arrive à la conclusion suivante:
"De cette brève revue de la jurisprudence sur la question, il me semble clair que les éléments essentiels de l'infraction prévue à l'article 122 C.Cr. sont les suivants:
1º   que l'accusé ait le statut de fonctionnaire;
2º que l'acte reproché ait été commis dans le cadre général de l'exécution de ses fonctions ;
3º  que l'acte constitue une fraude ou un abus de confiance.
Pour identifier maintenant les conditions nécessaires à ce troisième élément constitutif lorsqu'il s'agit d'abus de confiance, il me paraît que les conditions suivantes doivent être suivies ;
1º  L'accusé a posé un geste d'action ou d'omission contraire au devoir qui lui est imposé par la loi, un règlement, son contrat d'emploi ou une directive relativement à sa fonction.
2º  L'acte posé doit lui rapporter un bénéfice personnel (par exemple une compensation pécuniaire, un avantage en nature, en services ou autres) ou dérivé (par exemple, un avantage à son conjoint, un membre de sa famille ou même dans certains cas, un tiers).  Ce bénéfice peut être direct (par exemple, le paiement d'une somme d'argent) ou indirect (par exemple, l'espoir d'une promotion, le désir de plaire à un supérieur).
L'existence d'un préjudice réel au public ou à l'État n'est pas un élément de l'infraction, selon une jurisprudence unanime.  Le contraire est nécessaire pour établir la fraude, puisqu'il faut obligatoirement l'existence d'une privation. "
A-  LE STATUT DE FONCTIONNAIRES DE L'ACCUSÉ:
[366]      Le Juge Lamer a étudié la notion de fonctionnaire au sens du Code criminel, dans l'arrêt Doré c. Procureur Général du Canada:
" dans le Code criminel, le mot "fonctionnaire" fait l'objet d'une définition spéciale qui complète celle de "charge ou emploi" et de "département public", aux par. e) et d) de l'article 99 et au par. 15 de l'article 2".
[367]      L'article 118 du Code criminel définit le terme "fonctionnaire" de la façon suivante:
"personne qui:
a) détient une charge ou un emploi;
b) est nommé pour remplir une fonction publique.
Le terme "charge" ou "emploi" se définit de la façon suivante:
A)         d'une charge ou fonction sous l'autorité du gouvernement;
B)         d'une commission civile ou militaire;
C)         d'un poste ou un emploi dans un ministère public."
[368]      L'arrêt Lafrance définit "fonctionnaire" comme celui qui est sujet à l'autorité du gouvernement.
"… c'est une personne qui œuvre pour l'État, qui remplit un emploi de confiance à titre de conseiller ou autre dans une dynamique de réalisation ou de promotion des intérêts de l'état.".
[369]      Sur ce point, tant par son statut que par sa description de tâches, l'accusé est un fonctionnaire au sens de la Loi et il doit rendre compte de sa gestion puisqu'il dispose même d'un statut spécial et étant autorisé en vertu de l'article 34 de la Loi sur les finances publiques à apposer sa signature sur les factures afin que le paiement par un fonctionnaire soit fait au fournisseur de biens.
B-  DANS LE CADRE GÉNÉRAL DE SES FONCTIONS:
[370]      Sur ce point, tant l'accusé comme les témoins entendus, ou tel que révélé dans l'abondante preuve technique:
A)  L'accusé occupe une fonction de technicien en ophtalmologie, fonction unique aux emplois militaires et qui n'existe pas dans le civil;
B)  C'est la seule profession que pratique l'accusé depuis de nombreuses années;
C)  L'exercice de cette fonction se pratique uniquement sur les Bases des Forces armées canadiennes dans des locaux prévus à cette fin.
C-  QUE L'ACTE CONSTITUE UNE FRAUDE OU UN ABUS DE CONFIANCE:
[371]      Afin de déterminer si l'on peut conclure à l'abus de confiance, il faut analyser les critères suivants:
a)                  L'accusé pose-t-il un geste contraire à un devoir qui lui est imposé par la Loi ou un règlement?
b)                  L'acte posé a-t-il apporté un bénéfice direct ou indirect?
[372]      À cet égard, je réfère à l'analyse de mon collègue, l'Honorable Carol St-Cyr:
"Déjà dans l'arrêt Leblanc rendu en 1979, la Cour d'appel du Québec, en traitant de l'article 122 (anciennement 111) par l'entremise du juge Lamer, signalait :
 "En ce qui a trait au premier chef d'accusation, soit celui fondé sur l'article 111 du Code criminel, je crois qu'il serait opportun d'ajouter quelques commentaires ayant trait à la portée de ce texte, d'incrimination.
Il n'est aucunement nécessaire pour qu'une infraction soit commise en vertu de l'article 111 du Code criminel, que l'accusé ait agi malhonnêtement, de façon corrompue ou encore qu'il ait posé un geste illégal.  Ce sont là des conditions de fond d'infractions que l'on retrouve ailleurs au Code, dont, à titre d'exemple, aux articles 108 et 109 du Code criminel, où on prévoit que l'accusé doit avoir agi par «corruption».   Ces crimes sont d'ailleurs punis de façon beaucoup plus sévère.
L'infraction prévue à l'article 111 du Code criminel est à quelques nuances près, la codification des crimes de Common Law, connus sous le nom de «misbehaviour» et de «misfeasance in public office»".
[373]      Implicitement, le juge Lamer soulignait que la preuve d'un bénéfice quelconque est une des composantes de la notion d'abus de confiance en spécifiant :
"À mon avis, le fait qu'un fonctionnaire accepte des sommes d'argent autres que ses émoluments officiels, pour offrir à celui qui les lui donne un meilleur service que celui dont bénéficieront tous autres qui, à juste titre, se croient justifiés de ne payer que leurs impôts et leurs taxes, constitue de l'inconduite dans l'exécution de ses fonctions au sens que l'entendait le Commun Law et, partant, est «un abus de confiance» au sens de l'article 111 du C.Cr."
[374]      Or, dans l'analyse de ce deuxième critère de l'abus de confiance, le juge Baudouin signale que c'est précisément, parce que le crime d'abus de confiance n'implique pas toujours l'idée de corruption, qu'il doit impliquer au moins celle de réception d'un bénéfice quelconque.
[375]      Cette notion a aussi comme but d'éviter de faire intervenir le droit pénal dans des secteurs où il n'a pas sa raison d'être.
[376]      Sur cet aspect, le juge Baudouin s'exprime ainsi :
  "Le droit criminel a pour mission de sanctionner les atteintes graves dérogeant des valeurs sociales fondamentales.  Il est certain que de tirer un profit personnel de l'exercice d'une charge publique en est une.  Par contre, le droit criminel n'a pas à sanctionner le simple écart technique de conduite, l'acte d'indiscipline administrative ou la faute administrative, même délibérée.  La sanction relève alors de la discipline du droit administratif, peut-être même du droit civil ".
[377]      La jurisprudence a défini que le crime d'abus de confiance est un crime d'intention générale.  La Cour suprême dans l'arrêt R. c.Hinchey s'exprime de la façon suivante:
En ce qui concerne la mens rea, étant donné que l'infraction est un crime "lié au comportement", elle exige pour que l'accusé soit coupable qu'il sache ce qu'il a fait et connaisse les circonstances dans lesquelles il a commis l'acte.
… ce degré de mens rea est reconnu comme une forme de culpabilité criminelle.
Il s'agit que l'accusé ait été insouciant à l'égard des conséquences naturelles de ses actes.
[378]      La Cour d'appel du Québec a étudié à plusieurs reprises la notion d'actus reus et de mens rea de l'infraction d'abus de confiance et à cet égard, le Tribunal réfère aux arrêts R. c. Lippé. R. c. Flamand, R.c. Gagné

La portée de l'admission & la réouverture d'enquête

R. c. Gosselin, 2013 QCCS 716 (CanLII)


[21]        La Poursuivante prétend que si on admet qu'un complot a réduit indûment la concurrence sur le marché de Magog ou Sherbrooke, on a nécessairement admis l'existence de ces marchés, la structure du marché et le comportement des parties au complot puisque l’admission, c’est le résultat du processus d’analyse.
[22]        Le fait que le complot ait un effet indu sur la concurrence dans les marchés de Sherbrooke et de Magog est admis, ce qui dispense la Poursuivante d'en faire la preuve. L’admission est une preuve irréfragable, ce qui la dispense nécessairement de présenter les éléments nécessaires à l'examen ou au processus d'évaluation du caractère indu de la restriction de la concurrence dans ces deux marchés, ce qui inclut notamment, selon l’affaire Nova Scotia, les deux éléments principaux au processus d'évaluation, soit la structure de marché et le comportement des parties à l'accord, y compris le marché pertinent ainsi que tous les autres éléments essentiels à la détermination de l’effet indu d’un accord sur un marché. Selon Nova Scotia, la Cour suprême a dit que tous les autres éléments mentionnés n’étaient pas exhaustifs.
[23]        À première vue, pour le Tribunal, cela semblerait être la « portée naturelle » de l’admission.
[24]        Une admission est là pour simplifier la preuve. Après avoir écouté et réécouté la requête en non-lieu, il y a manifestement une méprise réelle sur la portée de l’admission.
[25]        Il y a imbroglio sur la portée d’admissions faites de bonne foi, imbroglio sur ce que l’admission couvre ou ne couvre pas et qui a été soulevé à l’occasion de la requête en non-lieu. Cette question doit être réglée avant que l’on continue.
[26]        Comme le disait le juge Doherty dans l’arrêt R. v. Irwin :
There is no "vested right" to any particular defence in a criminal proceeding.
[27]        Il n’y a aucun avantage à tirer de la situation où la portée d’admissions faites de bonne foi est mise en cause, où il est possible de compléter la preuve, sans préjudice à la défense qui pourra contrer cette preuve et contre-interroger.
[28]        Ainsi, après analyse, le Tribunal estime que les critères de la deuxième étape de l’arrêt R. c. M.B.P. sont remplis et que l’imbroglio doit être levé.
[29]        On demande la réouverture de l’enquête pour lever cet imbroglio. Le Tribunal ne voit pas d’autre moyen que d’accorder la requête tout en précisant que la preuve du caractère indu de l’entente inclut nécessairement la preuve des éléments nécessaires au processus d'évaluation du caractère indu de la restriction de la concurrence, tel que défini par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Nova Scotia.

Précédents jurisprudentiels de détermination de la peine en matière de vol qualifié

R. c. Beaudry, 2013 QCCS 999 (CanLII)


[35]        Dans R. c. Deschênes, le juge Claude C. Gagnon, j.c.s., impose une peine de neuf ans d’emprisonnement moins la détention provisoire à l’auteur non armé d’un vol qualifié, dû à l’utilisation de violence verbale; le vol n’a pas été prémédité, a été commis pour se procurer de la drogue par un individu qui a un profil criminalisé depuis 30 ans et qui en est à sa huitième condamnation pour vol qualifié. Dans sa décision sur la peine, le juge Gagnon passe en revue plusieurs précédents jurisprudentiels :
22.1      R. c. Corkum [1997] N.S.J. no. 421 (N.S. Sup. Court) :
w         L’accusé de 26 ans a commis deux vols qualifiés en menaçant ses victimes avec une note écrite.  Ses nombreux antécédents comprennent une condamnation à trente mois pour  vol qualifié.  La peine prononcée est de cinq (5) ans de prison.

22.2      R. c. A.D.P.  [2005] B.C.J. no 2737 (B.C.C.A.)
w         La Cour d’appel inflige à un accusé de 37 ans, déjà condamné à seize (16) mois et à quatre (4) ans pour des vols qualifiés, à une peine de six (6) ans en lieu et place de la peine avec sursis imposée en première instance.  L’accusé avait alors volé sous la menace trois postes d’essence de sommes d’argent inférieures à 150,00 $ en menaçant les commis.
22.3      R. c. MacDonald - 2006 B.C.C.A. 535
w         La Cour réduit de huit (8) à quatre (4) ans la peine d’un accusé de 45 ans, au long casier judiciaire, qui a commis deux vols à la pointe d’un couteau parce que le premier juge n’a pas suffisamment considéré une période d’accalmie de douze (12) années pendant laquelle MacDonald n’avait pas été condamné et avait travaillé régulièrement.
22.4      R. c. Allin – 2001 B.C.C.A. 710
w         La Cour confirme une peine de vingt-quatre (24) mois de prison pour vol qualifié consécutive à une peine de seize (16) mois. Le crime est commis dans une banque où l’accusé a exhibé au commis une note menaçante.  Allin a un passé judiciaire comprenant vingt-huit (28) condamnations dont deux (2) pour des vols qualifiés.  Au moment du vol reproché, la dépendance de l’accusé à la drogue était hors de contrôle.
22.5      R. c. Craig [2007] B.C.P.C. 144
w         L’accusé est condamné à cinq (5) ans de prison pour deux vols qualifiés dans des banques, commis au moyen de notes menaçantes.  Craig, 27 ans, avait un problème de dépendance à la drogue et cinq (5) antécédents judiciaires de vols qualifiés.  Les crimes reprochés avaient été commis peu de temps après sa sortie de prison et alors qu’il était encore sous libération conditionnelle.
22.6      R. c. Packwood [1991] A.Q. no 221 (C.A.Q.)
w         La Cour d’appel réduit à quatre (4) ans la peine pour un vol qualifié commis par un accusé déjà condamné à douze (12) reprises pour vol qualifié en treize (13) ans.  La peine est réduite en raison de la probabilité raisonnable de réhabilitation.
22.7      R. c. Dionne [2004 ] B.C.C.A.
w         La Cour confirme, dans le cas de l’appelant, la peine de trois (3) ans prononcée en première instance pour un vol qualifié commis par trois (3) individus en usant de menaces implicites.  L’accusé, qui était resté à l’extérieur de la banque, avait déjà à son passif onze (11) condamnations antérieures pour de tels crimes.  Le Tribunal note cependant que la peine se situe « at the very low end of the range for this offence committed by this offender… »à
(…)
23.1      R. c. Upton (2006) B.C.P.C. 496.
w         L’accusé, qui avait un problème de dépendance à la drogue, a commis trois (3) vols qualifiés en exhibant une note évoquant la possibilité qu’il devienne violent.  Au moment de ses crimes, il était sous libération conditionnelle suite à une condamnation de cinquante-quatre (54) mois pour vol qualifié.  Le Tribunal lui impose une peine de six (6) ans consécutive à la partie non purgée de sa peine précédente.
23.2      R. c. D. (D.A.) 2001 S.K.C.A. 14
w         L’accusé a commis deux (2) vols qualifiés en présentant des notes menaçantes à des commis féminins où il exigeait l’argent de leurs caisses.  Il avait déjà été condamné à une cinquantaine de reprises et était en libération conditionnelle au moment de la commission des crimes reprochés, suite à une condamnation à cinq (5) ans pour vol à main armée.  Le Tribunal infirme la peine de quatre ans et demi (4 ½) imposée par le premier juge et impose plutôt huit (8) années de détention.
23.3      R. c. Bezdan – 2001 B.C.C.A. 215
w         L’accusé se présente dans une banque et remet au commis une note dans laquelle il exige la remise de l’argent.  Condamné à plusieurs reprises, dont sept (7) fois pour vol qualifié au cours des quinze (15) dernières années, l’accusé était toujours sous probation lors du vol de banque.  La Cour d’appel confirme une peine de cinq (5) années parce que le premier juge avait eu raison, compte tenu des faibles probabilités de réhabilitation, de faire primer la protection du public dans le cas de l’accusé qui a l’habitude de commettre des vols qualifiés pour satisfaire sa dépendance à la cocaïne.
23.4      R. c. Kirby (06-04-1992) C.A. Montréal 500-10-000350-916 (1992) (C.A. Québec)
w         L’accusé plaide coupable à un vol de deux cent soixante dollars (260,00 $) commis en exhibant une note menaçante à une caissière. Âgé de 29 ans, il est un consommateur abusif de drogue et d’alcool depuis plus de dix (10) ans et a commis plusieurs vols qualifiés pour satisfaire à sa dépendance.  La Cour d’appel réduit de cinq (5) à deux (2) ans moins un (1) jour sa peine pour tenir compte de la possibilité réelle de réhabilitation de l’accusé.
[36]        Cette revue amène le juge Gagnon à conclure :
[25]      L’expérience judiciaire nous enseigne donc que les peines pour le vol qualifié commis en utilisant la menace et sans causer de lésions corporelles aux victimes, varient entre deux (2) et neuf (9) ans pour un récidiviste en semblable matière.
[37]        Le procureur de l’accusé insiste sur les précédents jurisprudentiels R. c. Craig et R. c. Corkum considérés par le juge Gagnon.
[38]        Il soumet aussi les suivants :
•         Maheux c. R., un arrêt de la Cour d’appel du 14 janvier 1992 dans le dossier 500-10-000056-919 où la Cour réduit de quinze à trois ans et neuf mois une peine globale pour vol qualifié, séquestration, vol d’automobile, possession d’arme prohibée, tentative de fraude, comme le suggérait en première instance le ministère public alors qu’un coaccusé, davantage responsable de la commission des crimes et ayant des antécédents judiciaires plus lourds, s’était vu imposer, comme le suggérait aussi le ministère public, une peine d’emprisonnement de quatre ans. Une lecture de l’arrêt révèle que la distinction dans la suggestion du ministère public se justifie par le fait que la détention préventive de Maheux a été plus longue que celle du complice parce que la peine a été prononcée ultérieurement. Toutefois, les informations suivantes ne ressortent pas de l’arrêt : l’âge de l’accusé, la période de détention préventive, la nature des antécédents judiciaires, les peines alors infligées, le lien entre la possession d’une arme prohibée et la commission du vol qualifié.
•         Beaupré c. R. (J.E. 94-1273), un arrêt de la Cour d’appel du 15 août 1994 où la cour réduit de cinq ans et six mois à quatre ans une peine globale pour séquestration, vol qualifié, déguisement dans un dessein criminel, usage d’une arme à feu. L’accusé avait déjà été condamné antérieurement pour un vol, un méfait, une conduite d’un véhicule automobile avec la capacité affaiblie par l’alcool ou une drogue, mais jamais à une peine d’emprisonnement.
•         R. c. Baril, un arrêt de la Cour d’appel du 28 octobre 1996 dans le dossier 500‑10‑000485-969 où la cour augmente à 48 mois une peine globale de 30 mois imposée pour complot en vue de commettre un vol qualifié, vol qualifié, utilisation d’une arme à feu lors d’un vol qualifié. L’accusé, âgé de 20 ans lors de la commission des crimes, avait déjà été condamné à 30 jours de détention à purger de façon discontinue pour voies de fait, 300 $ d’amende pour agression armée, 1 000 $ d’amende pour tentative de vol et subséquemment au vol qualifié, à une probation de deux ans pour omission de se conformer à un engagement, une amende dont le montant ne ressort pas de l’arrêt et une probation d’un an pour entrave au travail d’un agent de la paix et omission de se conformer à un engagement, douze mois d’emprisonnement pour possession d’une arme prohibée et évasion d’une garde légale. Selon un rapport préparé par le Service correctionnel du Canada, le risque de récidive était considéré comme moyen et l’accusé présentait « un beau potentiel ». La Cour ajoute :
« Outre le jeune âge de l’intimé, le dossier révèle par ailleurs certains facteurs atténuants dont nous devons aussi tenir compte. Il a une conjointe de fait et deux enfants. Il vient d’une famille qui peut le soutenir dans ses efforts pour changer son comportement. Le rapport du Service correctionnel note d’ailleurs que « [son] comportement s’est amélioré pendant qu’il était en liberté ». Il avait du succès aux études et il pourrait certainement compléter les cours lui permettant d’obtenir son diplôme d’études collégiales. Ces éléments ne suffisent toutefois pas à occulter la gravité des gestes que l’intimé a posés et les circonstances aggravantes liées à la perpétration de l’infraction et à sa situation personnelle, notamment ses antécédents judiciaires et sa volonté de persister dans son comportement criminel alors même qu’il est devant les tribunaux ».
•         R. c. Demers, Hamilton, Côté et Thériault où la juge Lise Côté, alors à la Cour supérieure, prononce des peines à l’égard de quatre individus trouvés coupables quant à Demers de neuf vols qualifiés, neuf tentatives de vol qualifié et participation aux activités d’un gang, quant à Hamilton de six vols qualifiés, deux tentatives de vol qualifié et participations aux activités d’un gang, quant à Côté de quatre vols qualifiés, cinq tentatives de vol qualifié et participation aux activités d’un gang et quant à Thériault d’un vol qualifié, quatre tentatives de vol qualifié et participation aux activités d’un gang. Thériault n’a pas été détenu de façon préventive.
La juge Côté condamne ce dernier à des peines concurrentes de deux ans d’emprisonnement pour les chefs de vol qualifié et de tentatives de vol qualifié et un an d’emprisonnement à être purgé de façon consécutive pour participation aux activités d’un gang. Le ministère public a porté la décision en appel.
La Cour d’appel, dans R. c. Thériault s’exprime comme suit :
« [8]      Il n’y a pas de doute que la peine infligée à l’intimé est clémente mais la Cour estime qu’elle n’est pas à ce point clémente qu’elle en est « manifestement inappropriée ».
[9]         À la lecture de la sentence, il semble que la juge de première instance a tenu compte de certains facteurs atténuants propres à l’intimé qui, en dépit de certains facteurs aggravants, ont fait pencher la balance du côté de la clémence. Par exemple, la participation de l’intimé dans l’organisation criminelle était moindre que celle de ses coaccusés. En ce qui concerne les quatre tentatives de vol qualifié pour lesquelles l’intimé a été déclaré coupable, la juge de première instance note qu’une fois entré dans le portique de l’institution financière, il n’a pas donné le signal convenu à ses complices, ne voulant pas que ceux-ci commettent le vol projeté. L’intimé est né le [...] 1973. Il a la garde de sa fille et il vit, depuis septembre 1999, avec une conjointe qui a elle-même deux enfants. Il serait un père responsable et sa conjointe aurait besoin de son soutien financier.
[10]      Sur le tout, bien que la peine soit clémente compte tenu des antécédents judiciaires de l’intimé et du fait que certaines infractions ont été commises alors qu’il était sous le coup d’une ordonnance de probation, la Cour estime qu’elle n’est pas « manifestement inappropriée ». »
[39]        Le procureur de l’accusé invoque aussi la peine globale de 42 mois d’emprisonnement imposée à son complice Lubin Durand le 7 décembre 2012 2012 QCCS 6713 (CanLII), (2012 QCCS 6713). Lubin Durand avait 33 ans lors de la commission du vol qualifié, 35 ans au moment du prononcé de la peine. Il a plaidé coupable aux accusations reprochées; il n’a pas d’antécédents judiciaires de vol qualifié. En 1982, pour un premier vol qualifié avec utilisation d’une arme à feu, l’accusé a bénéficié d’une peine de 23 mois d’emprisonnement. Il avait alors 23 ans. Son jeune âge justifie sans doute cette peine. À l’évidence, il n’a pas reçu le message. Il a récidivé : huit ans plus tard, en 1990, neuf ans plus tard en 1999, douze ans plus tard en 2011.
[40]        Les facteurs atténuants dans la présente affaire sont :
•         la reconnaissance par l’accusé, bien que tardive, de la commission des infractions;
•         son implication dans le marché du travail de 2002 à 2010, bien que pendant cette période, il ait aussi commis des infractions : vol, fraudes, utilisation non autorisée de données relatives à une carte de crédit, supposition intentionnelle de personnes, possessions illégales de produits du tabac;
•         son ouverture à participer à des thérapies manifestée à l’agente de probation et à l’audience;
•         l’absence de preuve quant à des séquelles à moyen ou à long terme chez la victime du vol qualifié;
•         le fait que l’accusé exprime des regrets d’avoir participé à ces crimes, bien que sa sincérité paraît peu certaine;
•         le fait qu’il soit affecté par la déception qu’il cause à ses enfants et par l’absence de contacts avec ses petits-enfants.
[41]        Les facteurs aggravants sont les suivants :
•         la gravité objective des délits, particulièrement celle du vol qualifié;
•         la préméditation de la commission du vol qualifié;
•         l’utilisation par complicité de voies de fait contre la victime de vol qualifié, bien que cette dernière n’ait pas souffert de lésions corporelles;
•         la tentative de minimiser sa participation et de faire porter une plus grande part de responsabilité sur ses complices;
•         le nombre impressionnant de chefs d’accusation pour lesquels dans le passé il a plaidé ou a été reconnu coupable, plus de 150 pour lesquels il a été condamné à plus de 25 reprises;
•         les antécédents judiciaires de vol qualifié impliquant l’usage d’une arme à feu, l’un en juin 1982, vingt-trois mois d’emprisonnement, deux en juin 1990, quatre ans et six mois d’emprisonnement, l’un en septembre 1999, cinq ans d’emprisonnement;
•         le risque élevé de récidive.

Détermination de la peine en matière de vol qualifié

R. c. Lubin Durand, 2012 QCCS 6713 (CanLII)

Lien vers la décision

[33]        La procureure de l’accusé soumet les précédents jurisprudentiels suivants :
a)   R. c. Vandal, J.E. 2002-621 (C.Q.)
L’accusé âgé de 33 ans a reconnu sa culpabilité sous neuf chefs d’accusation reliés à trois séries d’événements.
Le premier, un vol qualifié au cours duquel il a utilisé une fausse arme à feu, a séquestré ou saisi de force le gardien, a eu en sa possession, sans excuse légitime, des instruments servant à une introduction par effraction et s’est déguisé lors de la perpétration de l’infraction.
Le deuxième, une introduction par effraction dans une mine pour y voler des explosifs et la possession, sans excuse légitime, de ces explosifs.
Le troisième, un complot pour commettre un autre vol d’explosifs à la même mine.
L’accusé a des antécédents judiciaires de vol et recel, il n’affiche pas de remords face à ses victimes et il présente, selon un rapport de probation, des risques de récidive. Selon le juge d’instance, même si le pronostic à court terme n’est pas favorable, il n’en demeure pas moins que l’accusé est jeune et que son intelligence et sa grande capacité d’adaptation laissent entrevoir une possibilité de réhabilitation. Tenant compte de cent quarante-sept (147) jours que l’accusé a passés en détention préventive, soit l’équivalent de dix (10) mois de détention, le juge lui impose les peines suivantes : un emprisonnement de dix-huit (18) mois pour le vol qualifié et de douze (12) mois consécutifs pour l’usage d’une fausse arme à feu, douze (12) mois concurrents pour séquestration, possession d’outils de cambriolage et déguisement dans un dessein criminel pour un total de trente (30) mois, dix (10) mois pour introduction par effraction et quatre (4) mois consécutifs pour complot, ces peines consécutives à celle de trente (30) mois, pour un total de quarante‑quatre (44) mois d’emprisonnement.
b)   R. Constantineau 2012 QCCA 1312 (CanLII), (2012 QCCA 1312)
L’accusé, dont l’âge n’est pas mentionné dans l’arrêt, a commis un complot, un vol qualifié et des voies de fait alors qu’il portait une arme. Le juge de première instance lui a imposé une peine de seize (16) mois de détention, moins la détention provisoire de deux cent sept (207) jours. La Cour d’appel rejette la requête du ministère public pour permission d’en appeler de la peine. Elle écrit :
[4]         Le juge de première instance a tenu compte du témoignage de l'agent de probation qui écrit ce qui suit dans son rapport :
Par le passé, monsieur a fait montre d'un manque de conformisme en omettant de réaliser ses travaux communautaires en 2009, mais il a exécuté, avec satisfaction de la ressource, les travaux prescrits en 2010. Au cours des quatre dernières années, nous constations que monsieur a diminué ses agirs délictueux, il a stabilisé sa vie en travaillant et il a commencé à changer son réseau social alors nous croyons qu'il s'est mobilisé dans un certain changement.
Ceci dit, la présente mesure de détention préventive semble avoir eu les effets escomptés. Le sujet est davantage conscient des pertes encourues dans sa vie, il reconnaît ses problématiques et une mobilisation est amorcée. Nous constatons que le degré de malaise est bien présent et la volonté de changement l'est également. Son projet de réinsertion sociale est réalisable avec un encadrement serré et le support des siens (famille, conjointe et ami), diminuant ainsi le risque de récidive en matière criminelle.
Pour ce faire, monsieur doit demeurer abstinent (l'alcool / drogues), éviter les pairs déviants (consommateurs) et maintenir un emploi déclaré. De plus, il devra effectuer un suivi psychosocial afin d'aborder les problèmes susmentionnés et développer de nouvelles stratégies d'adaptation.
[34]        Dans R. c. Deschênes[4]le juge Claude C. Gagnon, j.c.s., passe en revue plusieurs précédents jurisprudentiels :
22.1      R. c. Corkum [1997] N.S.J. no. 421 (N.S. Sup. Court) :
w         L’accusé de 26 ans a commis deux vols qualifiés en menaçant ses victimes avec une note écrite.  Ses nombreux antécédents comprennent une condamnation à trente mois pour  vol qualifié.  La peine prononcée est de cinq (5) ans de prison.
R. c. A.D.P.  [2005] B.C.J. no 2737 (B.C.C.A.)
La Cour d’appel inflige à un accusé de 37 ans, déjà condamné à seize (16) mois et à quatre (4) ans pour des vols qualifiés, à une peine de six (6) ans en lieu et place de la peine avec sursis imposée en première instance.  L’accusé avait alors volé sous la menace trois postes d’essence de sommes d’argent inférieures à 150,00 $ en menaçant les commis.

R. c. MacDonald - 2006 B.C.C.A. 535
w         La Cour réduit de huit (8) à quatre (4) ans la peine d’un accusé de 45 ans, au long casier judiciaire, qui a commis deux vols à la pointe d’un couteau parce que le premier juge n’a pas suffisamment considéré une période d’accalmie de douze (12) années pendant laquelle MacDonald n’avait pas été condamné et avait travaillé régulièrement.
22.4      R. c. Allin – 2001 B.C.C.A. 710
w         La Cour confirme une peine de vingt-quatre (24) mois de prison pour vol qualifié consécutive à une peine de seize (16) mois. Le crime est commis dans une banque où l’accusé a exhibé au commis une note menaçante.  Allin a un passé judiciaire comprenant vingt-huit (28) condamnations dont deux (2) pour des vols qualifiés.  Au moment du vol reproché, la dépendance de l’accusé à la drogue était hors de contrôle.
22.5      R. c. Craig [2007] B.C.P.C. 144
w         L’accusé est condamné à cinq (5) ans de prison pour deux vols qualifiés dans des banques, commis au moyen de notes menaçantes.  Craig, 27 ans, avait un problème de dépendance à la drogue et cinq (5) antécédents judiciaires de vols qualifiés.  Les crimes reprochés avaient été commis peu de temps après sa sortie de prison et alors qu’il était encore sous libération conditionnelle.
22.6      R. c. Packwood [1991] A.Q. no 221 (C.A.Q.)
w         La Cour d’appel réduit à quatre (4) ans la peine pour un vol qualifié commis par un accusé déjà condamné à douze (12) reprises pour vol qualifié en treize (13) ans.  La peine est réduite en raison de la probabilité raisonnable de réhabilitation.
22.7      R. c. Dionne [2004 ] B.C.C.A.
w         La Cour confirme, dans le cas de l’appelant, la peine de trois (3) ans prononcée en première instance pour un vol qualifié commis par trois (3) individus en usant de menaces implicites.  L’accusé, qui était resté à l’extérieur de la banque, avait déjà à son passif onze (11) condamnations antérieures pour de tels crimes.  Le Tribunal note cependant que la peine se situe « at the very low end of the range for this offence committed by this offender… »
23.1      R. c. Upton (2006) B.C.P.C. 496.
w         L’accusé, qui avait un problème de dépendance à la drogue, a commis trois (3) vols qualifiés en exhibant une note évoquant la possibilité qu’il devienne violent.  Au moment de ses crimes, il était sous libération conditionnelle suite à une condamnation de cinquante-quatre (54) mois pour vol qualifié.  Le Tribunal lui impose une peine de six (6) ans consécutive à la partie non purgée de sa peine précédente.
23.2      R. c. D. (D.A.) 2001 S.K.C.A. 14
w         L’accusé a commis deux (2) vols qualifiés en présentant des notes menaçantes à des commis féminins où il exigeait l’argent de leurs caisses.  Il avait déjà été condamné à une cinquantaine de reprises et était en libération conditionnelle au moment de la commission des crimes reprochés, suite à une condamnation à cinq (5) ans pour vol à main armée.  Le Tribunal infirme la peine de quatre ans et demi (4 ½) imposée par le premier juge et impose plutôt huit (8) années de détention.
23.3      R. c. Bezdan – 2001 B.C.C.A. 215
w         L’accusé se présente dans une banque et remet au commis une note dans laquelle il exige la remise de l’argent.  Condamné à plusieurs reprises, dont sept (7) fois pour vol qualifié au cours des quinze (15) dernières années, l’accusé était toujours sous probation lors du vol de banque.  La Cour d’appel confirme une peine de cinq (5) années parce que le premier juge avait eu raison, compte tenu des faibles probabilités de réhabilitation, de faire primer la protection du public dans le cas de l’accusé qui a l’habitude de commettre des vols qualifiés pour satisfaire sa dépendance à la cocaïne.

23.4      R. c. Kirby (06-04-1992) C.A. Montréal 500-10-000350-916 (1992) (C.A. Québec)
w         L’accusé plaide coupable à un vol de deux cent soixante dollars (260,00 $) commis en exhibant une note menaçante à une caissière. Âgé de 29 ans, il est un consommateur abusif de drogue et d’alcool depuis plus de dix (10) ans et a commis plusieurs vols qualifiés pour satisfaire à sa dépendance.  La Cour d’appel réduit de cinq (5) à deux (2) ans moins un (1) jour sa peine pour tenir compte de la possibilité réelle de réhabilitation de l’accusé.
[35]        Cette revue amène le juge Gagnon à conclure :
[25]      L’expérience judiciaire nous enseigne donc que les peines pour le vol qualifié commis en utilisant la menace et sans causer de lésions corporelles aux victimes, varient entre deux (2) et neuf (9) ans pour un récidiviste en semblable matière.
[36]        Les facteurs atténuants dans la présente affaire sont :
•         les plaidoyers de culpabilité;
•         l’âge relativement jeune de l’accusé, 33 ans, au moment de la commission des infractions;
•         le fait qu’il n’a été, entre le 1er août 2008 et le 12 mai 2011, soit pendant près de trois ans, impliqué dans aucune infraction de nature criminelle, si ce n’est celle pour laquelle il se trouvait, le 12 mai 2011, en liberté sur engagement dans un dossier où on lui reproche d’avoir fait souffrir inutilement un animal, accusation dont l’issue n’est pas connue au moment de l’audition et du prononcé de la peine;
•         le fait qu’il ait occupé pendant plus d’un an des emplois à la satisfaction de ses employeurs;
•         l’absence d’antécédents judiciaires de vol qualifié;
•         l’absence de preuve quant à des séquelles à moyen ou long terme chez la victime du vol qualifié;
•         le fait que l’accusé exprime des regrets à l’endroit de cette victime, bien que sa sincérité paraît peu certaine.
[37]        Les facteurs aggravants sont les suivants :
•         la gravité objective des délits, particulièrement celle pour vol qualifié;
•         la préméditation dans la commission du vol qualifié : il a établi le lien entre ses deux complices Deschênes et Beaudry, a préparé les tuques aux fins de déguisement, a préparé l’utilisation d’une fausse arme à feu;
•         l’utilisation de voies de fait contre la victime de vol qualifié, bien que cette dernière n’ait pas souffert de lésions corporelles;
•         la tentative de minimiser sa participation et de faire porter une plus grande part de responsabilité sur une complice;
•         le nombre d’antécédents judiciaires dont vol, introduction par infraction, voies de fait et menaces et vingt (20) bris de probation ou d’ordonnance;
•         le fait que l’accusé était en liberté sous engagement au moment de la commission des crimes.
[41]        CONDAMNE Hérold Steve Lubin Durand aux peines d’emprisonnement suivantes :
a)            Sur le deuxième chef d’accusation, vol qualifié : un emprisonnement de trente (30) mois;
b)            Sur le troisième chef d’accusation, utilisation d’une fausse arme à feu lors de la perpétration d’un vol qualifié : un emprisonnement de douze (12) mois consécutifs;
c)            Sur le quatrième chef d’accusation, déguisement dans l’intention de commettre un acte criminel : un emprisonnement de six (6) mois concurrents;
pour un total de quarante-deux (42) mois d’emprisonnement, desquels doit être déduit le temps déjà couru depuis le 25 août 2011 jusqu’à ce jour, soit quinze (15) mois et douze (12) jours, ce qui établit la peine à être purgée à vingt-six (26) mois et dix-huit (18 jours), à compter de ce jour;

L’accusation d’abus de confiance par un fonctionnaire public constitue une infraction d’intention générale

R. c. Lavigne, 2011 ONSC 1335 (CanLII)

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[95] Comme l’accusation d’abus de confiance par un fonctionnaire public constitue une infraction d’intention générale, je conclus, en me fondant sur l’ensemble de la preuve que la poursuite a démontré hors de tout doute raisonnable, que l’accusé avait l’intention générale d’utiliser son poste de fonctionnaire, à savoir un sénateur ayant autorité sur son adjoint à la recherche, afin d’utiliser les services de cet adjoint dans le but d’obtenir un bénéfice pécuniaire personnel, à savoir faire abattre des arbres sur son fonds de terre à des fins autres que l’intérêt public.

Actus reus et mens rea de l’infraction d’abus de confiance prévue à l’art. 122

R. c. Boulanger, 2006 CSC 32 (CanLII), [2006] 2 RCS 49

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2.4.1 Actus Reus

49 Il ressort clairement des premières décisions que la multitude de conduites visées par l’abus de confiance rend difficile la définition de l’actus reus de l’infraction. Dans Perreault, le juge Baudouin a conclu que, sous réserve de l’exigence d’un bénéfice, tout acte ou omission contraire à un devoir imposé par la loi, un règlement, le contrat d’emploi ou une directive relative aux fonctions de la charge ou de l’emploi pouvait entraîner l’application de l’art. 122 du Code criminel. Cela va dans le sens de l’arrêt Campbell, rendu antérieurement, selon lequel l’infraction est [traduction] « assez large pour englober tout manquement aux normes de responsabilité et de conduite applicables à l’accusé en raison de la nature de sa charge de haut fonctionnaire » (p. 255).

50 Il est certain qu’une description de l’infraction qui tenterait de la restreindre à des actes ou omissions précis ne permettrait pas de prévoir toutes les circonstances pouvant constituer un abus de confiance par un fonctionnaire. Cela dit, tout manquement aux normes de conduite applicables, quelle qu’en soit la gravité, ne constituera pas nécessairement un abus de confiance. Par exemple, il se peut que l’utilisation de l’ordinateur de bureau à des fins personnelles aille à l’encontre d’une ligne directrice relative à l’emploi, mais ce n’est pas du même ordre que l’abus de confiance. La notion d’abus de confiance par un fonctionnaire perdrait son sens si le seuil était placé aussi bas. Un tel seuil ne tiendrait pas compte non plus des règlements, lignes directrices et codes d’éthique auxquels les fonctionnaires sont assujettis et dont beaucoup prévoient de lourdes sanctions disciplinaires.

51 Il importe également de se rappeler que l’abus de confiance n’est pas la seule infraction criminelle visant les fonctionnaires. Par exemple, selon l’al. 121(1)c), commet une infraction le fonctionnaire ou l’employé de l’État qui accepte d’une personne qui a des relations d’affaires avec le gouvernement une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice. Un fonctionnaire peut être poursuivi pour fraude en vertu de l’art. 122 ou en vertu de l’art. 380. De plus, il peut, comme n’importe qui d’autre, être poursuivi pour toute infraction criminelle, dont le vol (art. 334), l’extorsion (art. 346) et l’entrave à la justice (art. 139) et, dans des circonstances comme celles de Dytham, la négligence criminelle causant la mort (art. 220) ou des lésions corporelles (art. 221). Quel est l’objet de l’art. 122 du Code criminel, autre que celui de ces autres infractions?

52 L’objet de l’infraction d’action fautive dans l’exercice d’une charge ou d’un emploi publics — qui est maintenant l’abus de confiance par un fonctionnaire prévu à l’art. 122 — remonte aux anciennes jurisprudence et doctrine qui reconnaissent que les attributions des fonctionnaires leur sont confiées pour le bien public. Le public a le droit de s’attendre à ce que les fonctionnaires investis de ces pouvoirs et responsabilités s’acquittent de leurs fonctions pour le bien public. Les fonctionnaires doivent répondre de leurs actions devant le public d’une façon qui ne s’impose peut‑être pas aux acteurs privés. Toutefois, cela n’a jamais voulu dire qu’ils étaient tenus à la perfection sous peine d’être déclarés coupables d’actes criminels; les « simples erreurs » et les « erreurs de jugement » ont toujours été exclues de l’infraction. Il faut davantage pour établir l’infraction d’abus de confiance par un fonctionnaire. La conduite en cause doit s’accompagner de la mens rea requise et elle doit aussi être suffisamment grave pour passer du domaine de la faute administrative à celui du comportement criminel. Cette préoccupation se reflète clairement dans l’exigence de gravité énoncée dans Shum Kwok Sher et dans Attorney General’s Reference. Il faut [traduction] « une conduite si éloignée des normes acceptables qu’elle équivaut à un abus de la confiance du public envers le titulaire de la charge ou de l’emploi publics » (Attorney General’s Reference, par. 56). Comme il est mentionné dans R. c. Creighton, 1993 CanLII 61 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 3, « [e]n droit, nul n’est inconsidérément qualifié de criminel » (p. 59).

53 Les questions posées dans Shum Kwok Sher par Sir Anthony Mason, de la Cour de dernier ressort de Hong Kong, définissent bien les paramètres de l’examen à effectuer pour déterminer si la conduite s’écarte substantiellement des normes reconnues. Cet examen doit tenir compte des responsabilités de la charge ou de l’emploi et de l’importance des fins publiques poursuivies :

[traduction] La gravité, dans le présent contexte, s’évalue compte tenu des responsabilités de la charge, ou de l’emploi, et de son titulaire, de l’importance des fins publiques auxquelles elles s’attachent ainsi que de la nature et de la portée du manquement à ces responsabilités. [Je souligne; par. 86.]

54 Le critère applicable dans cet examen est analogue à celui se rapportant à la négligence criminelle. Relativement à cette dernière infraction, il a fallu, comme pour l’abus de confiance par un fonctionnaire, distinguer la conduite suffisamment grave pour mériter une sanction criminelle de la conduite moins grave, exposant simplement à une sanction civile ou administrative. Pour établir cette distinction, la Cour d’appel de l’Ontario a jugé, dans R. c. Rajic 1993 CanLII 3423 (ON CA), (1993), 80 C.C.C. (3d) 533, qu’il doit s’agir d’une conduite s’écartant [traduction] « de façon marquée » d’une conduite prudente. La Cour suprême du Canada a entériné ce raisonnement dans des affaires de conduite dangereuse, affirmant que le comportement en cause doit représenter un écart « marqué » par rapport à la norme de diligence qu’observerait une personne raisonnable, compte tenu de l’ensemble des circonstances : R. c. Hundal, 1993 CanLII 120 (CSC), [1993] 1 R.C.S. 867. De même, il faut que la conduite d’un fonctionnaire s’écarte de façon « marquée » des normes auxquelles une personne placée dans un poste de confiance comme le sien est censée se conformer. Toutefois, contrairement à la négligence criminelle, l’abus de confiance par un fonctionnaire nécessite un élément moral subjectif, que je vais maintenant examiner ci‑après.

2.4.2 Mens Rea

55 Dans les anciennes affaires de common law, l’élément moral de la faute dans l’exercice d’une charge ou d’un emploi publics était imprécis et il variait d’une affaire à l’autre. Cependant, les juges des tribunaux de common law ont toujours insisté sur l’existence d’une quelconque intention vile ou malhonnête. Celle‑ci est décrite sous différents termes : malhonnêteté, corruption, partialité, abus. Mais ces termes expriment tous le même souci, à savoir que les fonctionnaires, investis de fonctions à accomplir pour le bien public, s’en acquittent honnêtement et dans l’intérêt public et qu’ils n’abusent pas de leur charge pour des motifs illicites, notamment la corruption.

56 Conformément aux principes fondamentaux du droit criminel, le degré de culpabilité morale requis était élevé dans le cas de l’action fautive commise dans l’exercice d’une charge ou d’un emploi publics. Les simples erreurs n’étaient pas suffisantes, les erreurs de jugement non plus. Comme le juge en chef Abbott l’a écrit dans Borron :

[traduction] . . . il s’agit toujours de se demander non pas si les actes accomplis peuvent être jugés strictement corrects après examen approfondi, mais bien quels en étaient les fondements : procédaient‑ils d’un motif de malhonnêteté, d’abus ou de corruption — description pouvant généralement comprendre la crainte et le favoritisme — ou de simples erreurs? Ce n’est que dans le premier cas qu’ils donnent ouverture à châtiment. [p. 721‑722]


En principe, la mens rea de l’infraction réside dans l’intention d’user de sa charge ou de son emploi publics à d’autres fins que l’intérêt public. En pratique, elle a toujours été associée au fait d’en user dans un objectif de malhonnêteté, de partialité, de corruption ou d’abus, lesquels représentent le motif non public visé par l’infraction.

57 Comme pour toute infraction, la mens rea s’infère des circonstances. La tentative de l’accusé de camoufler ses actions peut souvent indiquer une intention illicite (Arnoldi) et l’obtention d’un avantage personnel substantiel, que l’accusé a agi dans son propre intérêt plutôt que dans celui du public. Cependant, un avantage obtenu par un fonctionnaire ne permet pas nécessairement de conclure à l’existence d’une intention coupable. L’exercice légitime d’un pouvoir public par un fonctionnaire confère souvent des avantages indirects. Comme le juge Widgery (plus tard Juge en chef) l’a signalé dans R. c. Llewellyn‑Jones (1966), 51 Cr. App. Rep. 4, p. 7 :

[traduction] . . . je ne suis pas disposé à affirmer qu’un greffier rendant une décision qui a effectivement influé sur ses intérêts personnels est coupable d’inconduite simplement parce qu’il savait que ses intérêts étaient en cause, s’il a pris la décision honnêtement en croyant sincèrement qu’il exerçait correctement sa compétence pour ce qui est des bénéficiaires et des autres personnes visées. [Cité par le lord juge en chef Widgery dans Dytham, p. 394.]

Par contre, l’infraction peut être établie lorsqu’il n’est pas question d’avantage personnel

2.4.3 Résumé de l’infraction

58 Je conclus qu’il y aura preuve d’abus de confiance par un fonctionnaire lorsque le ministère public aura prouvé hors de tout doute raisonnable les éléments suivants :

1. l’accusé est un fonctionnaire;

2. l’accusé agissait dans l’exercice de ses fonctions;

3. l’accusé a manqué aux normes de responsabilité et de conduite que lui impose la nature de sa charge ou de son emploi;

4. la conduite de l’accusé représente un écart grave et marqué par rapport aux normes que serait censé observer quiconque occuperait le poste de confiance de l’accusé;

5. l’accusé a agi dans l’intention d’user de sa charge ou de son emploi publics à des fins autres que l’intérêt public, par exemple dans un objectif de malhonnêteté, de partialité, de corruption ou d’abus.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les déclarations d'un accusé à son complice ne sont pas du ouï-dire

R v Ballantyne, 2015 SKCA 107 Lien vers la décision [ 58 ]             At trial, Crown counsel attempted to tender evidence of a statement m...