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dimanche 13 septembre 2009

Analyse des décisions relatives à la nécessité

R. c. Sabourin-Thibeault, 2006 QCCQ 7340 (CanLII)

[68] Comme on peut le constater avec ce qui précède, l’accusé avance des éléments factuels qui sont caractéristiques d’une défense de la nature d’une contrainte et qui prennent aussi appui sur la nécessité. Il s’agit dans les 2 cas, d’excuses reconnues en common law et toujours en vigueur comme moyens de défense en vertu du paragraphe 3, de l’article 8 du Code criminel.

[69] Cela dit, ces deux moyens sont souvent confondus car mis à part la nature de l’élément déclencheur qui amène l’accusé à commettre l’acte reproché, ils sont identiques.

[70] Dans l’affaire Perka, la Cour suprême s’est penchée sur le fondement philosophique de l’excuse de la nécessité comme moyen de défense. Ainsi au paragraphe 29 :

«Vu comme une «excuse» cependant, le moyen de défense résiduel fondé sur la nécessité, à mon avis prête beaucoup moins à la critique. Il se fonde sur une appréciation réaliste de la faiblesse humaine, tout en reconnaissant qu’un droit criminel humain et libéral ne peut astreindre des personnes à l’observation stricte des lois dans des situations d’urgence où les instincts normaux de l’être humain, que ce soit celui de conservation ou d’altruisme, commandent irrésistiblement l’inobservation de la loi. Le caractère objectif du droit est préservé; de tels actes sont toujours mauvais, mais dans les circonstances ils sont excusables…»

[71] La nécessité, tel qu’explicitée au paragraphe 33 dans l’affaire Perka est avant tout une situation qui naît de l’environnement dans lequel se trouve l’accusé et qui amène ce dernier à se détourner du respect de loi.

[72] Quant aux limites de ce moyen de défense, on peut lire ce qui suit aux paragraphes 37 et 38 :

- Si le moyen de défense fondé sur la nécessité doit faire partie valable et logique de notre droit criminel, il faut, comme tout le monde s’est accordé à le reconnaître, qu’il soit strictement contrôlé et scrupuleusement limité aux situations qui répondent à sa raison d’être fondamentale. Cette raison d’être, comme je l’ai indiqué, est la reconnaissance qu’il ne convient pas de punir des actes qui sont «involontaires» sur le plan normatif. Les contrôles et limites appropriés imposées au moyen de défense fondé sur la nécessité visent donc à assurer que les actes auxquels on demande d’appliquer le bénéfice de l’excuse sont vraiment «involontaires» au sens requis.

- Dans l’arrêt Morgentaler, précité, j’ai exprimé l’avis que tout moyen de défense fondé sur la nécessité ne s’applique qu’aux cas de désobéissance «dans des situations urgentes de danger imminent et évident lorsque l’obéissance de la loi est démonstrativement impossible. À mon avis cette restriction vise directement le «caractère involontaire» de la conduite apparemment répréhensible, en fournissant un certain nombre de critères qui permettent de déterminer si l’acte mauvais était vraiment la seule réaction possible pour la personne en question ou si, en réalité, elle a fait ce qu’on pourrait à juste titre appeler un choix. Si elle a fait un choix, alors l’acte mauvais ne peut pas avoir été involontaire au sens pertinent.»

[73] Pour le Tribunal, il est évident qu’une interprétation littérale de ce qui précède peut mener à une analyse excessivement rigide en ce que toute action de l’accusé est un choix en soi. Ce qu’il faut déterminer, c’est si le choix fait est l’aboutissement d’un raisonnement en vertu duquel les autres choix, le cas échéant, ne pouvaient raisonnablement être retenus étant donné les circonstances.

[74] Il faut donc comprendre que la poursuite doit principalement s’attarder au caractère volontaire de l’acte. Ainsi au paragraphe 56, la cour traite du fardeau de la preuve dans les termes suivants :

Bien que la nécessité soit désignée comme un moyen de défense en ce sens que c’est l’accusé qui l’invoque, il incombe toujours à la poursuite de faire la preuve d’un acte volontaire. La poursuite doit prouver chacun des éléments du crime imputé. Un de ces éléments est le caractère volontaire de l’acte. Normalement, le caractère volontaire peut se présumer, mais si l’accusé soumet à la cour, au moyen de ses propres témoins ou d’un contre-interrogatoire des témoins de la poursuite, des éléments suffisants pour soulever un doute que la situation engendrée par des forces extérieures était à ce point urgente que l’omission d’agir pouvait mettre en danger la vie ou la santé de quelqu’un que, suivant une analyse raisonnable des faits, il était impossible d’observer la loi, alors la poursuite se doit d’écarter ce doute. Le fardeau de la preuve ne repose pas sur l’accusé.

[75] Contrairement à la nécessité qui fait référence aux circonstances dans lesquelles se trouvent une personne, la contrainte elle, est directement liée à une menace de laquelle pourrait découler pour l’accusé ou une tierce personne des lésions corporelles ou la mort.

[76] Dans l’affaire Ruzic, la cour suprême a précisé et explicité le moyen de défense qu’est l’excuse résultant de la contrainte et a, par la même occasion, fait les rapprochements entre l’excuse qui résulte de la contrainte et celle qui résulte de la nécessité. Ainsi, aux paragraphes 30 et 31 :

o Appliquant au moyen de défense fondé sur la contrainte le raisonnement qu’elle avait tenu dans l’arrêt Perka, notre Cour a conclu, dans l’arrêt R. c. Hibbert, 1995 CanLII 110 (C.S.C.), (1995) 2 R.C.S. 973, que ce moyen de défense repose également sur la notion de caractère volontaire au sens moral. Dans les cas ou les moyens de défense fondés sur la nécessité et la contrainte sont invoqués, l’accusé prétend qu’il ne devrait pas être reconnu coupable parce qu’il a réagi à une menace de préjudice imminent. La Cour a également confirmé, dans l’arrêt Hibbert, que la contrainte n’annule pas habituellement la mens rea d’une infraction. Comme elle l’a fait à l’égard du moyen de défense fondé sur la contrainte. Par conséquent, la contrainte exonère une personne de toute responsabilité criminelle seulement après qu’on a conclu qu’elle avait la mens rea pertinente lorsqu’elle a commis l’acte prohibé : voir également Bergstrom c. La Reine, 1981 CanLII 188 (C.S.C.), (1981) 1 R.C.S. 539, p. 544 ( le juge McIntyre).

o Ainsi la contrainte, à l’instar de la nécessité, est invoquée pour éviter que la conduite moralement involontaire d’une personne engage sa responsabilité criminelle. Cette notion du «caractère volontaire au sens moral» peut-elle être reconnue comme un principe de justice fondamentale visé par l’art. 7 de la Charte ?

[77] C’est aussi dans cette affaire que la Cour explicite l’évaluation de la preuve présentée par l’accusé : le tribunal doit appliquer à la fois une norme objective et subjective, c’est-à-dire que ferait une personne raisonnable placée dans la même situation.

[78] Finalement, c’est au paragraphe 64, que la Cour confirme que pour les 2 moyens de défense, il y a identité des principes juridiques qui s’appliquent même si l’origine de l’excuse est totalement différente :

«D’après le juge en chef Lamer, dans l’arrêt Hibbert, le moyen de défense fondé sur la contrainte et celui fondé sur la nécessité reposent sur (page 274) les mêmes principes juridiques. Néanmoins, ils visent deux situations différentes. Dans le cas de nécessité, l’accusé est victime des circonstances. La contrainte a son origine dans les actes répréhensibles que les êtres humains accomplissent. En outre, le juge en chef Lamer, a établi certaines distinctions entre les conditions applicables au moyen de défense fondé sur la contrainte et celles qui s’appliquent au moyen de défense fondé sur la nécessité. Plus particulièrement, les motifs du juge en chef Lamer ne semblent pas avoir intégré dans le moyen de défense fondé sur la contrainte une exigence absolue d’immédiateté qui correspondrait exactement au contenu de l’art. 17 du Code Criminel».

[79] On peut donc affirmer que la défense de nécessité tire son origine des circonstances alors que la contrainte tire son origine des menaces faites par une ou plusieurs personnes. Les 2 situations obligent l’accusé à commettre un acte illégal. La défense et la nécessité sont en quelque sorte les deux faces d’une même pièce de monnaie.

[80] Pour les 2 moyens de défense la preuve doit faire ressortir les éléments suivants :

a) il y avait pour l’accusé ou une tierce personne, un danger réel, actuel et immi-nent sans que ce danger soit pour autant immédiat (facteur circonstanciel);

b) le temps à la disposition de l’accusé ou la nature et l’ampleur des menaces ne permettaient pas à l’accusé une alternative raisonnable et légale (facteur temporel);

c) la nature et l’ampleur du danger dépassait la gravité et les conséquences de l’acte illégal (facteur de proportionnalité);

[81] Une fois présentés en preuve, ces éléments doivent être analysés en appliquant une norme objective modifiée : objective en référence à une personne raisonnable et subjective en référence aux caractéristiques personnelles de l’accusé.

[82] C’est avec les nuances et les précisions qui précèdent que le Tribunal entend analyser la preuve présentée par l’accusé, car tel qu’explicité précédemment, cette preuve fait appel aux deux moyens de défense.

[83] Les éléments de preuve à la charge de l’accusé peuvent être présentés par des témoins de la défense et par le contre-interrogatoire des témoins de la poursuite.

Un individu accusé d'avoir flâné peut-il être trouvé coupable si la preuve établit qu'il n'a pas flâné mais qu'il a rôdé ?

R. c. Cloutier, 1991 CanLII 2831 (QC C.A.)

Leurs équivalents français "flâner" et "rôder" épousent les mêmes contours quand il s'agit de décrire les attitudes ou les gestes qu'ils impliquent. Au-delà des simples définitions de dictionnaires, ou ici pour en confirmer l'exactitude, l'homme moyen qui entend ces deux mots sait immédiatement faire la différence. Et, pour lui, elle est de première grandeur.

Dans le flâneur, il reconnaît l'individu qui erre, apparemment sans destination précise, qui n'a pas, dans sa façon de bouger, de but ou de raison de le faire autre que de passer le temps, qui ne cherche rien d'identifiable et dont, souvent, la démarche va au caprice de ses fantaisies. A ce verbe, le dictionnaire des synonymes Bordas (1988, page 424) assimile errer, se promener, baguenauder, se balader, traîner, musarder, boulevarder, lambiner, lécher les vitrines, lanterner et le reste. Bref, en l'occurrence il s'agit d'une conduite qui, essentiellement, n'aurait rien de répréhensible si, comme l'exige l'article 173 (177), elle ne se déroulait pas sur la propriété privée ou, en principe, un flâneur n'a pas d'affaires.

A l'encontre, à l'homme moyen rôder inspire une réaction péjorative.

Le verbe comporte une idée de mal, il déprécie à ses yeux la personne qui s'adonne à l'action qu'il représente. Le rôdeur n'agit pas avec désinvolture comme le flâneur. Les gestes qu'il accomplit laissent croire qu'il a quelque chose en tête et que ce quelque chose n'est pas recommandable. A le voir faire, on a raison de se dire qu'il va éventuellement passer à un acte précis, lequel sera de nature à attirer la réprobation des honnêtes gens, même s'il 'est pas par ailleurs spécifiquement interdit par le Code criminel.

Il y a, à mon avis, une autre raison pour laquelle il faut conclure qu'à l'article 173 (177) les deux actes qui font l'objet de l'alternative sont essentiellement différents l'un de l'autre et qu'ils ne peuvent être confondus. L'article précité énonce qu'une fois l'actus reus prouvé, ce qui est le fardeau du poursuivant, il incombe à l'accusé de fournir une excuse non pas simplement "raisonnable" mais, dit l'article, "légitime". Or il me paraît qu'il est beaucoup plus facile à un flâneur d'expliquer sa présence et d'en démontrer le légitimité lorsqu'elle a lieu la nuit sur la propriété d'autrui, près d'une maison d'habitation, que ce ne l'est pour un individu dont la preuve indique qu'il "rôdait" au même endroit et après le coucher du soleil. A mon avis, la personne accusée d'une infraction sous l'article 173 (177) est justifiée de s'en tenir à opposer une justification de sa présence sur les lien selon la nature précise de l'acte reproché et le juge qui préside n'a certainement pas le droit de lui imposer un fardeau plus lourd au motif que les faits entourant le flânage de la personne ainsi accusée constituent plutôt du rôdage.

C'est d'ailleurs ainsi, il est important de le souligner, que le juge de première instance a traité l'excuse offerte par l'appelant sur les lieux lorsqu'il se dit d'avis que, dans les circonstances, cette excuse ne permettait pas de lever le soupçon qu'un acte illégal était sur le point de se commettre.

Je conclus donc que rôder n'est pas flâner, que l'article 173 (177) n'implique pas simplement deux façons de commettre une infraction mais bien deux infractions distinctes, et que si la preuve au dossier ne correspond pas aux circonstances que l'on doit retrouver dans le cas de la plainte telle que rédigée, l'accusation doit être rejetée.

Dans l'affaire qui nous est soumise, je n'ai aucune hésitation à dire que si l'intimé a posé un geste illégal, il a rodé et non flâné. Sa présence de nuit, dans l'encoignure d'une porte de garage où, la veille, quelqu'un a forcé le dispositif servant à l'ouvrir, le bruit dont il y a lieu de présumer que c'est lui et son compagnon qui l'a fait et qui se prolonge au point de susciter l'inquiétude de Normandeau, enfin le fait qu'à la toute proximité de l'intimé on constate que de nouveau il y a manipulation du même dispositif, tout cela suggère fortement que, sauf excuse légitime, il se disposait à passer à des actes dont le résultat aurait pu donner lieu au moins à une accusation de tentative d'introduction par effraction.

Refus de fournir un échantillon d'haleine requis en application du paragraphe 254(2) C.cr

Houle c. R., 2007 QCCA 215 (CanLII)

[7] D'une part, la question du délai s'évalue à compter du moment où le policier a des raisons de soupçonner la présence d'alcool dans l'organisme de la personne qui conduit un véhicule automobile. En l'espèce, c'est un accident impliquant le véhicule de la requérante avec un véhicule stationnaire qui a occasionné la présence des policiers sur les lieux. Ceux-ci enquêtaient relativement à un accident et dans le cadre de cette enquête ont demandé à avoir un test de dépistage vu leurs soupçons que la requérante avait consommé de l'alcool. La sommation des policiers à la requérante a été donnée une fois qu'ils ont reçu l'appareil. Dans ces circonstances, le délai de 15 minutes pour obtenir l'appareil de dépistage ne contrevient pas à l'exigence de fournir « immédiatement » l'échantillon d'haleine requis en vertu de la disposition : R. c. Bernshaw, 1995 CanLII 150 (C.S.C.), [1995] 1 R.C.S. 254; R. c. Woods 2005 SCC 42 (CanLII), (2005), 197 C.C.C. (3d) 353.

[8] Enfin, notre Cour s'est déjà prononcée dans l'arrêt R. c. Petit, 2005 QCCA 687 (CanLII), [2005] R.J.Q. 2463, permission refusée en Cour suprême quant au fait que le début de la détention doit s'évaluer en regard des circonstances et dans cette affaire, celle-ci étant d'au plus quatre minutes, l'ordre était conforme à la loi.

[9] Par ailleurs, le fait que l'ordre ait été donné au moment de la réception de l'appareil et non au moment où les policiers font la demande pour obtenir l'appareil n'a aucune incidence en l'espèce sur le droit de consulter un avocat puisque la requérante avait eu l'occasion de parler à un avocat qui se trouvait sur les lieux au moment de l'arrivée des policiers. De plus, la négation du droit à l'avocat ne constitue pas une excuse raisonnable de refuser de passer le test, mais sert plutôt à étayer une demande d'exclusion de preuve des résultats du test.

[10] Dans ces circonstances, la conclusion du juge de la Cour supérieure est conforme à l'état du droit et, à ce titre, la requérante n'a pas établi qu'il s'agissait d'une question qui méritait d'être étudiée à nouveau par notre Cour.

[11] À l'égard de la conclusion du juge que la demande de la requérante de s'entretenir avec un avocat bien que le policier lui ait expliqué qu'elle n'était alors pas en état d'arrestation, mais qu'il avait des soupçons de la présence d'alcool dans son organisme, constitue un refus, celle-ci vise l'appréciation factuelle de la preuve par le premier juge.

[12] Comme l'a mentionné le juge de la Cour supérieure : « Elle ne s'est pas exécutée face à une demande claire, répétée par le policier et c'est un refus. », paragraphe 16 du jugement.

[13] Or l'infraction de refus de se soumettre à un test de dépistage est perpétrée lorsque la personne a reçu une sommation valide d'un policier à laquelle elle ne se conforme pas : R. c. Leblond, 1997 CanLII 10313 (QC C.A.), [1997] R.J.Q. 378 (C.A.)

Interprétation des mots « a le contrôle »

Petit c. R., 2005 QCCA 687 (CanLII)

[22] Comme la juge Duval Hesler, je suis d’avis que l’interprétation appropriée de l’expression « a le contrôle », que l’on retrouve aussi bien à l’art. 253 qu’au paragr. 254(2) C.cr., a été correctement énoncée par la Cour d’appel d’Ontario dans l’arrêt R. c. Lackovic, reflex, (1988) 45 C.C.C. (3d) 80, à la p. 83 :

I think that it is sufficient to say that the verb "is" (and, therefore, "has") can and should have some degree of past signification. To interpret these words as having a strictly literal (present tense only) meaning could defeat the purpose of the provision and lead to absurd results. For example, as far as "has care or control" is concerned, if the provision is confined to a literal present tense meaning it would not apply to a person who, when a police officer approaches, steps out of his car and throws his keys away or who runs away and is finally caught by the police officer a substantial distance from the car. Other examples could be given.

En d’autres mots, l’expression « a le contrôle », même si au temps présent, doit être lue comme incluant un élément passé, dont la preuve incombe cependant au ministère public.

[23] L’appelant soutient que cette interprétation a été depuis écartée par cette même Cour dans R. c. Wren, [2000] O.J. no 756. Je ne suis pas d’accord. Dans cette affaire, la police arrive sur les lieux trois heures après que l’accusé a conduit son véhicule dans un fossé d’où il ne pouvait sortir sans l’aide d’une remorqueuse. Constatant une odeur d’alcool, les policiers accusent le conducteur d’avoir eu le contrôle du véhicule alors que ses facultés étaient affaiblies en violation de l’art. 253 C.cr. On ne lui avait pas demandé de se soumettre à un ADA en vertu du paragr. 254(2) C.cr. De plus, comme l’indique l’arrêt de la Cour d’appel d’Ontario, le ministère public limite sa preuve aux faits constatés par les policiers :

[3] […] The Crown did not rely on the evidence of the respondent’s impairment when he drove the car into the ditch or attempted to extricate it from the ditch. The Crown sought the conviction based only on the fact that the respondent was in the driver’s seat at the time the police arrived at the scene.

[24] La présente affaire est très différente puisque la preuve a établi qu’au moment de l’accident l’appelant conduisait son véhicule. On a donc prouvé qu’il en avait le contrôle peu avant l’arrivée des policiers, et ce, au moment de l’accident.

[25] Par ailleurs, l’arrêt Lackovic n’est pas incompatible avec l’arrêt Wren, comme en font foi les passages suivants de ce dernier :

[17] Crown counsel submitted that this court reaffirmed the result in Saunders in its 1988 decision in R. v. Lackovic reflex, (1988), 45 C.C.C. (3d) 80, 29 O.A.C. 382 (C.A.). Lackovic drove his car into a traffic light standard. His car then crossed several lanes of traffic before finally coming to rest on top of a snow bank. The police arrived 12 minutes later to find Lackovic standing outside, but close to his car. When Lackovic refused to take the breathalyzer test, the police charged him with refusing to provide a sample. Lackovic’s defence at trial was that he did not have care or control of his vehicle at the time the demand was made.

[18] The Court of Appeal sustained the conviction and held that he had not surrendered care or control of his vehicle because he retained custody of it. Crown counsel submits that the decision in Lackovic confirms that mere custody of the vehicle, while impaired, whether or not the vehicle has the potential to be dangerous, is sufficient to amount to care or control.

[19] I do not agree. In Lackovic the court referred to the concept of danger to the public when it quoted from the reasons of McIntyre J. in Toews, in part as follows [at p. 85]:

This leaves the court with the question: What will constitute having care or control, short of driving the vehicle? It is, I suggest, impossible to set down an exhaustive list of acts which could qualify as acts of care or control, but courts have provided illustrations which are of assistance. In R. v. Thomson (1940), 75 C.C.C. 141 at pp. 143-4, [1941] 1 D.L.R. 516 at pp. 518-9, 15 M.P.R. 300 (N.S.S.C.A.D.), Baxter C.J. said:

I have had some difficulty in construing this expression but have come to the conclusion that “care” is intended to cover such a case as an intoxicated driver placing his vehicle, without applying the brakes, in such a situation that it may run away and occasion danger to the public. It is probably intended to cover the possible omission, because of intoxication, of such acts of care as would or might occasion harm, such acts, in short, as would render any person liable in damages for negligence. “Control” does not need definition. The man who is in a car has within his reach the means of operating it is in control of it.

In my view, it is implicit in this court’s conclusion in Lackovic that the court considered the appellant’s vehicle to be capable of becoming a danger in some way, so that by retaining custody of the vehicle the appellant maintained his ability, while impaired, to effect such potential danger.

[20] The requirement of some risk of danger in order to establish the actus reus of “care or control” is consistent with the basis for a finding of criminal liability under the impaired driving/care or control offences. As the Supreme Court stated in Saunders, supra, the object of the offence is to protect persons and property from danger. When the presumption has been rebutted and it has been shown that there is no potential danger either to any person or any property from the combination of the impaired person and the motor vehicle, there is no need for the protection which is the object of the offence.

[26] En l’instance, l’élément de risque a été clairement établi puisque la preuve indique que la conduite de l’appelant, dont les facultés étaient affaiblies, a causé un sérieux accident de la route.

[27] Je termine mon analyse en soulignant que retenir la proposition de l’appelant donnerait lieu à une situation aberrante : le paragr. 254(2) C.cr. ne s’appliquerait pas dans les cas d’accidents démolissant la voiture d’un conducteur ivre, alors que dans les cas où le véhicule demeurerait en état de rouler, un test au moyen d’un ADA pourrait être ordonné.

La jurisprudence applicable sur le chef de facultés affaiblies

R. c. Guy, 2009 CanLII 33584 (QC C.M.)

[253] Il est de jurisprudence constante, depuis l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans l’affaire « R. c. Stellato », 1994 CanLII 94 (C.S.C.), (1994) 2 R.C.S. 478, que la preuve de la poursuivante doit établir, hors de tout doute raisonnable, un affaiblissement de la capacité de conduire un véhicule automobile par l’effet de l’alcool.

[254] La seule consommation d’un verre de bière ou de vin ne présuppose pas l’affaiblissement de la capacité de conduire.

[255] Cependant, cet affaiblissement de la capacité de conduire n’a pas à atteindre un degré particulier.

[256] Il s’agit d’une question de fait que le juge du procès doit trancher en fonction de la preuve, tout en ayant à l’esprit que l’infraction est consommée dès que cette capacité de conduire de l’accusé est affaiblie un tant soit peu par l’effet de l’alcool ou une drogue.

Voir R. c. Laprise [1997] 113 C.C.C. (3d) 8 C.A. Québec

[257] Comme l’a expliqué la cour d’Appel du Québec dans l’arrêt R. c. Aubé (1993) 2 M.V.R. (3d) 127, cette preuve se fonde généralement sur des éléments circonstanciels :

« Ce n’est qu’exceptionnellement que l’état de boisson d’un conducteur se prouve autrement que par une preuve circonstancielle, comprenant un certain nombre de manifestations physiques distinctes touchant l’apparence de l’individu, sa façon de parler et de marcher, soit des manifestations anormales qui, à défaut d’explication ou de justification, permettent l’inférence certaine d’un affaiblissement de la capacité de conduire par l’alcool ou une drogue. »

[258] C’est ce qui ressort aussi des arrêts R. c. Guibord », (1998) A.Q. no. 564 (QL) (C.A.) et R. c. Tremblay », (2005) J.Q. no. 11708 (QL) (C.S.).

[259] Cependant, dans l’analyse de la preuve que doit faire le juge du procès, il ne doit pas oublier que le comportement qui est criminalisé n’est pas un affaiblissement de la capacité de conduire en raison uniquement de facteurs tels que la fatigue, le stress, un handicap quelconque, mais bien un affaiblissement de la capacité de conduire en raison notamment de l’absorption d’alcool ou d’une drogue.

[260] Le lien de cause à effet est ici excessivement important et une combinaison de certains facteurs comme fatigue, stress et handicap d’une part et de l’absorption d’alcool ou de drogue d’autre part peut devenir un facteur suffisant pour amener une déclaration de culpabilité vu que l’alcool ou la drogue est en cause et fait partie de la cause de l’affaiblissement des capacités et plus particulièrement de la capacité de conduire un véhicule automobile..

[261] La preuve doit convaincre le Tribunal que l’affaiblissement de conduite d’un véhicule automobile qui a été constaté, découle directement de la consommation d’alcool. C’est ce que mentionnait le juge Nuss dans l’arrêt « R. c. Blais », (1996) A.Q. no. 516 (QL) (C.A.) :

« … La quantité d’alcool consommé n’est pas un élément de l’infraction. Le premier juge devait déterminer si l’appelante avait consommé de l’alcool et si elle avait conduit avec les facultés affaiblies à cause de l’alcool. »

[262] Afin de déterminer si l’accusé a un affaiblissement de sa capacité de conduire un véhicule automobile par l’effet de l’alcool, le ministère public doit démontrer un comportement qui s’écarte d’un comportement normal par une preuve de symptômes tels que : l’odeur d’alcool provenant de son haleine, les yeux rouges ou vitreux, les traits tirés, le vacillement, la démarche chancelante, la marche à petits pas, la difficulté à s’exprimer ou à produire les documents requis par la loi etc.

[263] Me Karl-Emmanuel Harrison dans son livre intitulé « Capacités affaiblies – Principe et application », publié par les Publications CCH, définit bien, à la page 75, le type de preuve à être faite par le ministère public et ce, de la manière suivante :

« Le ministère public doit établir un degré d’affaiblissement suffisant ayant comme résultante d’altérer le jugement ou de diminuer l’habilité physique de l’automobiliste. Or, bien qu’une odeur d’alcool et des yeux rougis puissent permettre d’en déduire un affaiblissement de la capacité d’un individu, ce sont plutôt les constatations relatives à la conduite erratique du véhicule, à une démarche chancelante, à une précarité de l’équilibre, à la difficulté à produire les documents exigés par la loi ou à un langage difficile qui permettent de conclure hors de tout doute raisonnable à un affaiblissement de la capacité de conduire un véhicule. De même, la survenance d’un accident et une consommation d’alcool ne démontrent pas la commission de l’infraction à moins qu’il n’y ait un rapport probant entre l’accident et les effets de la consommation d’alcool ou d’une drogue.

Cela dit, la mauvaise conduite du véhicule n’est pas essentielle à la perpétration de cette infraction, car le comportement criminalisé est l’affaiblissement de la capacité de conduire pouvant engendrer la conduite erratique et non pas la conduite erratique en elle-même : R. c. Knight, (2001) 11 M.V.R. (4th) 219; R. c. Faucher, 1991 CanLII 3729 (QC C.A.), [1991] R. L. 333 (C.A.); R. c. Polturak, (1989) 9 M.V.R. (2d) 89…; R. c. Beals, (1956) 117 C.C.C. 22 … »

[264] Naturellement, l’accusé n’a pas à prouver son innocence, mais à soulever un doute raisonnable sur sa culpabilité. Pour ce faire, il devra expliquer ou nier les symptômes soulevés par la poursuite.

[265] Pour échapper au verdict de culpabilité, ses explications ou négations devront subir le test que la Cour Suprême du Canada nous a donné dans l’arrêt R. c. W. (D.) 1991 CanLII 93 (C.S.C.), [1991] 1 R.C.S. 742, test qui se résume comme suit :

• Si le Tribunal croit les explications de l’accusé, il doit l’acquitter;

• s'il ne croit pas ces explications mais que la preuve de la défense soulève dans son esprit un doute raisonnable, il doit l’acquitter;

• s'il ne croit pas l’accusé et que sa preuve ne soulève pas de doute dans l’esprit du Tribunal quant à sa culpabilité, il doit se demander s'il est convaincu hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de l’accusé en vertu de toute la preuve du dossier.

[266] Lors de l’évaluation de la version du défendeur certains principes sont à souligner :

• Le tribunal n’a pas à choisir une version par rapport à une autre;

R. c. K.C. (1991) 68 C.C.C. ( 3d ) p. 34
R. c. Potvin 500-00-000214-906, 2 mars 1994, ( C.A. Qué.)

• Le défendeur est présumé innocent; il n'a pas à prouver son innocence d’aucune façon;

• Le fardeau de la poursuite est de prouver, hors de tout doute raisonnable tous les éléments essentiels de l’infraction et ainsi sa culpabilité.

• Chaque élément de preuve ne doit pas être analysé isolément mais dans son ensemble.

Si le cessionnaire détourne alors le bien frauduleusement/sans apparence de droit, dans l'intention d'en priver le cédant, il se rend coupable de vol

R. c. Milne, 1992 CanLII 86 (C.S.C.)

Lorsqu'un bien est erronément cédé à une personne qui connaît l'erreur, il n'y a pas de transfert de propriété aux fins du droit criminel si, en droit des biens, le transfert initial est nul ou simplement annulable et que le cédant jouit d'un droit de recouvrement. La distinction entre les transferts nuls et ceux susceptibles d'annulation n'a pas de raison d'être dans le contexte du droit criminel. Dans l'un ou l'autre cas, lorsque le droit des biens accorde au moins un droit de recouvrement, la propriété n'est pas transférée aux fins du droit criminel. Si le cessionnaire détourne alors le bien à son propre usage, frauduleusement et sans apparence de droit, dans l'intention d'en priver le cédant, il se rend coupable de vol.

Le juge du procès a conclu que l'accusé savait que c'était par erreur que le second chèque avait été émis à l'ordre de sa société. Par conséquent, la propriété du chèque en cause n'a pas été transférée à la société de l'accusé aux fins du droit criminel. Le juge du procès a conclu en outre qu'en déposant le second chèque dans le compte de sa société pour ensuite retirer l'argent, l'accusé a détourné les fonds à son propre usage dans l'intention d'en priver la Cie B.H. Ce détournement a été fait frauduleusement et sans apparence de droit, car l'accusé savait que le chèque avait été émis par erreur.

Monsieur Milne ne pouvait être reconnu coupable de vol pour avoir pris quelque chose à la Compagnie de la Baie d'Hudson. Il est entré en possession du chèque par l'intermédiaire de sa société, sans avoir pris quelque chose. D'où il s'ensuit que M. Milne ne peut être déclaré coupable de vol que s'il a, frauduleusement et sans apparence de droit détourné l'argent à son propre usage dans l'intention de priver la Compagnie de la Baie d'Hudson de son bien ou de son "droit de propriété spécial ou [. . .] intérêt spécial" sur ce bien. C'est la théorie du détournement qui s'applique donc à un cas comme celui‑ci, où la possession de l'article en question a été acquise, au départ, sans que l'on ait pris quelque chose.

Pour déterminer si M. Milne a détourné l'argent à son propre usage, la question fondamentale est de savoir si, en raison de la connaissance qu'avait M. Milne de l'erreur commise par la Compagnie de la Baie d'Hudson, cette dernière a effectivement conservé un intérêt dans l'argent après que M. Milne en eut acquis la possession.

La distinction entre nul et annulable, en droit des biens, vise dans une large mesure (quoique peut‑être non exclusivement) à protéger les tiers innocents qui se sont fiés à la légitimité de l'opération qui semble avoir eu lieu. Cet objet n'a pas de pendant en droit criminel. En droit criminel, on se préoccupe de la culpabilité ou de l'innocence de l'accusé, de sorte que l'accent est mis sur les actes et la connaissance de ce dernier. Le droit criminel n'a pas, sur les intérêts de tiers, l'incidence que peut avoir le droit des biens. Le fait que M. Milne puisse, dans une affaire comme celle qui nous occupe, être exposé à une sanction pénale à cause de ses actes n'aurait aucune incidence sur la réclamation, fondée sur le droit des biens, d'un tiers innocent à qui la propriété avait été transférée dans l'intervalle.

En fait, il serait parfaitement conforme aux objets et aux traditions du droit criminel de se concentrer sur la connaissance de l'accusé aux fins de décider s'il y a eu transfert de propriété.

En l'espèce, il ne fait aucun doute que M. Milne savait qu'il n'avait pas droit au produit du second chèque. Puisqu'il était au courant de l'erreur du cédant et qu'il s'agissait d'une erreur qui, en droit des biens, faisait naître un droit de recouvrement, la propriété n'a pas été transférée aux fins du droit criminel.

samedi 12 septembre 2009

Analyse par la jurisprudence de ces notions de garde et contrôle d'un véhicule

R. c. Clermont, 2000 CanLII 5813 (QC C.Q.)

18. Dans l'arrêt Ford c. R. le juge Ritchie de la Cour suprême du Canada définit l'actus reus de l'infraction de garde ou contrôle ainsi:

Il peut y avoir garde même en l'absence de cette intention lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un accusé accomplit un acte ou une série d'actes ayant trait à l'utilisation d'un véhicule ou de ses accessoires, qui font que le véhicule peut être mis en marche involontairement, créant le danger que l'article vise à prévenir.

19. Quant à la mens rea de l'infraction, le juge McIntyre l'établit ainsi dans l'arrêt R. c. Toews:

(…) la mens rea de l'infraction d'avoir la garde ou le contrôle d'un véhicule à moteur est l'intention d'assumer la garde ou le contrôle après avoir volontairement consommé de l'alcool ou une drogue. L'actus reus est l'acte qui consiste à assumer la garde ou le contrôle du véhicule alors que la consommation volontaire d'alcool ou d'une drogue a affaibli la capacité de conduire.

20. Enfin, concluant sur l'analyse de la jurisprudence en la matière, le juge McIntyre écrit:

(…) Cependant, la jurisprudence citée illustre le point et amène à conclure que les actes de garde ou de contrôle, hormis l'acte de conduire, sont des actes qui comportent une certaine utilisation du véhicule ou de ses accessoires, ou une conduite quelconque à l'égard du véhicule qui comporterait le risque de le mettre en mouvement de sorte qu'il puisse devenir dangereux. Chaque affaire sera décidée en fonction de ses propres faits et les circonstances où l'on pourra conclure qu'il y a des actes de garde ou de contrôle varieront beaucoup. (…)

21. Appliquant ces mêmes principes, la Cour d'Appel du Québec a eu récemment l'occasion de décider de certaines affaires semblables à la nôtre.

22. Dans l'arrêt R. c. Rioux, la Cour d'appel a accueilli l'appel de la décision du juge de la Cour supérieure qui acquittait l'accusé de l'accusation d'avoir eu la garde ou le contrôle d'un véhicule moteur alors que sa capacité de conduire était affaiblie par l'alcool, pour y substituer un verdict de culpabilité dans les circonstances suivantes: l'accusé, visiblement en état d'ébriété, dort dans son véhicule stationné sur le terrain de stationnement d'un garage, en face d'un bar d'où il sortait; il est derrière le volant, les portes sont verrouillées, le moteur n'est pas en marche et les clés ont été déposées derrière le garage, à une vingtaine de pieds de son véhicule.

23. Au même effet, la Cour d'appel accueillit le pourvoi et rétablit la condamnation prononcée en première instance, dans l'arrêt R. c. Hamel.

24. Les faits mis en preuve dans cette affaire sont particuliers. L'appelante, qui était au volant du véhicule au moment de son interception, explique qu'elle a changé de place avec son copain, à l'approche d'un barrage policier; les lumières du véhicule étaient demeurées allumées et les clés du véhicule étaient en possession de celui-ci.

25. En désaccord avec son confrère le juge Philippon, le juge Proulx, avec l'approbation du juge Jacques Chamberland, écrit les motifs suivants centrés sur le danger imminent que l’accusé reparte avec le véhicule:

Le juge de la Cour supérieure a reproché au juge du procès d'avoir uniquement inféré la garde ou contrôle de trois faits, soit (1) la propriété de la voiture, (2) les lumières allumées et (3) la place occupée par l'intimée.

Avec respect pour l'opinion contraire, d'autres éléments ont été retenus en plus au procès, soit les circonstances dans lesquelles l'intimée s'était vu confier la garde et l'avait maintenue à l'arrivée des policiers et surtout le fait qu'elle n'ait pas nié avoir eu l'intention de vouloir partir avec le véhicule, «qu'il y avait un danger imminent que l'accusée reparte avec le véhicule, le mette en marche». Pour reprendre ici la proposition énoncée ci-haut, conformément aux arrêts Price et Thomson, de l'ensemble de ces faits le juge du procès était justifié de tirer l'inférence que l'intimée avait la garde ou le contrôle, c'est-à-dire qu'elle avait à sa portée les moyens de mettre en marche le véhicule et constituait, comme le juge du procès l'a écrit, «un danger imminent qu'elle reparte avec le véhicule». Comme on l'a observé dans l'arrêt Toews, chaque affaire sera décidée en fonction de ses propres faits et les circonstances où l'on pourra conclure qu'il y a des actes de garde ou de contrôle qui varieront beaucoup.

26. Dans ce même arrêt, le juge Proulx adopte la définition des mots «garde» et «contrôle» retenue par la Cour d'appel du Nouveau Brunswick dans l'arrêt R. c. Price déjà citée avec approbation par la Cour Suprême dans l'arrêt R. c. Toews:

The word «care» is defined in The Oxford English Dictionary as «having in charge or protection». «Control» on the other hand is defined as «the fact of controlling or of checking and directing action» also as «the function or power of directing and regulating; domination, command, sway». …The mischief sought to be prohibited by the section as expressed by the wording is that an intoxicated person who is in the immediate presence of a motor vehicle with the means of controlling it or setting it in motion is or may be a danger to the public. Even if he has no immediate intention of setting it in motion he can at any instant determine to do so, because his judgment may be so impaired that he cannot foresee the possible consequences of his actions.

27. Enfin, il reprend à son propre compte la proposition suivante de la Cour Suprême dans l'arrêt Toews, inspirée de la Cour d'appel de la Nouvelle Ecosse dans l'arrêt R. c. Thomson:

Dans Toews, on a cité également l'arrêt R. v. Thomson (1940), 75 C.C.C. 141, (C.A.N.-É.), duquel on peut dégager la proposition qu'une personne qui se trouve dans une voiture et a à sa portée les moyens de la mettre en marche en a le contrôle. Il n'est pas requis que cette personne ait l'intention immédiate de mettre le véhicule en marche puisque la disposition vise à empêcher qu'une personne en état d'ébriété qui est en présence immédiate d'un véhicule et qui a le moyen de la contrôler ou de le mettre en mouvement, ne devienne un danger pour le public.

28. Il conclut en souscrivant au raisonnement déjà retenu par le juge de première instance:

L'intimée, pour s'en remettre ici aux constatations de fait du juge du procès, n'a pas nié son intention de vouloir éventuellement mettre le véhicule en marche et, comme en a conclu le juge, présentait un danger imminent qu'elle parte avec le véhicule.

29. Sur la base des arrêts Ford c. R., R. c. Toews de la Cour Suprême, dans l'arrêt R. v. Lockerby, la Cour d'Appel de la Nouvelle Ecosse a maintenu la condamnation de l'accusé déjà prononcée en première instance sur la preuve des faits suivants: l'accusé, qui est assis dans le siège du passager avant dans son véhicule stationné, attend ses compagnons de voyage qui sont entrés dans un restaurant pour vérifier si des amis y sont; dans le but de les rejoindre, l'accusé se glisse sur le siège du conducteur pour arrêter le moteur du véhicule qui était demeuré en marche avec la transmission laissée au neutre.

30. Le juge Cromwell de la Cour d'Appel rappelle l'enseignement de la Cour Suprême dans R. c. Toews sur la notion de garde et contrôle en ces termes:

Mr. Lockerby was at the controls of the vehicle and admitted using them. He had possession and superintendence of the vehicle; he was in charge of it. Although it was not his intention to set the vehicle in motion, he was in the position to make the vehicle do what he wanted and used the ignition key, the clutch and the gear shift to carry out his purpose. In both the everyday sense of the word and as the word is used in s. 253(b), Mr. Lockerby was in control of the vehicle. He had more than the legal limit of alcohol in his blood. That is the conduct which is criminal under s. 253(b) of the Criminal Code.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

L’accusé qui soulève un doute raisonnable sur le consentement de la victime à l’emploi de la force sera acquitté d'une infraction de voies de fait et cette détermination du consentement s’effectue selon un critère subjectif

Bérubé-Gagnon c. R., 2020 QCCA 1389 Lien vers la décision [ 22 ]        L’absence de consentement de la victime est un élément essentiel de ...