R. c. Anderson, 2008 QCCS 3786 (CanLII)
[3] Le ouï-dire consiste à vouloir mettre en preuve, pour en établir la véracité, la déclaration faite par une personne qui ne témoigne pas elle-même à l'audience. Lorsque le témoignage du témoin ne vise pas à établir la véracité de la déclaration mais simplement que celle-ci a été faite, il ne s'agit pas de ouï-dire et si, stricto sensu, on pouvait affirmer qu'il s'agit effectivement de ouï-dire, ce témoignage serait néanmoins recevable.
[4] Ainsi, la déclaration du témoin qui affirme à l'audience que, lorsqu'il était au cinéma, il a entendu quelqu'un crier "Au feu", ne prouve pas l'existence du feu mais explique pourquoi tout le monde s'est précipité vers les sorties.
[5] Le ouï-dire visant à établir la véracité de la déclaration est inadmissible – même si le sujet évoqué est pertinent – parce qu'il est difficile d'en vérifier la fiabilité. En effet, le déclarant n'étant pas présent en Cour, il est difficile de vérifier s'il était sincère, précis ou fiable, s'il a exagéré ou tout simplement mal perçu la réalité. Étant absent à l'audience, on ne peut le contre-interroger.
[6] Toutefois, les tribunaux ont constaté que l'exclusion sans restriction de la preuve par ouï-dire gênerait la constatation exacte des faits et ont, au fil des ans, établi un certain nombre d'exceptions à la règle: les res gestae, les actes manifestes en matière de complot, la preuve de certains écrits de nature publique ou privée, la déclaration des mourants, etc.
[7] Les faits dans l'arrêt Khan ont montré les limites de ces exceptions particularisées.
[8] Dans cette affaire, la déclaration de la fillette de 3 ½ ans selon laquelle le docteur Khan l'avait agressée sexuellement ne s'insérait dans aucune des exceptions particularisées. La Cour suprême a donc redéfini le droit sur cette question pour affirmer que le ouï-dire pouvait être admissible pour établir la véracité de la déclaration si les critères de nécessité et de fiabilité étaient présents. Dans Khan, le critère de nécessité était clairement rencontré puisque la fillette ne pouvait évidemment témoigner et qu'il fallait s'en remettre à la déclaration qu'elle avait faite à sa mère environ une demi-heure après l'agression suite à la constatation par celle-ci d'une tache suspecte sur la robe de sa fille.
[9] Ce principe – l'admissibilité du ouï-dire pour établir la véracité de la déclaration si les critères de nécessité et de fiabilité sont présents – a été repris, réitéré, élaboré, commenté, précisé et approuvé par la Cour suprême dans les arrêts Smith, K.G.B., U.F.J., Hawkins, Starr, Mapara, Couture et, finalement et surtout, dans Khelawon.
[10] Quant au critère de nécessité, il reçoit une définition souple qui consiste à déterminer si l'auteur de la déclaration peut ou ne peut pas témoigner au procès. Le décès, l'aliénation, la maladie qui empêche de voyager ou de témoigner, l'absence du pays ainsi que le refus de prêter serment ou de témoigner constituent des exemples à cet égard.
[11] Quant à la fiabilité, elle se divise en deux parties: le seuil de fiabilité que le juge doit trancher selon la prépondérance des probabilités et la fiabilité ultime qui doit être tranchée par le jury.
[12] Le meilleur moyen de vérifier la fiabilité de la déclaration est le contre-interrogatoire. Cela se produit notamment lorsque la déclaration qu'on veut mettre en preuve a été faite au cours de l'enquête préliminaire et que le déclarant, absent à l'audience devant le juge du procès, a été contre-interrogé.
[13] À l'étape de la détermination du seuil de fiabilité, le juge doit se limiter "à déterminer si la déclaration relatée en question renferme suffisamment d'indices de fiabilité pour fournir au juge des faits une base satisfaisante pour examiner la véracité de la déclaration."
[14] Dans Khelawon, la Cour suprême affirme que "la question de savoir si certains facteurs toucheront uniquement la fiabilité en dernière analyse dépendra du contexte". Elle ajoute que certains des commentaires formulés aux paragraphes 215 et 217 de l'arrêt Starr "ne devraient plus être suivis."
[15] Elle continue en affirmant que la Cour "devrait plutôt adopter une approche plus fonctionnelle," et que les "facteurs pertinents ne doivent plus être rangés dans des catégories de seuil de fiabilité et de fiabilité en dernière analyse."
[16] Elle ajoute que le juge doit "se concentrer sur les dangers particuliers que comporte la preuve par ouï-dire qu'on cherche à présenter, de même que sur les caractéristiques ou circonstances que la partie qui veut présenter la preuve invoque pour écarter ces dangers."
[17] À ce titre, la Cour affirme que, même si les critères de nécessité et de fiabilité ont été démontrés, le juge conserve son pouvoir d'exclure une preuve admissible lorsque son effet préjudiciable est disproportionné par rapport à sa valeur probante.
[18] Elle rappelle finalement le rôle limité que le juge "joue lorsqu'il se prononce sur l'admissibilité".
vendredi 30 avril 2010
mercredi 28 avril 2010
Le pouvoir d’accorder ou de refuser une remise est discrétionnaire
R. c. Lévesque, 2006 QCCQ 12236 (CanLII)
[8] Le pouvoir d’accorder ou de refuser une remise est discrétionnaire, mais les tribunaux supérieurs interviendront si cette discrétion n’a pas été exercée d’une manière judiciaire.
[9] Les critères sont bien connus. Dans l’arrêt Darville, la Cour suprême a défini trois conditions que doit satisfaire la partie qui demande une remise. Elle doit démontrer : a) que la personne absente pourrait rendre un témoignage pertinent; b) qu’elle a pris des moyens raisonnables pour s’assurer de la présence du témoin; c) qu’on peut raisonnablement penser que le témoin absent se présentera ultérieurement devant le tribunal.
[10] L’arrêt Darville, rendu en 1957, mettait en cause l’opportunité raisonnable d’assigner des témoins dans une affaire de trafic de stupéfiants. Détenu depuis neuf mois, sans avocat depuis l’enquête préliminaire, Darville se plaignait de ne pouvoir retracer les témoins même si un journaliste lui avait offert ses services pour communiquer avec eux, mais en vain. Au procès, le juge a refusé une demande de remise et la Cour d’appel de l’Ontario a rejeté l’appel contre la condamnation. La Cour suprême, par la plume du juge Taschereau, a rejeté sommairement l’appel en rappelant les trois conditions pertinentes et en mentionnant que le juge du procès n’avait commis aucune erreur de droit. Le juge Cartwright, par ses motifs distincts, a conclu que le juge avait commis une erreur de droit en décidant du sort de la requête sans avoir donné l’occasion à Darville de démontrer qu’il pouvait satisfaire les critères. Cependant, cette opportunité lui avait été subséquemment donnée par la Cour appel alors qu’il était représenté par avocat et il n’avait rien fait. L’appel avait donc été rejeté à bon droit.
[11] Cela étant, il y a maintenant deux ans, la Cour d’appel du Québec a rendu deux décisions importantes sur la question dans lesquelles elle reprend la position du juge Cartwright. Le juge Dalphond, pour la majorité, a conclu que toute demande de remise doit prendre en compte l’ensemble des circonstances et doit être conforme aux intérêts de la justice :
Briefly stated, the decision whether or not to grant the adjournment must be made in the light of the realities of each case and shall be consistent with the interests of justice.
[12] Dans l’affaire G.(J.C.), une part importante du jugement discute de la négligence du ministère public relativement à une assignation envoyée par courrier ordinaire. Cet aspect ne touche pas le dossier de M. Lévesque qui met en cause uniquement la troisième condition. Sur ce point, la Cour d’appel a rappelé que la preuve ne peut généralement pas se faire séance tenante lorsqu’on constate l’absence du témoin et qu’il est difficile de trancher la question sans donner à la partie l’occasion d’y répondre :
24 The third criterion is the most difficult, particularly where, as here, it is not known before the time set for trial that the witness will not be appearing. In R. v. MacDonald, reference is made with approval to the following comments of McDonald J. of the Alberta Court of Queen's Bench in R. v. T. (A.) reflex, (1991), 69 C.C.C. (3d) 107 at p. 112:
As for condition (c), it will commonly be impossible to offer any evidence that if an adjournment is granted there is a reasonable expectation that the attendance of the witness on a future trial date can be procured. Whether there is such a reasonable expectation may depend on a variety of factors, which cannot be identified at the time the witness, has failed to appear. Is his failure to appear due to his having met with an accident or illness? If that is known, obviously an adjournment will be granted; ordinarily it will not be known and cannot be discovered until inquiries are made. Is his failure to appear due to forgetfulness on his part? That cannot be known and it will not be known until inquiries are made. Is his failure to appear due to his having been intimidated by the complainant or by someone on the complainant's behalf, or because the witness has decided without being intimidated that he does not wish to testify against the accused? That cannot be known and it will not be known until inquires have been made. In all these instances refusal to grant the adjournment may be inconsistent with the interests of justice, and may be the result of an undue readiness to assume that the failure of the witness to appear has been due to circumstances that will not be overcome if the party seeking the attendance of the witness is granted the adjournment.
[13] Dans cette affaire, le juge Dalphond a conclu que l’intérêt de la justice ne commandait pas un acquittement dans les circonstances, en raison notamment de la gravité des accusations, de l’absence de remise antérieure et de l’absence de préjudice démontré pour l’accusé. En outre, deux possibilités s’offraient alors au juge, soit d’émettre un mandat ou de suspendre pour obtenir un complément de preuve :
27 In theses circumstances, the trial judge should not have refused the Crown's request for a postponement of the trial and should not have subsequently acquitted the respondent. Instead, he should have considered issuing a warrant, or if unsatisfied with the facts alleged by the Crown, he should have adjourned to give the Crown an opportunity to adduce proper evidence
[8] Le pouvoir d’accorder ou de refuser une remise est discrétionnaire, mais les tribunaux supérieurs interviendront si cette discrétion n’a pas été exercée d’une manière judiciaire.
[9] Les critères sont bien connus. Dans l’arrêt Darville, la Cour suprême a défini trois conditions que doit satisfaire la partie qui demande une remise. Elle doit démontrer : a) que la personne absente pourrait rendre un témoignage pertinent; b) qu’elle a pris des moyens raisonnables pour s’assurer de la présence du témoin; c) qu’on peut raisonnablement penser que le témoin absent se présentera ultérieurement devant le tribunal.
[10] L’arrêt Darville, rendu en 1957, mettait en cause l’opportunité raisonnable d’assigner des témoins dans une affaire de trafic de stupéfiants. Détenu depuis neuf mois, sans avocat depuis l’enquête préliminaire, Darville se plaignait de ne pouvoir retracer les témoins même si un journaliste lui avait offert ses services pour communiquer avec eux, mais en vain. Au procès, le juge a refusé une demande de remise et la Cour d’appel de l’Ontario a rejeté l’appel contre la condamnation. La Cour suprême, par la plume du juge Taschereau, a rejeté sommairement l’appel en rappelant les trois conditions pertinentes et en mentionnant que le juge du procès n’avait commis aucune erreur de droit. Le juge Cartwright, par ses motifs distincts, a conclu que le juge avait commis une erreur de droit en décidant du sort de la requête sans avoir donné l’occasion à Darville de démontrer qu’il pouvait satisfaire les critères. Cependant, cette opportunité lui avait été subséquemment donnée par la Cour appel alors qu’il était représenté par avocat et il n’avait rien fait. L’appel avait donc été rejeté à bon droit.
[11] Cela étant, il y a maintenant deux ans, la Cour d’appel du Québec a rendu deux décisions importantes sur la question dans lesquelles elle reprend la position du juge Cartwright. Le juge Dalphond, pour la majorité, a conclu que toute demande de remise doit prendre en compte l’ensemble des circonstances et doit être conforme aux intérêts de la justice :
Briefly stated, the decision whether or not to grant the adjournment must be made in the light of the realities of each case and shall be consistent with the interests of justice.
[12] Dans l’affaire G.(J.C.), une part importante du jugement discute de la négligence du ministère public relativement à une assignation envoyée par courrier ordinaire. Cet aspect ne touche pas le dossier de M. Lévesque qui met en cause uniquement la troisième condition. Sur ce point, la Cour d’appel a rappelé que la preuve ne peut généralement pas se faire séance tenante lorsqu’on constate l’absence du témoin et qu’il est difficile de trancher la question sans donner à la partie l’occasion d’y répondre :
24 The third criterion is the most difficult, particularly where, as here, it is not known before the time set for trial that the witness will not be appearing. In R. v. MacDonald, reference is made with approval to the following comments of McDonald J. of the Alberta Court of Queen's Bench in R. v. T. (A.) reflex, (1991), 69 C.C.C. (3d) 107 at p. 112:
As for condition (c), it will commonly be impossible to offer any evidence that if an adjournment is granted there is a reasonable expectation that the attendance of the witness on a future trial date can be procured. Whether there is such a reasonable expectation may depend on a variety of factors, which cannot be identified at the time the witness, has failed to appear. Is his failure to appear due to his having met with an accident or illness? If that is known, obviously an adjournment will be granted; ordinarily it will not be known and cannot be discovered until inquiries are made. Is his failure to appear due to forgetfulness on his part? That cannot be known and it will not be known until inquiries are made. Is his failure to appear due to his having been intimidated by the complainant or by someone on the complainant's behalf, or because the witness has decided without being intimidated that he does not wish to testify against the accused? That cannot be known and it will not be known until inquires have been made. In all these instances refusal to grant the adjournment may be inconsistent with the interests of justice, and may be the result of an undue readiness to assume that the failure of the witness to appear has been due to circumstances that will not be overcome if the party seeking the attendance of the witness is granted the adjournment.
[13] Dans cette affaire, le juge Dalphond a conclu que l’intérêt de la justice ne commandait pas un acquittement dans les circonstances, en raison notamment de la gravité des accusations, de l’absence de remise antérieure et de l’absence de préjudice démontré pour l’accusé. En outre, deux possibilités s’offraient alors au juge, soit d’émettre un mandat ou de suspendre pour obtenir un complément de preuve :
27 In theses circumstances, the trial judge should not have refused the Crown's request for a postponement of the trial and should not have subsequently acquitted the respondent. Instead, he should have considered issuing a warrant, or if unsatisfied with the facts alleged by the Crown, he should have adjourned to give the Crown an opportunity to adduce proper evidence
mardi 27 avril 2010
La question du délai « dès que possible », dans les dossiers de capacités affaiblies, est une question de fait et d'appréciation
Pouliot c. R., 2009 QCCS 4256 (CanLII)
[2] L'appelant plaide deux arguments contradictoires. Il plaide qu'on ne lui a pas donné l'ordre de fournir un échantillon d'haleine « dès que possible ». Dans un même souffle, il affirme que les policiers ont été trop rapides à conclure au refus, ne laissant pas l'opportunité à l'appelant de changer d'idée.
[3] Dans les deux cas, il s'agit d'une question d'appréciation des faits par le juge de première instance.
[4] La question du délai « dès que possible » est une question de fait et d'appréciation. Le juge de première instance a apprécié les faits et a conclu que le délai était raisonnable et en est venu à la conclusion que l'appelant a refusé de souffler.
[5] La seule preuve qu'il y a au dossier est la preuve des policiers, ils affirment que l'appelant soufflait mal, on lui a expliqué comment souffler et il a dit : « je ne souffle pas ». Alors, les policiers n'avaient pas à attendre un autre 50 minutes pour savoir s'il change d'idée. Une fois qu'une personne dit non, c'est non à moins que le juge en vienne à la conclusion qu'il n'a pas bien compris
[2] L'appelant plaide deux arguments contradictoires. Il plaide qu'on ne lui a pas donné l'ordre de fournir un échantillon d'haleine « dès que possible ». Dans un même souffle, il affirme que les policiers ont été trop rapides à conclure au refus, ne laissant pas l'opportunité à l'appelant de changer d'idée.
[3] Dans les deux cas, il s'agit d'une question d'appréciation des faits par le juge de première instance.
[4] La question du délai « dès que possible » est une question de fait et d'appréciation. Le juge de première instance a apprécié les faits et a conclu que le délai était raisonnable et en est venu à la conclusion que l'appelant a refusé de souffler.
[5] La seule preuve qu'il y a au dossier est la preuve des policiers, ils affirment que l'appelant soufflait mal, on lui a expliqué comment souffler et il a dit : « je ne souffle pas ». Alors, les policiers n'avaient pas à attendre un autre 50 minutes pour savoir s'il change d'idée. Une fois qu'une personne dit non, c'est non à moins que le juge en vienne à la conclusion qu'il n'a pas bien compris
vendredi 23 avril 2010
Exposé du juge Chevalier sur les demandes de retrait du plaidoyer de culpabilité
R. c. Boivin, 2007 QCCQ 1997 (CanLII)
[30] La Cour suprême du Canada rappelait en 2003 que pour être valide un plaidoyer de culpabilité doit être volontaire et non équivoque. Il doit aussi être éclairé en ce sens que l'accusé doit connaître la nature des allégations faites contre lui, l'effet de son plaidoyer et les conséquences de celui-ci.
[31] Alors que cela était discrétionnaire auparavant le Code criminel impose maintenant au Tribunal qui reçoit un plaidoyer de culpabilité de s'assurer que le prévenu fait volontairement ce plaidoyer, qu'il comprend qu'en le faisant il admet les éléments essentiels de l'infraction, qu'il comprend la nature et les conséquences de sa décision et qu'il sait que le Tribunal n'est pas lié par une suggestion commune.
[32] Un accusé qui demande de retirer son plaidoyer de culpabilité a un fardeau: il doit démontrer des motifs sérieux et valables justifiant la radiation de son plaidoyer de culpabilité. Ce fardeau, par surcroît, "sera plus lourd [si l'accusé] était représenté par avocat".
[33] Lorsqu'un accusé reproche à ses avocats des pressions indues pour le forcer à plaider coupable, "l'avocat dont la conduite est en cause doit avoir eu l'opportunité" de s'expliquer.
[34] Compte tenu des conséquences d'un plaidoyer de culpabilité, lorsqu'un accusé en demande le retrait "le facteur primordial à considérer est le déni de justice. Dans ce contexte, il [lui] incombe… d'établir qu'il avait des moyens de défense valables et non futiles à présenter".
[35] Que le Ministère public discute avec les avocats des accusés pour tenter de régler des dossiers sans que ne se tienne de procès et fasse alors connaître la peine qu'il estime adéquate ne saurait d'aucune façon constituer une menace ou une pression indue. De toutes façons les juges sont là pour prononcer des peines justes et raisonnables et protéger les accusés contre des peines excessives qui pourraient être réclamées. De telles discussions, désignées comme étant le "plea-bargaining", "font partie du quotidien de l'administration de la justice pénale".
[36] Que, dans un procès impliquant plusieurs accusés, le Ministère public désire, dans le cadre du "plea-bargaining", obtenir un règlement complet du dossier est plus que normal et n'est que le prolongement de la philosophie du droit qui veut réunir des co-accusés dans un même dossier lorsque la preuve leur est commune. Dans un tel contexte, des pressions des co-accusés pour inciter une personne à plaider coupable parce que la poursuite voulait un règlement global, jumelées à d'autres pressions, ont été jugées par la Cour d'appel d'Ontario ne pas constituer de pressions indues ou de contrainte de nature à justifier un retrait de plaidoyer de culpabilité. Dans cette affaire, le procureur de l'accusé en outre estimait la preuve de la poursuite extrêmement faible et ne conseillait pas à son client de plaider coupable mais plutôt de faire le procès.
[30] La Cour suprême du Canada rappelait en 2003 que pour être valide un plaidoyer de culpabilité doit être volontaire et non équivoque. Il doit aussi être éclairé en ce sens que l'accusé doit connaître la nature des allégations faites contre lui, l'effet de son plaidoyer et les conséquences de celui-ci.
[31] Alors que cela était discrétionnaire auparavant le Code criminel impose maintenant au Tribunal qui reçoit un plaidoyer de culpabilité de s'assurer que le prévenu fait volontairement ce plaidoyer, qu'il comprend qu'en le faisant il admet les éléments essentiels de l'infraction, qu'il comprend la nature et les conséquences de sa décision et qu'il sait que le Tribunal n'est pas lié par une suggestion commune.
[32] Un accusé qui demande de retirer son plaidoyer de culpabilité a un fardeau: il doit démontrer des motifs sérieux et valables justifiant la radiation de son plaidoyer de culpabilité. Ce fardeau, par surcroît, "sera plus lourd [si l'accusé] était représenté par avocat".
[33] Lorsqu'un accusé reproche à ses avocats des pressions indues pour le forcer à plaider coupable, "l'avocat dont la conduite est en cause doit avoir eu l'opportunité" de s'expliquer.
[34] Compte tenu des conséquences d'un plaidoyer de culpabilité, lorsqu'un accusé en demande le retrait "le facteur primordial à considérer est le déni de justice. Dans ce contexte, il [lui] incombe… d'établir qu'il avait des moyens de défense valables et non futiles à présenter".
[35] Que le Ministère public discute avec les avocats des accusés pour tenter de régler des dossiers sans que ne se tienne de procès et fasse alors connaître la peine qu'il estime adéquate ne saurait d'aucune façon constituer une menace ou une pression indue. De toutes façons les juges sont là pour prononcer des peines justes et raisonnables et protéger les accusés contre des peines excessives qui pourraient être réclamées. De telles discussions, désignées comme étant le "plea-bargaining", "font partie du quotidien de l'administration de la justice pénale".
[36] Que, dans un procès impliquant plusieurs accusés, le Ministère public désire, dans le cadre du "plea-bargaining", obtenir un règlement complet du dossier est plus que normal et n'est que le prolongement de la philosophie du droit qui veut réunir des co-accusés dans un même dossier lorsque la preuve leur est commune. Dans un tel contexte, des pressions des co-accusés pour inciter une personne à plaider coupable parce que la poursuite voulait un règlement global, jumelées à d'autres pressions, ont été jugées par la Cour d'appel d'Ontario ne pas constituer de pressions indues ou de contrainte de nature à justifier un retrait de plaidoyer de culpabilité. Dans cette affaire, le procureur de l'accusé en outre estimait la preuve de la poursuite extrêmement faible et ne conseillait pas à son client de plaider coupable mais plutôt de faire le procès.
L’obligation de s’enregistrer en vertu de la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels constitue-t-elle une peine?
S.C. c. R., 2007 QCCQ 10386 (CanLII)
[5] Les requérants soutiennent que l'obligation de s'enregistrer constitue une peine et qu’en conséquence, l’article 11 de la Charte s’applique.
[6] L’article 11i) de la Charte énonce que l’inculpé a droit « de bénéficier de la peine la moins sévère lorsque la peine qui sanctionne l’infraction dont il est déclaré coupable est modifiée entre le moment de la perpétration de l’infraction et celui de la sentence ».
[7] Certaines ordonnances accessoires peuvent constituer une peine. Par exemple, l’ordonnance d’interdiction de posséder des armes à feu ou l’ordonnance de purger la moitié de la peine d’emprisonnement. Cependant, toutes les ordonnances accessoires ne sont pas assimilées à des peines.
[8] Dans R. c. Rodgers, la Cour suprême décide que l’ordonnance de prélèvement d’échantillons d’ADN ne constitue pas une peine au sens de 11i) de la Charte. Quant à la définition de la peine, elle précise:
Cela ne signifie pas que la « peine » à laquelle renvoient les al. 11h) et i) englobe nécessairement toute conséquence pouvant découler du fait d'être déclaré coupable d'une infraction criminelle, que cette conséquence survienne ou non au moment de la détermination de la peine.
[…]
En règle générale, il me semble que la conséquence constitue une peine lorsqu'elle fait partie des sanctions dont est passible un accusé pour une infraction donnée et qu'elle est conforme à l'objectif et aux principes de la détermination de la peine.
[9] Dans R. c. Cross, la Cour d’appel de Nouvelle-Écosse conclut que l’article 490.012 C. cr. ne constitue pas une peine au sens de la Charte. Le but de la loi n’est pas de punir le délinquant mais de protéger la société en constituant une banque de renseignements sur les déplacements des personnes ciblées par la loi.
[10] Dans R. c. Berthelette, la Cour d’appel du Québec opine dans le même sens. En l'espèce, les avocats des requérants invitent le Tribunal à considérer cet arrêt avec prudence considérant son énoncé laconique et le fait qu’il s’agit d’une entente intervenue entre la poursuite et la défense.
[11] Pourtant, la Cour d’appel se prononce clairement sur cette question:
Considérant l'arrêt de la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse dans la cause de R. c. Cross, 198 C.C.C. (3d) 395;
Considérant l'arrêt majoritaire La Reine c. Rodgers, 2006 CSC 15 (CanLII), 2006 CSC 15 du 27 avril 2006, qui est applicable par analogie;
DÉCLARE que l'article 490.012 du Code criminel ne fait pas partie de la peine, et ne contrevient pas à l'article 11 de la Charte Canadienne.
[12] L’obligation de s’enregistrer prévue aux articles 490.019 et suivants du Code criminel intervient bien longtemps après le prononcé de la peine. Bien qu'il puisse y avoir certains inconvénients à l’obligation de s’enregistrer, cela n’en fait pas une peine pour autant. La loi n’a pas pour but de punir mais plutôt de permettre aux services de police d’avoir accès à des renseignements à jour et fiables sur les délinquants sexuels.
[13] Considérant ce qui précède, le Tribunal conclut que les articles 490.019 à 490.022 C. cr. ne font pas partie de la peine et ne contreviennent pas à l’article 11 de la Charte.
[5] Les requérants soutiennent que l'obligation de s'enregistrer constitue une peine et qu’en conséquence, l’article 11 de la Charte s’applique.
[6] L’article 11i) de la Charte énonce que l’inculpé a droit « de bénéficier de la peine la moins sévère lorsque la peine qui sanctionne l’infraction dont il est déclaré coupable est modifiée entre le moment de la perpétration de l’infraction et celui de la sentence ».
[7] Certaines ordonnances accessoires peuvent constituer une peine. Par exemple, l’ordonnance d’interdiction de posséder des armes à feu ou l’ordonnance de purger la moitié de la peine d’emprisonnement. Cependant, toutes les ordonnances accessoires ne sont pas assimilées à des peines.
[8] Dans R. c. Rodgers, la Cour suprême décide que l’ordonnance de prélèvement d’échantillons d’ADN ne constitue pas une peine au sens de 11i) de la Charte. Quant à la définition de la peine, elle précise:
Cela ne signifie pas que la « peine » à laquelle renvoient les al. 11h) et i) englobe nécessairement toute conséquence pouvant découler du fait d'être déclaré coupable d'une infraction criminelle, que cette conséquence survienne ou non au moment de la détermination de la peine.
[…]
En règle générale, il me semble que la conséquence constitue une peine lorsqu'elle fait partie des sanctions dont est passible un accusé pour une infraction donnée et qu'elle est conforme à l'objectif et aux principes de la détermination de la peine.
[9] Dans R. c. Cross, la Cour d’appel de Nouvelle-Écosse conclut que l’article 490.012 C. cr. ne constitue pas une peine au sens de la Charte. Le but de la loi n’est pas de punir le délinquant mais de protéger la société en constituant une banque de renseignements sur les déplacements des personnes ciblées par la loi.
[10] Dans R. c. Berthelette, la Cour d’appel du Québec opine dans le même sens. En l'espèce, les avocats des requérants invitent le Tribunal à considérer cet arrêt avec prudence considérant son énoncé laconique et le fait qu’il s’agit d’une entente intervenue entre la poursuite et la défense.
[11] Pourtant, la Cour d’appel se prononce clairement sur cette question:
Considérant l'arrêt de la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse dans la cause de R. c. Cross, 198 C.C.C. (3d) 395;
Considérant l'arrêt majoritaire La Reine c. Rodgers, 2006 CSC 15 (CanLII), 2006 CSC 15 du 27 avril 2006, qui est applicable par analogie;
DÉCLARE que l'article 490.012 du Code criminel ne fait pas partie de la peine, et ne contrevient pas à l'article 11 de la Charte Canadienne.
[12] L’obligation de s’enregistrer prévue aux articles 490.019 et suivants du Code criminel intervient bien longtemps après le prononcé de la peine. Bien qu'il puisse y avoir certains inconvénients à l’obligation de s’enregistrer, cela n’en fait pas une peine pour autant. La loi n’a pas pour but de punir mais plutôt de permettre aux services de police d’avoir accès à des renseignements à jour et fiables sur les délinquants sexuels.
[13] Considérant ce qui précède, le Tribunal conclut que les articles 490.019 à 490.022 C. cr. ne font pas partie de la peine et ne contreviennent pas à l’article 11 de la Charte.
L'état du droit sur la question d'une demande de retrait de plaidoyer de culpabilité
R. c. Hébert, 2009 QCCQ 16250 (CanLII)
[54] La Cour d'appel du Québec, dans l'affaire Raymond c. R., fut saisie d'une demande de retrait de plaidoyer de culpabilité. Elle analyse ainsi l'état du droit sur cette question :
[74] Il est acquis qu’une personne, qui a plaidé coupable aux infractions qui lui étaient reprochées en première instance, peut interjeter appel de sa déclaration de culpabilité, dans la mesure où elle invoque des motifs valables justifiant le retrait de son plaidoyer.
[75] L’invalidité du plaidoyer de culpabilité qu’a présenté un accusé peut constituer un tel motif. Le paragraphe 1.1 de l’article 606 C.cr. codifie les conditions de validité d’un plaidoyer de culpabilité :
(a) le prévenu fait volontairement le plaidoyer;
(b) le prévenu comprend qu’il admet les éléments essentiels de l’infraction;
(c) le prévenu comprend la nature et les conséquences de sa décision; et
(d) le prévenu sait que le tribunal n’est lié par aucun accord conclu entre lui et le poursuivant.
[76] En d’autres termes, pour qu’il soit considéré comme valide, le plaidoyer « doit être libre, non équivoque et fondé sur une information adéquate quant à la nature des accusations portées contre le prévenu et aux conséquences du plaidoyer de culpabilité pour celui-ci ».
[55] Dans cette affaire, la Cour d'appel rappelle que c'est au requérant de démontrer que le plaidoyer qu'il a offert est invalide.
[56] Dans l'affaire R. c. Nersysyan, la Cour d'appel énonce ce qui suit :
[6] Le requérant a le fardeau de démontrer les motifs sérieux et valables justifiant la radiation de son plaidoyer de culpabilité. Le facteur primordial à considérer est le déni de justice. Dans ce contexte, il incombe à l’appelant d’établir qu’il avait des moyens de défense valables et non futiles à présenter. Il ne suffit pas de spéculer sur l’issue du procès qui a été évité. Or, dans le présent cas, l’appelant se contente d’une dénégation générale des actes qu’on lui reproche.
[7] Par ailleurs, l’insatisfaction subséquente devant la « manière dont les choses ont tourné » ou devant la peine infligée ne suffit pas pour obtenir la radiation du plaidoyer lorsque celui-ci demeure un geste éclairé et volontaire quant à l’ensemble des circonstances entourant les infractions reprochées et le procès lui-même.
[57] Par ailleurs, dans l'affaire Carignan c. R., la Cour d'appel, sur la question du retrait de plaidoyer de culpabilité, rappelle les éléments suivants :
[34] En enregistrant un plaidoyer de culpabilité, un accusé renonce à plusieurs droits garantis par la Charte. Dans R. c. Richard, le juge La Forest rappelle ce principe en faisant siens les propos du juge Laskin (il n'était pas encore juge en chef) dans Adgey c. R. :
Un plaidoyer de culpabilité comporte en soi l'aveu que le requérant qui l'offre a commis le crime imputé, de même qu'un consentement à ce qu'une déclaration de culpabilité soit inscrite sans procès d'aucune sorte. Le requérant, par un tel plaidoyer, délie le ministère public de l'obligation de prouver la culpabilité au-delà d'un doute raisonnable, abandonne son privilège de ne pouvoir être contraint à témoigner et son droit de rester muet, et renonce à son droit de faire une réponse et défense complète à l'encontre d'une accusation.
[35] C'est pourquoi « un plaidoyer, écrit le juge Baudouin, parce qu'il entraîne pour le requérant des conséquences, doit revêtir certaines qualités. Il doit être libre, volontaire, clair et informé ». Il est l'affaire du requérant et l'avocat ne peut forcer son client par des promesses ou des menaces à admettre une faute qu'il ne veut pas confesser ou qu'il n'a pas commise. Il faut néanmoins faire preuve de prudence car la frontière entre l'opinion juridique et la contrainte peut parfois être difficile à tracer.
[36] Le fardeau de la démonstration qu'un aveu de culpabilité fut illégalement donné et devrait être retiré appartient au requérant et il sera plus lourd s'il était représenté par avocat.
[37] En somme, c'est sur la base d'un examen de l'ensemble du dossier et des circonstances qu'un juge déterminera si le plaidoyer est non équivoque, volontaire et surtout informé. Au regard de ce dernier critère, Clayton C. Ruby écrit :
Where counsel’s assessment of the likelihood of success was flawed, for example, following counsel’s advice to plead guilty because there was no valid defence is a factor militating in favour of permission to change a plea as being invalid.
[54] La Cour d'appel du Québec, dans l'affaire Raymond c. R., fut saisie d'une demande de retrait de plaidoyer de culpabilité. Elle analyse ainsi l'état du droit sur cette question :
[74] Il est acquis qu’une personne, qui a plaidé coupable aux infractions qui lui étaient reprochées en première instance, peut interjeter appel de sa déclaration de culpabilité, dans la mesure où elle invoque des motifs valables justifiant le retrait de son plaidoyer.
[75] L’invalidité du plaidoyer de culpabilité qu’a présenté un accusé peut constituer un tel motif. Le paragraphe 1.1 de l’article 606 C.cr. codifie les conditions de validité d’un plaidoyer de culpabilité :
(a) le prévenu fait volontairement le plaidoyer;
(b) le prévenu comprend qu’il admet les éléments essentiels de l’infraction;
(c) le prévenu comprend la nature et les conséquences de sa décision; et
(d) le prévenu sait que le tribunal n’est lié par aucun accord conclu entre lui et le poursuivant.
[76] En d’autres termes, pour qu’il soit considéré comme valide, le plaidoyer « doit être libre, non équivoque et fondé sur une information adéquate quant à la nature des accusations portées contre le prévenu et aux conséquences du plaidoyer de culpabilité pour celui-ci ».
[55] Dans cette affaire, la Cour d'appel rappelle que c'est au requérant de démontrer que le plaidoyer qu'il a offert est invalide.
[56] Dans l'affaire R. c. Nersysyan, la Cour d'appel énonce ce qui suit :
[6] Le requérant a le fardeau de démontrer les motifs sérieux et valables justifiant la radiation de son plaidoyer de culpabilité. Le facteur primordial à considérer est le déni de justice. Dans ce contexte, il incombe à l’appelant d’établir qu’il avait des moyens de défense valables et non futiles à présenter. Il ne suffit pas de spéculer sur l’issue du procès qui a été évité. Or, dans le présent cas, l’appelant se contente d’une dénégation générale des actes qu’on lui reproche.
[7] Par ailleurs, l’insatisfaction subséquente devant la « manière dont les choses ont tourné » ou devant la peine infligée ne suffit pas pour obtenir la radiation du plaidoyer lorsque celui-ci demeure un geste éclairé et volontaire quant à l’ensemble des circonstances entourant les infractions reprochées et le procès lui-même.
[57] Par ailleurs, dans l'affaire Carignan c. R., la Cour d'appel, sur la question du retrait de plaidoyer de culpabilité, rappelle les éléments suivants :
[34] En enregistrant un plaidoyer de culpabilité, un accusé renonce à plusieurs droits garantis par la Charte. Dans R. c. Richard, le juge La Forest rappelle ce principe en faisant siens les propos du juge Laskin (il n'était pas encore juge en chef) dans Adgey c. R. :
Un plaidoyer de culpabilité comporte en soi l'aveu que le requérant qui l'offre a commis le crime imputé, de même qu'un consentement à ce qu'une déclaration de culpabilité soit inscrite sans procès d'aucune sorte. Le requérant, par un tel plaidoyer, délie le ministère public de l'obligation de prouver la culpabilité au-delà d'un doute raisonnable, abandonne son privilège de ne pouvoir être contraint à témoigner et son droit de rester muet, et renonce à son droit de faire une réponse et défense complète à l'encontre d'une accusation.
[35] C'est pourquoi « un plaidoyer, écrit le juge Baudouin, parce qu'il entraîne pour le requérant des conséquences, doit revêtir certaines qualités. Il doit être libre, volontaire, clair et informé ». Il est l'affaire du requérant et l'avocat ne peut forcer son client par des promesses ou des menaces à admettre une faute qu'il ne veut pas confesser ou qu'il n'a pas commise. Il faut néanmoins faire preuve de prudence car la frontière entre l'opinion juridique et la contrainte peut parfois être difficile à tracer.
[36] Le fardeau de la démonstration qu'un aveu de culpabilité fut illégalement donné et devrait être retiré appartient au requérant et il sera plus lourd s'il était représenté par avocat.
[37] En somme, c'est sur la base d'un examen de l'ensemble du dossier et des circonstances qu'un juge déterminera si le plaidoyer est non équivoque, volontaire et surtout informé. Au regard de ce dernier critère, Clayton C. Ruby écrit :
Where counsel’s assessment of the likelihood of success was flawed, for example, following counsel’s advice to plead guilty because there was no valid defence is a factor militating in favour of permission to change a plea as being invalid.
mercredi 21 avril 2010
Tableau de peines infligées pour une tentative de meurtre commise dans un contexte conjugal
Roy c. R., 2010 QCCA 16 (CanLII)
[73] Il peut être intéressant de brosser un tableau de peines infligées pour une tentative de meurtre commise dans un contexte conjugal afin de voir si la peine imposée à l'appelant se situe à l'intérieur de l'éventail des peines généralement imposées.
1) Des peines de plus courte durée (sept ans et moins)
[74] Dans R. c. Boutin (1993), 57 Q.A.C. 43 (C.A. Qué.), les faits peuvent se résumer ainsi : après l’annonce du divorce, l’accusé a vécu un épisode dépressif durant lequel il s’est nourri presque exclusivement de bières et a peu dormi. Il a prémédité son crime, puisqu’il a annoncé à son beau-frère son intention trois jours avant de passer à l’acte et il a usé d’un stratagème pour que sa conjointe vienne le rejoindre au domicile conjugal qu’elle avait quitté. Il l’a alors poignardée. Leur fille de 16 ans est intervenue physiquement et elle a réussi à le désarmer. L’accusé a plaidé coupable, il a exprimé des regrets et il a participé à des thérapies en centre de détention. Il a été toutefois mis en preuve que, lors de la relation conjugale, l’appelant était excessivement jaloux et se livrait à de la violence psychologique à l’endroit de la victime. Les séquelles pour la victime et l’adolescente sont nombreuses et importantes. Le juge de première instance a imposé neuf ans d’emprisonnement, mais la Cour d’appel a réduit la peine à cinq ans, vu la possibilité de réhabilitation.
[75] Dans R. c. Rousselle, AZ-91031139 (C.Q. crim. & pén.), une peine d’emprisonnement de 4 ans a été imposée à un accusé qui, après avoir obtenu un congé spécial du centre de détention, n'a pas réintégré l’établissement, s’est rendu dans sa famille au Nouveau-Brunswick afin de récupérer une arme de chasse semi-automatique dans le but de tuer son ex-conjointe et ensuite de s’enlever la vie. Il se rend à l’endroit où elle travaille à Montréal, mais, constatant que le chargeur de son arme est endommagé et craignant de blesser des tiers, il décide d’aller à la résidence de son ex-conjointe. Il s’y cache toute la nuit et au moment où la victime quitte les lieux avec son père pour aller travailler, il s’avance vers le véhicule et il fait feu. Il rate toutefois sa cible et il est maîtrisé. Personne n'est blessé. Le juge a imposé quatre ans d’emprisonnement après avoir noté la présence d'antécédents judiciaires, tous reliés à des épisodes de violence à l'endroit de la même victime après qu’elle eut mis un terme à leur relation, l’absence de problème de santé mentale, le plaidoyer de culpabilité, la possibilité de réhabilitation et l’absence de blessures à la suite de la tentative de meurtre.
[76] Dans R. c. Beaulieu, AZ-50235551 (C.Q. crim. & pén.), une peine de cinq ans d'emprisonnement a été imposée à l’accusé qui avait tenté de tuer son ex-conjointe avec une arme à feu et qui avait également utilisé une arme lors de sa tentative de causer des lésions corporelles à l’homme qui se trouvait avec elle. Après qu’elle eut mis un terme à leur relation, l’accusé a avisé son ex-conjointe qu’il allait la tuer. Il s’est présenté chez elle un soir, est entré dans la chambre à coucher et il a fait feu en sa direction (mais a raté la cible) et il a ensuite pointé l’arme en direction de l’homme qui s’y trouvait. Une altercation s’en est suivie et il a finalement infligé des lésions corporelles à ce dernier. Lorsqu’il a été retrouvé par les policiers, l’accusé avait fait une tentative de suicide qui lui a laissé une sérieuse blessure au visage. Le juge a imposé la peine en retenant comme élément significatif la tentative de suicide et le plaidoyer de culpabilité de même que la présence de nombreuses condamnations et l’absence de remords.
[77] Dans R. c. A.Y., [2007] J.Q. n° 609 (C.Q.), le juge impose une peine équivalant à six ans d’emprisonnement (en tenant compte de la détention provisoire) à un accusé non criminalisé qui a poignardé sa conjointe à sept reprises et leur enfant de quinze mois à deux reprises, et ce, sans raison apparente. Le juge considère comme facteurs atténuants l’absence de condamnation antérieure, les regrets (dont la sincérité est toutefois douteuse) et le fait que l'accusé n’était pas dans un état normal lors de la perpétration du crime (bien qu’il ne soit pas question de problèmes de santé mentale). Pour ce qui est des facteurs aggravants, le juge retient le contexte conjugal, la violence envers un enfant, l’abus de confiance, l’utilisation d’une arme, l’acharnement, son inquiétude quant au risque de récidive et les séquelles subies par les victimes.
[78] Dans R. c. Gauthier, [2000] J.Q. n° 885 (C.A.), la Cour a accueilli l’appel de la poursuivante contre une peine d’emprisonnement dans la collectivité de deux ans moins un jour imposée à un contrevenant qui avait tenté de tuer son épouse à l’occasion d’une procédure de divorce se tenant au palais de justice de Montréal. Il faut souligner que l’accusé avait attaqué au couteau un avocat et qu’il avait blessé deux agents de la paix lors de cet événement. Il avait également menacé de se suicider. Les séquelles subies par les victimes sont quelques cicatrices et un sentiment de peur. L’accusé était dépressif et le risque de récidive était faible. Vu l’endroit où les infractions ont été commises et leur nature, la Cour intervient, estimant qu’une peine d’emprisonnement totalisant quatre ans était appropriée.
[79] On constate donc que, au Québec, des peines variant entre quatre et six ans d'emprisonnement ont souvent été infligées pour des tentatives de meurtre commises dans des circonstances qui, tout en étant sérieuses, ont toutefois un niveau de gravité inférieur à celui du présent dossier. La situation est analogue dans les autres provinces[3], quoique des peines de sept ans ont aussi été imposées, notamment dans R. v. Sugar, [1982] B.C.J. No 1270 (B.C.C.A.), R. v. Stedingh, [1983] N.S.J. No 393 (N.S.C.A.), R. v. Fitzpratick, [1991] B.C.J. No 3586 (B.C.C.A.), R. v. Glen, [1983] O.J. No 179 (Ont.C.A.) et R. v. Chown, [1977] N.B.J. No 173 (N.B.C.A.). Je signale que, dans cette dernière affaire, l'accusé a frappé son épouse à 17 reprises avec son couteau et l'a abandonnée à son sort avec la lame enfoncée dans le cou. Son épouse voulait divorcer.
2) Des peines de durée intermédiaire (huit à quatorze ans)
[80] En 1996, la Cour d’appel de l’Ontario a entendu conjointement deux appels d'accusés qui avaient tous deux tenté de tuer leurs épouses. Il s'agit de R. v. Edwards; R. v. Levo 1996 CanLII 1522 (ON C.A.), (1996), 88 O.A.C. 217. Il convient d’examiner les faits de chaque affaire.
[81] Dans R. v. Edwards, l’accusé avait vécu en union de fait avec la victime pendant quelques mois et celle-ci avait mis fin à la relation après qu’il l’eut agressée physiquement à plusieurs occasions. La relation a toutefois continué. La victime a invité l’accusé à venir célébrer avec elle et son fils de sept ans la fête de Noël. Vers la fin de la soirée, l’accusé a fait des avances à la victime, mais elle a refusé. Il a alors quitté les lieux, prétextant devoir aller chercher un autre cadeau, mais il est plutôt revenu avec un pistolet et il a fait feu en sa direction à quatre reprises, l’atteignant à la tête et à la poitrine. L’accusé était âgé de 40 ans, avait un problème psychiatrique et avait vécu une enfance difficile. Il a plaidé coupable et exprimait des remords. La Cour d'appel a confirmé une peine de 11 ans d’emprisonnement.
[82] Dans R. v. Levo, l’accusé était marié avec la victime depuis 1971 et ils ont eu deux enfants. La relation battait de l’aile et la victime a indiqué à l’accusé qu’elle voulait se séparer. En mai 1992, après avoir consommé de l’alcool, l’accusé est allé à une fête à laquelle assistait la victime. Il l'a invitée à danser, mais elle a refusé tout en acceptant l'invitation d'un autre homme avec qui l’accusé soupçonnait qu'elle entretenait une liaison. Il a alors fait feu sur la victime, l'atteignant au cou, et ce, devant leurs deux enfants. À titre de facteurs aggravants, le juge de première instance a retenu que les enfants souffraient de séquelles psychologiques importantes et a souligné que la victime était paralysée à partir du cou. En revanche, l’accusé avait plaidé coupable, il souffrait d’alcoolisme chronique, avait un problème de personnalité et les probabilités de réhabilitation étaient favorables. L’accusé était âgé de 50 ans. La Cour d’appel a maintenu la peine d’emprisonnement de 12 ans.
[83] Dans R. v. Cormier, 1999 CanLII 13118 (NB C.A.), [1999] N.B.J. No 83, 140 C.C.C. (3d) 87 (N.B.C.A.), une peine de neuf ans, avec obligation d'en purger la moitié avant l'admissibilité à la libération conditionnelle, a été imposée à un accusé qui a tranché la gorge de son ex-amie de cœur, l'a traînée dans la rue et a continué à l'agresser en la poursuivant alors qu'elle tentait de s'enfuir.
[84] Dans R. v. Young, 2004 MBCA 69 (CanLII), 2004 MBCA 69, la Cour d'appel du Manitoba souligne qu’une peine d’emprisonnement de huit à dix ans est appropriée pour un contrevenant qui a tenté de commettre le meurtre de son ex-conjointe avec un couteau, de manière très brutale et violente, alors qu’il souffrait de bipolarité.
[85] Récemment, dans R. v. Al-Rabie, [2009] N.S.J. No 220, la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse a refusé d’accorder une demande de permission d’appeler hors délai présentée par l’accusé. Celui-ci avait tenté de tuer son épouse en l’étouffant et en la jetant dans les escaliers. Il a plaidé coupable et le juge d'instance a imposé une peine de huit ans d’emprisonnement, laquelle se situe, de l’avis de la Cour d'appel, dans la fourchette habituelle pour ce genre d’infraction (la Cour a alors appliqué l’arrêt Bryan, cité plus loin).
[86] Dans R. v. Quance, 2000 CanLII 5741 (ON C.A.), [2000] O.J. No 2243, 146 C.C.C. (3d) 153 (Ont.C.A.), l'accusé a imbibé d'essence son ex-épouse et l'ami de cœur de cette dernière avant de mettre le feu, ce qui a entraîné des douleurs atroces et des séquelles permanentes. La peine fut de 14 ans d'emprisonnement.
[87] Dans R. v. Brown, 2001 NFCA 8 (CanLII), (2001), 152 C.C.C. (3d) 26 (N.L. C.A.), la Cour d'appel a réduit la peine d'emprisonnement à perpétuité à une peine de 14 ans malgré la violence de l'attaque, que certains pourraient qualifier d'extrême. L'accusé a frappé son ex-amie à 22 reprises avec un couteau, lors d'une agression préméditée, et lui a causé des blessures à la tête, au visage et à l'abdomen qui ont entraîné de graves séquelles permanentes. La Cour a mentionné que l'emprisonnement à perpétuité est généralement limité aux cas de violence extrême ou encore lorsque le délinquant a des antécédents de violence, manifeste peu de remords et a un potentiel élevé de récidive.
[88] Enfin, je mentionne, à titre d'exemples, certaines décisions récentes de tribunaux canadiens : R. v. Ruso, 2007 CarswellOnt 4528 (Ont. S.C.J.); R. v. McDonald, 2007 CarswellOnt 6241 (Ont. S.C.J.); R. v. G. (K.), 2007 CarswellOnt 546 (Ont. S.C.J.); R. v. Cuthbert, 2007 BCCA 585 (CanLII), 54 C.R. (6th) 99, 2007 BCCA 585 (B.C. C.A.), tels que résumés dans Nadin-Davis and Sproule, Canadian Sentencing Digest, Toronto, Thomson Carswell, 2008, aux p. 74.1 à 74.4 :
R. v. Ruso
The accused, a 57-year-old first offender, pleaded guilty to the attempted murder of his wife of 34 years. He was convinced that the victim was seeing another man and insisted that she provide him with the man's name and telephone number. When she refused, he struck her in the neck with an axe. While she was bleeding and unconscious on the floor, he attempted to cave her head in with a hammer, striking her three or four times in the face and head area. He left her for dead and reported the "murder". The victim suffered serious, permanent and disfiguring injuries. Before the offence, the victim had left the family home in fear for her life after being threatened by the accused. She had smuggled out the accused's shotgun and taken it to the local police station. She was attacked when she returned to the home, against the advice of the police, to feed her physically challenged daughter. At the time of the offence, the accused was suffering from severe depression and anxiety and had taken a .5 milligram dose of Xanax, which acted as a disinhibitor. He waived the preliminary hearing and spent 29 months in pre-trial custody. The aggravating factors included the domestic nature of the offence, the prior threats, the brutality and cold-bloodedness of the offence itself, the use of two separate weapons the extent of the victim's injuries and the devastating emotional impact upon the victim. McMahon J. found that the appropriate sentence was 10 years' imprisonment. The accused was given 58 months' credit for pre-trial custody and was sentenced to an additional 5 years and 2 months' imprisonment.
R. v. McDonald
The accused pleaded guilty to one count of attempting to murder C, the woman with whom he had lived for ten years, and one count of attempting to murder C's 31-year-old daughter, who was living with the couple at the time. The accused was depressed and suicidal and decided to kill the two women and then kill himself. Using the claw end of a carpenter's hammer, he struck the sleeping daughter four to six times in the head and face, then went to C's bedroom and struck her about the head. She woke up and tried to fight back, and then fled the house and called 911. The daughter was in a coma and on life support for three days. She was permanently disfigured and suffered permanent cognitive impairment. C had a fractured skull and was permanently disfigured but did not lose any cognitive ability. The accused had significant gambling debts at the time of the offence, his mother's health was deterioration, and his relationship with C was poor. He was unable to explain why he tried to kill her daughter. He was not suffering from any mental illness and was not under the influence of drugs or alcohol at the time of the offence. The accused was 42 years old at the time of the offences and had no criminal record. He was steadily employed and was well regarded by his employer. He was an active volunteer in his church. He expressed genuine remorse. While the accused and C had been occupying separate bedrooms for some years, the relationship was domestic. That was an aggravating factor. McMahon J. gave the accused credit on a 2:1 basis for 1 year's pre-trial custody and sentenced him to an additional 9 years' imprisonment on each count, concurrent.
R. v. G. (K.)
The accused pleaded guilty after a preliminary inquiry to the attempted murder of his wife S and uttering death threats to his sister-in-law R. He and S were separated at the time of the offences, and the accused believed that S was seeing another man. S, accompanied by the couple's two young children, picked up the accused to go grocery shopping. The accused told S to pull into a parking lot, where they started arguing. The accused struck S about the face with great force. S got out of the car, and the accused knocked her down with the car and accelerated over her, trapping her in the undercarriage. She was dragged for 82 feet before she was thrown clear. The accused left her in the parking lot, put the children in a taxi, abandoned the car and ran away. He later called 911 and told the operator that he had a machine gun and intended to use it to kill S's family, including R. S's injuries were extensive and life-threatening. She had numerous surgeries, and faced a lifetime of medical interventions. The accused was from Guyana and did not have legal status in Canada. He had a criminal record in the United States which included convictions for attempted robbery in the first degree, burglary in the second degree and possession of a controlled substance. Kiteley J. sentenced the accused to 14 years' imprisonment for attempted murder, less a credit of 28 months for pre-trial custody, and to 9 months consecutive for uttering a death threat.
R. v. Cuthbert
The accused was convicted after a jury trial of the attempted murder of his ex-wife C, discharging a firearm with the intent to wound C's common law husband D, and possession of a sawed-off shotgun for a purpose dangerous to the public peace. The offences took place in the context of a dispute over custody of the daughter of the accused and C, who had been raised by the accused for most of her life. When he was served with legal papers with a covering letter from C informing him that their daughter would not be returning to live with him until he had dealt with his anger, he purchased a shotgun, sawed off the barrel, and drove to C's residence. He forced his way in and threatened C. D intervened and was shot, suffering severe injuries. The accused tried to fire the shotgun at C, but was unable to rechamber a fresh round. The accused was 46 years old at the time of sentencing. He had a degree in electronics and had been steadily employer throughout his adult life. He had no criminal record. The trial judge found that the appropriate global sentence was 12 years' imprisonment. He gave the accused 2 years credit for pre-trial custody and sentenced him to an additional 10 years' imprisonment for discharging a firearm, 10 years concurrent for attempted murder and 3 years concurrent for possession of a weapon for a purpose dangerous to the public peace. On appeal by the accused, the Court of Appeal (Finch C.J.B.C.; Levine and Lowry JJ.A. concurring) affirmed the sentence. The offences were not the result of momentary inattention or an error in judgment. The jury concluded beyond a reasonable doubt that he was not suffering from any mental incapacity at the time of the offences. Rather, he was motivated by hatred of C. The sentence was required to reflect both the gravity of the offences and the accused's degree of responsibility.
[89] Des peines allant de huit à quatorze ans d'emprisonnement paraissent donc appropriées dans des cas où la violence est particulièrement brutale, malgré la présence de facteurs atténuants et même en l'absence de condamnations antérieures. Je note que plusieurs de ces affaires s'apparentent au présent appel et certaines paraissent même plus graves.
3) Des peines d'emprisonnement de plus longue durée (quinze ans et plus)
[90] Les jugements cités par le juge de première instance (Tan, Mesgun, Zavala-Juarez et Lieug) permettent de voir que les peines dépassant 15 ans d’emprisonnement sont réservées à des affaires où des circonstances aggravantes particulières sont présentes, comme : la violence répétée avant l'agression, les menaces antérieures, le harcèlement répétitif, le caractère planifié, prémédité et orchestré de l'agression, la brutalité extrême, l'absence de remords, une agression que l'accusé fait intentionnellement durer, une tentative de camouflage, la perpétration d’infractions connexes (telles l’agression sexuelle, la séquestration et l'introduction par effraction) ou le risque élevé de récidive, des facteurs qui, outre la brutalité de l'agression et une certaine forme de préméditation, sont ici inexistants. D'autres décisions confirment ce point de vue.
[91] Ainsi, dans R. v. Bryan, [2008] NSCA 119, la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse a confirmé une peine de 15 ans d’emprisonnement imposée à un contrevenant qui avait tenté de tuer son épouse enceinte de 4 mois en la frappant 15 fois avec une épée. Il s’agissait d’un individu non criminalisé qui souffrait d’un trouble narcissique de la personnalité. Il avait inscrit dans son journal intime son désir de tuer sa conjointe et l’enfant qu’elle portait et de s’enlever la vie ensuite. C’est un voisin, témoin de l’attaque, qui a alerté les secours. La victime a perdu son enfant, a souffert de plusieurs incapacités et a subi 14 interventions chirurgicales. Elle requérait ensuite une assistance permanente. L'accusé a plaidé coupable. La Cour d'appel estime que la peine appropriée pour une tentative de meurtre à l’égard d’un conjoint peut varier entre 8 ans d'emprisonnement et la perpétuité. Dans ce cas, elle conclut que le juge d’instance n’a pas commis d’erreur en accordant peu de poids à l’absence de condamnation antérieure et au plaidoyer de culpabilité à la première occasion. De plus, le juge d’instance était justifié de faire primer les objectifs de dénonciation et de dissuasion. L'appel a été rejeté.
[92] Dans R. v. Nippard reflex, (1993), 83 C.C.C. (3d) 410 (N.L.C.A.), l'emprisonnement à perpétuité a été imposé dans les circonstances suivantes. L'accusé a attaqué son épouse et un homme qui l'accompagnait et qu'il croyait être son amant. Il a frappé celui-ci d'un coup de couteau à l'estomac et s'en est ensuite pris à son épouse en la retenant d'une main et en la frappant de l'autre avec son arme à 33 reprises au visage, au dos, sur les bras, à l'abdomen et au thorax, tout en lui disant qu'il la tuerait. L'accusé avait une longue histoire de comportement de violence et d'humiliation envers son épouse, particulièrement durant les 5 années précédant l'agression. Ses antécédents judiciaires étaient récents (au cours de l'année de l'agression) et étaient tous reliés à son épouse : à deux reprises, menaces de mort envers celle-ci; pointer une arme à feu en sa direction; non-respect d'une ordonnance de probation en la menaçant. Deux psychiatres ont témoigné que l'accusé souffrait de jalousie paranoïde, qui pouvait le rendre extrêmement violent, et qu'il n'existait pas de traitement pour ce trouble de la personnalité. Disant craindre pour la sécurité de la victime et du public en général, la Cour d'appel cite alors avec approbation la Cour d'appel de l'Ontario dans R. v. Hill (1974), 15 C.C.C. (2d) 145, aux p. 147-148 :
When an accused has been convicted of a serious crime in itself calling for a substantial sentence and when he suffers from some mental or personality disorder rendering him a danger to the community but not subjecting him to confinement in a mental institution and when it is uncertain when, if ever, the accused will be cured of his affliction, in my opinion the appropriate sentence is one of life. Such a sentence, in such circumstances, amounts to an indefinite sentence under which the parole board can release him to the community when it is satisfied, upon adequate psychiatric examination, it is in the interest of the accused and of the community for him to return to society.
[93] Dans Sentencing, précité à la note 3, l'auteur Clayton C. Ruby fait état, à la p. 794, paragr. 23.120, de R. v. Hurley, jugement inédit du 8 mai 1995 (Cour de l'Ontario, division générale), dans lequel l'emprisonnement à perpétuité a été infligé à un accusé qui a, brutalement et de manière dégradante, attaqué son amie après l'avoir violentée de façon répétée durant une période de plusieurs mois avant l'attaque.
[73] Il peut être intéressant de brosser un tableau de peines infligées pour une tentative de meurtre commise dans un contexte conjugal afin de voir si la peine imposée à l'appelant se situe à l'intérieur de l'éventail des peines généralement imposées.
1) Des peines de plus courte durée (sept ans et moins)
[74] Dans R. c. Boutin (1993), 57 Q.A.C. 43 (C.A. Qué.), les faits peuvent se résumer ainsi : après l’annonce du divorce, l’accusé a vécu un épisode dépressif durant lequel il s’est nourri presque exclusivement de bières et a peu dormi. Il a prémédité son crime, puisqu’il a annoncé à son beau-frère son intention trois jours avant de passer à l’acte et il a usé d’un stratagème pour que sa conjointe vienne le rejoindre au domicile conjugal qu’elle avait quitté. Il l’a alors poignardée. Leur fille de 16 ans est intervenue physiquement et elle a réussi à le désarmer. L’accusé a plaidé coupable, il a exprimé des regrets et il a participé à des thérapies en centre de détention. Il a été toutefois mis en preuve que, lors de la relation conjugale, l’appelant était excessivement jaloux et se livrait à de la violence psychologique à l’endroit de la victime. Les séquelles pour la victime et l’adolescente sont nombreuses et importantes. Le juge de première instance a imposé neuf ans d’emprisonnement, mais la Cour d’appel a réduit la peine à cinq ans, vu la possibilité de réhabilitation.
[75] Dans R. c. Rousselle, AZ-91031139 (C.Q. crim. & pén.), une peine d’emprisonnement de 4 ans a été imposée à un accusé qui, après avoir obtenu un congé spécial du centre de détention, n'a pas réintégré l’établissement, s’est rendu dans sa famille au Nouveau-Brunswick afin de récupérer une arme de chasse semi-automatique dans le but de tuer son ex-conjointe et ensuite de s’enlever la vie. Il se rend à l’endroit où elle travaille à Montréal, mais, constatant que le chargeur de son arme est endommagé et craignant de blesser des tiers, il décide d’aller à la résidence de son ex-conjointe. Il s’y cache toute la nuit et au moment où la victime quitte les lieux avec son père pour aller travailler, il s’avance vers le véhicule et il fait feu. Il rate toutefois sa cible et il est maîtrisé. Personne n'est blessé. Le juge a imposé quatre ans d’emprisonnement après avoir noté la présence d'antécédents judiciaires, tous reliés à des épisodes de violence à l'endroit de la même victime après qu’elle eut mis un terme à leur relation, l’absence de problème de santé mentale, le plaidoyer de culpabilité, la possibilité de réhabilitation et l’absence de blessures à la suite de la tentative de meurtre.
[76] Dans R. c. Beaulieu, AZ-50235551 (C.Q. crim. & pén.), une peine de cinq ans d'emprisonnement a été imposée à l’accusé qui avait tenté de tuer son ex-conjointe avec une arme à feu et qui avait également utilisé une arme lors de sa tentative de causer des lésions corporelles à l’homme qui se trouvait avec elle. Après qu’elle eut mis un terme à leur relation, l’accusé a avisé son ex-conjointe qu’il allait la tuer. Il s’est présenté chez elle un soir, est entré dans la chambre à coucher et il a fait feu en sa direction (mais a raté la cible) et il a ensuite pointé l’arme en direction de l’homme qui s’y trouvait. Une altercation s’en est suivie et il a finalement infligé des lésions corporelles à ce dernier. Lorsqu’il a été retrouvé par les policiers, l’accusé avait fait une tentative de suicide qui lui a laissé une sérieuse blessure au visage. Le juge a imposé la peine en retenant comme élément significatif la tentative de suicide et le plaidoyer de culpabilité de même que la présence de nombreuses condamnations et l’absence de remords.
[77] Dans R. c. A.Y., [2007] J.Q. n° 609 (C.Q.), le juge impose une peine équivalant à six ans d’emprisonnement (en tenant compte de la détention provisoire) à un accusé non criminalisé qui a poignardé sa conjointe à sept reprises et leur enfant de quinze mois à deux reprises, et ce, sans raison apparente. Le juge considère comme facteurs atténuants l’absence de condamnation antérieure, les regrets (dont la sincérité est toutefois douteuse) et le fait que l'accusé n’était pas dans un état normal lors de la perpétration du crime (bien qu’il ne soit pas question de problèmes de santé mentale). Pour ce qui est des facteurs aggravants, le juge retient le contexte conjugal, la violence envers un enfant, l’abus de confiance, l’utilisation d’une arme, l’acharnement, son inquiétude quant au risque de récidive et les séquelles subies par les victimes.
[78] Dans R. c. Gauthier, [2000] J.Q. n° 885 (C.A.), la Cour a accueilli l’appel de la poursuivante contre une peine d’emprisonnement dans la collectivité de deux ans moins un jour imposée à un contrevenant qui avait tenté de tuer son épouse à l’occasion d’une procédure de divorce se tenant au palais de justice de Montréal. Il faut souligner que l’accusé avait attaqué au couteau un avocat et qu’il avait blessé deux agents de la paix lors de cet événement. Il avait également menacé de se suicider. Les séquelles subies par les victimes sont quelques cicatrices et un sentiment de peur. L’accusé était dépressif et le risque de récidive était faible. Vu l’endroit où les infractions ont été commises et leur nature, la Cour intervient, estimant qu’une peine d’emprisonnement totalisant quatre ans était appropriée.
[79] On constate donc que, au Québec, des peines variant entre quatre et six ans d'emprisonnement ont souvent été infligées pour des tentatives de meurtre commises dans des circonstances qui, tout en étant sérieuses, ont toutefois un niveau de gravité inférieur à celui du présent dossier. La situation est analogue dans les autres provinces[3], quoique des peines de sept ans ont aussi été imposées, notamment dans R. v. Sugar, [1982] B.C.J. No 1270 (B.C.C.A.), R. v. Stedingh, [1983] N.S.J. No 393 (N.S.C.A.), R. v. Fitzpratick, [1991] B.C.J. No 3586 (B.C.C.A.), R. v. Glen, [1983] O.J. No 179 (Ont.C.A.) et R. v. Chown, [1977] N.B.J. No 173 (N.B.C.A.). Je signale que, dans cette dernière affaire, l'accusé a frappé son épouse à 17 reprises avec son couteau et l'a abandonnée à son sort avec la lame enfoncée dans le cou. Son épouse voulait divorcer.
2) Des peines de durée intermédiaire (huit à quatorze ans)
[80] En 1996, la Cour d’appel de l’Ontario a entendu conjointement deux appels d'accusés qui avaient tous deux tenté de tuer leurs épouses. Il s'agit de R. v. Edwards; R. v. Levo 1996 CanLII 1522 (ON C.A.), (1996), 88 O.A.C. 217. Il convient d’examiner les faits de chaque affaire.
[81] Dans R. v. Edwards, l’accusé avait vécu en union de fait avec la victime pendant quelques mois et celle-ci avait mis fin à la relation après qu’il l’eut agressée physiquement à plusieurs occasions. La relation a toutefois continué. La victime a invité l’accusé à venir célébrer avec elle et son fils de sept ans la fête de Noël. Vers la fin de la soirée, l’accusé a fait des avances à la victime, mais elle a refusé. Il a alors quitté les lieux, prétextant devoir aller chercher un autre cadeau, mais il est plutôt revenu avec un pistolet et il a fait feu en sa direction à quatre reprises, l’atteignant à la tête et à la poitrine. L’accusé était âgé de 40 ans, avait un problème psychiatrique et avait vécu une enfance difficile. Il a plaidé coupable et exprimait des remords. La Cour d'appel a confirmé une peine de 11 ans d’emprisonnement.
[82] Dans R. v. Levo, l’accusé était marié avec la victime depuis 1971 et ils ont eu deux enfants. La relation battait de l’aile et la victime a indiqué à l’accusé qu’elle voulait se séparer. En mai 1992, après avoir consommé de l’alcool, l’accusé est allé à une fête à laquelle assistait la victime. Il l'a invitée à danser, mais elle a refusé tout en acceptant l'invitation d'un autre homme avec qui l’accusé soupçonnait qu'elle entretenait une liaison. Il a alors fait feu sur la victime, l'atteignant au cou, et ce, devant leurs deux enfants. À titre de facteurs aggravants, le juge de première instance a retenu que les enfants souffraient de séquelles psychologiques importantes et a souligné que la victime était paralysée à partir du cou. En revanche, l’accusé avait plaidé coupable, il souffrait d’alcoolisme chronique, avait un problème de personnalité et les probabilités de réhabilitation étaient favorables. L’accusé était âgé de 50 ans. La Cour d’appel a maintenu la peine d’emprisonnement de 12 ans.
[83] Dans R. v. Cormier, 1999 CanLII 13118 (NB C.A.), [1999] N.B.J. No 83, 140 C.C.C. (3d) 87 (N.B.C.A.), une peine de neuf ans, avec obligation d'en purger la moitié avant l'admissibilité à la libération conditionnelle, a été imposée à un accusé qui a tranché la gorge de son ex-amie de cœur, l'a traînée dans la rue et a continué à l'agresser en la poursuivant alors qu'elle tentait de s'enfuir.
[84] Dans R. v. Young, 2004 MBCA 69 (CanLII), 2004 MBCA 69, la Cour d'appel du Manitoba souligne qu’une peine d’emprisonnement de huit à dix ans est appropriée pour un contrevenant qui a tenté de commettre le meurtre de son ex-conjointe avec un couteau, de manière très brutale et violente, alors qu’il souffrait de bipolarité.
[85] Récemment, dans R. v. Al-Rabie, [2009] N.S.J. No 220, la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse a refusé d’accorder une demande de permission d’appeler hors délai présentée par l’accusé. Celui-ci avait tenté de tuer son épouse en l’étouffant et en la jetant dans les escaliers. Il a plaidé coupable et le juge d'instance a imposé une peine de huit ans d’emprisonnement, laquelle se situe, de l’avis de la Cour d'appel, dans la fourchette habituelle pour ce genre d’infraction (la Cour a alors appliqué l’arrêt Bryan, cité plus loin).
[86] Dans R. v. Quance, 2000 CanLII 5741 (ON C.A.), [2000] O.J. No 2243, 146 C.C.C. (3d) 153 (Ont.C.A.), l'accusé a imbibé d'essence son ex-épouse et l'ami de cœur de cette dernière avant de mettre le feu, ce qui a entraîné des douleurs atroces et des séquelles permanentes. La peine fut de 14 ans d'emprisonnement.
[87] Dans R. v. Brown, 2001 NFCA 8 (CanLII), (2001), 152 C.C.C. (3d) 26 (N.L. C.A.), la Cour d'appel a réduit la peine d'emprisonnement à perpétuité à une peine de 14 ans malgré la violence de l'attaque, que certains pourraient qualifier d'extrême. L'accusé a frappé son ex-amie à 22 reprises avec un couteau, lors d'une agression préméditée, et lui a causé des blessures à la tête, au visage et à l'abdomen qui ont entraîné de graves séquelles permanentes. La Cour a mentionné que l'emprisonnement à perpétuité est généralement limité aux cas de violence extrême ou encore lorsque le délinquant a des antécédents de violence, manifeste peu de remords et a un potentiel élevé de récidive.
[88] Enfin, je mentionne, à titre d'exemples, certaines décisions récentes de tribunaux canadiens : R. v. Ruso, 2007 CarswellOnt 4528 (Ont. S.C.J.); R. v. McDonald, 2007 CarswellOnt 6241 (Ont. S.C.J.); R. v. G. (K.), 2007 CarswellOnt 546 (Ont. S.C.J.); R. v. Cuthbert, 2007 BCCA 585 (CanLII), 54 C.R. (6th) 99, 2007 BCCA 585 (B.C. C.A.), tels que résumés dans Nadin-Davis and Sproule, Canadian Sentencing Digest, Toronto, Thomson Carswell, 2008, aux p. 74.1 à 74.4 :
R. v. Ruso
The accused, a 57-year-old first offender, pleaded guilty to the attempted murder of his wife of 34 years. He was convinced that the victim was seeing another man and insisted that she provide him with the man's name and telephone number. When she refused, he struck her in the neck with an axe. While she was bleeding and unconscious on the floor, he attempted to cave her head in with a hammer, striking her three or four times in the face and head area. He left her for dead and reported the "murder". The victim suffered serious, permanent and disfiguring injuries. Before the offence, the victim had left the family home in fear for her life after being threatened by the accused. She had smuggled out the accused's shotgun and taken it to the local police station. She was attacked when she returned to the home, against the advice of the police, to feed her physically challenged daughter. At the time of the offence, the accused was suffering from severe depression and anxiety and had taken a .5 milligram dose of Xanax, which acted as a disinhibitor. He waived the preliminary hearing and spent 29 months in pre-trial custody. The aggravating factors included the domestic nature of the offence, the prior threats, the brutality and cold-bloodedness of the offence itself, the use of two separate weapons the extent of the victim's injuries and the devastating emotional impact upon the victim. McMahon J. found that the appropriate sentence was 10 years' imprisonment. The accused was given 58 months' credit for pre-trial custody and was sentenced to an additional 5 years and 2 months' imprisonment.
R. v. McDonald
The accused pleaded guilty to one count of attempting to murder C, the woman with whom he had lived for ten years, and one count of attempting to murder C's 31-year-old daughter, who was living with the couple at the time. The accused was depressed and suicidal and decided to kill the two women and then kill himself. Using the claw end of a carpenter's hammer, he struck the sleeping daughter four to six times in the head and face, then went to C's bedroom and struck her about the head. She woke up and tried to fight back, and then fled the house and called 911. The daughter was in a coma and on life support for three days. She was permanently disfigured and suffered permanent cognitive impairment. C had a fractured skull and was permanently disfigured but did not lose any cognitive ability. The accused had significant gambling debts at the time of the offence, his mother's health was deterioration, and his relationship with C was poor. He was unable to explain why he tried to kill her daughter. He was not suffering from any mental illness and was not under the influence of drugs or alcohol at the time of the offence. The accused was 42 years old at the time of the offences and had no criminal record. He was steadily employed and was well regarded by his employer. He was an active volunteer in his church. He expressed genuine remorse. While the accused and C had been occupying separate bedrooms for some years, the relationship was domestic. That was an aggravating factor. McMahon J. gave the accused credit on a 2:1 basis for 1 year's pre-trial custody and sentenced him to an additional 9 years' imprisonment on each count, concurrent.
R. v. G. (K.)
The accused pleaded guilty after a preliminary inquiry to the attempted murder of his wife S and uttering death threats to his sister-in-law R. He and S were separated at the time of the offences, and the accused believed that S was seeing another man. S, accompanied by the couple's two young children, picked up the accused to go grocery shopping. The accused told S to pull into a parking lot, where they started arguing. The accused struck S about the face with great force. S got out of the car, and the accused knocked her down with the car and accelerated over her, trapping her in the undercarriage. She was dragged for 82 feet before she was thrown clear. The accused left her in the parking lot, put the children in a taxi, abandoned the car and ran away. He later called 911 and told the operator that he had a machine gun and intended to use it to kill S's family, including R. S's injuries were extensive and life-threatening. She had numerous surgeries, and faced a lifetime of medical interventions. The accused was from Guyana and did not have legal status in Canada. He had a criminal record in the United States which included convictions for attempted robbery in the first degree, burglary in the second degree and possession of a controlled substance. Kiteley J. sentenced the accused to 14 years' imprisonment for attempted murder, less a credit of 28 months for pre-trial custody, and to 9 months consecutive for uttering a death threat.
R. v. Cuthbert
The accused was convicted after a jury trial of the attempted murder of his ex-wife C, discharging a firearm with the intent to wound C's common law husband D, and possession of a sawed-off shotgun for a purpose dangerous to the public peace. The offences took place in the context of a dispute over custody of the daughter of the accused and C, who had been raised by the accused for most of her life. When he was served with legal papers with a covering letter from C informing him that their daughter would not be returning to live with him until he had dealt with his anger, he purchased a shotgun, sawed off the barrel, and drove to C's residence. He forced his way in and threatened C. D intervened and was shot, suffering severe injuries. The accused tried to fire the shotgun at C, but was unable to rechamber a fresh round. The accused was 46 years old at the time of sentencing. He had a degree in electronics and had been steadily employer throughout his adult life. He had no criminal record. The trial judge found that the appropriate global sentence was 12 years' imprisonment. He gave the accused 2 years credit for pre-trial custody and sentenced him to an additional 10 years' imprisonment for discharging a firearm, 10 years concurrent for attempted murder and 3 years concurrent for possession of a weapon for a purpose dangerous to the public peace. On appeal by the accused, the Court of Appeal (Finch C.J.B.C.; Levine and Lowry JJ.A. concurring) affirmed the sentence. The offences were not the result of momentary inattention or an error in judgment. The jury concluded beyond a reasonable doubt that he was not suffering from any mental incapacity at the time of the offences. Rather, he was motivated by hatred of C. The sentence was required to reflect both the gravity of the offences and the accused's degree of responsibility.
[89] Des peines allant de huit à quatorze ans d'emprisonnement paraissent donc appropriées dans des cas où la violence est particulièrement brutale, malgré la présence de facteurs atténuants et même en l'absence de condamnations antérieures. Je note que plusieurs de ces affaires s'apparentent au présent appel et certaines paraissent même plus graves.
3) Des peines d'emprisonnement de plus longue durée (quinze ans et plus)
[90] Les jugements cités par le juge de première instance (Tan, Mesgun, Zavala-Juarez et Lieug) permettent de voir que les peines dépassant 15 ans d’emprisonnement sont réservées à des affaires où des circonstances aggravantes particulières sont présentes, comme : la violence répétée avant l'agression, les menaces antérieures, le harcèlement répétitif, le caractère planifié, prémédité et orchestré de l'agression, la brutalité extrême, l'absence de remords, une agression que l'accusé fait intentionnellement durer, une tentative de camouflage, la perpétration d’infractions connexes (telles l’agression sexuelle, la séquestration et l'introduction par effraction) ou le risque élevé de récidive, des facteurs qui, outre la brutalité de l'agression et une certaine forme de préméditation, sont ici inexistants. D'autres décisions confirment ce point de vue.
[91] Ainsi, dans R. v. Bryan, [2008] NSCA 119, la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse a confirmé une peine de 15 ans d’emprisonnement imposée à un contrevenant qui avait tenté de tuer son épouse enceinte de 4 mois en la frappant 15 fois avec une épée. Il s’agissait d’un individu non criminalisé qui souffrait d’un trouble narcissique de la personnalité. Il avait inscrit dans son journal intime son désir de tuer sa conjointe et l’enfant qu’elle portait et de s’enlever la vie ensuite. C’est un voisin, témoin de l’attaque, qui a alerté les secours. La victime a perdu son enfant, a souffert de plusieurs incapacités et a subi 14 interventions chirurgicales. Elle requérait ensuite une assistance permanente. L'accusé a plaidé coupable. La Cour d'appel estime que la peine appropriée pour une tentative de meurtre à l’égard d’un conjoint peut varier entre 8 ans d'emprisonnement et la perpétuité. Dans ce cas, elle conclut que le juge d’instance n’a pas commis d’erreur en accordant peu de poids à l’absence de condamnation antérieure et au plaidoyer de culpabilité à la première occasion. De plus, le juge d’instance était justifié de faire primer les objectifs de dénonciation et de dissuasion. L'appel a été rejeté.
[92] Dans R. v. Nippard reflex, (1993), 83 C.C.C. (3d) 410 (N.L.C.A.), l'emprisonnement à perpétuité a été imposé dans les circonstances suivantes. L'accusé a attaqué son épouse et un homme qui l'accompagnait et qu'il croyait être son amant. Il a frappé celui-ci d'un coup de couteau à l'estomac et s'en est ensuite pris à son épouse en la retenant d'une main et en la frappant de l'autre avec son arme à 33 reprises au visage, au dos, sur les bras, à l'abdomen et au thorax, tout en lui disant qu'il la tuerait. L'accusé avait une longue histoire de comportement de violence et d'humiliation envers son épouse, particulièrement durant les 5 années précédant l'agression. Ses antécédents judiciaires étaient récents (au cours de l'année de l'agression) et étaient tous reliés à son épouse : à deux reprises, menaces de mort envers celle-ci; pointer une arme à feu en sa direction; non-respect d'une ordonnance de probation en la menaçant. Deux psychiatres ont témoigné que l'accusé souffrait de jalousie paranoïde, qui pouvait le rendre extrêmement violent, et qu'il n'existait pas de traitement pour ce trouble de la personnalité. Disant craindre pour la sécurité de la victime et du public en général, la Cour d'appel cite alors avec approbation la Cour d'appel de l'Ontario dans R. v. Hill (1974), 15 C.C.C. (2d) 145, aux p. 147-148 :
When an accused has been convicted of a serious crime in itself calling for a substantial sentence and when he suffers from some mental or personality disorder rendering him a danger to the community but not subjecting him to confinement in a mental institution and when it is uncertain when, if ever, the accused will be cured of his affliction, in my opinion the appropriate sentence is one of life. Such a sentence, in such circumstances, amounts to an indefinite sentence under which the parole board can release him to the community when it is satisfied, upon adequate psychiatric examination, it is in the interest of the accused and of the community for him to return to society.
[93] Dans Sentencing, précité à la note 3, l'auteur Clayton C. Ruby fait état, à la p. 794, paragr. 23.120, de R. v. Hurley, jugement inédit du 8 mai 1995 (Cour de l'Ontario, division générale), dans lequel l'emprisonnement à perpétuité a été infligé à un accusé qui a, brutalement et de manière dégradante, attaqué son amie après l'avoir violentée de façon répétée durant une période de plusieurs mois avant l'attaque.
Il n'existe aucune règle qui interdit à un policier d'adresser la parole à un citoyen et de lui poser des questions
R. c. Nikanpour, 2008 QCCQ 7958 (CanLII)
[72] L'accusé plaide que l'approche de la policière en sa direction, les paroles de salutation qu'elle lui a adressées et les questions qu'elle lui a posées, la lumière qu'elle a dirigée vers son visage et l'ordre qu'elle lui a donné de sortir du véhicule constituaient une détention arbitraire et une atteinte inacceptable au principe qui veut que l'État doive laisser les gens tranquilles.
[73] Pourtant, il n'existe aucune règle qui interdit à un policier d'adresser la parole à un citoyen et de lui poser des questions (R. c. Grafe 1987 CanLII 170 (ON C.A.), [1988] 36 CCC. (3ed) 267 ), (R. c. Kutynec reflex, [1992] 70 CCC (3ed) 289), (R. c. Cloutier, 500-01-019013-934, Cour du Québec, 14 septembre 1994), (Dries c. Ville de Saint-Lambert, 505-36-000079-956, Cour supérieure, 1 décembre 1995), (R. c. Gendron [2006] QCCS 4322).
[74] En l'espèce, le fait pour la policière de s'approcher de l'automobile de l'accusé, de le saluer, de lui demander la raison de sa présence en ces lieux et le fait d'éclairer son visage avec sa lampe de poche n'ont d'aucune façon entravé sa liberté.
[75] L'accusé était libre de répondre ou non aux questions et il pouvait toujours librement quitter volontairement les lieux.
[76] Lorsque la policière constate des signes d'affaiblissement de capacité de conduire et qu'elle manifeste ouvertement à l'accusé son inquiétude à le voir conduire, s'amorce une deuxième étape.
[77] Elle commence une enquête sur la commission possible d'une infraction criminelle.
[72] L'accusé plaide que l'approche de la policière en sa direction, les paroles de salutation qu'elle lui a adressées et les questions qu'elle lui a posées, la lumière qu'elle a dirigée vers son visage et l'ordre qu'elle lui a donné de sortir du véhicule constituaient une détention arbitraire et une atteinte inacceptable au principe qui veut que l'État doive laisser les gens tranquilles.
[73] Pourtant, il n'existe aucune règle qui interdit à un policier d'adresser la parole à un citoyen et de lui poser des questions (R. c. Grafe 1987 CanLII 170 (ON C.A.), [1988] 36 CCC. (3ed) 267 ), (R. c. Kutynec reflex, [1992] 70 CCC (3ed) 289), (R. c. Cloutier, 500-01-019013-934, Cour du Québec, 14 septembre 1994), (Dries c. Ville de Saint-Lambert, 505-36-000079-956, Cour supérieure, 1 décembre 1995), (R. c. Gendron [2006] QCCS 4322).
[74] En l'espèce, le fait pour la policière de s'approcher de l'automobile de l'accusé, de le saluer, de lui demander la raison de sa présence en ces lieux et le fait d'éclairer son visage avec sa lampe de poche n'ont d'aucune façon entravé sa liberté.
[75] L'accusé était libre de répondre ou non aux questions et il pouvait toujours librement quitter volontairement les lieux.
[76] Lorsque la policière constate des signes d'affaiblissement de capacité de conduire et qu'elle manifeste ouvertement à l'accusé son inquiétude à le voir conduire, s'amorce une deuxième étape.
[77] Elle commence une enquête sur la commission possible d'une infraction criminelle.
Comment examiner la validité apparente de la dénonciation en vue d’obtenir un mandat de perquisition
R. c. Rioux, 2007 NBPC 1 (CanLII)
[43] En l’espèce, on demande à la Cour d’examiner la validité apparente de la dénonciation en vue d’obtenir un mandat de perquisition, datée du 10 novembre 2003. Les principes fondamentaux d’une telle révision sont maintenant bien établis par la Cour suprême du Canada. Dans l’arrêt clé R. c. Garofoli, 1990 CanLII 52 (C.S.C.), [1990] 2 R.C.S. 1421, à la page 1452, la Cour décrit comme suit les obligations du juge qui siège en révision :
Le juge qui siège en révision ne substitue pas son opinion à celle du juge qui a accordé l’autorisation. Si, compte tenu du dossier dont disposait le juge qui a accordé l’autorisation et complété lors de la révision, le juge siégeant en révision conclut que le juge qui a accordé l’autorisation pouvait le faire, il ne devrait pas intervenir. Dans ce processus, la fraude, la non-divulgation, la déclaration trompeuse et les nouveaux éléments de preuve sont tous des aspects pertinents, mais au lieu d’être nécessaires à la révision leur seul effet est d’aider à décider s’il existe encore un fondement quelconque à la décision du juge qui a accordé l’autorisation.
[44] La Cour suprême a eu l’occasion de revenir sur la question dans l’arrêt R. c. Araujo, 2000 CSC 65 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 992, et je cite un long extrait de la décision du juge LeBel.
Tant que l’affidavit satisfait à la norme juridique applicable, il n’est pas nécessaire qu’il soit aussi long qu’À la recherche du temps perdu, aussi sémillant que le Kama Sutra ni aussi détaillé qu’un guide de réparation d’automobiles. Il doit simplement énoncer les faits de manière complète et sincère pour que le juge saisi de la demande d’autorisation puisse déterminer s’ils remplissent le critère juridique applicable et justifient l’autorisation. Idéalement, il devrait non seulement être complet et sincère, mais aussi clair et concis. Nul besoin de faire état par le menu de l’enquête policière menée jusqu’alors, depuis des mois ou même des années.
[45] Dans les arrêts R. c. Allain (S.) (1998), 205 R.N.‑B. (2e) 201, et R. c. Shalala, [2000] A.N.‑B. no 14, la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick a eu l’occasion d’examiner en profondeur les principes que doivent appliquer à des requêtes du genre les juges qui siègent en révision. La Cour d’appel a statué que, malgré le fait que les arrêts Garofoli et Araujo ont porté sur la révision de dénonciations visant à obtenir des autorisations d’écoute électronique, les principes qui ont été élaborés en conséquence s’appliquent tout aussi bien à la révision de dénonciations visant à obtenir des mandats de perquisition.
[46] À la suite de ces deux décisions, je résumerais les principes comme suit :
1) Le mandat de perquisition et la dénonciation contestés sont présumés valides.
2) Étant donné la présomption de validité, il incombe au requérant de convaincre le juge qui siège en révision que la dénonciation visant à obtenir un mandat de perquisition n’est pas conforme aux exigences de fond établies par la loi.
3) Lorsqu’il évalue quant au fond la qualité de la dénonciation, le tribunal de révision ne doit pas s’en tenir à la preuve qui y est mentionnée. Le juge qui décerne le mandat a le droit de tirer des déductions raisonnables de la preuve présentée dans la dénonciation.
4) Dans son évaluation, le tribunal de révision doit prendre en considération la totalité de la dénonciation et en interpréter les différentes parties en contexte. Il n’y a pas lieu de soumettre la dénonciation à une analyse microscopique de chaque partie et d’en considérer des extraits sans tenir compte du contexte général.
5) Le sens des termes utilisés dans la dénonciation ne devrait pas être soumis à une interprétation excessivement stricte.
6) Le juge saisi de la révision doit déterminer s’il existait une preuve sur laquelle le juge qui a décerné le mandat, agissant de façon judiciaire, pouvait se fonder pour décerner le mandat. Le tribunal siégeant en révision ne peut pas substituer son opinion à celle du premier juge quant à la question de savoir s’il existe une preuve suffisante.
7) Le juge saisi de la révision doit retrancher toute partie de la dénonciation qui est considérée frauduleuse, délibérément trompeuse ou contenant une déclaration erronée intentionnelle.
8) Si le juge saisi de la révision conclut que des extraits de la dénonciation visant à obtenir un mandat contiennent des déclarations frauduleuses, trompeuses ou intentionnellement erronées, ces extraits blâmables doivent être retranchés du document.
9) Le juge saisi de la révision doit ensuite examiner la dénonciation expurgée et décider s’il existe toujours des motifs raisonnables de décerner le mandat de perquisition, compte tenu des suppressions. Il faut répondre à la question suivante : le mandat pourrait-il être décerné sur le fondement de la preuve qui reste?
[47] Le juge Cromwell, de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, dans l’affaire R. c. Morris, [1998] N.S.J. No. 492, a eu l’occasion de commenter les principes qui inspirent les juges siégeant en révision dans des affaires du genre. Il donne le résumé utile qui suit :
[TRADUCTION]
Il pourrait être utile de résumer les principes de révision que j’ai adoptés, dans un voir-dire sur l’article 8 auquel a donné lieu le procès, relativement à un mandat fondé sur une dénonciation qui est valide à première vue :
1. Le juge du procès doit déterminer si le juge de paix a pu décerner validement le mandat
2. En procédant à cette révision, le juge du procès peut entendre et considérer des éléments de preuves pertinents concernant l’exactitude et les motifs d’inclusion de l’information contenue dans la dénonciation visant à obtenir un mandat de perquisition.
3. Des renseignements frauduleux ou délibérément trompeurs dans la dénonciation n’invalident pas automatiquement le mandat. Toutefois, ils peuvent avoir un tel effet si le juge qui siège en révision conclut, d’après l’ensemble des circonstances, que la manière dont la police a abordé le processus d’autorisation préalable était si apte à le saper que le mandat devrait être invalidé. De plus, les renseignements frauduleux ou délibérément trompeurs devraient être retranchés pour qu’on n’en tienne pas compte.
4. En évaluant la validité du mandat, le juge du procès, en général, a le droit de tenir compte de tous les éléments de preuve concernant l’existence effective de motifs raisonnables dont la police était visiblement au courant lorsque le mandat a été sollicité. Toutefois, de tels éléments de preuve ne peuvent être utilisés s’ils ont été obtenus par des moyens anticonstitutionnels ou (je suis porté à le croire) pour amplifier des renseignements frauduleux ou délibérément trompeurs de la dénonciation visant à obtenir un mandat.
[43] En l’espèce, on demande à la Cour d’examiner la validité apparente de la dénonciation en vue d’obtenir un mandat de perquisition, datée du 10 novembre 2003. Les principes fondamentaux d’une telle révision sont maintenant bien établis par la Cour suprême du Canada. Dans l’arrêt clé R. c. Garofoli, 1990 CanLII 52 (C.S.C.), [1990] 2 R.C.S. 1421, à la page 1452, la Cour décrit comme suit les obligations du juge qui siège en révision :
Le juge qui siège en révision ne substitue pas son opinion à celle du juge qui a accordé l’autorisation. Si, compte tenu du dossier dont disposait le juge qui a accordé l’autorisation et complété lors de la révision, le juge siégeant en révision conclut que le juge qui a accordé l’autorisation pouvait le faire, il ne devrait pas intervenir. Dans ce processus, la fraude, la non-divulgation, la déclaration trompeuse et les nouveaux éléments de preuve sont tous des aspects pertinents, mais au lieu d’être nécessaires à la révision leur seul effet est d’aider à décider s’il existe encore un fondement quelconque à la décision du juge qui a accordé l’autorisation.
[44] La Cour suprême a eu l’occasion de revenir sur la question dans l’arrêt R. c. Araujo, 2000 CSC 65 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 992, et je cite un long extrait de la décision du juge LeBel.
Tant que l’affidavit satisfait à la norme juridique applicable, il n’est pas nécessaire qu’il soit aussi long qu’À la recherche du temps perdu, aussi sémillant que le Kama Sutra ni aussi détaillé qu’un guide de réparation d’automobiles. Il doit simplement énoncer les faits de manière complète et sincère pour que le juge saisi de la demande d’autorisation puisse déterminer s’ils remplissent le critère juridique applicable et justifient l’autorisation. Idéalement, il devrait non seulement être complet et sincère, mais aussi clair et concis. Nul besoin de faire état par le menu de l’enquête policière menée jusqu’alors, depuis des mois ou même des années.
[45] Dans les arrêts R. c. Allain (S.) (1998), 205 R.N.‑B. (2e) 201, et R. c. Shalala, [2000] A.N.‑B. no 14, la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick a eu l’occasion d’examiner en profondeur les principes que doivent appliquer à des requêtes du genre les juges qui siègent en révision. La Cour d’appel a statué que, malgré le fait que les arrêts Garofoli et Araujo ont porté sur la révision de dénonciations visant à obtenir des autorisations d’écoute électronique, les principes qui ont été élaborés en conséquence s’appliquent tout aussi bien à la révision de dénonciations visant à obtenir des mandats de perquisition.
[46] À la suite de ces deux décisions, je résumerais les principes comme suit :
1) Le mandat de perquisition et la dénonciation contestés sont présumés valides.
2) Étant donné la présomption de validité, il incombe au requérant de convaincre le juge qui siège en révision que la dénonciation visant à obtenir un mandat de perquisition n’est pas conforme aux exigences de fond établies par la loi.
3) Lorsqu’il évalue quant au fond la qualité de la dénonciation, le tribunal de révision ne doit pas s’en tenir à la preuve qui y est mentionnée. Le juge qui décerne le mandat a le droit de tirer des déductions raisonnables de la preuve présentée dans la dénonciation.
4) Dans son évaluation, le tribunal de révision doit prendre en considération la totalité de la dénonciation et en interpréter les différentes parties en contexte. Il n’y a pas lieu de soumettre la dénonciation à une analyse microscopique de chaque partie et d’en considérer des extraits sans tenir compte du contexte général.
5) Le sens des termes utilisés dans la dénonciation ne devrait pas être soumis à une interprétation excessivement stricte.
6) Le juge saisi de la révision doit déterminer s’il existait une preuve sur laquelle le juge qui a décerné le mandat, agissant de façon judiciaire, pouvait se fonder pour décerner le mandat. Le tribunal siégeant en révision ne peut pas substituer son opinion à celle du premier juge quant à la question de savoir s’il existe une preuve suffisante.
7) Le juge saisi de la révision doit retrancher toute partie de la dénonciation qui est considérée frauduleuse, délibérément trompeuse ou contenant une déclaration erronée intentionnelle.
8) Si le juge saisi de la révision conclut que des extraits de la dénonciation visant à obtenir un mandat contiennent des déclarations frauduleuses, trompeuses ou intentionnellement erronées, ces extraits blâmables doivent être retranchés du document.
9) Le juge saisi de la révision doit ensuite examiner la dénonciation expurgée et décider s’il existe toujours des motifs raisonnables de décerner le mandat de perquisition, compte tenu des suppressions. Il faut répondre à la question suivante : le mandat pourrait-il être décerné sur le fondement de la preuve qui reste?
[47] Le juge Cromwell, de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, dans l’affaire R. c. Morris, [1998] N.S.J. No. 492, a eu l’occasion de commenter les principes qui inspirent les juges siégeant en révision dans des affaires du genre. Il donne le résumé utile qui suit :
[TRADUCTION]
Il pourrait être utile de résumer les principes de révision que j’ai adoptés, dans un voir-dire sur l’article 8 auquel a donné lieu le procès, relativement à un mandat fondé sur une dénonciation qui est valide à première vue :
1. Le juge du procès doit déterminer si le juge de paix a pu décerner validement le mandat
2. En procédant à cette révision, le juge du procès peut entendre et considérer des éléments de preuves pertinents concernant l’exactitude et les motifs d’inclusion de l’information contenue dans la dénonciation visant à obtenir un mandat de perquisition.
3. Des renseignements frauduleux ou délibérément trompeurs dans la dénonciation n’invalident pas automatiquement le mandat. Toutefois, ils peuvent avoir un tel effet si le juge qui siège en révision conclut, d’après l’ensemble des circonstances, que la manière dont la police a abordé le processus d’autorisation préalable était si apte à le saper que le mandat devrait être invalidé. De plus, les renseignements frauduleux ou délibérément trompeurs devraient être retranchés pour qu’on n’en tienne pas compte.
4. En évaluant la validité du mandat, le juge du procès, en général, a le droit de tenir compte de tous les éléments de preuve concernant l’existence effective de motifs raisonnables dont la police était visiblement au courant lorsque le mandat a été sollicité. Toutefois, de tels éléments de preuve ne peuvent être utilisés s’ils ont été obtenus par des moyens anticonstitutionnels ou (je suis porté à le croire) pour amplifier des renseignements frauduleux ou délibérément trompeurs de la dénonciation visant à obtenir un mandat.
mardi 20 avril 2010
Il est possible d'être complice d'une infraction sans pour autant avoir participé à un complot
Trudeau c. R., 2007 QCCA 505 (CanLII)
[3] Bien qu'en l'espèce, le juge d'instance ait acquitté l'appelant de complot, cela ne l'empêchait aucunement de le trouver coupable des trois premiers chefs d'accusation selon l'article 21 du Code criminel. Il ne pouvait y avoir de complot puisque, selon la preuve, les infractions commises n'étaient pas planifiées mais ont été commises de façon spontanée et ponctuelle. Le juge a plutôt appliqué le concept de complicité. Le complot est une infraction criminelle alors que le concept de complicité fait référence aux règles de participation criminelle. Il est donc possible d'être complice d'une infraction sans pour autant avoir participé à un complot.
[4] Considérant que les accusations de complot et de complicité sont tout à fait indépendantes l'une de l'autre, le juge avait devant lui suffisamment de preuve pour tirer la conclusion que l'appelant avait encouragé Pelletier à commettre les voies de faits, se rendant ainsi coupable des trois premiers chefs d'accusation.
[5] Il faut aussi noter que:
En droit pénal canadien, il n'existe pas différents degrés de responsabilité criminelle selon la plus ou moins grande participation d'une personne à la perpétration d'un crime. La loi ne fait aucune distinction entre celui qui commet réellement l'acte et celui qui l'encourage. C'est pourquoi ce dernier sera accusé de l'infraction substantive et non de complicité
[3] Bien qu'en l'espèce, le juge d'instance ait acquitté l'appelant de complot, cela ne l'empêchait aucunement de le trouver coupable des trois premiers chefs d'accusation selon l'article 21 du Code criminel. Il ne pouvait y avoir de complot puisque, selon la preuve, les infractions commises n'étaient pas planifiées mais ont été commises de façon spontanée et ponctuelle. Le juge a plutôt appliqué le concept de complicité. Le complot est une infraction criminelle alors que le concept de complicité fait référence aux règles de participation criminelle. Il est donc possible d'être complice d'une infraction sans pour autant avoir participé à un complot.
[4] Considérant que les accusations de complot et de complicité sont tout à fait indépendantes l'une de l'autre, le juge avait devant lui suffisamment de preuve pour tirer la conclusion que l'appelant avait encouragé Pelletier à commettre les voies de faits, se rendant ainsi coupable des trois premiers chefs d'accusation.
[5] Il faut aussi noter que:
En droit pénal canadien, il n'existe pas différents degrés de responsabilité criminelle selon la plus ou moins grande participation d'une personne à la perpétration d'un crime. La loi ne fait aucune distinction entre celui qui commet réellement l'acte et celui qui l'encourage. C'est pourquoi ce dernier sera accusé de l'infraction substantive et non de complicité
lundi 19 avril 2010
L'analyse du consentement au stade de la mens rea de l'agression sexuelle - Importance primordiale de la vraisemblance de la défense
R. c. A.B. / 2010 QCCQ 2582 / N° : 500-01-003255-087 / DATE :
Le 14 avril 2010
[157] L'arrêt Esau 1997 2 RCS 77 donne un éclairage sur la vraisemblance.
(Par. 15) … pour qu'une cour soit tenue d'examiner la croyance sincère mais erronée ou de donner au jury des directives à cet égard, cette croyance doit d'abord être appuyée par une preuve plausible de façon que la défense acquière une vraisemblance. En l'espèce, la preuve plausible vient des témoignages de la plaignante et de l'intimé et des circonstances entourant l'agression sexuelle reprochée. Le témoignage de l'intimé constitue davantage qu'une simple affirmation de croyance ou consentement. Il a rapporté des paroles et des actes précis de la plaignante, qui l'ont amené à croire qu'elle était consentante. À lui seul, ce témoignage peut donner ouverture au moyen de défense. Cependant, il y a plus. Le témoignage de la plaignante n'a pas contredit celui de l'intimé, car elle ne peut pas se rappeler ce qui s'est passé après qu'elle fut entrée dans sa chambre. De plus, il n'y a aucune preuve de violence, de lutte ou d'emploi de force.
[158] Dans l'arrêt Osolin 1993 4 RCS 595 , on débat la question de savoir s'il convient de soumettre la défense de croyance sincère mais erronée au consentement lorsque les témoignages des parties sont "diamétralement opposés".
[159] Également dans Park 1995 2 RCS 836 .
(Par. 25) La question qui se pose est donc de savoir si, en l'absence d'autres éléments de preuve conférant une vraisemblance à la défense d'erreur honnête un jury raisonnable pourrait combiner une partie de la preuve de la plaignante et une partie de la preuve de l'accusé, pour servir de justification suffisante à ce moyen de défense… En d'autres termes, un jury qui a reçu des directives appropriées et qui agit judicieusement peut-il, de façon réaliste, retenir une partie du témoignage de chacun des intéressés relativement à l'incident pour en arriver à un ensemble de faits, raisonnablement cohérent et appuyé par la preuve, qui soit susceptible de justifier la défense de croyance erronée au consentement?
[160] Il en ressort donc, que des témoignages diamétralement opposés, mais qui peuvent être combinés de manière cohérente, rencontrent les critères du test de la vraisemblance.
[165] À ce stade-ci, la vraisemblance ne s'intéresse pas à la force probante des éléments de preuve ni à des évaluations de crédibilité.
[167] Le Tribunal est d'avis que l'étape de la vraisemblance est donc franchie et passe à l'étape de l'évaluation de la défense de croyance erronée mais sincère au consentement.
[168] D'entrée de jeu, il n'existe pas de consentement "tacite" en droit criminel canadien. (Ewanchuk, par. 31).
[169] D'autre part, le fait de croire que le silence, la passivité ou le comportement ambigu de la plaignante valent consentement de sa part ne constitue pas un moyen de défense. (Ewanchuk, par. 51).
[170] De plus, on ne peut se fier au silence ou au comportement équivoque de la plaignante pour en déduire qu'il y a consentement, non plus que se livrer à des attouchements sexuels afin de "voir ce qui va se passer". (Ewanchuk, par. 52).
[171] Il est faux de prétendre que la plaignante doive opposer un minimum de résistance, par des paroles ou des gestes, et que l'absence de résistance équivaut à consentement. (M. (M.L.) 1994 2 RCS 3 ).
[172] Les suppositions de l'accusé relativement à ce qui se passe dans l'esprit de la plaignante ne constituent pas un moyen de défense. (Ewanchuk, par. 46).
[175] En résumé:
· … pour être sincère, la croyance de l'accusé ne doit pas être le fruit de son insouciance ou de son aveuglement volontaire, ni être viciée par la connaissance de l'un des autres facteurs énumérés au par. 273.1(2) et à l'art. 273.2. (Ewanchuk,par. 65).
· L'article 273.1(2) se lie comme suit:
"Le consentement du plaignant ne se déduit pas, pour l'application des art. 271, 272, 273 des cas où:
a. …
b. il est incapable de le former.
Le 14 avril 2010
[157] L'arrêt Esau 1997 2 RCS 77 donne un éclairage sur la vraisemblance.
(Par. 15) … pour qu'une cour soit tenue d'examiner la croyance sincère mais erronée ou de donner au jury des directives à cet égard, cette croyance doit d'abord être appuyée par une preuve plausible de façon que la défense acquière une vraisemblance. En l'espèce, la preuve plausible vient des témoignages de la plaignante et de l'intimé et des circonstances entourant l'agression sexuelle reprochée. Le témoignage de l'intimé constitue davantage qu'une simple affirmation de croyance ou consentement. Il a rapporté des paroles et des actes précis de la plaignante, qui l'ont amené à croire qu'elle était consentante. À lui seul, ce témoignage peut donner ouverture au moyen de défense. Cependant, il y a plus. Le témoignage de la plaignante n'a pas contredit celui de l'intimé, car elle ne peut pas se rappeler ce qui s'est passé après qu'elle fut entrée dans sa chambre. De plus, il n'y a aucune preuve de violence, de lutte ou d'emploi de force.
[158] Dans l'arrêt Osolin 1993 4 RCS 595 , on débat la question de savoir s'il convient de soumettre la défense de croyance sincère mais erronée au consentement lorsque les témoignages des parties sont "diamétralement opposés".
[159] Également dans Park 1995 2 RCS 836 .
(Par. 25) La question qui se pose est donc de savoir si, en l'absence d'autres éléments de preuve conférant une vraisemblance à la défense d'erreur honnête un jury raisonnable pourrait combiner une partie de la preuve de la plaignante et une partie de la preuve de l'accusé, pour servir de justification suffisante à ce moyen de défense… En d'autres termes, un jury qui a reçu des directives appropriées et qui agit judicieusement peut-il, de façon réaliste, retenir une partie du témoignage de chacun des intéressés relativement à l'incident pour en arriver à un ensemble de faits, raisonnablement cohérent et appuyé par la preuve, qui soit susceptible de justifier la défense de croyance erronée au consentement?
[160] Il en ressort donc, que des témoignages diamétralement opposés, mais qui peuvent être combinés de manière cohérente, rencontrent les critères du test de la vraisemblance.
[165] À ce stade-ci, la vraisemblance ne s'intéresse pas à la force probante des éléments de preuve ni à des évaluations de crédibilité.
[167] Le Tribunal est d'avis que l'étape de la vraisemblance est donc franchie et passe à l'étape de l'évaluation de la défense de croyance erronée mais sincère au consentement.
[168] D'entrée de jeu, il n'existe pas de consentement "tacite" en droit criminel canadien. (Ewanchuk, par. 31).
[169] D'autre part, le fait de croire que le silence, la passivité ou le comportement ambigu de la plaignante valent consentement de sa part ne constitue pas un moyen de défense. (Ewanchuk, par. 51).
[170] De plus, on ne peut se fier au silence ou au comportement équivoque de la plaignante pour en déduire qu'il y a consentement, non plus que se livrer à des attouchements sexuels afin de "voir ce qui va se passer". (Ewanchuk, par. 52).
[171] Il est faux de prétendre que la plaignante doive opposer un minimum de résistance, par des paroles ou des gestes, et que l'absence de résistance équivaut à consentement. (M. (M.L.) 1994 2 RCS 3 ).
[172] Les suppositions de l'accusé relativement à ce qui se passe dans l'esprit de la plaignante ne constituent pas un moyen de défense. (Ewanchuk, par. 46).
[175] En résumé:
· … pour être sincère, la croyance de l'accusé ne doit pas être le fruit de son insouciance ou de son aveuglement volontaire, ni être viciée par la connaissance de l'un des autres facteurs énumérés au par. 273.1(2) et à l'art. 273.2. (Ewanchuk,par. 65).
· L'article 273.1(2) se lie comme suit:
"Le consentement du plaignant ne se déduit pas, pour l'application des art. 271, 272, 273 des cas où:
a. …
b. il est incapable de le former.
samedi 17 avril 2010
Détermination de la peine - Voici comment les tribunaux ont traité certains dossiers de recyclage de produits de la criminalité
R. c. Lefebvre, 2007 QCCQ 16856 (CanLII)
[24] Voici comment les tribunaux ont traité certains dossiers de recyclage de produits de la criminalité.
R. c. Roa, AZ- 96011223,
- la Cour d'appel rejette une requête pour permission d'appeler de la sentence;
- recyclage 3 298 820$;
- antécédent: possession dans le but de trafic: 6 ans;
- 4 mois détention provisoire;
- sentence 46 mois d'emprisonnement.
R c. Pavao, 1995 M. J. no 295 (C.A.M.)
- recyclage de 80 000$;
- pas pour lui-même, pour son frère;
- pas d'antécédent judiciaire;
- un actif pour la société. A toujours travaillé;
- facteurs atténuants;
-sentence dissuasive s'impose ;
-sentence de 30 mois diminuée à 20 mois.
R. c. Flahiff, 1999 J.Q. no 403 (C.Q.), confirmé à 2001, J.Q. no 2319(C.A.)
- recyclage de 1,5 million de dollars;
- facteur aggravant: l'accusé était l'avocat du trafiquant;
- transactions complexes;
- préméditation;
- peine de 3 ans de pénitencier.
R. c. Tejani, (1999) 138 C.C.C. 93d) 166, C.A.O.
- Requête pour permission d'appeler en Cour suprême rejetée, 23 mars 2000, 1999 S.C.C.A. no 509.
- tentative de recyclage de 100 000$ en changeant de l'argent canadien en fonds américains;
- âgé de 50 ans;
- pas d'antécédents judiciaires;
- profits de 1 000$;
- "Ordinarily, a money laundering offence will attract a custodial sentence for the very reason emphasized by the trial judge (par. 52)";
- sentence de 2 ans d'emprisonnement. Modifié par la Cour d'appel d'Ontario à 2 ans moins un jour d'emprisonnement avec sursis et amende de 20 000$, à défaut 8 mois.
R. c. Loewen, 1999 M.J. no 125 (C.A.M.)
- tentative de recyclage de 25 000$ et de 125 000$;
- 40 ans, sans antécédent;
- marié, 4 enfants, travaille;
- possibilité d'emprisonnement avec sursis rejetée sauf par un juge dissident en appel;
- "…the trial judge was correct in stating that the main consideration on the sentencing for this offence was general deterrence (par. 39)";
- 2 ans d'emprisonnement.
R. c. Lazeo, 2000 B.C.J. no 2282 (C.A.C.-B.)
- Requête pour permission d'appeler à la Cour suprême rejetée, 2000 S.C.C.A. no 222;
- recyclage par agent de change de 290 000$ en fonds américains;
- 10 transactions;
- un antécédent en Angleterre: possession d'une substance contrôlée: 15 mois;
"[par. 22] The next consideration then is whether or not it would be appropriate that such a term be served as a conditional sentence. I am of the opinion that the circumstances of this offence are exceedingly grave and that general deterrence and denunciation are the paramount principles to be considered in rendering the appropriate sentence in the circumstances of this case. Money laundering is an essential feature of dealing with major drugs and the sums involved here clearly indicate this appellant believed that the persons with whom he dealt were dealing in drugs in a most significant way.
[par. 23] In the well known case of R. v. Proulx 2000 SCC 5 (CanLII), (2000), 140 C.C.C. (3d) 449 (S.C.C.), under the summary section the following appears at 502;
... Where objectives such as denunciation and deterrence are particularly pressing, incarceration will generally be the preferable sanction;
Similar comments were made by my colleague Mr. Justice Lambert in the case of R. v. Su, 2000 BCCA 480 (CanLII), 2000 BCCA 480, [2000] B.C.J. No. 1816.";
- sentence de 27 mois d'emprisonnement réduite à deux ans moins un jour.
R. c. Bin, 2006 B.C.J. no 1099 (C.A.C.B.)
- deux accusés;
- l'un recycle 83 500$ canadiens et l'autre 7 000$ en fonds américains;
- légers antécédents;
- risque de rédicive;
- emprisonnement de 18 mois.
[25] On constate aisément que l'exemplarité et la dissuasion sont des facteurs primordiaux à considérer pour une pareille infraction. De plus, une sentence d'emprisonnement semble une règle générale.
[24] Voici comment les tribunaux ont traité certains dossiers de recyclage de produits de la criminalité.
R. c. Roa, AZ- 96011223,
- la Cour d'appel rejette une requête pour permission d'appeler de la sentence;
- recyclage 3 298 820$;
- antécédent: possession dans le but de trafic: 6 ans;
- 4 mois détention provisoire;
- sentence 46 mois d'emprisonnement.
R c. Pavao, 1995 M. J. no 295 (C.A.M.)
- recyclage de 80 000$;
- pas pour lui-même, pour son frère;
- pas d'antécédent judiciaire;
- un actif pour la société. A toujours travaillé;
- facteurs atténuants;
-sentence dissuasive s'impose ;
-sentence de 30 mois diminuée à 20 mois.
R. c. Flahiff, 1999 J.Q. no 403 (C.Q.), confirmé à 2001, J.Q. no 2319(C.A.)
- recyclage de 1,5 million de dollars;
- facteur aggravant: l'accusé était l'avocat du trafiquant;
- transactions complexes;
- préméditation;
- peine de 3 ans de pénitencier.
R. c. Tejani, (1999) 138 C.C.C. 93d) 166, C.A.O.
- Requête pour permission d'appeler en Cour suprême rejetée, 23 mars 2000, 1999 S.C.C.A. no 509.
- tentative de recyclage de 100 000$ en changeant de l'argent canadien en fonds américains;
- âgé de 50 ans;
- pas d'antécédents judiciaires;
- profits de 1 000$;
- "Ordinarily, a money laundering offence will attract a custodial sentence for the very reason emphasized by the trial judge (par. 52)";
- sentence de 2 ans d'emprisonnement. Modifié par la Cour d'appel d'Ontario à 2 ans moins un jour d'emprisonnement avec sursis et amende de 20 000$, à défaut 8 mois.
R. c. Loewen, 1999 M.J. no 125 (C.A.M.)
- tentative de recyclage de 25 000$ et de 125 000$;
- 40 ans, sans antécédent;
- marié, 4 enfants, travaille;
- possibilité d'emprisonnement avec sursis rejetée sauf par un juge dissident en appel;
- "…the trial judge was correct in stating that the main consideration on the sentencing for this offence was general deterrence (par. 39)";
- 2 ans d'emprisonnement.
R. c. Lazeo, 2000 B.C.J. no 2282 (C.A.C.-B.)
- Requête pour permission d'appeler à la Cour suprême rejetée, 2000 S.C.C.A. no 222;
- recyclage par agent de change de 290 000$ en fonds américains;
- 10 transactions;
- un antécédent en Angleterre: possession d'une substance contrôlée: 15 mois;
"[par. 22] The next consideration then is whether or not it would be appropriate that such a term be served as a conditional sentence. I am of the opinion that the circumstances of this offence are exceedingly grave and that general deterrence and denunciation are the paramount principles to be considered in rendering the appropriate sentence in the circumstances of this case. Money laundering is an essential feature of dealing with major drugs and the sums involved here clearly indicate this appellant believed that the persons with whom he dealt were dealing in drugs in a most significant way.
[par. 23] In the well known case of R. v. Proulx 2000 SCC 5 (CanLII), (2000), 140 C.C.C. (3d) 449 (S.C.C.), under the summary section the following appears at 502;
... Where objectives such as denunciation and deterrence are particularly pressing, incarceration will generally be the preferable sanction;
Similar comments were made by my colleague Mr. Justice Lambert in the case of R. v. Su, 2000 BCCA 480 (CanLII), 2000 BCCA 480, [2000] B.C.J. No. 1816.";
- sentence de 27 mois d'emprisonnement réduite à deux ans moins un jour.
R. c. Bin, 2006 B.C.J. no 1099 (C.A.C.B.)
- deux accusés;
- l'un recycle 83 500$ canadiens et l'autre 7 000$ en fonds américains;
- légers antécédents;
- risque de rédicive;
- emprisonnement de 18 mois.
[25] On constate aisément que l'exemplarité et la dissuasion sont des facteurs primordiaux à considérer pour une pareille infraction. De plus, une sentence d'emprisonnement semble une règle générale.
Les règles concernant l'amende en remplacement d’une ordonnance de confiscation de biens qui constituent des produits de la criminalité
R. c. Lavigne, 2006 CSC 10, [2006] 1 R.C.S. 392
34 Les limites du pouvoir discrétionnaire du tribunal peuvent être dégagées de l’objectif et du contexte du par. 462.37(3) C. cr. Elles sont aussi inscrites dans le texte même de la disposition. Non seulement le pouvoir discrétionnaire du tribunal est-il limité par les circonstances susceptibles de donner lieu à la substitution, notamment celles énumérées aux al. a) à e), mais, facteur plus important encore, il l’est aussi par le texte clair de la disposition elle-même. Le montant de l’amende est établi par le Code criminel : le tribunal « peut, en remplacement de l’ordonnance [de confiscation], infliger au contrevenant une amende égale à la valeur du bien . . . ». Le texte est limpide. Le législateur a lui-même déterminé le montant de l’amende.
35 L’amende, comme le texte le dit, est égale à la valeur du bien. L’équivalence entre la valeur du bien et le montant de l’amende est d’ailleurs inhérente à la notion de « remplacement ». L’amende tient en effet lieu de confiscation. Pour qu’il s’agisse d’un véritable remplacement, la valeur doit être équivalente. Le pouvoir discrétionnaire du tribunal s’applique et à la décision d’infliger ou non une amende et à la détermination de la valeur du bien. Ce processus doit s’appuyer sur la preuve et, lorsqu’il est complété, le tribunal ne peut pas prendre en considération la capacité de payer du contrevenant pour ne pas infliger l’amende ou pour en diminuer le montant.
52 Les dispositions sur les produits de la criminalité constituent des règles particulières qui écartent partiellement les règles générales concernant la détermination de la peine. La prise en considération de la capacité de payer n’est pas compatible avec les objectifs visés par ces dispositions, ni à l’étape de la décision d’infliger l’amende de remplacement ni à celle de la détermination du montant de l’amende. Le tribunal doit cependant tenir compte de ce facteur lorsqu’il fixe le délai de paiement de celle-ci.
34 Les limites du pouvoir discrétionnaire du tribunal peuvent être dégagées de l’objectif et du contexte du par. 462.37(3) C. cr. Elles sont aussi inscrites dans le texte même de la disposition. Non seulement le pouvoir discrétionnaire du tribunal est-il limité par les circonstances susceptibles de donner lieu à la substitution, notamment celles énumérées aux al. a) à e), mais, facteur plus important encore, il l’est aussi par le texte clair de la disposition elle-même. Le montant de l’amende est établi par le Code criminel : le tribunal « peut, en remplacement de l’ordonnance [de confiscation], infliger au contrevenant une amende égale à la valeur du bien . . . ». Le texte est limpide. Le législateur a lui-même déterminé le montant de l’amende.
35 L’amende, comme le texte le dit, est égale à la valeur du bien. L’équivalence entre la valeur du bien et le montant de l’amende est d’ailleurs inhérente à la notion de « remplacement ». L’amende tient en effet lieu de confiscation. Pour qu’il s’agisse d’un véritable remplacement, la valeur doit être équivalente. Le pouvoir discrétionnaire du tribunal s’applique et à la décision d’infliger ou non une amende et à la détermination de la valeur du bien. Ce processus doit s’appuyer sur la preuve et, lorsqu’il est complété, le tribunal ne peut pas prendre en considération la capacité de payer du contrevenant pour ne pas infliger l’amende ou pour en diminuer le montant.
52 Les dispositions sur les produits de la criminalité constituent des règles particulières qui écartent partiellement les règles générales concernant la détermination de la peine. La prise en considération de la capacité de payer n’est pas compatible avec les objectifs visés par ces dispositions, ni à l’étape de la décision d’infliger l’amende de remplacement ni à celle de la détermination du montant de l’amende. Le tribunal doit cependant tenir compte de ce facteur lorsqu’il fixe le délai de paiement de celle-ci.
Quand le dépôt des notes sténo du témoignage de la victime rendu à l'enquête préliminaire peut être utilisée au procès à titre de témoignage
R. c. Morissette, 2010 QCCQ 1900 (CanLII)
[14] Il est établi que le Tribunal jouit d'un pouvoir discrétionnaire d'admettre en preuve ou d'écarter un témoignage rendu à l'enquête préliminaire lorsque toutes les conditions énoncées à l'article 715 C.cr. sont rencontrées, comme c'est le cas en l'espèce.
[15] Le procureur de la défense soumet que l'utilisation du témoignage antérieur, produit comme preuve à charge au procès, est inéquitable envers l'accusé car le contre-interrogatoire mené à l'enquête préliminaire, loin d'être exhaustif, préparait plutôt le procès.
[16] Le juge Wilson dans l'arrêt Potvin s'exprime ainsi :
« […] À mon avis, il est essentiel à notre système de justice que l'accusé ait eu l'occasion voulue de contre-interroger le témoin au moment de la déposition antérieure, si la transcription doit être produite comme preuve à charge dans un procès criminel. Cela est conforme au point de vue traditionnel selon lequel c'est l'occasion de contre-interroger, et non le contre-interrogatoire lui-même, qui est cruciale (sic) si on veut traiter l'accusé de façon équitable. […] »
[17] Sur l'exercice du pouvoir discrétionnaire par le Tribunal, le juge Wilson dans l'arrêt Potvin précise :
«[…] Je pense que ce terme lui confère le pouvoir discrétionnaire d'écarter le témoignage antérieur dans des circonstances où son utilisation aurait un effet inéquitable envers l'accusé. Je m'empresse cependant d'ajouter que ces circonstances seront relativement rares et que le pouvoir discrétionnaire de prévenir l'inéquité n'est pas un pouvoir général de contrecarrer l'objet du par. 643(1) [maintenant 715(1) ] en écartant automatiquement la preuve du témoignage antérieur. »
[18] Et un plus loin :
« À mon avis, dès que l'on accepte que le par. 643(1) [maintenant 715(1) ] donne au juge du procès le pouvoir discrétionnaire de s'éloigner de l'application purement mécanique de l'article, il faut donner à ce pouvoir discrétionnaire une interprétation suffisamment large pour couvrir les deux types de situations, c'est-à-dire le cas où le témoignage a été obtenu d'une façon inéquitable envers l'accusé et le cas où, même si la façon de l'obtenir était équitable envers l'accusé, son utilisation ne serait pas équitable envers l'accusé. […] »
[19] Ce pouvoir doit être interprété plus largement que le principe traditionnel de preuve voulant qu'un élément soit écarté si son effet préjudiciable est supérieur à sa valeur probante. Référant à l'arrêt Clarkson c. La Reine, le juge Wilson ajoute :
« […] Le juge du procès devrait plus se préoccuper de protéger l'accusé contre l'iniquité que d'utiliser des éléments de preuve probants «sans trop tenir compte de l'équité du processus décisionnel […] »
[20] La Cour d'appel dans l'arrêt R. v. Michaud reprend les critères établis dans l'arrêt Hawkins pour déterminer les paramètres du pouvoir discrétionnaire de l'article 715 C.cr. citant le juge Lamer :
[…] cette déclaration est toujours assujettie au pouvoir discrétionnaire résiduel que possède le juge d'exclure la déclaration lorsque «sa valeur probante est faible et que l'accusé pourrait subir un préjudice indu»: Smith, précité, à la p. 937 […] De plus, comme la juge McLachlin l'a fait ressortir dans R. c. Seaboyer, 1991 CanLII 76 (C.S.C.), [1991] 2 R.C.S. 577, à la p. 610, il faut interpréter le «préjudice» d'une façon large de façon à englober à la fois le préjudice causé à l'accusé et celui causé au procès même.
[21] Pour déterminer si l'accusé subit un préjudice qui rendrait le procès inéquitable en raison de l'admission en preuve d'un témoignage recueilli antérieurement au procès, il faut examiner l'ensemble de la preuve. Même si un témoin n'a pu être contre-interrogé sur un sujet précis, le reste de la preuve pourrait pallier cette lacune.
[22] En l'espèce, le témoignage que l'on recherche à faire admettre en preuve est celui de la présumée victime et seul témoin direct du geste reproché. Sans son témoignage, rien ne peut expliquer les photographies prises par les policiers. La crédibilité du témoin constitue donc un point litigieux.
[23] Dans l'arrêt Osolin, le juge Cory insiste sur l'importance du contre-interrogatoire particulièrement lorsque la crédibilité d'un témoin est en cause dans un procès :
« Le contre-interrogatoire a une importance incontestable. Il remplit un rôle essentiel dans le processus qui permet de déterminer si un témoin est digne de foi. Même lorsqu'il vise le témoin le plus honnête qui soit, il peut permettre de jauger la fragilité des témoignages. Il peut servir, par exemple, à montrer le handicap visuel ou auditif d'un témoin […] C'est le moyen par excellence d'établir la vérité et de tester la véracité. Il faut autoriser le contre-interrogatoire pour que l'accusé puisse présenter une défense pleine et entière. La possibilité de contre-interroger les témoins constitue un élément fondamental d'un procès équitable auquel l'accusé a droit. Il s'agit d'un principe ancien et bien établi qui est lié de près à la présomption d'innocence. […] »
[24] De plus, la Cour suprême a indiqué dans l'arrêt Shearing, qu'un contre-interrogatoire complet et incisif est l'outil le plus efficace dont dispose un accusé lorsque, comme c'est souvent le cas en matière d'agression sexuelle, c'est la parole de l'accusé contre la crédibilité de son accusateur.
[25] Même si la défense a eu l'occasion voulue au sens de l'article 715 C.cr. de contre-interroger la présumée victime à l'enquête préliminaire, il demeure qu'admettre ce témoignage en preuve au procès, alors qu'il constitue la seule version accusatoire, priverait l'accusé d'un contre-interrogatoire complet. En outre, l'évaluation de la crédibilité de ce témoin peut avoir un impact sur le verdict. Admettre en preuve le témoignage rendu à l'enquête préliminaire priverait le Tribunal de la possibilité d'observer le témoin pendant son témoignage afin d'analyser sa crédibilité.
[26] En l'espèce, en soupesant le droit de l'accusé à une défense pleine et entière et l'intérêt de la société dans l'utilisation d'éléments de preuve probants en vue de faire ressortir la vérité, le tribunal estime que le premier doit primer.
[27] Le dépôt ou la lecture des notes sténographiques du témoignage rendu à l'enquête préliminaire par le seul témoin direct de l'infraction pour valoir de preuve au procès serait inéquitable pour l'accusé.
[28] Le Tribunal est d'avis que décider autrement causerait un effet préjudiciable à l'accusé qui le priverait d'un procès juste et équitable.
[14] Il est établi que le Tribunal jouit d'un pouvoir discrétionnaire d'admettre en preuve ou d'écarter un témoignage rendu à l'enquête préliminaire lorsque toutes les conditions énoncées à l'article 715 C.cr. sont rencontrées, comme c'est le cas en l'espèce.
[15] Le procureur de la défense soumet que l'utilisation du témoignage antérieur, produit comme preuve à charge au procès, est inéquitable envers l'accusé car le contre-interrogatoire mené à l'enquête préliminaire, loin d'être exhaustif, préparait plutôt le procès.
[16] Le juge Wilson dans l'arrêt Potvin s'exprime ainsi :
« […] À mon avis, il est essentiel à notre système de justice que l'accusé ait eu l'occasion voulue de contre-interroger le témoin au moment de la déposition antérieure, si la transcription doit être produite comme preuve à charge dans un procès criminel. Cela est conforme au point de vue traditionnel selon lequel c'est l'occasion de contre-interroger, et non le contre-interrogatoire lui-même, qui est cruciale (sic) si on veut traiter l'accusé de façon équitable. […] »
[17] Sur l'exercice du pouvoir discrétionnaire par le Tribunal, le juge Wilson dans l'arrêt Potvin précise :
«[…] Je pense que ce terme lui confère le pouvoir discrétionnaire d'écarter le témoignage antérieur dans des circonstances où son utilisation aurait un effet inéquitable envers l'accusé. Je m'empresse cependant d'ajouter que ces circonstances seront relativement rares et que le pouvoir discrétionnaire de prévenir l'inéquité n'est pas un pouvoir général de contrecarrer l'objet du par. 643(1) [maintenant 715(1) ] en écartant automatiquement la preuve du témoignage antérieur. »
[18] Et un plus loin :
« À mon avis, dès que l'on accepte que le par. 643(1) [maintenant 715(1) ] donne au juge du procès le pouvoir discrétionnaire de s'éloigner de l'application purement mécanique de l'article, il faut donner à ce pouvoir discrétionnaire une interprétation suffisamment large pour couvrir les deux types de situations, c'est-à-dire le cas où le témoignage a été obtenu d'une façon inéquitable envers l'accusé et le cas où, même si la façon de l'obtenir était équitable envers l'accusé, son utilisation ne serait pas équitable envers l'accusé. […] »
[19] Ce pouvoir doit être interprété plus largement que le principe traditionnel de preuve voulant qu'un élément soit écarté si son effet préjudiciable est supérieur à sa valeur probante. Référant à l'arrêt Clarkson c. La Reine, le juge Wilson ajoute :
« […] Le juge du procès devrait plus se préoccuper de protéger l'accusé contre l'iniquité que d'utiliser des éléments de preuve probants «sans trop tenir compte de l'équité du processus décisionnel […] »
[20] La Cour d'appel dans l'arrêt R. v. Michaud reprend les critères établis dans l'arrêt Hawkins pour déterminer les paramètres du pouvoir discrétionnaire de l'article 715 C.cr. citant le juge Lamer :
[…] cette déclaration est toujours assujettie au pouvoir discrétionnaire résiduel que possède le juge d'exclure la déclaration lorsque «sa valeur probante est faible et que l'accusé pourrait subir un préjudice indu»: Smith, précité, à la p. 937 […] De plus, comme la juge McLachlin l'a fait ressortir dans R. c. Seaboyer, 1991 CanLII 76 (C.S.C.), [1991] 2 R.C.S. 577, à la p. 610, il faut interpréter le «préjudice» d'une façon large de façon à englober à la fois le préjudice causé à l'accusé et celui causé au procès même.
[21] Pour déterminer si l'accusé subit un préjudice qui rendrait le procès inéquitable en raison de l'admission en preuve d'un témoignage recueilli antérieurement au procès, il faut examiner l'ensemble de la preuve. Même si un témoin n'a pu être contre-interrogé sur un sujet précis, le reste de la preuve pourrait pallier cette lacune.
[22] En l'espèce, le témoignage que l'on recherche à faire admettre en preuve est celui de la présumée victime et seul témoin direct du geste reproché. Sans son témoignage, rien ne peut expliquer les photographies prises par les policiers. La crédibilité du témoin constitue donc un point litigieux.
[23] Dans l'arrêt Osolin, le juge Cory insiste sur l'importance du contre-interrogatoire particulièrement lorsque la crédibilité d'un témoin est en cause dans un procès :
« Le contre-interrogatoire a une importance incontestable. Il remplit un rôle essentiel dans le processus qui permet de déterminer si un témoin est digne de foi. Même lorsqu'il vise le témoin le plus honnête qui soit, il peut permettre de jauger la fragilité des témoignages. Il peut servir, par exemple, à montrer le handicap visuel ou auditif d'un témoin […] C'est le moyen par excellence d'établir la vérité et de tester la véracité. Il faut autoriser le contre-interrogatoire pour que l'accusé puisse présenter une défense pleine et entière. La possibilité de contre-interroger les témoins constitue un élément fondamental d'un procès équitable auquel l'accusé a droit. Il s'agit d'un principe ancien et bien établi qui est lié de près à la présomption d'innocence. […] »
[24] De plus, la Cour suprême a indiqué dans l'arrêt Shearing, qu'un contre-interrogatoire complet et incisif est l'outil le plus efficace dont dispose un accusé lorsque, comme c'est souvent le cas en matière d'agression sexuelle, c'est la parole de l'accusé contre la crédibilité de son accusateur.
[25] Même si la défense a eu l'occasion voulue au sens de l'article 715 C.cr. de contre-interroger la présumée victime à l'enquête préliminaire, il demeure qu'admettre ce témoignage en preuve au procès, alors qu'il constitue la seule version accusatoire, priverait l'accusé d'un contre-interrogatoire complet. En outre, l'évaluation de la crédibilité de ce témoin peut avoir un impact sur le verdict. Admettre en preuve le témoignage rendu à l'enquête préliminaire priverait le Tribunal de la possibilité d'observer le témoin pendant son témoignage afin d'analyser sa crédibilité.
[26] En l'espèce, en soupesant le droit de l'accusé à une défense pleine et entière et l'intérêt de la société dans l'utilisation d'éléments de preuve probants en vue de faire ressortir la vérité, le tribunal estime que le premier doit primer.
[27] Le dépôt ou la lecture des notes sténographiques du témoignage rendu à l'enquête préliminaire par le seul témoin direct de l'infraction pour valoir de preuve au procès serait inéquitable pour l'accusé.
[28] Le Tribunal est d'avis que décider autrement causerait un effet préjudiciable à l'accusé qui le priverait d'un procès juste et équitable.
Détermination de la peine relative à une personne en autorité (dont les policiers) commettant une infraction dans l'exercice de leurs fonctions
R. c. Morgan, 2010 QCCQ 2555 (CanLII)
1) St-Amour c. R. (AZ-88011228) : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles lors d'une arrestation : Aucune indication sur la position des parties : Décision : forte amende et probation, confirmée par la Cour d'appel;
2) R. c. Thireau (J.E. 88-1376) : Policier déclaré coupable de voies de fait graves : Aucune indication sur la position des parties : Décision : la Cour d'appel augmente la peine d'emprisonnement imposée en première instance, la faisant passer de 3 mois à 2 ans;
3) René Tapp c. La Reine 1992 CanLII 4012 (QC C.A.), [1992 CanLII 4012 (QC C.A.)] : Policier déclaré coupable de voies de faits graves : La position de la Poursuite n'est pas clairement définie alors que la défense demande une absolution : Décision : condamné à une peine d'emprisonnement de 6 mois en première instance, la Cour d'appel modifie celle-ci pour la remplacer par une amende et des travaux communautaires;
4) Serge Markovic c. Sa Majesté la Reine (AZ-98011166) : Policier déclaré coupable de conduite dangereuse causant la mort : La position des parties n'apparaît ni au jugement de première instance (AZ-95031147) ni au jugement de la Cour d'appel : Décision : la Cour d'appel modifie la peine d'emprisonnement imposée en première instance pour la remplacer par une peine de la même durée à être purgée dans la communauté;
5) Pierre-Yves Deragon c. Sa Majesté la Reine (REJB 2003-48225) : Policier déclaré coupable d'entrave à la justice, de falsification et d'usage de faux documents : La Poursuite suggère une peine de 12 mois [(2000) J.Q. no 7096] alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle et subsidiairement, une sentence suspendue ou une peine dans la collectivité : Décision : peine d'emprisonnement de douze mois, confirmée par la Cour d'appel;
6) Alain Beaudry c. Sa Majesté la Reine 2005 QCCA 967 (CanLII), [2005 QCCA 967 (CanLII)] : Policier déclaré coupable d'entrave à la justice : La Poursuite suggère une peine de 6 mois ferme ou de 9 mois si la peine doit être purgée dans la collectivité alors que la défense suggère une absolution : Décision : peine à être purgée dans la communauté, confirmée par la Cour d'appel – appel du verdict de culpabilité rejeté par la Cour Suprême [2007 CSC 5 (CanLII), (2007) 1 R.C.S. 190];
7) Stéphane Gagnon c. Sa Majesté la Reine 2007 QCCA 940 (CanLII), (2007 QCCA 940) : Policier déclaré coupable de falsification de rapports et de constats d'infraction : La position des parties n'apparaît ni au jugement de première instance [2005 CanLII 63138 (QC C.Q.), (2005 CanLII 63138 (QC C.Q.)] ni au jugement de la Cour d'appel : Décision : condamné à une peine d'emprisonnement de 10 mois en première instance, la Cour d'appel modifie celle-ci et la remplace par une peine de la même durée à être purgée dans la communauté;
8) Sa Majesté la Reine c. Guy Hovington 2007 QCCA 1023 (CanLII), (2007 QCCA 1023) : Policier déclaré coupable de voies de fait armées et de voies de fait simples : La Poursuite suggère une peine de 9 mois alors que la défense suggère d'examiner toutes les autres possibilités de peines moindres prévues à la Loi : Décision : l'absolution inconditionnelle prononcée par le juge de première instance est remplacée, par la Cour d'appel, par une peine à être purgée dans la communauté;
9) La Reine c. Laurent Parent (AZ-93031197) : Policier qui plaide coupable à une accusation d'intimidation : La Poursuite suggère une peine pécuniaire alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : absolution inconditionnelle;
10) Sa Majesté la Reine c. Pierre Bergeron [(1995) J.Q. no 1638] : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles : La Poursuite suggère une peine d'emprisonnement alors que la défense suggère plutôt une sentence suspendue avec probation et travaux communautaires ou encore une peine pécuniaire : Décision : peine de 90 jours d'emprisonnement à être purgée de façon discontinue et probation;
11) La Reine c. Daniel Simard (AZ-50136651) : Policier déclaré coupable de voies de fait simples, de voies de fait causant des lésions corporelles et de tentative d'entrave à la justice : La Poursuite suggère une peine de détention alors que défense suggère une absolution : Décision : peine d'emprisonnement dans la collectivité;
12) La Reine c. Steeve Larose (AZ-50155450) : Policier qui plaide coupable à des accusations d'entrave à la justice et de fabrication de faux rapport : La Poursuite suggère une peine entre 12 et 24 mois alors que la défense suggère une absolution : Décision : peine à être purgée dans la communauté;
13) La Reine c. Stéphane Couture (AZ-50165229) : Policier déclaré coupable d'agression sexuelle sur une collègue : La Poursuite suggère un peine maximale de 6 mois alors que la défense suggère une absolution : Décision : absolution conditionnelle avec don substantiel;
14) La Reine c. Daniel Cayer (AZ-50172829) : Policier qui plaide coupable à une accusation de vol d'argent saisi : suggestion commune d'absolution conditionnelle entérinée;
15) Sa Majesté la Reine c. Steeve Larouche (AZ-50206249) : Policier déclaré coupable d'utilisation négligente d'une arme à feu : La défense suggère absolution alors que la Poursuite ne consent pas mais ne s'oppose pas à cette demande : Décision : absolution inconditionnelle;
16) Sa Majesté la Reine c. Vincent Bodet (AZ-50345882) : Policier qui plaide coupable à deux accusations de voies de fait simples : La défense suggère une absolution inconditionnelle alors que la Poursuite suggère des travaux communautaires ou, subsidiairement, une absolution conditionnelle : Décision : absolution inconditionnelle;
17) La Reine c. Mohamed Elfaf 2007 QCCQ 17172 (CanLII), [2007 QCCQ 17172 (CanLII)] : Policier déclaré coupable de voies de fait sur sa conjointe : La Poursuite suggère une sentence suspendue avec probation alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : sentence suspendue et probation – Appel du verdict de culpabilité rejeté par la Cour d'appel 2009 QCCA 556 (CanLII), [2009 QCCA 556 (CanLII)] et permission d'en appeler à la Cour suprême refusée 2009 CanLII 44641 (C.S.C.), [2009 CanLII 44641 (C.S.C.)];
18) La Reine c. Jean-Pierre Côté (AZ-50468516) : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles et de voies de fait armées : La Poursuite suggère une amende alors que la défense suggère une absolution : Décision : absolution inconditionnelle;
19) Sa Majesté la Reine c. Pierre Goulet (AZ-50493355) : Policier déclaré coupable de possession de biens criminellement obtenus et de recyclage de produits de la criminalité : La Poursuite suggère au moins 3 ans de pénitencier alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité, ajoutant que si une peine de prison ferme était absolument incontournable, un barème de 16 à 18 mois serait approprié : Décision : 30 mois;
20) R. c. Charrette 2006 NBBR 242 (CanLII), [2006 NBBR 242 (CanLII)] : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles, d'entrave à la justice (en effaçant une cassette qui avait enregistré ses gestes du jour des évènements) et d'une autre accusation de voies de fait, survenue à une autre date : La Poursuite suggère une peine de 8 à 18 mois alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : peine d'emprisonnement de 12 mois;
21) R. c. Yves Blais 2009 QCCQ 451 (CanLII), (2009 QCCQ 451) : Policier qui plaide coupable à des accusations de fraude, d'obtention par faux semblant et d'avoir obtenu par corruption de l'argent avec l'intention d'entraver l'administration de la justice : La Poursuite suggère une peine de 12 mois alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité : Décision : Peine d'emprisonnement dans la collectivité;
22) R. c. LeBlanc 2003 NBCA 75 (CanLII), (2003 NBCA 75) : Policier qui plaide coupable à une accusation d'abus de confiance : Aucune indication sur la position des parties : Décision : Peine d'absolution cassée par la Cour d'appel qui lui substitue une peine d'emprisonnement de 3 mois;
23) R. c. Ryan [(1999) N.B.J. No. 487] : Policier qui plaide coupable à des accusations d'abus de confiance, de fraude et de vol : Les parties semblent d'accord pour une peine d'emprisonnement dans la collectivité – la poursuite suggérant une peine de 15 à 18 mois alors que la défense suggère plutôt une peine de 6 à 12 mois : Décision : Le juge de première instance, s'estimant lié par une décision récente de sa Cour d'appel, prononce une peine d'emprisonnement de 8 mois;
24) R. c. Ré 2007 QCCA 1020 (CanLII), (2007 QCCA 1020) : Policier déclaré coupable de voies de fait armées et de voies de fait causant des lésions corporelles : La Poursuite suggère une peine de 10 mois alors que la défense suggère d'examiner toutes les autres possibilités de peines moindres prévues à la Loi : Décision : peine d'emprisonnement dans la collectivité maintenue par la Cour d'appel;
25) R. c. Filion (AZ-50328052) : Député déclaré coupable de fraude et d'abus de confiance : La position de la Poursuite n'est pas mentionnée alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : peine d'emprisonnement de 6 mois;
26) R. c. Laplante 2009 QCCS 1365 (CanLII), (2009 QCCS 1365) : Agent frontalier qui a plaidé coupable à une accusation d'avoir participé à une tentative d'introduire clandestinement au Canada des marchandises dont l'importation est prohibée, à savoir 150 kg de cocaïne : La position des parties n'est pas énoncée : Décision : peine d'emprisonnement dans la collectivité;
27) R. c. Bédard 2005 CanLII 44197 (QC C.Q.), [2005 CanLII 44197 (QC C.Q.)] : Avocat déclaré coupable de tentative d'entrave à la justice après avoir suggéré au père, dont le fils est accusé de vol qualifié, de faire disparaître l'arme du vol : La Poursuite suggère une peine de 18 mois alors que l'accusé, qui se représente lui-même, demande au Tribunal de ne pas le punir trop sévèrement : Décision : peine d'emprisonnement de 8 mois;
28) R. c. Manon Labelle 2009 QCCQ 810 (CanLII), (2009 QCCQ 810) : Employée de la S.A.A.Q. qui plaide coupable à des accusations de participation ou contribution aux activités d'une organisation criminelle, usage de faux et abus de confiance relativement aux fonctions de sa charge (elle conseille une organisation criminelle quant à la fabrication de faux documents pour permettre l'immatriculation au Québec de véhicules lourds) : La Poursuite suggère une peine de détention ferme alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité : Décision : peine à être purgée dans la collectivité;
29) R. c. De Francesco 1998 CanLII 13079 (QC C.A.), [1998 CanLII 13079 (QC C.A.)] : L'accusé et un complice offrent 150 000$ à un policier afin que celui-ci obtienne que fut infligée à un autre accusé une peine plus légère que celle qu'il méritait : La Poursuite suggère une peine de 2 ans alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité : Décision : La Cour d'appel casse la peine d'emprisonnement dans la collectivité infligée en première instance et lui substitue un emprisonnement de 12 mois;
30) R. c. Morin (AZ-85021233) : Avocat qui, à deux reprises, a donné une somme de 1 000$ au substitut de Procureur général en charge du dossier de ses clients. Il fut reconnu coupable de deux infractions déposées contre lui. La Poursuite réclamait une peine d'emprisonnement entre 24 et 34 mois alors que la défense demande la clémence du Tribunal. Décision : peine totale de 24 mois – Il est à remarquer que cette décision fait état de la peine imposée au substitut du Procureur général (Gilles Harris) impliqué dans les délits : peine de 18 mois de prison et amendes totalisant 2 000$;
31) R. c. Ticne 2009 BCCA 191 (CanLII), (2009 BCCA 191) : L'accusé, agent correctionnel, plaide coupable à des chefs d'accusation lui reprochant d'avoir aidé un détenu à s'évader en retour du paiement d'une somme de 50 000$, qu'il n'a jamais reçue. La Poursuite suggère une peine de 7 ans de pénitencier alors que la position du procureur de la défense n'est pas énoncée. Décision : Le juge de 1ère instance impose une peine de 39 mois, laquelle est maintenue par la Cour d'appel;
32) R. c. Dennis (2001 O.J. No. 1983) : L'accusée, qui travaillait comme commis au bureau des substituts du Procureur général, a plaidé coupable à une accusation d'avoir accepté une somme d'argent dans le but d'entraver le cours de la justice. Elle avait convenu avec un accusé de mettre la main sur son dossier et d'y retirer une certaine preuve qui ferait en sorte qu'il serait acquitté en retour d'une somme de 2 400$. La Poursuite et la défense font une suggestion commune de 12 mois d'emprisonnement dans la collectivité. Décision : Le juge de 1ère instance rejette la suggestion commune et prononce une peine de 12 mois de prison. En appel, la Cour d'appel rétablit la suggestion commune alléguant que les motifs du juge de 1ère instance pour s'en écarter n'étaient pas suffisants (2002 O.J. No. 237).
1) St-Amour c. R. (AZ-88011228) : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles lors d'une arrestation : Aucune indication sur la position des parties : Décision : forte amende et probation, confirmée par la Cour d'appel;
2) R. c. Thireau (J.E. 88-1376) : Policier déclaré coupable de voies de fait graves : Aucune indication sur la position des parties : Décision : la Cour d'appel augmente la peine d'emprisonnement imposée en première instance, la faisant passer de 3 mois à 2 ans;
3) René Tapp c. La Reine 1992 CanLII 4012 (QC C.A.), [1992 CanLII 4012 (QC C.A.)] : Policier déclaré coupable de voies de faits graves : La position de la Poursuite n'est pas clairement définie alors que la défense demande une absolution : Décision : condamné à une peine d'emprisonnement de 6 mois en première instance, la Cour d'appel modifie celle-ci pour la remplacer par une amende et des travaux communautaires;
4) Serge Markovic c. Sa Majesté la Reine (AZ-98011166) : Policier déclaré coupable de conduite dangereuse causant la mort : La position des parties n'apparaît ni au jugement de première instance (AZ-95031147) ni au jugement de la Cour d'appel : Décision : la Cour d'appel modifie la peine d'emprisonnement imposée en première instance pour la remplacer par une peine de la même durée à être purgée dans la communauté;
5) Pierre-Yves Deragon c. Sa Majesté la Reine (REJB 2003-48225) : Policier déclaré coupable d'entrave à la justice, de falsification et d'usage de faux documents : La Poursuite suggère une peine de 12 mois [(2000) J.Q. no 7096] alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle et subsidiairement, une sentence suspendue ou une peine dans la collectivité : Décision : peine d'emprisonnement de douze mois, confirmée par la Cour d'appel;
6) Alain Beaudry c. Sa Majesté la Reine 2005 QCCA 967 (CanLII), [2005 QCCA 967 (CanLII)] : Policier déclaré coupable d'entrave à la justice : La Poursuite suggère une peine de 6 mois ferme ou de 9 mois si la peine doit être purgée dans la collectivité alors que la défense suggère une absolution : Décision : peine à être purgée dans la communauté, confirmée par la Cour d'appel – appel du verdict de culpabilité rejeté par la Cour Suprême [2007 CSC 5 (CanLII), (2007) 1 R.C.S. 190];
7) Stéphane Gagnon c. Sa Majesté la Reine 2007 QCCA 940 (CanLII), (2007 QCCA 940) : Policier déclaré coupable de falsification de rapports et de constats d'infraction : La position des parties n'apparaît ni au jugement de première instance [2005 CanLII 63138 (QC C.Q.), (2005 CanLII 63138 (QC C.Q.)] ni au jugement de la Cour d'appel : Décision : condamné à une peine d'emprisonnement de 10 mois en première instance, la Cour d'appel modifie celle-ci et la remplace par une peine de la même durée à être purgée dans la communauté;
8) Sa Majesté la Reine c. Guy Hovington 2007 QCCA 1023 (CanLII), (2007 QCCA 1023) : Policier déclaré coupable de voies de fait armées et de voies de fait simples : La Poursuite suggère une peine de 9 mois alors que la défense suggère d'examiner toutes les autres possibilités de peines moindres prévues à la Loi : Décision : l'absolution inconditionnelle prononcée par le juge de première instance est remplacée, par la Cour d'appel, par une peine à être purgée dans la communauté;
9) La Reine c. Laurent Parent (AZ-93031197) : Policier qui plaide coupable à une accusation d'intimidation : La Poursuite suggère une peine pécuniaire alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : absolution inconditionnelle;
10) Sa Majesté la Reine c. Pierre Bergeron [(1995) J.Q. no 1638] : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles : La Poursuite suggère une peine d'emprisonnement alors que la défense suggère plutôt une sentence suspendue avec probation et travaux communautaires ou encore une peine pécuniaire : Décision : peine de 90 jours d'emprisonnement à être purgée de façon discontinue et probation;
11) La Reine c. Daniel Simard (AZ-50136651) : Policier déclaré coupable de voies de fait simples, de voies de fait causant des lésions corporelles et de tentative d'entrave à la justice : La Poursuite suggère une peine de détention alors que défense suggère une absolution : Décision : peine d'emprisonnement dans la collectivité;
12) La Reine c. Steeve Larose (AZ-50155450) : Policier qui plaide coupable à des accusations d'entrave à la justice et de fabrication de faux rapport : La Poursuite suggère une peine entre 12 et 24 mois alors que la défense suggère une absolution : Décision : peine à être purgée dans la communauté;
13) La Reine c. Stéphane Couture (AZ-50165229) : Policier déclaré coupable d'agression sexuelle sur une collègue : La Poursuite suggère un peine maximale de 6 mois alors que la défense suggère une absolution : Décision : absolution conditionnelle avec don substantiel;
14) La Reine c. Daniel Cayer (AZ-50172829) : Policier qui plaide coupable à une accusation de vol d'argent saisi : suggestion commune d'absolution conditionnelle entérinée;
15) Sa Majesté la Reine c. Steeve Larouche (AZ-50206249) : Policier déclaré coupable d'utilisation négligente d'une arme à feu : La défense suggère absolution alors que la Poursuite ne consent pas mais ne s'oppose pas à cette demande : Décision : absolution inconditionnelle;
16) Sa Majesté la Reine c. Vincent Bodet (AZ-50345882) : Policier qui plaide coupable à deux accusations de voies de fait simples : La défense suggère une absolution inconditionnelle alors que la Poursuite suggère des travaux communautaires ou, subsidiairement, une absolution conditionnelle : Décision : absolution inconditionnelle;
17) La Reine c. Mohamed Elfaf 2007 QCCQ 17172 (CanLII), [2007 QCCQ 17172 (CanLII)] : Policier déclaré coupable de voies de fait sur sa conjointe : La Poursuite suggère une sentence suspendue avec probation alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : sentence suspendue et probation – Appel du verdict de culpabilité rejeté par la Cour d'appel 2009 QCCA 556 (CanLII), [2009 QCCA 556 (CanLII)] et permission d'en appeler à la Cour suprême refusée 2009 CanLII 44641 (C.S.C.), [2009 CanLII 44641 (C.S.C.)];
18) La Reine c. Jean-Pierre Côté (AZ-50468516) : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles et de voies de fait armées : La Poursuite suggère une amende alors que la défense suggère une absolution : Décision : absolution inconditionnelle;
19) Sa Majesté la Reine c. Pierre Goulet (AZ-50493355) : Policier déclaré coupable de possession de biens criminellement obtenus et de recyclage de produits de la criminalité : La Poursuite suggère au moins 3 ans de pénitencier alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité, ajoutant que si une peine de prison ferme était absolument incontournable, un barème de 16 à 18 mois serait approprié : Décision : 30 mois;
20) R. c. Charrette 2006 NBBR 242 (CanLII), [2006 NBBR 242 (CanLII)] : Policier déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles, d'entrave à la justice (en effaçant une cassette qui avait enregistré ses gestes du jour des évènements) et d'une autre accusation de voies de fait, survenue à une autre date : La Poursuite suggère une peine de 8 à 18 mois alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : peine d'emprisonnement de 12 mois;
21) R. c. Yves Blais 2009 QCCQ 451 (CanLII), (2009 QCCQ 451) : Policier qui plaide coupable à des accusations de fraude, d'obtention par faux semblant et d'avoir obtenu par corruption de l'argent avec l'intention d'entraver l'administration de la justice : La Poursuite suggère une peine de 12 mois alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité : Décision : Peine d'emprisonnement dans la collectivité;
22) R. c. LeBlanc 2003 NBCA 75 (CanLII), (2003 NBCA 75) : Policier qui plaide coupable à une accusation d'abus de confiance : Aucune indication sur la position des parties : Décision : Peine d'absolution cassée par la Cour d'appel qui lui substitue une peine d'emprisonnement de 3 mois;
23) R. c. Ryan [(1999) N.B.J. No. 487] : Policier qui plaide coupable à des accusations d'abus de confiance, de fraude et de vol : Les parties semblent d'accord pour une peine d'emprisonnement dans la collectivité – la poursuite suggérant une peine de 15 à 18 mois alors que la défense suggère plutôt une peine de 6 à 12 mois : Décision : Le juge de première instance, s'estimant lié par une décision récente de sa Cour d'appel, prononce une peine d'emprisonnement de 8 mois;
24) R. c. Ré 2007 QCCA 1020 (CanLII), (2007 QCCA 1020) : Policier déclaré coupable de voies de fait armées et de voies de fait causant des lésions corporelles : La Poursuite suggère une peine de 10 mois alors que la défense suggère d'examiner toutes les autres possibilités de peines moindres prévues à la Loi : Décision : peine d'emprisonnement dans la collectivité maintenue par la Cour d'appel;
25) R. c. Filion (AZ-50328052) : Député déclaré coupable de fraude et d'abus de confiance : La position de la Poursuite n'est pas mentionnée alors que la défense suggère une absolution inconditionnelle : Décision : peine d'emprisonnement de 6 mois;
26) R. c. Laplante 2009 QCCS 1365 (CanLII), (2009 QCCS 1365) : Agent frontalier qui a plaidé coupable à une accusation d'avoir participé à une tentative d'introduire clandestinement au Canada des marchandises dont l'importation est prohibée, à savoir 150 kg de cocaïne : La position des parties n'est pas énoncée : Décision : peine d'emprisonnement dans la collectivité;
27) R. c. Bédard 2005 CanLII 44197 (QC C.Q.), [2005 CanLII 44197 (QC C.Q.)] : Avocat déclaré coupable de tentative d'entrave à la justice après avoir suggéré au père, dont le fils est accusé de vol qualifié, de faire disparaître l'arme du vol : La Poursuite suggère une peine de 18 mois alors que l'accusé, qui se représente lui-même, demande au Tribunal de ne pas le punir trop sévèrement : Décision : peine d'emprisonnement de 8 mois;
28) R. c. Manon Labelle 2009 QCCQ 810 (CanLII), (2009 QCCQ 810) : Employée de la S.A.A.Q. qui plaide coupable à des accusations de participation ou contribution aux activités d'une organisation criminelle, usage de faux et abus de confiance relativement aux fonctions de sa charge (elle conseille une organisation criminelle quant à la fabrication de faux documents pour permettre l'immatriculation au Québec de véhicules lourds) : La Poursuite suggère une peine de détention ferme alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité : Décision : peine à être purgée dans la collectivité;
29) R. c. De Francesco 1998 CanLII 13079 (QC C.A.), [1998 CanLII 13079 (QC C.A.)] : L'accusé et un complice offrent 150 000$ à un policier afin que celui-ci obtienne que fut infligée à un autre accusé une peine plus légère que celle qu'il méritait : La Poursuite suggère une peine de 2 ans alors que la défense suggère une peine d'emprisonnement dans la collectivité : Décision : La Cour d'appel casse la peine d'emprisonnement dans la collectivité infligée en première instance et lui substitue un emprisonnement de 12 mois;
30) R. c. Morin (AZ-85021233) : Avocat qui, à deux reprises, a donné une somme de 1 000$ au substitut de Procureur général en charge du dossier de ses clients. Il fut reconnu coupable de deux infractions déposées contre lui. La Poursuite réclamait une peine d'emprisonnement entre 24 et 34 mois alors que la défense demande la clémence du Tribunal. Décision : peine totale de 24 mois – Il est à remarquer que cette décision fait état de la peine imposée au substitut du Procureur général (Gilles Harris) impliqué dans les délits : peine de 18 mois de prison et amendes totalisant 2 000$;
31) R. c. Ticne 2009 BCCA 191 (CanLII), (2009 BCCA 191) : L'accusé, agent correctionnel, plaide coupable à des chefs d'accusation lui reprochant d'avoir aidé un détenu à s'évader en retour du paiement d'une somme de 50 000$, qu'il n'a jamais reçue. La Poursuite suggère une peine de 7 ans de pénitencier alors que la position du procureur de la défense n'est pas énoncée. Décision : Le juge de 1ère instance impose une peine de 39 mois, laquelle est maintenue par la Cour d'appel;
32) R. c. Dennis (2001 O.J. No. 1983) : L'accusée, qui travaillait comme commis au bureau des substituts du Procureur général, a plaidé coupable à une accusation d'avoir accepté une somme d'argent dans le but d'entraver le cours de la justice. Elle avait convenu avec un accusé de mettre la main sur son dossier et d'y retirer une certaine preuve qui ferait en sorte qu'il serait acquitté en retour d'une somme de 2 400$. La Poursuite et la défense font une suggestion commune de 12 mois d'emprisonnement dans la collectivité. Décision : Le juge de 1ère instance rejette la suggestion commune et prononce une peine de 12 mois de prison. En appel, la Cour d'appel rétablit la suggestion commune alléguant que les motifs du juge de 1ère instance pour s'en écarter n'étaient pas suffisants (2002 O.J. No. 237).
L'infraction de garde ou contrôle est commise lorsque l'automobile est dans une position potentiellement dangereuse pour le public
R. c. Lussier, 2010 QCCQ 2553 (CanLII)
[34] Dans un jugement de La Reine c. Sylvain Ringuet, confirmant l'acquittement prononcé en première instance d'un individu ayant la garde et le contrôle d'un véhicule enlisé dans un banc de neige, l'hon. James L. Brunton de la Cour supérieure écrit:
« [23] Dans le dossier sous étude, le juge de première instance a conclu qu'il n'y avait pas de danger réel ou potentiel dû à la combinaison de M. Ringuet, qui avait les facultés affaiblies, et le véhicule moteur, qui était impossible à déplacer, car enlisé dans le banc de neige. Cette conclusion est supportée par la preuve.
[24] Nonobstant que la preuve révélait que l'auto était immobilisée, si cette même preuve avait révélé que l'auto se trouvait dans une position potentiellement dangereuse pour le public – qu'elle empiétait sur une voie par exemple – je suis d'avis qu'une condamnation de garde ou de contrôle aurait été de mise malgré le fait que l'intimé n'avait aucune intention de conduire et que l'auto ne pouvait pas bouger. Tel n'étant pas le cas, je suis d'avis de rejeter l'appel. »
[35] Comme le mentionne le juge Brunton, un accusé peut être déclaré coupable de garde ou contrôle, même s'il n'a pas l'intention de conduire, que son automobile ne peut bouger, lorsque l'automobile est dans une position potentiellement dangereuse pour le public.
[36] Dans la décision de R. c. Paul, mon collègue le juge Beaudoin écrit :
« [19] À cet égard, voici ma traduction des propos de l'honorable juge Feldman rendant le jugement de la Cour d'appel de l'Ontario dans R. c. Wren (47 O.R. (3d) 544, le 14 mars 2000):
"[15] Même si ces cours soulignèrent le danger dans des termes reliés seulement à la mise en marche du véhicule, cette cour a expliqué dans R.c. Vansickle (jugement rendu le 17 décembre 1990 par la Cour d'appel de l'Ontario), que la mention de ce risque compris n'était faite seulement qu'à titre d'exemple de la façon selon laquelle la combinaison d'une personne intoxiquée et d'un véhicule à moteur pouvait causer la situation potentielle de danger exigée.
[16] Je suis d'opinion que le résultat de ces arrêts et des autres qui les ont suivis (voir la note 2 à la fin du jugement), est à l'effet que, pour établir la garde ou le contrôle d'un véhicule à moteur, l'agir ou la conduite de l'accusé en relation avec le véhicule à moteur doit constituer un risque de danger, qu'il émane de la mise en marche du véhicule ou de quelque autre façon."
[20] La Cour d'appel de Terre-Neuve a rendu un jugement au même effet sur la notion de danger dans R. c. Decker (2002, 162 C.C.C. (3d) 503).
[21] Donc, à la lumière des faits qui m'ont été exposés dans la preuve, je conclus, hors de tout doute raisonnable, que l'accusé avait le contrôle et la garde d'un véhicule à moteur alors qu'il avait la capacité de conduire affaiblie par l'effet de l'alcool et alors qu'il avait un taux d'alcoolémie supérieur à la limite légale, créant ainsi une situation potentiellement dangereuse pour la sécurité publique. »
[37] Selon le Tribunal, la garde par l'accusée d'un véhicule qui entrave la nuit une voie d'un pont surplombant le Saint-Laurent, laquelle voie est si étroite qu'elle ne permet pas, selon l'agent Lapointe un dépassement, constitue une situation à risque pour la sécurité des usagers du pont.
[34] Dans un jugement de La Reine c. Sylvain Ringuet, confirmant l'acquittement prononcé en première instance d'un individu ayant la garde et le contrôle d'un véhicule enlisé dans un banc de neige, l'hon. James L. Brunton de la Cour supérieure écrit:
« [23] Dans le dossier sous étude, le juge de première instance a conclu qu'il n'y avait pas de danger réel ou potentiel dû à la combinaison de M. Ringuet, qui avait les facultés affaiblies, et le véhicule moteur, qui était impossible à déplacer, car enlisé dans le banc de neige. Cette conclusion est supportée par la preuve.
[24] Nonobstant que la preuve révélait que l'auto était immobilisée, si cette même preuve avait révélé que l'auto se trouvait dans une position potentiellement dangereuse pour le public – qu'elle empiétait sur une voie par exemple – je suis d'avis qu'une condamnation de garde ou de contrôle aurait été de mise malgré le fait que l'intimé n'avait aucune intention de conduire et que l'auto ne pouvait pas bouger. Tel n'étant pas le cas, je suis d'avis de rejeter l'appel. »
[35] Comme le mentionne le juge Brunton, un accusé peut être déclaré coupable de garde ou contrôle, même s'il n'a pas l'intention de conduire, que son automobile ne peut bouger, lorsque l'automobile est dans une position potentiellement dangereuse pour le public.
[36] Dans la décision de R. c. Paul, mon collègue le juge Beaudoin écrit :
« [19] À cet égard, voici ma traduction des propos de l'honorable juge Feldman rendant le jugement de la Cour d'appel de l'Ontario dans R. c. Wren (47 O.R. (3d) 544, le 14 mars 2000):
"[15] Même si ces cours soulignèrent le danger dans des termes reliés seulement à la mise en marche du véhicule, cette cour a expliqué dans R.c. Vansickle (jugement rendu le 17 décembre 1990 par la Cour d'appel de l'Ontario), que la mention de ce risque compris n'était faite seulement qu'à titre d'exemple de la façon selon laquelle la combinaison d'une personne intoxiquée et d'un véhicule à moteur pouvait causer la situation potentielle de danger exigée.
[16] Je suis d'opinion que le résultat de ces arrêts et des autres qui les ont suivis (voir la note 2 à la fin du jugement), est à l'effet que, pour établir la garde ou le contrôle d'un véhicule à moteur, l'agir ou la conduite de l'accusé en relation avec le véhicule à moteur doit constituer un risque de danger, qu'il émane de la mise en marche du véhicule ou de quelque autre façon."
[20] La Cour d'appel de Terre-Neuve a rendu un jugement au même effet sur la notion de danger dans R. c. Decker (2002, 162 C.C.C. (3d) 503).
[21] Donc, à la lumière des faits qui m'ont été exposés dans la preuve, je conclus, hors de tout doute raisonnable, que l'accusé avait le contrôle et la garde d'un véhicule à moteur alors qu'il avait la capacité de conduire affaiblie par l'effet de l'alcool et alors qu'il avait un taux d'alcoolémie supérieur à la limite légale, créant ainsi une situation potentiellement dangereuse pour la sécurité publique. »
[37] Selon le Tribunal, la garde par l'accusée d'un véhicule qui entrave la nuit une voie d'un pont surplombant le Saint-Laurent, laquelle voie est si étroite qu'elle ne permet pas, selon l'agent Lapointe un dépassement, constitue une situation à risque pour la sécurité des usagers du pont.
vendredi 16 avril 2010
La jurisprudence enseigne que l'aveuglement volontaire s'applique en matière de collusion au sens de l'article 462.34(6) C.cr
R. c. Antillas Communication Inc., 2002 CanLII 14856 (QC C.Q.)
[71] Le requérant doit prouver qu'il semble innocent de toute complicité ou de toute collusion à l'égard de la perpétration d'une infraction de criminalité organisée ou d'une infraction désignée, comme l'exige l'article 462.34 (6) C. cr. La notion de complicité est définie à l'article 21 du Code criminel. Est partie à l'infraction quiconque la commet réellement, accomplit ou omet d'accomplir quelque chose en vue d'aider quelqu'un à la commettre, ou encourage quelqu'un à la commettre.
[72] Pour sa part, la collusion comporte deux éléments: une entente secrète, de même qu'un but qui consiste à causer un préjudice à un tiers ou à atteindre un objectif illégal. Je tire cette conclusion d'un extrait de l'arrêt Villeneuve c R. et Leblanc (REJB 1999-14356) dans laquelle la Cour d'appel du Québec fait l'inventaire des définitions du mot collusion qu'on trouve dans différents dictionnaires:
"1. entente secrète entre deux ou plusieurs personnes en vue d'en tromper une ou plusieurs." (Gérard Cornu, vocabulaire juridique, PUF, 1987, p. 149)
"2. coming together to commit fraud or to deceive." (Dictionary of Canadian Law; Dukelow & Nose, Carswell, 1990, p. 174)
"3. entente secrète entre deux ou plusieurs personnes dans le but de causer un préjudice à une ou plusieurs autres personnes ou d'atteindre un objectif prohibé par la loi." (Hubert Reid, Dictionnaire de droit québécois et canadien, Wilson et Lafleur, 1994, p. 99)
[73] La jurisprudence enseigne que l'aveuglement volontaire s'applique en matière de collusion au sens de l'article 462.34(6) C.cr. Voici ce qu'écrit la Cour d'appel dans l'arrêt Villeneuve c R. (précité):
"Le comportement de l'appelant que le juge qualifie d'aveuglement volontaire peut être pris en compte non pour établir en soi s'il y a aveuglement volontaire mais plutôt pour établir s'il y a collusion." (p.17)
[74] Dans l'affaire Côté c. Canada (procureure générale) (2001) J.Q. no 5349: le 19 octobre 2001), la juge Danielle Côté de la Cour du Québec rappelle que l'aveuglement volontaire ne correspond pas à un test objectif, mais à un test subjectif. Elle écrit ce qui suit:
"Le véritable test exige l'examen de la conduite de l'inculpé en regard de toutes les circonstances du dossier. Une autre personne dite raisonnable aurait peut-être agi autrement, mais on ne peut pas faire abstraction de l'état d'esprit de l'accusé en situation: l'on doit se demander s'il a préféré se fermer les yeux et ne pas s'informer alors qu'il savait qu'il y avait des motifs de le faire."
Cet extrait de l'affaire Côté c Canada s'inspire de l'arrêt R.c Rathod (1993) A.Q. no 1689) de la Cour d'appel du Québec
[71] Le requérant doit prouver qu'il semble innocent de toute complicité ou de toute collusion à l'égard de la perpétration d'une infraction de criminalité organisée ou d'une infraction désignée, comme l'exige l'article 462.34 (6) C. cr. La notion de complicité est définie à l'article 21 du Code criminel. Est partie à l'infraction quiconque la commet réellement, accomplit ou omet d'accomplir quelque chose en vue d'aider quelqu'un à la commettre, ou encourage quelqu'un à la commettre.
[72] Pour sa part, la collusion comporte deux éléments: une entente secrète, de même qu'un but qui consiste à causer un préjudice à un tiers ou à atteindre un objectif illégal. Je tire cette conclusion d'un extrait de l'arrêt Villeneuve c R. et Leblanc (REJB 1999-14356) dans laquelle la Cour d'appel du Québec fait l'inventaire des définitions du mot collusion qu'on trouve dans différents dictionnaires:
"1. entente secrète entre deux ou plusieurs personnes en vue d'en tromper une ou plusieurs." (Gérard Cornu, vocabulaire juridique, PUF, 1987, p. 149)
"2. coming together to commit fraud or to deceive." (Dictionary of Canadian Law; Dukelow & Nose, Carswell, 1990, p. 174)
"3. entente secrète entre deux ou plusieurs personnes dans le but de causer un préjudice à une ou plusieurs autres personnes ou d'atteindre un objectif prohibé par la loi." (Hubert Reid, Dictionnaire de droit québécois et canadien, Wilson et Lafleur, 1994, p. 99)
[73] La jurisprudence enseigne que l'aveuglement volontaire s'applique en matière de collusion au sens de l'article 462.34(6) C.cr. Voici ce qu'écrit la Cour d'appel dans l'arrêt Villeneuve c R. (précité):
"Le comportement de l'appelant que le juge qualifie d'aveuglement volontaire peut être pris en compte non pour établir en soi s'il y a aveuglement volontaire mais plutôt pour établir s'il y a collusion." (p.17)
[74] Dans l'affaire Côté c. Canada (procureure générale) (2001) J.Q. no 5349: le 19 octobre 2001), la juge Danielle Côté de la Cour du Québec rappelle que l'aveuglement volontaire ne correspond pas à un test objectif, mais à un test subjectif. Elle écrit ce qui suit:
"Le véritable test exige l'examen de la conduite de l'inculpé en regard de toutes les circonstances du dossier. Une autre personne dite raisonnable aurait peut-être agi autrement, mais on ne peut pas faire abstraction de l'état d'esprit de l'accusé en situation: l'on doit se demander s'il a préféré se fermer les yeux et ne pas s'informer alors qu'il savait qu'il y avait des motifs de le faire."
Cet extrait de l'affaire Côté c Canada s'inspire de l'arrêt R.c Rathod (1993) A.Q. no 1689) de la Cour d'appel du Québec
Droit réel et confiscation des produits de la criminalité: Test applicable, cirsonstance de l'obtention et définition de collusion
R. c. Villeneuve, 1999 CanLII 13333 (QC C.A.)
Il convient d’abord de déterminer la portée du droit visé par l’article 462.42(1) C.cr.
Dans un arrêt récent, notre Cour a décidé que la disposition ne visait pas les créanciers ordinaire mais seulement les créanciers qui avaient «un droit sur un bien confisqué» (dans la version anglaise «an interest in the property»). Cet arrêt confirme la position prise par le premier juge dans la cause type La Reine c. Jean-Pierre Leblanc et Revêtements Idéal Jacques Tremblay Inc. Cependant, en l’espèce le créancier a acquis un droit réel sur le bien entre le moment de l’ordonnance de blocage et le moment de la confiscation. La question se pose donc: est-il nécessaire que le droit réel existe avant l’ordonnance de blocage?
Avec égards pour l’opinion contraire, je ne partage pas cette interprétation rigoriste de l’article 462.42 C.cr (...)
Je crois que les mots:
Ou celle qui a obtenu un titre ou un droit sur ce bien d’une personne accusée d’une telle infraction dans des circonstances telles qu’elles permettent raisonnablement d’induire que l’opération a été effectuée dans l’intention d’éviter la confiscation des biens.
laissent supposer qu’un créancier puisse acquérir un droit réel après le blocage du bien. Cependant, le juge devra examiner les circonstances et appliquer le test ci-haut défini. Il est bien évident qu’une telle situation pourra être utilisée par le juge pour déterminer si l’opération a été effectuée dans l’intention d’éviter la confiscation du bien.
Après avoir appliqué le paragraphe 1 de l’article 462.42 C.cr., le juge devra passer à la seconde étape, soit l’application du paragraphe 4 (...):
À cette fin, il devra d’abord déterminer que la personne qui présente la requête n’est pas l’accusé.
Ensuite, il devra déterminer si le tiers semble innocent de toute complicité ou de toute colllusion à l’égard de l’infraction qui a donné lieu à la confiscation.
Je crois qu’il appartient au requérant de convaincre le juge qu’il semble innocent de toute complicité et de toute collusion. En l’absence d’une disposition contraire, celui qui allègue un droit a le fardeau d’en prouver les éléments essentiels. Son fardeau de preuve, cependant, n’est pas celui du droit criminel qui s’applique à la Couronne, au-delà de tout doute raisonnable. Il doit établir une prépondérance des probabilités, soit le fardeau civil. Bien que la disposition se retrouve au Code criminel, il ne s’agit pas de déterminer la responsabilité criminelle de quiconque. C’est pourquoi, la présomption d’innocence n’est pas applicable en l’espèce. Il s’agit plutôt de déterminer les droits économiques et civils d’un tiers qui prétend avoir un droit sur des biens qui ont été déclarés produits de la criminalité et confisqués au profit de la Couronne.
D’ailleurs, l’honorable Hnatyshyn, ministre de la Justice à l’époque de l’adoption de l’article 462.42 C.cr. s’exprimait ainsi à la Chambre des communes:
Dans notre système, bien entendu, il faut établir non pas au-delà de tout doute raisonnable, mais plutôt en fonction de probabilités raisonnables que la demande de l’intéressé est bien fondée.
Cette opinion ministérielle est indicative de l’intention du législateur.
La complicité est un concept bien connu et bien défini en droit criminel, la collusion au contraire est un concept de droit civil, dont on doit définir la portée.
Gérard Cornu, dans son Vocabulaire juridique, la définit ainsi:
Entente secrète entre deux ou plusieurs personnes en vue d’en tromper une ou plusieurs autres.
Le Dictionary of Canadian Law quant à lui en donne la définition suivante:
Coming together to commit fraud or to deceive.
Hubert Reid propose la définition qui suit:
Entente secrète entre deux ou plusieurs personnes dans le but de causer un préjudice à une ou plusieurs autres personnes ou d’atteindre un objectif prohibé par la loi.
À l’aide de ces définitions, je crois qu’on peut retenir que la collusion comporte deux éléments: une entente d’abord et ensuite un but, soit tromper une ou plusieurs personnes. Nous verrons comment appliquer cette notion aux faits de la présente cause.
L’entente peut être établie par une preuve directe ou peut être inférée du comportement des parties. Le comportement de l’appelant que le juge qualifie d’aveuglement volontaire peut être pris en compte non pour établir en soi s’il y a aveuglement volontaire mais plutôt pour établir s’il y a collusion.
La disposition semble en outre accorder au premier juge une discrétion d’émettre ou de ne pas émettre une ordonnance d’exclusion du bien du tiers, de la confiscation. Cependant, cette discrétion doit être exercée de façon judiciaire à la lumière du but de la législation sur les produits de la criminalité: empêcher qu’un délinquant puisse profiter du fruit de ses crimes.
Il convient d’abord de déterminer la portée du droit visé par l’article 462.42(1) C.cr.
Dans un arrêt récent, notre Cour a décidé que la disposition ne visait pas les créanciers ordinaire mais seulement les créanciers qui avaient «un droit sur un bien confisqué» (dans la version anglaise «an interest in the property»). Cet arrêt confirme la position prise par le premier juge dans la cause type La Reine c. Jean-Pierre Leblanc et Revêtements Idéal Jacques Tremblay Inc. Cependant, en l’espèce le créancier a acquis un droit réel sur le bien entre le moment de l’ordonnance de blocage et le moment de la confiscation. La question se pose donc: est-il nécessaire que le droit réel existe avant l’ordonnance de blocage?
Avec égards pour l’opinion contraire, je ne partage pas cette interprétation rigoriste de l’article 462.42 C.cr (...)
Je crois que les mots:
Ou celle qui a obtenu un titre ou un droit sur ce bien d’une personne accusée d’une telle infraction dans des circonstances telles qu’elles permettent raisonnablement d’induire que l’opération a été effectuée dans l’intention d’éviter la confiscation des biens.
laissent supposer qu’un créancier puisse acquérir un droit réel après le blocage du bien. Cependant, le juge devra examiner les circonstances et appliquer le test ci-haut défini. Il est bien évident qu’une telle situation pourra être utilisée par le juge pour déterminer si l’opération a été effectuée dans l’intention d’éviter la confiscation du bien.
Après avoir appliqué le paragraphe 1 de l’article 462.42 C.cr., le juge devra passer à la seconde étape, soit l’application du paragraphe 4 (...):
À cette fin, il devra d’abord déterminer que la personne qui présente la requête n’est pas l’accusé.
Ensuite, il devra déterminer si le tiers semble innocent de toute complicité ou de toute colllusion à l’égard de l’infraction qui a donné lieu à la confiscation.
Je crois qu’il appartient au requérant de convaincre le juge qu’il semble innocent de toute complicité et de toute collusion. En l’absence d’une disposition contraire, celui qui allègue un droit a le fardeau d’en prouver les éléments essentiels. Son fardeau de preuve, cependant, n’est pas celui du droit criminel qui s’applique à la Couronne, au-delà de tout doute raisonnable. Il doit établir une prépondérance des probabilités, soit le fardeau civil. Bien que la disposition se retrouve au Code criminel, il ne s’agit pas de déterminer la responsabilité criminelle de quiconque. C’est pourquoi, la présomption d’innocence n’est pas applicable en l’espèce. Il s’agit plutôt de déterminer les droits économiques et civils d’un tiers qui prétend avoir un droit sur des biens qui ont été déclarés produits de la criminalité et confisqués au profit de la Couronne.
D’ailleurs, l’honorable Hnatyshyn, ministre de la Justice à l’époque de l’adoption de l’article 462.42 C.cr. s’exprimait ainsi à la Chambre des communes:
Dans notre système, bien entendu, il faut établir non pas au-delà de tout doute raisonnable, mais plutôt en fonction de probabilités raisonnables que la demande de l’intéressé est bien fondée.
Cette opinion ministérielle est indicative de l’intention du législateur.
La complicité est un concept bien connu et bien défini en droit criminel, la collusion au contraire est un concept de droit civil, dont on doit définir la portée.
Gérard Cornu, dans son Vocabulaire juridique, la définit ainsi:
Entente secrète entre deux ou plusieurs personnes en vue d’en tromper une ou plusieurs autres.
Le Dictionary of Canadian Law quant à lui en donne la définition suivante:
Coming together to commit fraud or to deceive.
Hubert Reid propose la définition qui suit:
Entente secrète entre deux ou plusieurs personnes dans le but de causer un préjudice à une ou plusieurs autres personnes ou d’atteindre un objectif prohibé par la loi.
À l’aide de ces définitions, je crois qu’on peut retenir que la collusion comporte deux éléments: une entente d’abord et ensuite un but, soit tromper une ou plusieurs personnes. Nous verrons comment appliquer cette notion aux faits de la présente cause.
L’entente peut être établie par une preuve directe ou peut être inférée du comportement des parties. Le comportement de l’appelant que le juge qualifie d’aveuglement volontaire peut être pris en compte non pour établir en soi s’il y a aveuglement volontaire mais plutôt pour établir s’il y a collusion.
La disposition semble en outre accorder au premier juge une discrétion d’émettre ou de ne pas émettre une ordonnance d’exclusion du bien du tiers, de la confiscation. Cependant, cette discrétion doit être exercée de façon judiciaire à la lumière du but de la législation sur les produits de la criminalité: empêcher qu’un délinquant puisse profiter du fruit de ses crimes.
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