R. c. Hodgson, [1998] 2 R.C.S. 449 / Paragraphe 48
Lien vers la décision
1. La règle toujours applicable pour décider de l’admissibilité d’une déclaration faite par un accusé à une personne en situation d’autorité est que cette déclaration doit avoir été faite volontairement et être le produit d’un état d’esprit conscient.
2. La règle repose sur deux concepts d’une importance fondamentale: la nécessité de garantir la fiabilité de la déclaration et d’assurer l’équité en empêchant l’État de prendre des mesures de coercition inappropriées. Il en résulte que l’aveu ne doit pas être obtenu par des menaces ou des promesses.
3. La règle s’applique lorsque l’accusé fait une déclaration à une personne en situation d’autorité. Bien qu’il ne soit ni nécessaire ni souhaitable de définir de manière absolue l’expression «personne en situation d’autorité», cette expression vise habituellement les personnes qui participent officiellement à l’arrestation, à la détention, à l’interrogatoire ou à la poursuite de l’accusé. En conséquence, elle s’applique aux personnes tels les policiers et les gardiens de prison. Lorsque la déclaration de l’accusé est faite à un policier ou à un gardien de prison, un voir‑dire doit être tenu pour déterminer si la déclaration est admissible en tant que déclaration volontaire, sauf si l’avocat de l’accusé renonce au voir-dire.
4. Peuvent aussi être des personnes en situation d’autorité les personnes qui, selon ce que croit raisonnablement l’accusé, agissent pour le compte de la police ou des autorités chargées des poursuites et pourraient, de ce fait, avoir quelque influence ou autorité sur les poursuites engagées contre lui. Cette question doit être tranchée au cas par cas.
5. Pour déterminer qui est une personne en situation d’autorité, il faut examiner la question subjectivement, du point de vue de l’accusé. Toutefois, la croyance de l’accusé que la personne qui entend sa déclaration est une personne en situation d’autorité doit avoir un fondement raisonnable.
6. Cette question ne se posera normalement pas dans le cas des agents doubles de la police, puisque la question doit être examinée du point de vue de l’accusé. En ce sens, les agents doubles ne sont habituellement pas considérés par l’accusé comme des personnes en situation d’autorité.
7. Lorsqu’il est allégué que la personne qui a reçu la déclaration était une personne en situation d’autorité aux yeux de l’accusé, la défense doit alors signaler la question au juge du procès. Cette façon de faire est appropriée car seul l’accusé peut savoir que la déclaration a été faite à une personne qu’il considérait comme une personne en situation d’autorité.
8. Au cours du voir‑dire qui s’ensuit, l’accusé a le fardeau de présenter des éléments de preuve démontrant l’existence d’une question en litige valide devant être examinée. Si l’accusé s’acquitte de ce fardeau, le ministère public a ensuite le fardeau de persuasion et doit démontrer hors de tout doute raisonnable que la personne qui a reçu la déclaration n’était pas une personne en situation d’autorité ou, s’il est jugé qu’il s’agissait d’une telle personne, que la déclaration de l’accusé a été faite volontairement.
9. Dans des cas extrêmement rares, il peut arriver que la preuve produite au procès soit telle qu’elle devrait attirer l’attention du juge du procès sur le fait que la question de savoir si la personne qui a reçu la déclaration de l’accusé était une personne en situation d’autorité doit être examinée au cours d’un voir‑dire. Dans de tels cas, qui doivent être extrêmement rares compte tenu de l’obligation qu’a l’accusé de soulever cette question, le juge du procès doit ordonner d’office un voir‑dire, sous réserve, évidemment, de la renonciation par l’avocat de l’accusé à la tenue de cette procédure.
10. L’obligation du juge du procès de tenir d’office un voir‑dire ne prend naissance que dans les rares cas où la preuve, examinée objectivement, est suffisante pour attirer son attention sur la nécessité de tenir un voir‑dire en vue de déterminer si la personne qui a reçu la déclaration de l’accusé était, dans les circonstances, une personne en situation d’autorité.
11. Si le juge du procès est convaincu que la personne qui a reçu la déclaration n’était pas une personne en situation d’autorité, mais que la déclaration de l’accusé a été obtenue à l’aide de tactiques coercitives répréhensibles, telles la violence ou des menaces de violence crédibles, une directive doit alors être donnée au jury. Le jury doit être avisé que, s’il conclut que la déclaration a été obtenue par coercition, il doit alors faire preuve de prudence avant de l’accepter, et qu’il faut n’accorder que peu ou pas de valeur à cette déclaration.
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